Variations d’indice de réfraction dans les matériaux dopés terres-rares

Le domaine des lasers est arrivé aujourd’hui à une grande maturité. Les techniques de pompage par diodes lasers des lasers à solide et à fibres sont connues et de mieux en mieux maîtrisées. En revanche, il existe encore des limitations ou des verrous qui limitent les performances des sources, notamment aux puissances et/ou aux énergies élevées :
− Effets thermiques dans les lasers à état solide : dégradation de la qualité spatiale du faisceau laser (diminution de la luminance, réduction de la portée des instruments)
− Effets non-linéaires parasites (notamment si la source est fine spectralement) et problèmes de tenue au flux dans les fibres lasers monomodes .

L’optimisation des résonateurs (cavité à grand mode avec correction de la biréfringence par exemple) ou l’utilisation de fibre quasi-monomode – fibres Large Mode Area (LMA) – permettent d’améliorer les performances des sources. Néanmoins les limites de ces techniques sont déjà perceptibles. Les besoins dans les domaines des sources pour l’optronique, l’aéronautique et le spatial réclament des solutions innovantes dans lesquelles la conception conventionnelle des sources doit être remise en cause. Ces nouvelles solutions doivent permettre un contrôle précis de la phase. Pour s’affranchir de composants adaptatifs qui nécessitent un pilotage externe, il y a un grand intérêt à concevoir de nouveaux types de sources laser exploitant des effets non-linéaires pour corriger de façon dynamique les aberrations de phase du milieu laser ou de convertir un faisceau multimode en un faisceau monomode limité par diffraction. Dans ce deuxième cas, on réalise une fonction de nettoyage de faisceau autrement appelée « beam clean-up ». La diffusion Brillouin stimulée exploitée dans une fibre à gradient d’indice est un exemple d’effets non-linéaires permettant de réaliser cette fonction [Lombard 2006, Steinhausser 2007]. Le mélange à deux ondes dans un cristal photoréfractif le permet aussi via un hologramme d’indice déphasé par rapport à la figure d’interférence [Lombard 2006].

Le mélange d’onde dans les absorbants saturables ou les milieux amplificateurs saturables a aussi été mis en oeuvre [Ian Mc Michael 1994, Brignon 1996, Soan 1992, Sillard 1998]. Ces derniers sont particulièrement intéressants en raison d’un effet d’amplification subi par toutes les ondes interagissant dans le milieu à gain contrairement aux absorbants saturables. Le milieu laser lui-même est alors utilisé en tant que milieu non linéaire. Cela permet d’envisager des cavités dites « auto-organisées », dans lesquelles le faisceau laser imprime lui-même un miroir dynamique dans un milieu non-linéaire. Ce miroir non-linéaire est par essence adapté à la phase de l’onde qui oscille et constitue un hologramme permettant une correction automatique des aberrations de la cavité par conjugaison de phase et un contrôle spectral de l’émission laser.

Le mélange d’onde dans les milieux lasers présente de nombreux avantages. Le milieu non-linéaire étant identique à celui utilisé pour la génération et l’amplification des faisceaux, le matériau possède automatiquement toutes les caractéristiques spectrales requises. Tous les matériaux lasers peuvent être a priori utilisés comme milieux non-linéaires. Théoriquement, ce mécanisme peut fonctionner quel que soit le régime temporel (régime continu ou impulsionnel). On dispose finalement d’un grand choix de matériaux lasers solides, compacts, fiables, faciles à manipuler et de grande durée de vie. Ces mêmes matériaux peuvent être utilisés pour réaliser la mise en phase d’une série de lasers à fibre. Le milieu non-linéaire n’est alors plus intégré à l’oscillateur et ce sont N sources laser monomodes qui sont mélangées au sein du milieu laser pour ne former plus qu’un seul faisceau laser monomode. On parle alors de combinaison de faisceaux.

