VARIATION DE QUALITE DE VIE ENTRE J0 ET M6 

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Critère de jugement principal

Le critère principal de jugement était la qualité de vie avant l’entrée en réanimation et six mois plus tard, mesurée à l’aide du questionnaire EuroQol 5D 3L(9). Ce questionnaire est validé pour évaluer la qualité de vie chez les personnes âgées(10) et les patients de réanimation(11)et explore 5dimensions de la qualité de vie (mobilité, autonomie, activités de la vie courante, douleurs/gênes, anxiété/dépression). Pour chacune de cescatégories,il existe trois niveaux : « aucune difficulté », « difficultés modérées » et « difficultés importantes », respectivement dénommées classes 1, 2 et 3. L’EuroQol 5Dcomporte aussi une échelle visuelle analogique (EVA) d’autoévaluation de l’état de santé,s’étendant de 0 à 100, avec 0 la plus basse et 100 la meilleure note.
Pour la qualité de vie à l’inclusion, le questionnaire était rempli par 2 personnes : le coordonnateur et celui réalisantl’étude. Le questionnaire était rempli le plus précocement possible après interrogatoire du malade, si possible, à défaut auprès de la personne de confiance ou de la famille la plus proche.
L’évaluation à 6 moisa été réaliséepar un entretien téléphonique, uniquement par la personne réalisant la recherche. De la même manière,le questionnaire était complétéauprès du patient ou auprès de sa famille connue la plus proche à défaut. Pour analyser les possibles variations de qualité de vie entre J0 et M6, les classes 2 et 3 ont été regroupées(problèmes modérés et importants) et comparées à la classe 1 (aucun problème), pour chaque dimension de la première partie de l’EuroQol. Ce regroupement de classes est validé par le manuel d’utilisation de l’EuroQol.
Les EVA de J0 et M6étaient uniquement rempliespar interrogatoire du malade. En cas d’impossibilité elles étaient laissées non renseignées.

Critère de jugement secondaire

La mortalité était recensée en tant que critère de jugementsecondaire pendant le séjour en réanimation ainsi qu’aux premier (M1) et sixième mois (M6).
La mortalité a été recueillie à l’aide des données enregistrées dans les services hospitaliers du CHU de Martinique. Pour les patients sortis vivants de réanimation, le statut vital était renseigné lors l’appel téléphonique du 6ème mois.

Données recueillies

Un formulaire préétabli a permis de recueillir les caractéristiques démographiques des patients étudiés, la date, le diagnostic d’entrée en réanimation et le score IGS2 des 24 premières heures. Nous avons aussi recensé la survenue de défaillances d’organes. La défaillance hémodynamique était définie comme l’utilisation de toute catécholamine. La défaillancerespiratoire était définiecomme le recours à la ventilation non invasive (VNI) ou un rapport un PaO2/FiO2<200 mm Hg si ventilation invasive.
La défaillancerénale était définie comme une diurèse horaire inférieure à 0,3ml/kg/h pendant 6h, et/ou une créatininémie basale multipliée par trois ou le recours à une épuration extra- rénale (conventionnelle ou continue).
La défaillance neurologique était définie comme un déficit neurologique focalisé nouveau et/ou un Glasgow Coma Scale strictement inférieur à 8.
La défaillance hématologique était définiepar une hémoglobinémieinférieure à 7g/dl,une thrombopénie inférieure à 50G/l, une leucopénie inférieure à 4000/mm3 ou une transfusion de produits sanguins labiles (PSL).
La défaillance hépatique était définie par une cytolyse supérieure à 10 fois la normale associée à un tempsde prothrombine (TP) inférieur à 50% du témoin.
La défaillance coagulatoire était définie par l’association d’un TP inférieur à 50% de la normale, et d’un temps de céphaline activée (TCA) supérieur à 1,5 fois le témoin. Il était aussi noté le recours à une décision de limitation ou arrêt des thérapeutiques actives (Loi Léonetti 2005) pendant le séjour en réanimation, la date de sortie ou de décès en réanimation.

