Les français et l’internet médical
Internet est une bibliothèque inépuisable et facilement accessible pour les patients en matière de santé. Ce domaine représente environ 36% des bases de données scientifiques. L’augmentation du nombre de sites médicaux au fil des années est révélatrice de l’importance que les patients portent à leur santé et du changement de comportement de ces derniers. Notons qu’une recherche effectuée avec le moteur de recherche « Google » et utilisant le mot « grossesse » nous offre 56 300 000 réponses en 0.13 secondes contre 19 900 000 en 20075 (autant dire que le nombre de résultats, et donc de sites disponibles, a triplé en 5 ans !). En effet, il y a 50 ans, le malade, considéré comme un profane, se contentait de peu d’information de la part de son médecin, considéré comme un savant. Il attendait juste d’être soigné. Le soignant et le patient se trouvaient dans une relation dite paternelle. Aujourd’hui, les choses ont changé. Nous manifestons beaucoup plus d’intérêt pour les questions de santé et intervenons davantage dans les décisions médicales prises à notre égard. La relation entre le patient et le soignant est désormais qualifiée de « contractuelle », faisant du patient un véritable acteur de sa santé. Cet intérêt pour notre santé s’est accru avec le développement de l’enseignement des matières générales et scientifiques, le développement de la télévision avec la diffusion de débats sur les questions de santé, et avec la publication de rubriques médicales dans les journaux et dans les magazines parfois entièrement consacrés à la santé. Le sondage réalisé par IPSOS pour le conseil national de l’Ordre en 2010 et intitulé: « Les conséquences des usages d’Internet sur les relations patients-médecins », révèle que :
– 71% des patients cherchent des informations médicales ou de santé sur internet. C’est donc une pratique très répandue.
– Lorsqu’ils cherchent à s’informer en matière de santé, les Français ont recours à des sources d’informations multiples. Le médecin arrive nettement en tête des sources utilisées, avec 89% des citations, devant Internet (64%), les proches (64%), le pharmacien (63%) ou les émissions santé à la télévision (55%).
– En concordance avec le taux de connexion à internet, 82% des moins de 35 ans utilisent internet comme informateur médical contre 54% des plus de 35 ans.
– Les patients accordent un plus large crédit à leur médecin. On note que malgré tout, 74% des internautes jugent fiable l’information recueillie sur le net.
– Pour 90% des français, la recherche d’informations est motivée par la curiosité ou l’envie d’en savoir plus sur une maladie.
L’industrie pharmaceutique
Ces sites sont parmi les plus visités aux Etats-Unis et bénéficient d’une certaine légitimité autour de l’information concernant les médicaments qu’ils commercialisent. En France, l’industrie communique essentiellement vers les médecins mais peut toutefois se tourner vers le grand public. L’information délivrée est sous l’étroite surveillance des autorités réglementaires (AFSSAPS) qui peuvent émettre des avertissements et sanctionner l’industrie par une baisse de prix de ses produits. Citons pour exemple : « www.bayerpharma.com » site dédié à la fertilité et les traitements hormonaux, qui propose essentiellement des informations sur la contraception et les traitements hormonaux substitutifs.
L’obstétrique, une spécialité en constante évolution
Les progrès et découvertes dans le domaine de la naissance sont nombreux. C’est pourquoi, les pratiques des professionnels changent pour s’adapter à l’actualité scientifique et aux recommandations de l’HAS. Nous pouvons citer par exemple les recommandations sur le dépistage du diabète gestationnel. C’est pourquoi, les mises à jour des sites dédiés à la femme enceinte, ainsi que les dates de création des articles publiés sont primordiales. Il en est de même pour les messages postés sur les forums de discussion.
Des grossesses et vécus différents
Il est important de rappeler le caractère unique de chaque grossesse, tant sur le déroulement que sur le vécu. On réalise alors que certaines informations dénichées sur le net ne sont pas valables pour toutes les femmes. On peut citer l’exemple de la douleur, au combien subjective et personnelle. Les données bibliographiques et nos constats dans les services ou sur internet nous ont amenés à réaliser une enquête afin de mieux appréhender la thématique de « l’utilisation d’internet pendant la grossesse »
Empowerment
Les patients n’ont pas attendu Internet pour prendre des décisions concernant leur santé. Le nomadisme médical en est un bon exemple. Aujourd’hui, l’usager du système de soin peut changer de médecin si les soins ne lui donnent pas satisfaction. Il en est de même pour la femme enceinte. Mais la Toile, en fournissant l’information médicale la plus large et la plus détaillée possible offre à cette dernière un surcroit d’autonomie dans l’orientation qu’elle veut donner à la prise en charge de sa grossesse qu’elle va pouvoir se réapproprier. C’est un outil qui va aider la femme à être l’actrice de sa grossesse, de sa santé et de sa vie. Cette notion d’ « auto-appropriation », est aussi appelée notion d’ « empowerment » ,mot qui tire sa racine latine de « potere » qui signifie « être capable de », ou « avoir l’habilité de choisir ». Les québécois le traduisent par « le pouvoir d’agir » qui est défini par un processus d’action et de réflexion qui amène le patient à avoir une image positive de lui-même, de ses capacités, de ses connaissances et de son aisance à remplir son rôle et à faire des choix éclairés C’est ainsi que dans son article « Internet et responsabilisation : perspective de l’usager au quotidien » 24 publié en 2009, Marc Lemire, chercheur-adjoint au Département d’administration de la santé et chercheur régulier à l’Institut de recherche sur la santé publique de l’Université de Montréal (IRSPUM), affirme le rôle clé que joue internet dans ce processus d’empowerment des patients. En corrélation avec l’étude de M. Marc Lemire qui s’intéresse à la santé dans sa globalité, notre enquête nous confirme qu’internet permet à la femme enceinte d’entrer dans ce concept d’empowerment En effet:
– Internet permet de mieux comprendre les propos des soignants et donc de mieux suivre leurs directives pour 27, 2 % des femmes interrogées (fig.17).
