Vue d’ensemble du traitement sismique
Dans le contexte de l’exploration pétrolière, l’imagerie sismique est la principale méthode utilisée pour déterminer les paramètres du sous-sol. En effet, pour des fréquences caractéristiques autour de la dizaine de Hertz, les ondes sismiques sont capables de parcourir de longues distances dans le sous-sol jusqu’à une profondeur de l’ordre de quelques kilomètres. Les structures géologiques du sous-sol réfléchissent et diffractent ces ondes émises par des sources, vers des récepteurs placés généralement à la surface. Ces enregistrements sont ensuite traités afin de faire ressortir les structures du sous-sol (Yilmaz, 1987, Sheriff and Geldart, 1995). Finalement, l’interprétation sismique permet d’identifier les structures géologiques.
Dans cette partie, nous présentons les principales étapes de l’imagerie sismique dans le contexte de l’exploration pétrolière. Après l’acquisition des données vient le prétraitement des signaux qui consiste à séparer le signal du bruit. La troisième phase, l’estimation du modèle de vitesse est une étape clé. Elle consiste à transformer les données initialement en temps, en une image des structures du sous-sol en profondeur. Le modèle de vitesse de propagation des ondes joue un rôle central dans cette transformation. La quatrième étape, le post-traitement et l’interprétation, vise à mettre en lumière les structures géologiques susceptibles de contenir des hydrocarbures. Notre travail concerne l’estimation du modèle de vitesse, qui nécessite une analyse du problème direct (la propagation des ondes) et du problème inverse (retrouver les meilleurs paramètres).
Données sismiques et pré-traitements
L’acquisition sismique est principalement effectuée à partir de la surface (Figure1.1a)
dans le cadre terrestre ou marin (Sheriff and Geldart, 1995). Sur terre, la source est en général un camion vibrateur. Les récepteurs, appelés géophones, se répartissent en une grille pour couvrir toute une parcelle. En mer, ce sont des canons à air qui produisent les ondes. Les récepteurs, nommés hydrophones, sont répartis sur des lignes (des streamers), et trainés par un bateau conçu à cet effet. Le bateau sillonne des trajectoires sur l’océan pour couvrir une zone entière. Des sources et des récepteurs peuvent aussi être installés dans les puits pour avoir une illumination différente du sous-sol. On parle de VSP (Vertical Seismic Profiling) si les sources sont à la surface et que les récepteurs sont dans les puits (Figure 1.1b, Balch and Lee, 1984; Hardage, 1985; Soni and Verschuur, 2014). Les sources et les récepteurs peuvent aussi être respectivement dans deux puits différents (Rector III, 1995; Zhou et al., 2015; Plessix et al., 2000). Il s’agit d’acquisition entre puits, ou crosswell (Figure 1.1c). En sismique marine, on peut également poser les récepteurs multi composants au fond de la mer, ce qui donne lieu à la configuration dite OBC ou OBN (Ocean Bottom Cable ou Ocean Bottom Node, Figure 1.1d, MacLeod et al., 1999; Plessix and Perkins, 2010).
Les données enregistrées par les récepteurs sont une fonction du temps, appelée trace. L’ensemble de traces peut être représenté avec le temps en ordonnées, et en abscisses la distance entre sources et récepteurs (appelée surface offset). Ce type de représentation est appelée sismogramme. Les panneaux de données triées selon la source commune ou le récepteur commun sont appelés respectivement shot gather ou receiver gather.