Gestion des données

Le recueil des données brutes était réalisésous format papier, sur formulaire pré-rempli, par les 2 personnes réalisant la recherche. Il existait deux formulaires.
Le premier était la fiche de recueil d’identité, qui comportait,en plus du numéro d’inclusion, l’adresse postale valide, les numéros de téléphones, les coordonnées du représentant et du médecin traitant, qui permettait de contacter le patient ou son représentant à 6 mois. Le deuxième était la fiche de recueil médicalanonymisée parle numéro d’inclusion, qui comportait en plus des informations médicales les données de l’EuroQol 5D. Les formulaires étaient conservés sous format papier, sous la responsabilité de l’investigateur principal, dans le service de réanimation du CHU de Martinique. Ils ont été détruits à la fin de la recherche. Seul le numéro d’inclusion dans l’étude était enregistré pour identifier chaque patient dans le tableau récapitulatif des données.
Les données médicales anonymisées ont été transférées vers un fichier tableur de données type Microsoft® Excel 2011, regroupant les informations de l’ensemble des patients de l’étude. Les données informatiques ne restaient accessibles qu’aux personnes dirigeant la recherche et réalisant la recherche, stockées sur un ordinateur personnel protégé par mot de passe, sur disque chiffré. Chaque donnée recueillie étaitvérifiée par le coordonnateur et la personne réalisantla recherche.
Des sauvegardes quotidiennes ont été réalisées à l’aide d’un site de stockage en ligne protégé par mot de passe.
Les donnéesont été enregistrées dans le respect de la loi n°78-17 du 6 janvier 1978 relative à l’informatique, aux fichiers et aux libertés, modifiée par la loi 2004-801 du 6 août 2004.

Comité de protection des personnes

L’étude « DEVENIR DES PERSONNES AGEES APRES UN SEJOUR EN REANIMATION : MORTALITE ET QUALITE DE VIE A 6 MOIS (ETUDE DEPARQ) » a étéprésentée au comité de protection des personnes sud ouest et outre mer III le 28 octobre 2013. Celui-ci adonnéun avis favorable le 18/12/2013 avec le dossier CPP n° 2013/92 et avec le numéro EudraCT 2013-004568-68.
Cette étude a étéenregistrée comme étude de soins courants.
Le promoteur de l’étude était le CHU de la Martinique, Hôpital Pierre Zobda-Quitman, CS 90632, 97261 Fort-de-France cedex. Le coordonnateur était le docteur Cyrille CHABARTIER, praticien hospitalier dans le service de réanimation.

Variation de qualité de vie entre J0 et M6

Pour faciliter les comparaison de qualité de vie, nous avons pris parti d’associer la classe 2 et 3 de l’EuroQol (défini comme problèmes) comme précédemment expliqué dans « matériels et méthodes ».
La répartition des patients déclarant au moins un problème fonctionnel à J0 et M6est reportée dans la figure 4.
La mobilité à 6 mois était significativement altérée avec 63,4% des patients classes 2 et 3 contre 37,8% à J0 (p=0,0056).
L’autonomie à 6 mois était également plus mauvaiseavec 56,1% de patients en classes 2 et 3 à M6 contre 17,4% à J0 (p<0,001).
Nous avons réalisé la même observation pour les activités courantes avec 63,4% des patients en classes 2 et 3 à M6 contre 36,7% à J0 (p=0,0039).
Aucune différence significative n’était mise en évidence entre J0 et M6 pour les dimensions anxiété/dépression et douleurs/gênes.

Mortalité

La mortalité observéeen réanimation était de 37,4% et de 47,5% à 1 mois. La mortalité à 6 mois s’élevait à58,6%.
Il n’y avait pas de différence de mortalité significative, durant l’hospitalisation, à M1 et M6 selon la tranche d’kge (65-74 ans vs 75 ans et plus) et le sexe.
On notaittoutefois qu’il existait une tendance à la surmortalité, tout sexe confondu, après M1 chez les 75 ans et plus (27,3% contre 16,7% ; p=0,0878).
La mortalité hospitalière prédite par le score IGS2 moyen de 71 était de 85% pour une mortalité observée en réanimation de 37,4%. Le score IGS2 était significativement plus élevéchez les patients décédés(78contre 66avec p=0,0014).
La valeur seuil du score IGS2, pour laquelle tous les malades décédaient, étaitde106.Deux malades seulement rentraient dans cettecatégorie avec des scores IGS2 à 106 et 114.