Variation d’indice de réfraction dans les matériaux dopés Terres-rares

Les faisceaux qui interférent dans le milieu laser forment un hologramme de population qui est à la fois un hologramme de gain et un hologramme d’indice [Powell 1989]. Ce dernier est à tort souvent négligé. A la résonance de gain, un réseau d’indice subsiste en raison de l’existence de bandes UV intenses [Margerie 2006, Moncorgé 2008]. Il est important de mesurer cet effet d’une part d’un point de vue fondamental pour comprendre l’origine des variations d’indice et d’autre part pour prédire le résultat du mélange d’ondes dans le milieu à gain.

Nous avons donc mis en place une technique de mesure de variations d’indice permettant de s’affranchir de la contribution d’origine thermique restant inhérente à la mesure. Nous avons alors mesuré la contribution d’indice d’origine électronique dans les principaux cristaux laser dopés Nd3+ et Yb3+.

DISTINCTION ENTRE DIFFERENTS TYPES DE VARIATIONS D’INDICE (RESONANT ET NON-RESONANT) ET FACTEUR DE HENRY

VARIATION D’INDICE D’ORIGINE THERMIQUE

Lorsque des ions lasers sont portés dans l’état excité, des relaxations non radiatives ont lieu ce qui émet de la chaleur.

FACTEUR DE HENRY

En raison de la causalité de la réponse diélectrique à l’excitation électrique, la valeur de la partie réelle (respectivement imaginaire) est fonction du spectre entier de la partie imaginaire (respectivement réelle) de la variation de susceptibilité diélectrique. C’est la raison pour laquelle les propriétés d’émission laser ne suffisent pas à elles seules pour rendre compte des variations d’indice observées à la résonance de gain laser contrairement à ce qui est pourtant généralement admis. Les hologrammes de population générés dans un matériau laser placé en inversion de population sont à la fois des hologrammes de gain et d’indice d’origine électronique. Pour quantifier la contribution de la partie réelle de la variation de susceptibilité diélectrique, Δχ’, par rapport à celle de la partie imaginaire, Δχ’’, le paramètre β=Δχ’/Δχ’’ a été introduit [Antipov 2003]. Ce rapport quantifie la contribution relative de la variation d’indice électronique par rapport à la contribution de gain des ions actifs dans un matériau laser placé en inversion de population. Ce paramètre β est connu dans les milieux semiconducteurs comme étant le facteur de Henry [Henry 1982]. Il est alors noté α. La durée de vie du niveau métastable laser dans les matériaux lasers dopés Nd3+ et Yb3+ est prédominante devant celle des autres niveaux d’énergie. Par ailleurs, avec un pompage par diode laser l’absorption des photons de pompe par les ions dans l’état excité est négligeable. Par conséquent seul le niveau métastable laser est considéré comme étant peuplé.

ETAT DE L’ART SUR LES IONS DE TERRES RARES ET LES IONS DE TRANSITION DU GROUPE DU FER ET TECHNIQUES UTILISEES

Les premières mesures de variation d’indice de population ont été effectuées par Baldwin en 1967 [Baldwin 1967] en montrant que les variations d’indice d’origine thermique n’expliquaient pas à elles seules les résultats expérimentaux. Par la suite, une série de mesures de variations d’indice dans des matériaux laser par mélange à quatre ondes en régime continu a été menée [Powell 1989, Powell 1990]. Cette technique consiste à utiliser deux ondes de pompe pour inscrire un réseau de population et une 3ème onde comme faisceau sonde. Le signal diffracté permet alors d’obtenir l’efficacité de diffraction du réseau de population qui est reliée à la variation de polarisabilité des ions entre l’état fondamental et l’état excité. Le signal dû à la présence d’un réseau thermique est considéré comme étant négligeable compte-tenu des effets de diffusion de la chaleur sur une distance de l’ordre du pas de l’interfrange.

Ces travaux ont permis de classer et de quantifier les changements de polarisabilité des ions actifs suivant leur nature et celles des réseaux hôtes . Les ions de terres rares tels que l’ion Nd3+ conduisent à des variations de polarisabilité plus faibles que les ions de transition du groupe du fer tel que l’ion Cr3+. Par ailleurs, les ions Terres Rares tels que l’ion Nd3+ conduisent à des variations de polarisabilité plus faibles dans les fluorures que dans les oxydes.