– Internet permet d’améliorer la qualité d’une consultation en offrant la possibilité de la préparer. En effet, 16,3 % des femmes interrogées consultent des sites internet afin d’être capable de poser des questions précises aux professionnels de santé (fig.17).
– Internet permet de faire de meilleurs choix personnels grâce à la connaissance en fonction de la variété des solutions et des préférences. On constate d’ailleurs, que la diversité de l’information est devenue règle d’or pour la femme enceinte qui consulte systématiquement plusieurs sites dans 70 % des cas. (fig.21) L’appropriation des informations du Net s’inscrit alors dans une perspective d’affirmation orientée sur la prise de décision personnelle. Par exemple, nous remarquons que la question de la douleur et de sa prise en charge est exploitée par 36,2 % des femmes de notre enquête (fig15). Les informations recueillies, qu’elles soient officielles ou personnelles seront des renseignements complémentaires à ceux délivrés par les professionnels pour permettre un choix libre et éclairé concernant le recours ou non à la péridurale.
– Internet permet de mieux faire par l’entraide et l’échange grâce aux forums de discussions consultés par 74 % des femmes qui utilisent internet pendant la grossesse (fig.18). Ainsi, certaines patientes peuvent prendre des décisions concernant leur santé en se fiant aux témoignages pour 75,8 % d’entre elles et aux avis des personnes avec qui elles discutent pour 51,1% d’entre elles (fig.19)
L’utilisation de moteur de recherche
Etant donné que le référencement des sites internet (et donc leur apparition en première page) fonctionne par mots-clés, il suffit de taper les symptômes pour voir affichées les maladies les plus graves malgré leur faible prévalence. Pour exemple, lorsque nous tapons sur Google : « augmentation de la soif pendant grossesse », le deuxième site affiché nous signale d’éventuels problèmes endocriniens, le troisième est un forum qui évoque d’emblée le diabète gestationnel, et le quatrième nous annonce une possible glomérulonéphrite. Internet fait correspondre à un symptôme non pathognomonique une maladie bien précise.
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Table des matières
INTRODUCTION
PARTIE 1
1. INTERNET
1.1. Définition
1.2. Histoire de l’internet
1.3. Les français et Internet
1.3.1. La population
1.3.2. Equipement
1.3.3. Usage
2. INTERNET MEDICAL
2.1. Les français et l’internet médical
2.2. Les différents sites internet
2.2.1. les catégories
2.2.2. les auteurs
2.3. Les moteurs de recherche
2.3.1. Référencement des sites proposés
2.3.2. Inconvénients des moteurs de recherche
2.4. Les moyens de sûreté
2.4.1. Les certifications
2.4.2. Les portails d’orientation
2.4.3. Qu’en est-il des réseaux sociaux, forums et blogs ?
3. LE CAS PARTICULIER DE LA FEMME ENCEINTE
3.1. Un état propice à l’utilisation d’internet
3.1.1. La grossesse, un état anxiogène
3.1.2. Une période d’imagination et de préparation
3.1.3. Une période de plénitude
3.2. Des recherches à effectuer avec prudence
3.2.1. L’obstétrique, une spécialité en constante évolution
3.2.2. Des pratiques différentes
3.2.3. Des grossesses et vécus différents
PARTIE 2
1. PRESENTATION DE L’ETUDE
1.1. Problématique
1.2. Objectifs
1.3. Méthode
1.3.1. Choix de la population
1.3.2. Création du questionnaire
1.3.3. Analyse
2. RESULTATS
2.1. Caractéristiques de l’échantillon
2.2. Médias de la grossesse
2.3. Internet
2.4. Informations recherchées
2.5. Raisons des recherches
2.6. Méthodes de recherche
2.7. Conséquences de l’utilisation d’internet
2.8. Professionnels de santé
2.9. Question libre
PARTIE 3
1. CRITIQUE DE L’ECHANTILLON
2. PLACE D’INTERNET AU QUOTIDIEN
3. INTERNET, UN ALLIE POUR LA FEMME
3.1. Un outil aux nombreux avantages
3.2. Exhaustivité des thèmes
3.3. Promoteur de santé publique pendant la grossesse
3.4. Empowerment
3.5. Sérénité et épanouissement
3.5.1. Apaisement
3.5.2. Projets
4. INTERNET, UN ENNEMI POUR LA FEMME
4.1. Un outil anxiogène
4.1.1. De l’anxiété vers la cyberchondrie
4.1.2. Causes possibles
4.2. Une patiente mal informée et manipulée
4.2.1. Une patiente mal informée
4.2.2. Une patiente manipulée
4.3. Un médecin improvisé
4.3.1. Un rendez-vous manqué
4.3.2. Auto-médication
5. SYNTHESE
5.1. Un service discutable au cas par cas
5.2. Le rôle des professionnels de santé
5.2.1. Ce que disent les textes
5.2.2. Une attitude anticipatrice
5.2.3. Une attitude pédagogique
5.2.4. Une attitude accompagnatrice
CONCLUSION
BIBLIOGRAPHIE
ANNEXES
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