Discussion

Les pays industrialisés font faceà un vieillissement croissant de la population. De ce fait, les services de réanimation sont de plus en plus confrontés à l’hospitalisation de patients kgés, entrainant desproblèmes éthiques, économiques et médicaux (12).
Les données concernant l’impact d’une hospitalisation chez les plus de 65 ans en réanimation restent rares. En effet, la littérature fournit des renseignements quant à la qualité de vie avant (13) ou après (8)(14)(15)(16)(17)la réanimation, mais rares sont les études(18)(19)s’intéressant à la variation de la qualité de vie imputable à l’hospitalisation en réanimation chez les personnes âgées. Nous avons donc réalisé cette étude dans le but de mieux connaître les changements induits sur la qualité de vie de nos patients âgés hospitalisés en réanimation.
La qualité de vie mesurée à J0 chez nos patients se trouve être assez semblable à celle relevée dans unepopulation hollandaise (20), qui retrouvait des problèmes pour la mobilitéchez 26 % des 60-69 ans et chez 43% à 60 % des plus de 70 ans. En comparaison, nos résultat ont révélé des problèmes chez 40,7% des 65-74 ans pour la mobilité et 34,1% de problèmes concernant les 75 ans et plus. Seule la dimension anxiété/dépression semble différente puisque seulement 11,8% de la population âgée hollandaise se décrit en classe 2 ou 3 de l’EuroQol contre 50% dans notre étude.
La thématique de notre étude est singulière dans le sens que seulsde très rares essaissont recensés dans la littérature.
A notre connaissance, aucune étude ne s’intéresse à la qualité de vie mesuréepar l’EuroQol chez des patients âgés, issus de réanimation polyvalente à 6 mois. Une étude italienne (17)retrouve des résultats sur la qualité de vie relativement similairesaux nôtres. Mais le recrutement de cette étude était différent puisque seulement 18% des malades (n=21) hospitalisés dans cette réanimation l’ont été pour raison médicale. L’évaluation se faisait par ailleurs à 1 an.
Nous avons trouvé de nombreuses similitudes avecune étude genevoise (21) s’intéressant aux patients de plus de 70 ans, 2 ans après une hospitalisation en réanimation pourchirurgie abdominale. En effet, 56 % des patients présentaient des problèmes de mobilité, 30 % d’autonomie, 68 % d’activités courantes, 50% une dépression ou des symptômes d’anxiété et 72% des douleurs ou des gênes.
La principale force de notre étude est d’avoircomparé de manière prospective la qualité de vie avant l’hospitalisation et à 6 mois, dans une population de 65ans ou plus. Nous avons choisi le questionnaire EuroQol 5D 3L car il a été utilisé et validé dans de nombreuses études de qualité de vie en réanimation (14)(15)(19) et semble plus approprié que l’EuroQol 6D qui explore la cognition(14). De plus, ce questionnaire permet une certaine lisibilité en comparaison des autres questionnaires utilisés telsque : The Short Form Health Survey 36 (SF36 = RAND36), le Nottingham Health Profile (NHP),l’échelle d’autonomie de Katzconnu aussi par le nom d’Activities of Daily Living (ADL),ou l’Instrumental Activities of Daily Living (IADL). En effet ces questionnaires donnent une note globale dont la perception est finalement assez abstraite.
Notre étude a montréune diminution fonctionnelledans les domaines physiques de l’EuroQoL que sont la mobilité, l’autonomie et les activités courantes. Les deux autresdimensions de l’EuroQol (douleurs/gênes et anxiété/dépression) demeuraient inchangées. Nos résultatsont été retrouvés dans l’étude de Kaarlolaet al.(15) et les revues de littérature(8). Une étude comparant les patients âgés à la population générale, après hospitalisation en réanimation, a montré elle aussi, queles domaines les plus touchésétaient les activités courantes(14) excepté chez les plus de 75 ans. Nous avons montré que nos patients n’ont pas eu de plaintes supplémentaires pour les dimensions psychiques de l’EuroQol (douleurs/gênes et anxiété/dépression).