Les données sismiques peuvent se répartir en deux groupes principaux : les ondes de surface et les ondes de volume. Pour les paragraphes suivants qui présentent les différentes catégories d’ondes, le lecteur peut se référer au Tableau 1.1 et à la Figure 1.2. Les ondes de surface sont des ondes énergétiques se propageant à la surface, utiles pour la sismologie pour caractériser la structure superficielle (Xia et al., 1999; Socco and Strobbia, 2004; Shapiro et al., 2005; Pérez Solano, 2013). Considérées comme bruits dans la sismique d’exploration profonde, elles sont éliminées au cours du pré-traitement. Nous ne discutons pas de ces ondes dans notre travail. Parmi les ondes de volume on distingue deux catégories selon la polarisation (Aki and Richards, 2002) : les ondes de compression (ondes P) et les ondes de cisaillement (ondes S). La plupart des méthodes privilégient les ondes P, négligent ou éliminent les autres ondes au préalable. On distingue aussi selon les trajectoires de propagations : les ondes transmises (transmitted waves, Figure 1.2a) et les ondes réfléchies et diffractées (scattered waves, Figure 1.2b). Figure 1.2c montre un exemple de jeu de données synthétiques pour lequel les ondes transmises, réfléchies et diffractées ont été modélisées (sans les ondes de surface).
Les ondes transmises incluent les ondes directes, plongeantes et réfractées. Les ondes directes (direct waves) se propagent directement de la source au récepteur dans la partie superficielle du volume. Les ondes plongeantes (diving waves) correspondent à des trajectoires courbées entre la source et récepteur dans une configuration spéciale où la vitesse est croissante en fonction de la profondeur. Aux grands offsets, leurs temps d’arrivées peuvent être plus courts que ceux des ondes directes. Les ondes réfractées (refracted waves ou head waves) se propagent le long des interfaces, puis retournent à la surface. D’un autre côté, les ondes réfléchies/diffractées incluent les ondes diffractées (diffracted waves) et les ondes réfléchies (reflected waves). Les ondes réfléchies ou diffractées primaires, ou simplement ondes réfléchies par abus de langage, sont celles qui ont subi une seule réflexion sur des interfaces. Les ondes multiples sont celles qui ont subi plusieurs réflexions ou diffractions entre différentes interfaces (les multiples internes) ou entre des interfaces et la surface (les multiples de surface). Elles sont en général négligées ou éliminées dans le pré-traitement (Verschuur et al., 1992; Verschuur, 2006). Des progrès récents permettent d’utiliser les multiples (Cocher et al., 2015; Kumar et al., 2015; Verschuur and Berkhout, 2015). Les ondes transmises, quant à elles, font partie intégrante de l’inversion des formes d’onde (Full Waveform Inversion ou FWI), pour obtenir de meilleurs résultats dans la partie superficielle (Virieux and Operto, 2009).
Problème direct et loi de propagation
Une loi de propagation des ondes avec ses paramètres (vitesse, densité, …) permet de générer des données synthétiques. Ce processus s’appelle le problème direct ou la modélisation. Le choix de la loi physique de propagation est primordial, car il détermine la représentativité de la modélisation et la complexité du problème. La loi générale pour les cas isotropes est l’équation d’onde viscoélastique qui inclut la densité, les atténuations des ondes P et S, ainsi que les coefficients d’élasticité. En pratique, des lois plus simples sont utilisées. Dans ce travail, on considère que la loi acoustique est isotrope à densité constante. Même dans ce cas simplifié, le nombre d’inconnues est déjà suffisamment important, puisqu’elles sont fonction de l’espace. La résolution de l’équation d’onde peut s’obtenir par la méthode des différences finies (Virieux, 1986; Levander, 1988; Etgen and O’Brien, 2007), ou par la méthode des éléments finis (Smith, 1975; Marfurt, 1984). Le lecteur peut se référer à Virieux et al. (2011) pour la comparaison entre ces approches. Dans ce travail, c’est la méthode des différences finies qui est utilisée. Il est utile de noter que les données sismiques peuvent aussi être modélisées avec la théorie des rais, qui est basée sur l’approximation asymptotique à haute fréquence de l’équation d’onde (Cervený ˘ , 2005). La propagation est identique aux lois utilisées dans l’optique (Cervený et al. ˘ , 1977; Chapman, 2004). Les données modélisées avec cette théorie correspondent alors essentiellement aux temps d’arrivées des ondes. Il existe deux stratégies différentes de modélisation : soit par le tracé de rais (Julian, 1977; Cervený ˘ , 1987), soit par la résolution de l’équation d’Eikonal (Vidale, 1988; Podvin and Lecomte, 1991; Qin et al., 1992).
