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Substitution du noyau imidazole par un noyau pyrrole ou maléimide
De nombreux analogues dont le noyau imidazole a été substitué par un noyau pyrrole ont été synthétisés. Parmi les plus efficaces, nous pouvons citer le travail de Prudhomme et coll. qui se sont intéressés aux molécules représentées Figure 9.
La même équipe a aussi étudié une série de composés, obtenus selon le schéma réactionnel suivant dans laquelle le motif imidazole a été remplacé par un deuxième noyau maléimide (Schéma 4).27 Dans la voie de synthèse utilisée, décrite plus tôt par Bergman et al.28, le premier synthon 25 peut être obtenu soit par addition du bromomaléimide sur l’indole, via le dérivé Grignard ou après oxydation de l’adduit de Michael résultant de l’addition du maléimide sur l’indole dans l’acide acétique glacial. Les composés 26 et 27 sont issus de la cycloaddition d’un noyau maléimide sur le synthon 25 dans le xylène à reflux. L’obtention de l’un ou de l’autre dépend de la méthode de purification. Enfin, l’oxydation des composés 26, avec du TFA, et 27, avec du DDQ donne le produit 28.
Les analyses d’activité biologique ont donné des résultats encourageants en ce qui concerne les molécules 15, 17, 18 et 19 pour la série pyrrole. Ces molécules se révèlent être de meilleurs inhibiteurs de la Chk1 que les produits naturels. De plus les molécules 17 et 18 montrent aussi une meilleure sélectivité vis-à-vis de l’enzyme.29 Pour la série maléimide, les composés les plus puissants en terme d’inhibition de la Chk1 sont représentés Figure 10. Les molécules 29 et 30 ont une IC50 de 2 et 8 nM, les rendant plus efficaces que les produits naturels, seul le composé 29 montrant une faible cytotoxicité.30
Substitution du noyau imidazole par un cycle non aromatique à cinq ou six chaînons
Les composés 33 et 34 ont été synthétisés par Conchon et al. via une réaction de Suzuki entre un dérivé boronique et un cycle bromé, suivie d’une réaction de Diels-Alder, (Schéma 5).
Les composés 35 à 39 ont été obtenus eux, via une réaction de Diels-Alder entre un indolylmaléimide et différents diénophiles. La réduction de la quinone des composés 35 à 37 a abouti à la synthèse de trois nouveaux composés, 40 à 42 (Schéma 6). Ces modifications ont permis d’obtenir dix nouveaux analogues dont les plus actifs, les composés 37 et 38, présentent une IC50 de 27 et 24 nM respectivement. On peut en conclure que le cycle D peut être remplacé par un carbonyle sans qu’il n’y ait de perte d’activité vis-à-vis de la Chk1.31,32
Modification ou absence des cycles D et E
Deux autres séries de molécules représentées Figure 11 ont été synthétisées. Les composés de la première série ont été obtenus à partir de la réaction de l’éthyl-3-oxo-(1H-indol-3-yl)propionate et du N-BOM-dibromomaléimide alors que la deuxième série est préparée par réaction de Diels-Alder entre l’indolylmaléimide et l’acrylate d’éthyle.33
Les composés dont le cycle D est manquant se sont révélés être de mauvais inhibiteurs de la Chk1, prouvant ainsi la nécessité de ce cycle. Pour les molécules dont le cycle E est absent, il n’est pas observé de grande modification de l’inhibition de la Chk1, l’introduction d’un substituant portant un groupement hydroxyle sur l’azote de l’imide ne perturbant pas non plus l’inhibition.
Analogues de type pyrrolocarbazoles inhibiteurs d’autres kinases
D’autres analogues de type pyrrolocarbazoles ont aussi été étudiés qui se sont révélés de bons, voire d’excellents inhibiteurs d’autres kinases.
Inhibiteurs de la PARP-1
La poly (ADP Ribose) polymérase 1 (PARP-1) est une protéine senseur, capable de repérer les ruptures sur un brin d’ADN. Elle détecte donc les atteintes génétiques. Récemment, une série de molécules inhibitrices de la PARP-1 a été décrite dont la structure est présentée Figure 12.
Préparation des intermédiaires 1 : bromation régiosélective de noyaux indoliques (Schéma 7)
La bromation de la position 3 de l’indole a été décrite à plusieurs reprises avec divers systèmes de bromation : KBr-H5IO6,51 bromosuccinimide,52 dioxane dibromé53 ou DMSO-Me3SiBr54.