Ces premiers résultats ont été repris par la suite pour les confronter aux résultats donnés par des techniques telles que la technique « Z-scan ». Cette méthode consiste à induire une lentille de population dans un matériau laser et à mesurer l’effet de la translation de celui-ci sur la transmission d’une onde à travers un diaphragme. Cette technique, simple à mettre en œuvre, permet de mesurer des variations d’indice en résonance avec des raies d’absorption [Catunda 2001, Catunda 2007]. Elle présente également l’avantage de donner le signe de la variation d’indice. En revanche, elle nécessite de s’affranchir des effets de lentille thermique qui ne sont pas toujours faciles à modéliser.

Des techniques de mesure en régime transitoire ont alors été imaginées de manière à discriminer les effets thermiques des effets électroniques par l’étude de la dynamique de retour à l’équilibre. Une mesure interférométrique a été ainsi utilisée de manière à mesurer le déphasage et donc la variation d’indice induite dans l’un des bras de l’interféromètre par un pompage impulsionnel [Antipov 1998]. Elle a été effectuée dans le Nd3+:YAG, le pompage optique étant assuré par une diode laser à fonctionnement quasi-continu (impulsion de 200 µs à 808 nm) et la sonde par un laser He-Ne à ∼ 633 nm.

Antipov et al. ont alors entrepris une expérience de mélange à deux ondes dans un amplificateur Nd:YAG pompé par flash. Ils ont alors constaté en régime transitoire que le faisceau sonde à été plus amplifié en présence du faisceau pompe que ce qu’il aurait été en son absence. Ce gain a été maximisé pour une impulsion pompe de 30 µs en faisant varier le décalage en fréquence Ω d’un faisceau par rapport à l’autre à la résonance de gain mais il serait intéressant de faire varier les paramètres expérimentaux (δ, g0L, durée de l’interaction, intensité des faisceaux) de manière à dégager les conditions pour lesquelles le mélange est optimisé.

Un pompage flash ne permet cependant pas de connaître avec précision les populations et donc les variations de polarisabilité des niveaux supérieurs au niveau émetteur laser. Par une excitation indirecte à 266 nm, on peut considérer que seul le niveau 2 F(2)5/2 est peuplé car sa durée de vie est de 3 µs tandis qu’elles sont inférieures à 0,3 µs pour les autres niveaux intermédiaires.

[Margerie 2006]. On montre alors qu’il y a un facteur deux entre les mesures et les simulations théoriques. On peut penser qu’une contribution supplémentaire doit être ajoutée. En effet, il existe des bandes de transfert de charge qui peuvent expliquer ces écarts entre théorie et expérience. Avec l’Yb3+ par exemple cette contribution est importante. Elle suffirait à elle seule à rendre compte de la variation de polarisabilité mesurée par des techniques de diffractométrie transitoire et d’interférométrie transitoire dans le Yb:YAG [Moncorgé 2008, Antipov 2006].