Ceci pourrait être expliqué par une diminution des attentes sur leur statut fonctionnel, et d’une sensation debonne qualité de vie malgré des handicaps devenus importants (8)(22). Les analyses en sous groupesont montré des différences selon le sexe et l’kge. Nous avons mis en évidence que la population féminine n’a pas présenté de variation significative sur l’EuroQol excepté pour l’autonomie. Nous n’avons pas retrouvé de résultat comparable dans la littérature, seuls quelques articles relatent une mortalité accrue chez les hommes âgés en comparaison aux femmes(23).
La qualité de vie des survivants àM6 n’était pas différente decelle à J0.Plusieurs éléments pourraient expliquer ce résultat. Le premier est que l’EuroQol n’est pas une bonne échelle de mesure pour discriminer les qualités de vie dites faibles (24). La deuxième raison est que la qualité de vie à 6 mois est proche de celle avant l’hospitalisation. Ceci a déjà été noté (25)(26)(27), mais la plupart du temps pour des intervalles plus importants entre l’hospitalisation et la prise de nouvelles (25).La dernière raison, la plus probable, est que nous n’avons pas pu mettre en avant une différence significative d’altération des dimensions fonctionnelles par manque de puissance. Nous n’avons pas réalisé d’analyses en sous groupes chez ces seuls survivants étant donnél’effectif trop faible.
Nous avons choisi une période relativement courte de suivi des patients. Cela permettait une évaluation rapide des données. Cet intervalle de 6 mois a par ailleurs déjà été utilisé dans la littérature(19). Nous avons obtenu un taux de réponse à 6 mois de 100%,bien supérieur à ceux communément retrouvés dans la littérature. Ce taux est atteint quelques fois (28)(29) dans des études de qualité de vie post réanimation pour patients sans limites d’kge,mais exceptionnellement chez des personnes âgées(30)(31). Les études similaires à la nôtre ont des taux de suivi qui restent globalement proche de 80% (8).
Le principal biais de notre étude vient du mode de recueil de la qualité de vie.Les données de qualité de vie à 6 mois ont été obtenues après entretien téléphonique. Une consultation post réanimation aurait semblée plus appropriée et précise pour cette évaluation. Elle semble toutefois difficilement réalisable. Par ailleurs, l’entretien téléphonique obtient un bien meilleur taux de réponse(8)(25). Nous avons aussi réalisé la prise de nouvelles auprès de proches, sous estimant ainsifaiblement la qualité de vie des patients(32), surtout celle à J0 par l’effet dépréciatif de l’hospitalisation soudaine en réanimation. Certains auteurs considèrent même que seuls les patients eux-mêmes doivent être interrogés(31)(33). Mais ceux-ciont utilisé des questionnaires avec une part de subjectivité comme le RAND 36(31).
Comme dans l’étude de Merlaniet al.(21), nous ne retrouvons pas de différence significativequant àl’échelle visuelle analogique de l’EuroQol. Ces résultats sont à pondérer quant aufaibletauxde réponse. En effet,nous n’avons eu seulement que 21 patients répondeurs sur les 41 survivants. Il existait un problème majeur de compréhension avec une notation qui est normalement faite à l’écrit et non à l’oral. Ce biais de recueil n’a pas été précédemment décrit.
Dans l’ensemble il existait des difficultés de compréhension pour l’ensemble du questionnaire,dues à un obstacle linguistique, les personnes âgées martiniquaises parlant créole et maitrisant parfois mal le français. Cette barrière de langue nous a fait recueillir peut être plus fréquemment la qualité de vie auprès des proches que si il n’y avait pas eu cet obstacle. Enfin, nous n’avons pas précisé si le recueil de l’EuroQol de M6 se faisait auprès du même proche que pour J0.

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Table des matières

REMERCIEMENTS 
ABREVIATIONS
INTRODUCTION
MATERIEL ET METHODES
CONCEPTION
DONNEES ETUDIEES
CRITERE DE JUGEMENT PRINCIPAL
CRITERE DE JUGEMENT SECONDAIRE
DONNEES RECUEILLIES
GESTION DES DONNEES
ANALYSE STATISTIQUE
COMITE DE PROTECTION DES PERSONNES
RESULTATS 
EXCLUSIONS
PATIENTS INCLUS
QUALITE DE VIE A J0
QUALITE DE VIE A M6
VARIATION DE QUALITE DE VIE ENTRE J0 ET M6
MORTALITE
DISCUSSION 
CONCLUSION 
REFERENCES BIBLIOGRAPHIQUES 

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