La méthode la plus facile à mettre en œuvre a été celle décrite par Bocchi et ses collaborateurs, les conditions décrites consistant en l’addition de Br2 goutte à goutte sur une solution d’indole substitué dans le DMF jusqu’à ce que persiste la couleur, la réaction est alors considérée comme totale (Schéma 8).22 Il est à noter que la régioséléctivité de la bromation respecte les règles de substitution électrophile aromatique d’un noyau indole, l’introduction du brome se faisant en position 3.
Grâce à cette méthode, nous avons préparé les 3-bromoindoles 1a-c diversement substitués :
– 1a a été obtenu à l’état solide avec un bon rendement de 85 % après traitement du milieu réactionnel par de l’ammoniaque puis isolement du produit par simple filtration.
– la précipitation de 1b et 1c n’ayant malheureusement pas été observée, une étape d’extraction au CH2Cl2 s’est avérée nécessaire. Après évaporation des phases organiques, 1b et 1c ont été isolés en présence de traces de DMF et engagés tels quels dans l’étape suivante. En effet, leur faible stabilité sous l’effet de la chaleur et/ou de la lumière ne nous a pas permis d’évaporer le DMF sans les détruire. En 2007, Prudhomme et al. ont aussi utilisé cette méthode en soulignant déjà la faible stabilité de ce type de dérivés.55
Préparation des unités indolopyrroles 2 (Schéma 7)
Les unités 2-indolopyrroles 2a-c ont été préparées par condensation acido-catalysée des 1a-c avec le pyrrole dans les conditions décrites par Bocchi et al., à savoir dans le dichlorométhane catalysé par le TFA à température ambiante (Schéma 9).56 Si le mélange de réactifs est équimolaire, les auteurs ont observé la formation du produit de bicondensation 2’. Ce problème est facilement contournable via l’utilisation d’un large excès de pyrrole, à savoir 2 équivalents de pyrrole pour un équivalent d’indole bromé 1.
Dans ces conditions, nous avons pu préparer les trois unités indolopyrrole 2a-c, 2a ayant été obtenu à partir de 1a avec un bon rendement de 75 % alors que 2b et 2c ont été obtenus avec des rendements plus modestes, de respectivement 59 % et 30 % (rendements calculés sur deux étapes à partir de l’indole commercial) (schéma 9). Il est à noter que la faible stabilité des bromoindoles 1a-c conjuguée à la forte réactivité du pyrrole ont fait de cette réaction une étape délicate. En effet, en seulement 20 minutes, nous avons observé une disparition totale des précurseurs 1a-c pour donner les adduits 2a-c mais aussi un produit de dégradation du pyrrole par polymérisation en milieu acide.
D’un point de vue mécanistique, cette condensation consiste formellement en une substitution électrophile aromatique du noyau pyrrole par l’électrophile 1a’ issu de la protonation régiosélective du motif 3-bromoindole 1a (Schéma 10). Une fois la liaison C-C formée, l’élimination de HBr permet de réaromatiser le squelette indole et de fournir l’unité 2-pyrroloindole 2a désirée. Il est à noter que la régiosélectivité de la transformation respecte les règles de substitution électrophile aromatique propre au noyau pyrrole, l’addition de l’indole se faisant en position 2.
Préparation des intermédiaires acycliques 3 (schéma 7)
Initialement, la stratégie envisagée faisait intervenir une cycloaddition de type Diels-Alder, entre le diène 2 et le maléimide jouant le rôle de diénophile (Schéma 11). Ainsi, à l’instar de Barry et al57, nous avons tenté de synthétiser le cycloadduit 3’ via la réaction de 2 avec le maléimide. Malheureusement, même en présence d’un large excès de diénophile dans le toluène à 140 °C sous pression, la formation du cycloadduit 3’ n’a pas été observée. Dans ces conditions, le seul produit détecté a été l’adduit acyclique 3a issu de l’addition de Michael de 2a sur le motif maléimide.
Suite à ce résultat, nous avons décidé d’adopter la stratégie de Prudhomme et al. en faisant justement intervenir ce type d’intermédiaires acycliques 3.58 Par conséquent, en appliquant les conditions décrites par Prudhomme (réaction dans le toluène à reflux en présence d’une quantité catalytique de SnCl2,2H2O), les intermédiaires acycliques 3a-d constitués des trois unités pyrrole-indole-succinimide, ont été préparés avec des rendements moyens (28 – 59 %) (Schéma 12).