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Table des matières
1 Introduction
1.1 Vue d’ensemble du traitement sismique
1.1.1 Données sismiques et pré-traitements
1.1.2 Problème direct et loi de propagation
1.1.3 Problème inverse et fonction coût
1.1.4 Inversion multi-paramètres
1.1.5 Post-traitement et interprétation
1.2 Présentation générale des méthodes de l’estimation du modèle de vitesse
1.2.1 Principe de la séparation d’échelle
1.2.2 Classification des méthodes
1.3 Méthodes d’obtention du modèle de vitesse utilisant l’ensemble des ondes
1.3.1 Inversion des formes d’onde
1.3.2 Problèmes de la FWI et ses alternatives
1.4 Migration
1.4.1 Migration itérative
1.4.2 Migration directe
1.5 Méthodes d’obtention du macro-modèle
1.5.1 Méthodes d’obtention du macro-modèle développées dans le domaine des données
1.5.2 Méthodes d’obtention du macro-modèle développées dans le domaine image
1.6 Motivations et organisation de la thèse
1.6.1 Impact des paramètres utilisateurs sur les résultats de l’IVA
1.6.2 Stratégies d’utilisation des ondes transmises dans la MVA
1.6.3 Application de la MVA sur données réelles
1.6.4 Organisation de la thèse
1.6.5 Contributions
2 Estimation du modèle de vitesse
2.1 Outils
2.1.1 Equation d’onde acoustique à densité constante
2.1.2 Résolution par la méthode des différences finies
2.1.3 Fonction de Green
2.1.4 Séparation d’échelle et approximations
2.1.5 Résolution du problème inverse par la méthode de l’état adjoint
2.2 Inversion des formes d’onde et variantes
2.2.1 Inversion des formes d’onde classique
2.2.2 Alternatives de l’inversion des formes d’onde
2.2.3 Inversion des formes d’onde réfléchies
2.2.4 Tomographie combinant ondes transmises et réfléchies
2.3 Méthodes de migration
2.3.1 Migration classique et migration itérative
2.3.2 Migration quantitative
2.3.3 Migration dans le domaine étendu
2.3.4 Inversion dans le domaine étendu
2.4 Analyse de vitesse par migration et variantes
2.4.1 Analyse de vitesse par migration classique
2.4.2 Analyse de vitesse par inversion
2.4.3 Ondes transmises dans l’analyse de vitesse par migration
2.4.4 Combinaisons FWI-MVA
2.5 Conclusions
3 Impact des paramètres d’utilisateur dans l’IVA
3.1 Introduction
3.2 Theory
3.2.1 Inversion velocity analysis
3.2.2 Shape of events in the CIG
3.2.3 Necessary surface offset range and space lag range
3.3 Application on a simple model
3.4 Application on the Marmousi model
3.4.1 Model and IVA setup
3.4.2 Comparison of the final results of three different sets of parameters
3.4.3 Impact of parameters responsible for anomalies through iterations
3.5 Discussion
3.5.1 Variable ranges of surface offset and space lag
3.5.2 Normalisation of the objective function and modification of space
lag range
3.5.3 Impact of the source frequency
3.6 Conclusion
3.7 Appendix A: Calculation of the shape of events in CIGs
3.8 Appendix B: Details of the choice of the ranges of surface offset and
space lag for the Marmousi model .
4 Stratégies d’incorporation des ondes transmises dans la MVA
4.1 Introduction
4.2 Methodology
4.2.1 Objective functions
4.2.2 Workflows
4.3 Practical aspects
4.3.1 Presentations of the models
4.3.2 Data separation
4.3.3 Pre-conditioner for the transmitted image
4.3.4 Pre-conditioner for the reflected image
4.4 Results of the different workflows
4.4.1 One-reflector model
4.4.2 Blocky model
4.4.3 Marmousi model
4.5 Discussion
4.6 Conclusion
4.7 Appendix A: modeling, migration and inversion
5 Conclusion
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