VOIES D’AMELIORATION DES ASSOCIATIONS MAIS-LEGUMINEUSE
PRINCIPAUX AVANTAGES DES CULTURES ASSOCIEES
La période où les cultures associées n’étaient considérées que comme une pratique «arriérée», devant nécessairement évoluer vers la monoculture hautement mécanisée, semble maintenant révolue.
On enregistre tout au plus une certaine résistance des institutions de recherche et de développement rural à la reconnaissance du bien fondé d’une telle pratique; cette résistance est certainement liée à la complexité des systèmes de cultures associées, rarement étudiés de manière exhaustive et sur lesquels il est difficile de porter un jugement qualifié.
On s’accorde dans l’ensemble à admettre une logique empirique à ces systèmes, laquelle leur aurait permis de se pérenniser.
La mécanisation elle-même, longtemps invoquée comme incontournable d’une nécessaire disparition des cultures associées, ne fait plus recette; des chercheurs indiens et brésiliens, en effet, ont, à mettre au point un matériel adapté à la conduite intercalaires; et les recherches sur ce sujet particulier ne font sans doute que commencer …
Les avantages les plus nets de la pratique des associations de cultures s’articulent autour de quatre axes :
Une bonne utilisation des ressources de l’environnement (eau, éléments minéraux, lumière) : celle-ci est due à une complémentarité spatiale et temporelle des appareils foliaires et racinaires; la couverture du sol, meilleure qu’en culture pure, limite les risques d’érosion, d’où l’intérêt des cultures associées sur fortes pentes; le billonnage, en assurant un meilleur enracinement, accroit cette complémentarité. Ces caractéristiques permettent aux associations culturales de tirer partie des milieux dont le niveau de ressources est limitant.
La stabilité et la sécurité des productions : la multiplicité des plantes cultivées entraîne une répartition des risques, toutes les plantes n’étant pas affectées au même degré par les aléas d’ordre climatique ou phytosanitaire.
Cette stabilité se fonde essentiellement sur le phénomène de croissance compensatrice : le mauvais développement de l’espèce particulièrement sensible à un aléa donné est largement compensé par un surcroît de développement (du fait d’une disponibilité accrue des ressources) des autres espèces par rapport à celui qu’elles auraient eu en culture pure.
L’augmentation des rendements : l’utilisation plus efficiente des ressources et la croissance compensatrice aboutissent naturellement à un supplément de rendement (appelé «surrendement», «ovèryield», «transgressive yieldn) de l’association par rapport aux cultures pures; ce surrendement exprimé par le Land Equivalent Ratio (LER) – sur lequel nous reviendrons longuement – se situe très souvent entre 20 et 50% voire plus lorsque l’on associe espèces annuelles et pérennes.
Répartition pIus régulière du travail dans le temps : cet étaiement du travail qui n’implique pas forcément une meilleure valorisation du travail permet du moins d’écrêter les pointes de travail.
Les trois derniers atouts des cultures associées, évoqués ci-dessus, semblent bien connus des agriculteurs qui les citent souvent lors des enquêtes.
L’intérêt consistant en une meilleure utilisation des ressources de l’environnement peut cependant avoir son revers : cette utilisation accrue est susceptible de générer un épuisement du sol à moyen ou long terme.
Bien évidemment les avantages présentés ici ne sont pas inhérents à tous les systèmes de culture associée existants.
Les types d’espèces végétales en présence et l’environnement concerné produisent des relations spécifiques entre partenaires, bénéfiques ou non;
on sait par exemple que certaines espèces ne peuvent être associées du fait de phénomènes d’allélopathie négative. De même l’association de plantes ne présentant pas de différences morpho physiologiques suffisantes n’offre pas d’intérêt et peut même se révéler néfaste à forte densité de peuplement.
LES INTERFERENCES BIOLOGIOUES DANS L’ASSOCIATION
L’examen des interférences entre partenaires d’une association nous semble un préalable nécessaire à toute étude de ce système de culture; nous donnons donc ici quelques généralités de la bibliographie sur cet aspect.
JACQUARD (1975) regroupe les situations d’interférence biologique en deux classes :
– l’antagonisme :
. opposition, les deux individus sont désavantagés par l’association,
. compétition, un individu profite de l’association aux dépens de l’autre,
– la coopération :
. les deux individus sont avantagés par l’association, par rapport à leurs cultures pures respectives.
La compétition apparaît entre plusieurs organismes chaque fois que l’un deux exprime un besoin pour lequel la fourniture immédiate est inférieure à la demande de l’ensemble de ces organismes.
Elle s’exerce pour les ressources en lumière, eau et éléments nutritifs et par obligatoirement à tous les stades de végétation.