Le mécanisme associé à cette réaction consiste à faire réagir l’unité indole de 2a en tant que nucléophile et le maléimide préalablement activé par le SnCl2 en tant qu’électrophile (Schéma 13). Une fois la liaison C-C formée, le résidu indole est réaromatisé après déprotonation et le résidu succinimide est « régénéré » pour conduire à l’intermédiaire 3a.
Accès aux analogues pyrroles 4 (schéma 7)
La dernière étape pour obtenir les analogues de la série pyrrole est une étape de cyclisation. Là encore, nous nous sommes inspirés d’un travail de M. Prudhomme qui a décrit en 2003 une étude méthodologique autour de cette étape de cyclisation.21
Dans les conditions optimales décrites par Prudhomme et al., à savoir dans le nitrobenzène à 200 °C en présence d’une quantité stoechiométrique de Pd black, nous avons effectivement obtenu les analogues cycliques 4a-d mais avec de faibles rendement de 15 à 30 %.
En effet, dans ces conditions, bien que la conversion soit totale, les faibles rendements sont expliqués d’une part, par l’apparition de nombreux produits de dégradation et d’autre part, par la purification rendue fastidieuse par la présence du nitrobenzène. Il est à noter que le palladium black est introduit dans des quantités stoechiométriques ce qui nous laisse penser que ce sont ses propriétés d’absorption d’hydrogène qui sont exploitées ici.
Dans l’optique d’améliorer l’efficacité de cette transformation, nous avons décidé d’étudier l’effet des micro-ondes pour cette cyclisation (Tableau 2). De plus, de manière à faciliter la purification, nous avons tenté la cyclisation dans divers solvants plus volatils que le nitrobenzène.
Préparation des intermédiaires acycliques bromés 10 et 11
L’addition du dibrmomaléimide sur la position 3 de l’indole a été décrite par Yoshida et al. pour la synthèse de l’isogranulatimide20 mais aussi par Routier et al.60 et l’équipe de Meggers61. La première équipe passe par un réactif de Grignard (EtMgBr) pour activer le noyau indolo-imidazole alors que les deux dernières utilisent une base syllilée (LiHMDS) pour déprotoner l’indole.
Les méthodes diffèrent mais Yoshida et Routier tous les deux rapportent un meilleur rendement lorsque l’azote du dibromomaléimide est substitué. En effet, l’utilisation de N-méthyl-dibromomaléimide donne, dans les mêmes conditions, un rendement quatre fois supérieur pour Yoshida et trois fois supérieur pour Routier par rapport au NH-maléimide (Schéma 27).
Dans notre cas, il faut, pour l’ancrage des molécules dans le site actif de l’enzyme, que cet atome d’azote soit libre. Nous avons donc, suite à ces observations décidé de protéger l’azote du dibromomaléimide afin de pouvoir augmenter le rendement de cette étape, et à l’instar de Meggers, nous avons choisi le groupement TBDMS facilement clivable en présence de TBAF.
Après la mise en place de la protection sur le noyau maléimide, son addition sur le composé 5 a été réalisée selon les deux protocoles cités plus haut (Schéma 28).
L’utilisation du réactif de Grignard ou du LiHMDS nous ont permis d’obtenir les deux intermédiaires acycliques 10 et 11. La formation du composé 11 s’explique par le fait que dans les deux cas, le traitement du brut se fait par un lavage légèrement acide qui clive partiellement la protection au TBDMS. Les produits 10 et 11 sont séparés par chromatographie. Des deux méthodes, nous avons cependant préféré utiliser le LiHMDS car dans le cas de la série sans substituant, le brut réactionnel, plus propre, donnait un meilleur rendement en produit attendu après purification.
Dans tous les cas, la conversion du réactif 5 n’est jamais totale mais la purification nous permet de récupérer celui qui n’a pas réagi pour le réutiliser ensuite.
Accès aux analogues pyrazoliques 8
Dans l’optique de préparer les analogues pyrazoliques de type A (Schéma 17), l’étape-clé de notre approche repose sur la cyclisation, par voie photochimique, des intermédiaires acycliques bromés 11. Une telle approche de cyclisation a déjà été réalisée avec succès sur des architectures comparables par deux équipes :
– Pour réaliser la synthèse totale du produit naturel granulatimide (schéma 2 du chapitre Mise au point bibliographique), l’équipe de Yoshida a cyclisé de manière efficace un tel intermédiaire acyclique bromé qui, après déprotection du groupement MOM, a permis l’accès au produit naturel.20 Pour cycliser ce type de motifs, il est à noter que la réaction a été effectuée dans l’acétonitrile sous irradiation par une lampe au mercure basse pression.
