La prise en charge des affections bucco-dentaires implique le plus souvent la réalisation d’un geste thérapeutique, ce geste s’accompagne parfois d’une prescription médicamenteuse, une fois le diagnostic posé et la thérapeutique définie [9]. Le séjour d’un médicament dans l’organisme est marqué par plusieurs séries d’événements qui débutent dès son contact avec la muqueuse digestive (dans l’éventualité où le médicament est pris par voie orale, ce qui est souvent le cas lorsque la prescription est ordonnée par le chirurgien-dentiste) et se terminent par son élimination principalement par les reins [25]. En odontologie pédiatrique, le chirurgien-dentiste est amené à prescrire des antibiotiques, des antalgiques, des sédatifs, des antiémétiques, du fluor ou encore des produits d’hygiène bucco dentaire (bain de bouche, dentifrice…), mais il devra prouver l’intérêt clinique d’une telle prescription, en se référant aux données actuelles de la science. Le praticien doit alors se tenir au courant des dernières recommandations des différentes classes de médicaments, du cadre légal de leur utilisation et être particulièrement attentif pour chaque médicament au risque de sa prescription [24]. Il est essentiel de considérer la prescription comme un acte médicale à part entière qui engage notre responsabilité professionnelle [4].
Généralités sur les médicaments
Définition du médicament
Le code français de la santé publique définit le médicament comme : « toute substance ou composition présentée comme, possédant des propriétés curatives ou préventives à l’égard des maladies humaines ou animales, ainsi que toute substance ou composition pouvant être utilisée chez l’homme ou chez l’animal ou pouvant leur être administrée, en vue d’établir un diagnostic médical ou de restaurer, corriger ou modifier leurs fonctions physiologiques en exerçant une action pharmacologique, immunologique ou métabolique » [33].
Pharmacocinétique
La pharmacocinétique étudie le devenir du médicament dans l’organisme. Elle permet de décrire le trajet du médicament dans le corps humain. Le médicament doit agir dans l’organisme au niveau de sa cible, il va y parcourir différentes étapes qui le mèneront dans plusieurs compartiments, là où la substance active se trouve.
Absorption
L’absorption est l’ensemble des phénomènes qui permettent à une substance de passer dans le plasma sanguin, quel que soit son lieu d’administration. Le médicament pénètre dans le sang en passant à travers une muqueuse, la facilité de pénétration à travers cette muqueuse dépend de sa constitution cellulaire et de la structure chimique de la substance active. Les substances actives sont liposolubles dans leur grande majorité, cela conditionne la traversée des muqueuses. Dans le cas de la voie orale, l’absorption se fait à travers la muqueuse intestinale.
Distribution
La substance active ne se concentre pas de manière homogène dans tout l’organisme. Elle se dirige préférentiellement vers un ou plusieurs organes, on parle de tropisme. Elle peut aussi rejoindre les zones de stockage, conférant un effet retard à la molécule. La concentration de la substance active dans un organe donné permet d’expliquer ses propriétés pharmacologiques, mais également les effets secondaires qu’elle y génère.
Métabolisme
Le médicament de départ est transformé en métabolite actif ou inactif, le plus souvent moins efficace et moins toxique, le lieu de métabolisme est le foie. Les substances actives sont la plus part du temps lipophiles. Pour être éliminées dans l’urine, lieu hydrophile, elles sont transformées en métabolites hydrosolubles, d’élimination plus facile.
Elimination
Dernière étape de la phase pharmacocinétique, l’élimination est le processus aboutissant à la sortie de l’organisme du principe actif et de ses métabolites, les substances sont éliminées principalement par le rein, mais aussi par la bile, plus rarement par les poumons, la salive, la peau ou les glandes sudoripares.
Voies d’administration du médicament
Voie orale
Le médicament est pris par la bouche où il est avalé, passe par l’œsophage, puis l’estomac, et pénètre dans l’organisme au niveau intestinal. Les formes galéniques de la voie orale sont :
*les gélules, les comprimés chez l’enfant âgé de plus de 6 ans.
*les comprimés effervescents ou lyophilisés, les poudres pour suspensions buvables, les sirops. Certains médicaments existent sous des formes pédiatriques, celles-ci possèdent un goût agréable, ce qui est utile pour la prise du traitement, mais sont parfois riches en saccharose et donc cariogènes. Ainsi, on préfère les comprimés et les gélules, dès que l’enfant est capable de les avaler. L’inconvénient majeur de cette voie est la dégradation intense lors du premier passage hépatique.
Voie rectale
Elle est utilisée plus fréquemment chez l’enfant et le nourrisson, notamment en cas de fièvre. Cette voie est privilégiée en cas de vomissements ou de problèmes digestifs. La bonne vascularisation de l’ampoule rectale permet une rapide biodisponibilité des principes actifs. Certains de ses vaisseaux drainent le sang directement vers le cœur (par la veine cave) et ne traverse pas le foie, où le médicament est métabolisé à chaque passage.
Voie parentérale
Etant source de douleur, le choix de cette voie est exceptionnel chez l’enfant. Cependant, l’efficacité quasi immédiate de la voie intraveineuse justifiera son utilisation lors des situations d’urgence. Elle est utilisée en milieu hospitalier.