La plante plus apte que les autres à utiliser le facteur pour lequel la compétition s’exerce est qualifiée de dominante, les autres de dominées.
Pour que les cultures associées restent avantageuses par rapport aux cultures pures, il faut que la compétition interspécifique pour les ressources du milieu soit inférieure à la compétition intraspécifique pour ces mêmes ressources.
Seule les situations de coopération et certaines situations de compétition conduisent à une production du mélange supérieure à celle des cultures pures.
Les situations de compétition où ce surrendement » . apparaît sont celles dites de compensation : l’accroissement de production de l’espèce dominante compense (ou même dépasse en valeur absolue la baisse de production de I’espèce dominée par rapport à la culture pure.
CAS DES ASSOCIATIONS INCLUANT UNE LEGUMINEUSE
Caractéristiques:
Une bonne adaptation des légumineuses à la culture en association, bien que très rarement en tant que plante principale, est constatée; cette adaptation s’appuie sur diverses caractéristiques de cette famille botanique:
– hormis en Amérique Latine où le haricot occupe une place privilégiée, les légumineuses représentent les plantes secondaires de l’association : on n’attend pas d’elles des performances de rendement mais simplement un appoint à la production de la plante principale (céréale ou tubercule);
-généralement héliophiles mais tolérant un certain ombrage (sauf l’arachide), elles s’accommodent de la présence de nombreux partenaires;leur cycle photosynthétique en C3, complémentaire de celui en C4 de certaines céréales (maïs), permet une amélioration de la photosynthèse globale de l’association;
-de cycle court (surtout pour les légumineuses alimentaires), elles peuvent être combinées à des plantes annuelles en tirant parti de la complémentarité temporelle entre espèces;
– elles sont peu concurrentes vis-à-vis des ressources minérales, particulièrement pour l’azote;
– elles fournissent éventuellement des reIiquats d’azote aux plantes art en aires ou aux cultures suivantes.
La nutrition azotée des Iégumineuses (rappel théorique)
Cette nutrition utilise deux voies complémentaires :
– l’absorption des nitrates par les racines puis leur réducl la nitrate réductase; cette absorption révèle deux pics d’activité, au stade plantule et après floraison;
– la fixation de l’azote atmosphérique par l’intermédiaire de la nitrogènase, au niveau des nodosités formées à partir du Rhizobizilll yhaseoli.
Ces deux voies, complémentaires pour maximiser les exportations azotées, sont également antagonistes dans la mesure où l’apport d’azote à la plante, au-delà d’une certaine quantité, réduit l’activité de la nitrogènase (FELIX, 1981).
Généralement, la fixation et l’azote du sol assurent seules l’alimentation de la plante, rendant inutile l’apport d’engrais.
Le haricot se différencie cependant de la plupart des légumineuses: il est considéré comme un mauvais fixateur et répond à la fertilisation azotée.
Le transfert d’azote
Les effets positifs des excrétats racinaires d’azote et des produits de décomposition des nodules d’une légumineuse sur une céréale subséquente ont été prouvés (AHMED et RAO, 1982).
La notion de transfert d’azote de la légumineuse vers la céréale associée est en revanche relativement controversée.
Le transfert évoqué par plusieurs auteurs (DOBERTI, 1971 cité par OUKNIDER, 1987) s’appuie sur l’étude des teneurs en azote total de la céréale associée et est contesté par CRUZ et LEMAIRE (1986); ceux-ci affirment, en effet, que l’augmentation de la teneur en azote de la céréale s’explique par les phénomènes de concurrence entre espèces.
D’après SERAFINI (1984), l’évidence d’un transfert d’azote de la Iégumineuse vers la « non-légumineuse » associée n’a été démontrée que dans quelques cas exceptionnels :
-présence d’une céréale fourragère à cycle long, qui profite des effets résiduels d’une légumineuse récoltée précocement (SEARLE et a1.,’1981);
– culture dérobée dans une légumineuse, à condition que la légumineuse soit récoltée avant la floraison de cette culture.
D’autres exemples existent, ‘où un supplément d’aminoacides excrétés par la Iégumineuse associée est mis en évidence, les partenaires de l’association n’étant pas aptes à les utiliser.