– L’équipe de Meggers a, quant à elle, cyclisé des intermédiaires acycliques bromés possédant un résidu pyridine pour accéder aux architectures cycliques, qui après
déprotection, a permis l’accès à des composés utilisés comme ligand bidendate du ruthénium (Figure 15).61 Dans ce cas, les auteurs ont également irradié à la longueur d’onde de 350 nm mais ont préféré utiliser le toluène comme solvant.
A la différence des cas de Yoshida et Meggers où l’étape de photocyclisation conduit à la formation d’un cycle central carboné, la cyclisation de nos motifs bromés 10 repose sur la formation d’un hétérocycle central de type pyridine, cette différence structurale notable pouvant entraîner une réactivité chimique différente (Schéma 31).
Avant de présenter la démarche expérimentale que nous avons adoptée et les résultats obtenus, nous allons rappeler brièvement quelques notions importantes de spectroscopie d’absorption UV-visible.
Rappels théoriques sur la spectroscopie UV-Visible 62
Le phénomène d’absorption peut être représenté par le schéma suivant :
L’absorption d’énergie lumineuse par un échantillon quelconque se traduit par la diminution de l’intensité lumineuse d’un rayon incident (I0) après son passage à travers l’échantillon considéré. L’intensité lumineuse transmise est alors notée I et l’absorption est alors quantifiable grâce à la relation A = log10 (I/I0), où A est une grandeur adimensionnelle appelée absorbance.
Pour A = 1, on a log10(I/I0) = 1 d’où I/I0 = 10. Ce qui veut dire que 90 % des photons sont absorbés par le milieu traversé.
Si A = 2 alors log10(I/I0) = 2 d’où I/I0 = 100. Dans ce cas là, 99 % des photons sont absorbés par le milieu traversé.
Une relation importante de la spectroscopie UV-Visible est la loi de Beer-Lambert qui est une relation empirique reliant justement l’absorbance A aux propriétés de l’échantillon traversé par la lumière. Dans le cas d’un faisceau lumineux monochromatique traversant une solution de concentration c en soluté (= espèce absorbante) et de longueur l, la loi de Beer-Lambert s’écrit sous la forme:
A : absorbance (sans unité)
Aλ = ελ × l × c ε : coefficient d’extinction molaire du soluté (L.mol-1.cm-1)
l : longueur du trajet optique dans la solution (cm)
c : concentration molaire de soluté (mol.L-1)
Une réaction photochimique est basée sur l’absorption d’énergie des photons. Il faut pour cela que le réactif puisse absorber cette énergie ce qui se traduit par un compromis au niveau du choix de la longueur d’onde pour la synthèse réalisée : le composé doit avoir un coefficient d’extinction molaire permettant l’absorption mais qui ne doit pas être trop élevé puisque cela entrainera une diminution de la longueur du trajet optique conduisant à l’absorption de la totalité des photons (A = 2), limitant ainsi le volume réactionnel irradié.
Passage de la théorie à la pratique
Afin de réaliser la photocyclisation souhaitée, nous avons adopté la démarche suivante consistant en deux étapes:
(i) enregistrement du spectre UV-Visible du précurseur acyclique dans un solvant transparent aux UV, à savoir l’éthanol. Cet enregistrement de spectres est nécessaire car il nous a permis d’appréhender les propriétés d’absorption de l’espèce à irradier et repérer ainsi la longueur d’onde d’irradiation optimale pour la réaction.
(ii) irradiation du précurseur acyclique à la longueur d’onde choisie jusqu’à sa conversion complète. Les réactions de cyclisation ont été effectuées au laboratoire dans un réacteur photochimique de marque Southern New England Ultraviolet Company, type « rayonet ». Cet appareil consiste en une cuve équipée de seize lampes UV d’une puissance de 8 W chacune et interchangeables, le laboratoire disposant de trois jeux de lampes monochromatiques (250, 300 et 350 nm).
Pour illustrer cette démarche, considérons les résultats associés à la cyclisation du précurseur 11b dont le spectre UV-Visible est donné ci-dessous (Figure 21). Il est à noter que l’ensemble des précurseurs acycliques 11a-c présente un même profil de spectre d’absorption. [c] = 2 nM, l = 1 cm, solvant : éthanol.