Voie topique
Il est primordial de considérer ici que l’enfant présente une absorption plus élevée que celle de l’adulte. En effet, la résorption cutanée est augmentée en raison de la finesse de la peau et d’un rapport élevé entre la surface cutanée et le poids du corps, d’où un risque de passage trop important du médicament et donc d’intoxication.
Classes des médicaments utilisés en odontologie pédiatrique
Antibiotiques
Deux grandes modalités thérapeutiques sont envisageables, la prise d’antibiotiques pour prévenir l’apparition d’un phénomène infectieux, encore appelée antibioprophylaxie, et la prescription d’antibiotique pour traiter une infection avérée encore appelée antibiothérapie.
– L’antibioprophylaxie
Elle s’envisagera essentiellement pour prévenir un risque d’endocardite infectieuse chez les patients à risque. Elle s’agira de prescrire une prise unique une heure avant le geste à risque .
– L’antibiothérapie
Face à une infection bactérienne avérée, le traitement pourra être associé à une prescription d’antibiotique. Quel que soit la molécule choisie, il est impératif que le traitement soit poursuivi le temps nécessaire, le plus souvent sept jours et que le nombre par prise soit respecté. En absence de toute allergie, l’Amoxicilline et l’antibiotique de première intention dans le traitement des infections bucco-dentaires.
Bêtalactamines
– L’Amoxicilline, est l’antibiotique le plus prescrit. Son spectre large, ses propriétés bactéricides et sa grande innocuité font de lui un médicament tout à la fois efficace est sûr. Chez l’enfant, la posologie usuelle est de 25mg/kg/j à 50mg/kg/j en deux ou mieux trois prise pour les enfants de moins de trente mois, et de 50mg/kg/j à 100mg/kg/j en trois prises espacées de huit heures pour les enfants de plus de 30 mois sans dépasser 3g/j. Les deux seules contre-indications de l’Amoxicilline sont l’allergie aux bêtalactamines et la mononucléose infectieuse. Les effets indésirables les plus fréquents sont de nature gastrointestinale.
– Association Amoxicilline/Acide Clavulanique : AMOXICLAV® Comme toute association d’antibiotique l’AMOXICLAV doit être prescrit en deuxième intension après échec d’une monothérapie correctement suivie pendant 48 heures. La posologie est de 80mg/kg/j et sans dépasser 3g/j. Les contre-indications sont les mêmes que celles de l’Amoxicilline. Les troubles digestifs seront généralement plus fréquents.
Macrolides et apparentés
Ce sont des antibiotiques bactériostatiques qui présentent un spectre antimicrobien moins large notamment en ce qui concerne les bactéries anaérobies.
-La Josamycine : elle présente des dosages et des formes galéniques intéressantes, la seule véritable contre-indication est l’allergie aux macrolides, et les effets indésirables se résument à des troubles digestifs .
-La Clindamycine : tous les dosages sont sous forme de gélules ce qui contre indique leur utilisation chez l’enfant de moins de six ans. Sa posologie est de 8 à 25mg/kg/j en trois ou quatre prises, la seule contreindication est l’allergie.
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Table des matières
Introduction
Chapitre 1 : Généralités sur les médicaments
I. Définition du médicament
II. Pharmacocinétique
1. Absorption
2. Distribution
3. Métabolisme
4. Elimination
III. Voies d’administration du médicament
1. Voie orale
2. Voie rectale
3. Voie parentérale
4. Voie topique
IV. Classes des médicaments utilisés en odontologie pédiatrique
1. Antibiotiques
1.1 . Bêtalactamines
1.2 . Macrolides et apparentés
1.3 . Imidazolés
2. Antalgiques
1.1 . Antalgiques non morphiniques
1.2 . Antalgiques morphiniques
2. Anti-inflammatoires non stéroïdiens (AINS)
3. Antiémétiques
4. Sédatifs
4.1 . Benzodiazépines
4.2 . Antihistaminiques H1
5. Produits fluorés
6.1. Voie systémique
6.2. Voie topique
6.2.1. Application professionnelle
6.2.1.1. Vernis fluorés
6.2.1.2. Gels fluorés
6.2.1.3. Solutions fluorées
6.2.2. Auto application
6.2.2.1. Dentifrices fluorés
6.2.2.2. Bains de bouche fluorés
6.2.2.1. Gels fluorés
V. Risques thérapeutiques liés à la prescription
1. Antibiotiques
2. Antalgiques
3. Anti-inflammatoires non stéroïdiens
4. Erreurs de prescription
Chapitre 2 : Règles de prescription
I. Aspect juridique
1. Législation
2. Responsabilité du chirurgien-dentiste
2.1 . Responsabilité pénale
2.2 . Responsabilité civile
2.3 . Responsabilité déontologique
II. Ordonnance
1. Différents types d’ordonnance
1.1 . Classique
1.2 . Bizone
1.3 . Sécurisée
1.4 . Electronique
2. Méthode de rédaction d’une ordonnance
III. Règles de prescription en odontologie pédiatrique
1. Adaptation en fonction de l’âge
2. Adaptation en fonction du poids
3. Adaptation en fonction de l’âge et du poids
4. Adaptation en fonction de la surface corporelle, âge et du poids
Conclusion