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Table des matières
INTRODUCTION
CHAPITRE I ANALYSE BIBLIOGRAPHIQUE
1.1 Présentation
1.2 Définitions préalables
1.3 Principaux avantages des cultures associées
1.4 Contenu et tendances des recherches
1.5 Les interférences biologiques dans l’association
1.6 Cas des associations incluant une légumineuse
CHAPITRE II MILIEU EXPERIMENTAL
2.1 Morphologie et végétation
2.2 Climat
2.3 Sols
2.4 Paysages agraires
2.5 Evolution des systèmes agraires
2.6 Aperçu des systèmes de culture
CHAPITRE III METHODOLOGIE
3.1 Stratégie d’expérimentation
3.2 Choix des dispositifs expérimentaux
3.3 Conditions générales de réalisation des essais
3.4 Prélèvements, mesures et analyses
3.5 Les termes de comparaison des systèmes
3.6 Traitement statistique des résultats
CHAPITRE IV: VOIES D’AMELIORATION DES ASSOCIATIONS MAIS-LEGUMINEUSE
4.1Comparaison de divers arrangements spatiaux
4.1.1 Systèmes de culture intercalaire maïs-soja
4.1.2 Systèmes mixtes et intercalaires maïs-soja
4.1.3 Systèmes mixtes et intercalaires maïs-haricot
4.1.4 Conclusion
4.2 Choix de variétés et densités de peuplement adaptées
4.2.1 Densités et variétés de maïs en association maïs-soja
4.2.2 Comportement de quatre variétés de soja
4.2.3 Associations incluant des haricots déterminés et semi-déterminés
4.2.4 Conclusion
4.3 Effet des dates de semis sur la production de l’association
4.3.1 Echelonnement du semis dans l’association maïs-soja
4.3.2 Retard de semis du haricot dans l’association maïs-haricot
4.3.3 Conclusion
4.4 Fertilisation des associations maïs-légumineuse
4.4.1 Effets des fumures N et NP sur l’association maïs-soja
4.4.2 Apports fractionnés d’azote dans l’association maïs-soja
4.4.3 Fumure azotée dans l’association maïs-haricot
4.4.4 Fertilisation NP dans l’association maïs-haricot
4.4.5 Fertilisation de l’association maïs-haricot en paysannat
4.4.6 Conclusion
4.5 Effet précédent cultural des associations
4.6 Possibilités d’amélioration d’une association maïs-haricot-macabo
4.6.1 Objet et réalisation pratique
4.6.2 Résultats de rendements et interprétation
4.6.3 LER et rendements relatifs
4.6.4 Calcul et comparaison des ATER
4.6.5 Rendements énergétiques et protéiques
4.6.6 Conclusion
CHAPITRE V:INTERACTION ET CARACTERISTIQUES PROPRES AUX ASSOCIATIONS MAIS-LUGUMINEUSE
5.1 Compétition interspécifique . interactions racinaires
5.1.1 Pouvoir de compétition du mais
5.1.2 Effet de la compétition sur la Légumineuse
5.1.3 Interactions racinaires dans l’association maïs-soja
5.2 Etude de la biomasse produite
5.2.1 Présentation
5.2.2 Biomasse racinaire
5.2.3 Biomasse aérienne
5.2.4 Conclusion
5.3 Etude des mobilisations minérales
5.3.1 Présentation
5.3.2 Diagnostics foliaires
5.3.3 Teneurs en NPK
5.3.4 Exportations totales d’azote et phosphore
5.3.5 Conclusion
5.4 Composantes du rendement
5.4.1 Hauteur des plantes
5.4.2 Nombre de ramifications du soja
5.4.3 Production de gousses ou épis
5.4.4 ombre de graines par gousse
5.4.5 Nombre de graines par plante
5.4.6 Poids de 1 000 graines
5.4.7 Rendement en grains par plante
5.4.8 Conclusion
5.5 Effets de l’association sur la nodulation et la fixation d’N de la légumineuse
5.5.1 Nodulation de la légumineuse associée
5.5.2 Fixation symbiotique par le soja associé
5.5.3 Conclusion
5.6 Effets de l’association sur l’intensité des maladies
5.6.1 Choix des maladies – notation
5.6.2 Résultats des notations
5.6.3 Interprétation
5.6.4 Conclusion
5.7 La valorisation du travail par l’association culturale
5.7.1 Présentation et méthode utilisée
5.7.2 Temps de travaux
5.7.3 Productivité du travail
5.7.4 Conclusion
CHAPITRE VI RENTABILITE DES FERTILIS.ANTS EN CULTURE ASSOCIEE
6.1 Présentation
6.2 Revenus marginaux issus des fertilisants
6.3 Rentabilité des fertilisants en incluant les arrière effets
6.4 Analyse par la méthode des budgets partiels
6.5 Conclusion
CHAPITRE VII SYNTHESE SUR QUELQUES POINTS PARTICULIERS
7.1 Présentation
7.2 Rendements relatifs
7.3 LER
7.4 Nutrition azotée
7.5 Ombrage
7.6 Comparaison des associations maïs-haricot et maïs-soja
CONCLUSION GENERALE
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