A partir du spectre UV-visible, nous avons déterminé les coefficients d’extinction molaires associées aux longueurs d’ondes des trois lampes d’irradiation dont nous disposons :
ε250 = 18000 L. mol-1.cm-1.
ε300 = 17500 L. mol-1.cm-1.
ε350 = 1950 L. mol-1.cm-1.
Pour la cyclisation, nous avons choisi d’irradier une solution de concentration c de 5 mM qui est la concentration généralement utilisée pour ce type de réaction. Dans ces conditions, nous avons alors pu évaluer grâce à la loi de Beer-Lambert la longueur maximale parcourue par le faisceau lumineux au sein du milieu réactionnel avant d’être complètement absorbé (absorbance A = 2), à savoir : (i) de l’ordre de 0,2 mm (!) pour des longueurs d’onde de 250 et 300 nm, (ii) de l’ordre de 2 mm pour une longueur d’onde de 350 nm.
D’après ces valeurs, il apparaît clairement que la longueur d’onde la plus adaptée à notre situation est = 350 nm. Malgré cela, le volume de milieu réactionnel irradié est très faible puisqu’il correspond à un film sur la paroi du ballon de 2 mm d’épaisseur. Travailler à plus forte dilution serait envisageable mais plus la dilution est élevée, plus la taille du ballon doit être grande et donc le cœur du milieu réactionnel reste tout de même inaccessible. De plus, l’utilisation d’un milieu suffisamment concentré est intéressante car cela conduit à la précipitation progressive du produit de cyclisation au cours de l’irradiation. Par conséquent, afin d’assurer un renouvellement continu du « film réactionnel » irradié, nous avons aménagé l’appareillage à notre disposition en introduisant une agitation vigoureuse par l’intermédiaire d’un agitateur magnétique.
Enfin, toujours d’un point de vue pratique, un flux d’argon continu a été imposé au milieu réactionnel de manière à éliminer le bromure d’hydrogène qui est progressivement formé au cours de la cyclisation, la présence de cet acide dans le milieu pouvant entraîner soit la formation de sous-produits indésirables soit la dégradation du produit de cyclisation souhaité.
En appliquant ces conditions expérimentales, nous avons cyclisé avec succès l’ensemble des précurseurs acycliques 11a-c.
Molécules symétriques, premier squelette X = Y = pyrrole
Récemment, dans le but de faire des marqueurs de fluorescence, Lin et al. se sont intéressés à des structure symétriques ouvertes comportant soit deux pyroles, soit deux indoles. Ils ont ainsi montré qu’en ne travaillant pas à froid mais en chauffant, l’utilisation d’un réactif de Grignard lors de l’addition du pyrrole sur le dibromomaleimide permet l’introduction de deux noyaux pyrroles.74. Nous avons repris ce protocole pour obtenir le composé 33 qui est obtenu pur avec un rendement de l’ordre de 16 %. Un peu de produit 34 (5 %), correspondant à l’addition d’une seule molécule de pyrrole est aussi obtenu lors de cette réaction. Ces mauvais rendements s’expliquent du fait de la purification que nous n’avons pas optimisée.
La cyclisation de ce composé a été tentée par voie photochimique mais n’a pas permis pour le moment d’accéder au composé 35 attendu.
Molécules disymétriques, deuxième squelette X = pyrrole, Y = pyrazole
Pour le deuxième type de squelette que nous voulions faire, il nous semblait intéressant d’utiliser le synthon 34 précédement obtenu. Mais dans un premier temps, il était important d’avoir une méthode de préparation plus efficace. Pour cela, nous avons adapté un protocole proposé par Routier et al..71 qui synthétisaient un synthon analogue, mais comportant un indole à la place du pyrrole. Ce synthon était ensuite, mis en jeu dans des réactions de Suzuki. L’addition du pyrrole sur le dibromomaléimide se fait en présence de LiHMDS. Ce dernier arrache un proton du pyrrole, l’anion formé attaque ensuite un des carbones du maléimide portant un brome, avec départ de Br-. Dans notre cas, on obtient le composé 34 avec un rendement de 80 % correspondant à la formation d’un anion en position 2 du pyrrole.
Pour introduire un noyau pyrazole sur le composé 34, notre première idée a aussi été de faire des réactions de Suzuki, d’autant que nous disposions du pyrazole boronique 29. Nos différentes tentatives en ce sens n’ont pas abouti au composé 36 mais se sont heurtées à des échecs.