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Table des matières

Introduction
Contexte et problématique
Organisation du mémoire
1 Variations d’indice de réfraction dans les matériaux dopés terres-rares
1.1 Introduction
1.2 Distinction entre différents types de variations d’indice (résonants et non-résonants) et facteur de Henry
1.2.1 Variation d’indice d’origine thermique
1.2.2 Facteur de Henry
1.2.3 Contribution électronique résonante et contribution électronique nonrésonante
1.3 Etat de l’art sur les ions de terres rares et les ions de transition du groupe du fer et techniques utilisées
1.4 Méthodes de mesures utilisées : interférométrie et diffractométrie en régime transitoire
1.4.1 Technique interférométrique en régime transitoire
1.4.2 Technique de diffractométrie en régime transitoire
1.4.3 Discrimination entre les effets thermiques et les effets électroniques
1.4.3.1 Cas d’un Dirac de chaleur
1.4.3.2 Cas d’une source additionnelle de chaleur en exp(-t/télec)
1.4.3.3 Bilan
1.5 Exposé et analyse des résultats dans les matériaux dopés Nd3+
1.5.1 Caractérisation détaillée des variations d’indice observées dans Nd:YVO4, Nd:GdVO4 et Nd:KGW
1.5.2 Exposé et analyse des résultats dans les autres matériaux dopés Nd3+
1.6 Exposé et analyse des résultats dans les matériaux dopés Yb3+
1.7 Origine des variations d’indice observées (confrontation des résultats avec les mesures d’absorption dans l’état excité des ions)
1.7.1 Bandes interconfigurationnelles et bandes de transfert de charge dans le cas des ions Nd3+ et Yb3+
1.7.1.1 Bandes interconfigurationnelles
1.7.1.2 Bandes de transfert de charge
1.7.2 Spectroscopie dans l’état excité des ions Nd3+ et Yb3+
1.7.2.1 Technique de mesure
1.7.2.2 Cas de l’ion Nd3+ [Margerie 2006]
1.7.2.3 Cas de l’ion Yb3+ [Moncorgé 2008]
1.7.3 Modèles utilisés et variations de polarisabilités associées
1.8 Conclusion
2 Mélange à deux ondes dans les milieux lasers solides dopés Nd3+ ou Yb3+ pompés par diodes en présence de reseaux d’indice électronique
2.1 Introduction
2.2 Théorie du mélange à deux ondes dans les milieux à gain en présence de reseaux d’indice de population
2.2.1 Analyse théorique
2.2.2 Etude des paramètres 0γ et 1γ
2.2.2.1 Cas d’un réseau d’illumination immobile
2.2.2.2 Cas d’un réseau d’illumination mobile
2.3 Influence des paramètres clés
2.4 Determination théorique du taux de transfert à deux ondes dans les matériaux dopés Nd3+ et Yb3+
2.5 Réalisation expérimentale dans une fibre cristalline Nd:YAG
2.5.1 Présentation des fibres cristallines
2.5.2 Réalisation et caractérisation des amplificateurs à fibres cristallines
2.5.3 Expérience de mélange à deux ondes
2.6 Application à la vibrométrie auto-adaptative
2.6.1 Introduction
2.6.2 Théorie de l’interférométrie auto-adaptative en présence de réseaux d’indice de population
2.6.3 Réalisation expérimentale dans une fibre cristalline Nd:YAG
2.7 Conclusion
3 Cavité laser auto-adaptative
3.1 Introduction
3.2 Configuration de la tête laser
3.2.1 Présentation de la géométrie retenue
3.2.2 Description du module de pompe réalisé
3.2.3 Caractéristiques des diodes lasers de pompe
3.3 Mesures du gain g0L
3.3.1 Description des essais réalisés
3.3.1 Gain au centre du barreau
3.3.2 Cartographie du gain
3.3.3 Gain faible signal moyen
3.3.4 Comportement temporel
3.4 Mesure des effets thermiques
3.4.1 Mesure de la lentille thermique et des aberrations d’ordres supérieurs
3.4.1.1 Description des essais réalisés
3.4.1.2 Mesure de la focale de la lentille thermique
3.4.1.3 Mesure des aberrations
3.4.2 Mesure de la dépolarisation
3.4.2.1 Description des essais réalisés
3.4.2.2 Mesure de la dépolarisation
3.4.3 Conclusion
3.5 Dimensionnement du laser auto-adaptatif utilisant la tête réalisee
3.5.1 Dimensionnement de la cavité
3.5.2 Choix des têtes laser
3.5.3 Choix des lentilles Ld et Lc
3.6 Performances du laser auto-adaptatif utilisant la tête laser à fort gain
3.6.1 Caractéristiques énergétique
3.6.2 Caractéristiques spatiales
3.6.3 Caractéristiques temporelles
3.7 Conclusion et perspectives
Conclusion générale

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