Nous avons ensuite adapté un protocole proposé par Kuduk et al. qui introduisait un noyau pyrazole sur un noyau aromatique. La réaction entre le composé 34 et le pyrazole en présence de CuI et 1-10 phénanthroline, a conduit au composé 37 qui pouvait aussi conduire par cyclisation à un dérivé tétracyclique intéressant. 75.
Cette fois encore, la réaction de cyclisation pour conduite au composé 38 comportant un cycle pyridinique central a été tentée sans succès par photochimie en utilisant les conditions décrites par Prudhomme pour la préparation des aza-analogues de la rébeccamycine.69
Molécules disymétriques, troisième squelette X = pyrrole, Y = 2ème maléimide
Le squelette hétérocyclique suivant auquel nous nous sommes intéressés comporte en plus de l’enchaînement maléimide / benzène / pyrrole, un deuxième motif maléimide.
Cette molécule s’inspire d’une série développée par Prudhomme et son équipe dans laquelle le cycle imidazole de la granulatimide a été remplacé par un deuxième cycle maléimide. Certaines des molécules qu’ils ont étudiées présentent une activité inhibitrice vis-à-vis de la Chk1 de l’ordre du nanomolaire ce qui constitue un gain de 2 unités de log par rapport aux produits naturels.
Le schéma de rétrosynthèse pour cette molécule a été pensé autour d’une réaction de Diels-Alder faisant intervenir un diène comprenant un pyrrole et un maléimide, et le maléimide.
La synthèse du diène 40 a été envisagée à partir du dérivé 34 selon le schéma réactionnel suivant :
La débromation du composé 34 se fait en deux étapes conformément à un protocole décrit par Prudhomme dans le cas d’un composé analogue, mais comportant un aza-indole à la place du pyrrole.76 La première étape faisant intervenir l’hydrogène en présence de palladium sur charbon a conduit quelles que soient les conditions étudiées (stoechiométrie, température, temps de réaction) au composé 39 correspondant à la déhalogénation de 34 accompagnée d’une réaction de réduction de la double liaison du maléimide. On a aussi observé un manque de reproductibilité des rendements obtenus (quelques pourcents à 84 %).
Nous avons voulu voir si une autre méthode de déhalogénation n’impliquant pas une réduction de double liaison ne pouvait pas être utilisée. Pour cela nous nous somme intéressés à une réaction de déhalogénation sur un noyau aromatique décrite récemment par Hekmatshoar.77. Elle se fait en présence de Zn dans un mélange THF/NH4Cl. Malheureusement, cette réaction a aussi conduit au composé 39 avec un rendement plus faible (40 %) mais bien reproductible.
La deuxième étape dans la synthèse du diène est une étape d’oxydation pour recréer la double liaison du cycle maléimide. Dans sa suite réactionnelle, Prudhomme et al. utilisent le DDQ pour cette étape.76. Dans notre cas, ce réactif ne s’est pas révélé efficient, néanmoins le produit attendu 40 a finalement pu être obtenu mais avec un faible rendement (de l’ordre de 10 %) par action du MnO2.
Pour le moment, la réaction de Diels-Alder n’a pas encore été réalisée faute de temps.
Molécules disymétriques, quatrième squelette X = pyrrole, Y = cyclopentène
En 2006, l’équipe d’Hudkins publie une série de molécules décrite pour inhiber la PARP-1, une enzyme nucléaire impliquée dans les processus de réparation de l’ADN.78 Elle catalyse la synthèse de chaînes Poly ADP ribose à partir du NAD+ en réponse à des coupures d’ADN simple brin. Parmi les composés les plus efficaces, on note le composé 41 qui inhibe l’enzyme avec un IC50 de 40 nM.
La synthèse de ce composé était réalisée en quatre étapes sur la base d’une réaction de Diels-Alder entre le diène comportant un pyrrole et un cyclopentène, et l’acétylène dicarboxylate de méthyle.
Il nous a paru intéressant de voir quelle pouvait être l’activité de ce composé sur le checkpoint G2, le but étant d’envisager ensuite la série suivante.
Nous avons donc étudié une synthèse alternative de ce composé basée aussi sur une réaction de Diels-Alder entre le même diène que celui utilisé par l’équipe d’Hudkins, le maléimide jouant cette fois le rôle de diénophile.
Synthèse des diènes
La synthèse du diène 42 a été décrite dans un brevet par Chatterjee79 qui a modifié une procédure précédemment décrite par Tashiro et al.80. Elle consiste à condenser l’énamine 43 sur un noyau pyrrole.
Nous avons voulu voir s’il était possible de généraliser cette méthode pour obtenir les diènes comprenant les noyaux pyrazole et imidazole.
L’énamine, synthon commun aux 3 diènes, est obtenu selon le protocole reporté par Kuehne.81
La condensation de la cyclopentanone sur la pyrrolidine se fait dans le toluène à 130 °C en présence de quelques cristaux d’APTS. Le produit 43 est isolé par distillation Kügelrhor, avec un rendement de l’ordre de 77 %.
Il est décrit que le produit doit être fraîchement préparé pour l’étape suivante. En effet, malgré une conservation à -16 °C, nous observons la dissociation de l’énamine pour redonner la cyclopentanone et la pyrrolidine.
Synthèse des diènes
L’énamine obtenue est condensée sans solvant à 145 °C pendant 5 h sur les hétéropentacycles pour donner les diènes voulus. Dans le cas du pyrrole et du pyrazole, on obtient deux diènes régioisomères l’un de l’autre, dans le cas de l’imidazole, un seul diène est obtenu
Cas du Pyrrole
Il est décrit dans la littérature80,82 que lorsque la réaction du pyrrole sur une énamine similaire est réalisée dans des conditions douces (60 °C / 5 min), elle conduit avec un bon rendement (> 70 %) à l’adduit tricyclique 48 issu d’une réaction de N-alkylation du pyrrole.
Par contre, en travaillant dans des conditions plus dures (150 °C / 5 h) comme nous l’avons fait, on observe la formation des produits de C-alkylation du pyrrole, les deux régioisomères 45a/45b.
Schéma 65 : Préparation des diènes 45a et 45b
Ces deux régioisomères ont été séparés par flash chromatographie, ils sont obtenus avec des rendements respectifs de 26 et 5 %.
Ces faibles rendements peuvent être expliqués par la formation d’autres produits secondaires, parmi lesquels les deux composés 49 et 50, résultant de l’addition d’une deuxième molécule d’énamine sur les diènes obtenus.
Cas du pyrazole
Une analyse similaire peut être faite pour la réaction du pyrazole sur l’énamine 43.
Les deux diènes régioisomères 46a et 46b ont été obtenus mais, dans ce cas, avec des rendements plus faibles que précédemment, respectivement de 3 et de 2 %.
Cas de l’imidazole
L’imidazole étant une molécule symétrique, un seul régioisomère 47 a été obtenu avec également un faible rendement.
Réaction de Diels-Alder
Cas du diène pyrrole
La réaction de Diels Alder a d’abord été étudiée dans le cas du diène 45 comportant un noyau pyrrole. Nous avons repris les conditions décrites par Tao et al. dans un cas similaire.78 ce qui nous a amené à travailler sans solvant, à 190 °C pendant 3 h.
La réaction a été effectuée avec les deux isomères 45a et 45b, les deux adduits de Diels-Alder 41a et 41b ayant été obtenus avec des rendements respectifs de 17 et 15%.
D’après les spectres RMN des produits isolés, il semble que la double liaison des cycles à 6 chaînons des composés 41a’ et 41b’ formés théoriquement ait migré de façon à donner les composés 41a et 41b dans lequel le cycle pyrrole a retrouvé son aromaticité.
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Table des matières
Chapitre I : Mise au Point Bibliographique
I. Situation mondiale vis-à-vis du cancer
A. Quelques chiffres
B. Relations cancer/cellule
1. Le cycle cellulaire
2. Régulation du cycle cellulaire
C. D’où vient le cancer ?
1. Mécanismes mis en jeu au cours du développement d’un cancer
II. Traitements en place
A. La chirurgie
B. La radiothérapie
C. L’hormonothérapie
D. L’immunothérapie
E. Les ultrasons
F. La Chimiothérapie
1. Les agents alkylants
a) Les moutardes à l’azote
b) Les nitrosourées
c) Triazènes et hydrazines
d) Les sels de platine
2. Les antimétabolites
a) Les antipurines
b) Les antipyrimidines
c) Les antifoliques
3. Les agents induisant ou stabilisant des coupures de l’ADN
a) Les inhibiteurs de topoisomérases I
b) Les inhibiteurs de topoisomérases II
c) Les poisons de l’ADN
4. Molécules actives au niveau de la mitose
a) Inhibiteurs de la polymérisation de la tubuline
b) Inhibiteurs de la dépolymérisation de la tubuline
III. Une nouvelle voie de recherche : les structures indolocarbazoles
A. Voies d’accès à ces composés
B. Analogues de type pyrrolocarbazoles inhibiteurs de la Chk1 – Relations Structure/Activité
1. Pyrrolocarbazoles analogues structuraux des produits naturels
2. Substitution du noyau imidazole par un noyau pyrrole ou maléimide
3. Substitution du noyau imidazole par un cycle non aromatique à cinq ou six chaînons
4. Modification ou absence des cycles D et E
C. Analogues de type pyrrolocarbazoles inhibiteurs d’autres kinases
1. Inhibiteurs de la PARP-1
2. Inhibiteurs du complexe D1/CDK4
3. Inhibiteurs de la GSK-3
4. Rebeccamycine, staurosporine et analogues
Chaptre II : Synthèse Chimique de nouveaux analogues de la granulatimide
Partie 1 : Synthèse d’analogues pentacycliques de la granulatimide
I. Synthèse des analogues pyrroles
A. Préparation des intermédiaires 1 : bromation régiosélective de noyaux indoliques
B. Préparation des unités indolopyrroles
C. Préparation des intermédiaires acycliques
D. Accès aux analogues pyrroles
II. Synthèse des analogues pyrazoles de type A
A. Première approche
1. Préparation des unités indolopyrazole
2. Préparation des intermédiaires acycliques
3. Accès aux analogues pyrazoles de type A 8 : cyclisation des intermédiaires
B. Seconde approche
1. Préparation des intermédiaires acycliques bromés 10 et 11
2. Accès aux analogues pyrazoliques 8
a) Rappels théoriques sur la spectroscopie UV-Visible
b) Passage de la théorie à la pratique
3. Déméthylation
III. Synthèse d’analogues pyrazoles de type B
A. Première approche
1. Préparation des synthons 20
a) Synthèse du pyrazole acétamide
b) Synthèse du synthon glyoxylate
2. Préparation des intermédiaires acycliques
3. Préparation des analogues 27 : cyclisation photochimique des intermédiaires acycliques
4. Déprotection
B. Seconde approche
1. Synthèse de l’ester boronique du pyrazole
2. Synthèse du dérivé bromé
3. Couplage de Suzuki
4. Cyclisation photochimique
5. Déprotection
6. Vers la synthèse des analogues
Partie 2 : Synthèse d’analogues tetracycliques de la granulatimide
I. Molécules symétriques, premier squelette X = Y = pyrrole
II. Molécules disymétriques, deuxième squelette X = pyrrole, Y = pyrazole
III. Molécules disymétriques, troisième squelette X = pyrrole, Y = 2ème maléimide
IV. Molécules disymétriques, quatrième squelette X = pyrrole, Y = cyclopentène
A. Synthèse des diènes
1. Synthèse des diènes
a) Cas du Pyrrole
b) Cas du pyrazole
c) Cas de l’imidazole
2. Réaction de Diels-Alder
a) Cas du diène pyrrole
b) Cas du diène pyrazole
3. Aromatisation de l’adduit de Diels Alder
Chapitre III : Evaluations Biologiques
I. Principe des tests
A. Test d’inhibition de la croissance globale de la population cellulaire
B. Test d’inhibition du checkpoint G2
II. Matériels et méthodes
III. Résultats
A. Test d’inhibition de la croissance de la population cellulaire
B. Inhibition du Checkpoint G2
IV. Discussion
V. Conclusion
Chapitre IV : Vers une approche in silico de nouveaux inhibiteurs dérivés du produit naturel isogranulatimide
I. Contexte
A. Positionnement de l’étude in silico
B. Etude préliminaire de la Chk1 : rôle et analyse structurale
1. Rôle de la Chk1
2. Eléments d’analyse structurale
II. Prédiction in silico de l’affinité des analogues préparés pour la Chk1
Sommaire
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A. Introduction
B. Analyses de structures protéiques et identification de résidus clés
C. Calculs d’arrimage moléculaire
1. Résultats
2. Conclusion
III. Vers un design rationnel de nouveaux inhibiteurs de la Chk1 dérivés de l’isogranulatimide
A. Introduction
B. Résultats & discussion
IV. Matériels & méthodes
V. Conclusion
Conclusion Générale
Partie Expérimentale
Bibliographie
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