Le développement d’un médicament est un procédé long, impliquant la découverte de la molécule active, les essais de laboratoires, les études sur l’animal, les essais cliniques et les enregistrements réglementaires. Afin d’améliorer l’efficacité et la sécurité du médicament après sa mise sur le marché, les agences réglementaires exigent que le médicament soit testé sur son identité, son dosage, sa qualité, sa pureté et sa stabilité avant libération. Les fabricants de médicaments sont donc dans l’obligation de démontrer qu’ils contrôlent les aspects critiques de leurs opérations spécifiques. Pour cette raison, la validation pharmaceutique et les contrôles de procédés sont importants [1]. Cependant la validation n’est pas seulement un exercice réglementaire, elle représente également un des principaux outils de l’assurance qualité, permettant de construire la qualité du produit et d’en conserver les standards, depuis sa conception jusqu’à la fin de sa commercialisation. C’est aussi une démarche de progrès qui, par une meilleure connaissance et une meilleure maîtrise des procédés, permet une diminution des coûts de production et de contrôles. La validation est l’expression complète d’une séquence d’activités ayant pour but de démontrer et documenter qu’un médicament peut être fabriqué de façon fiable par des procédés déterminés, avec une qualité appropriée. Les contrôles en cours de procédé et l’analyse à libération seuls ne sont pas suffisants pour assurer cette qualité. La validation est la preuve qu’un procédé fonctionne correctement : elle doit être effectuée en utilisant des principes scientifiques, afin d’établir la capabilité du procédé et de confirmer l’acceptabilité du médicament. Un intermédiaire de production existe dès lors que la forme chimique ou physique du produit change entre des étapes consécutives de production. Après chaque étape de production, l’intermédiaire de production peut être stocké : stockage exceptionnel (suite à un problème technique par exemple) ou faisant partie intégrante du processus de fabrication (stockage de produits vracs avant conditionnement) [3]. La durée du stockage peut influencer l’efficacité et la pureté du principe actif ainsi que l’aspect ou les propriétés physiques et chimiques du produit. Etant donné que la durée de stockage des intermédiaires peut affecter la qualité et la sécurité du produit, elle doit être validée. C’est dans ce contexte que s’inscrit notre étude qui a pour objectif de valider la durée de stockage des comprimés nus / pelliculés et du mélange granulé de Flagyl 500 mg et Gardénal 100 mg.
Contexte réglementaire de la validation
Pourquoi valider ?
L’industrie pharmaceutique utilise des matériels coûteux, des installations et des équipements sophistiqués et du personnel qualifié. L’utilisation efficace de ces ressources est nécessaire pour le succès continu de l’industrie : il ne serait pas possible d’utiliser les équipements sans savoir s’ils produiront le médicament ayant les qualités requises.
Historique de la validation
Avant le début des années 1960, la validation n’était pas une exigence réglementaire, les compagnies pharmaceutiques n’avaient pas l’obligation de prouver la sécurité de leurs médicaments. Avant 1962, la seule voie pour les autorités pour prouver qu’un procédé n’avait pas fait ce qu’il devait faire était de prendre des échantillons du produit final, les analyser et montrer des écarts aux spécifications. En 1962, aux Etats-Unis l’amendement Kefauver-Harris [1] (respectivement sénateur américain et procureur) est approuvé suite aux malformations de nouveau-nés en Europe, liées à la prise de thalidomide pendant la grossesse de leur mère (loi signée par le président John F. Kennedy le 10 octobre 1962) [2]. Les habitudes ont commencé à changer à la fin des années 1960 et au début des années 1970 où de nouveaux événements, tels que des comprimés de teneur non uniforme, fortement dosés et des procédures de stérilisation insuffisantes ont eu des répercutions sérieuses sur les patients [3]. L’enquête a permis de mettre en évidence des hétérogénéités de teneur résultant de procédés de fabrication mal contrôlés. Beaucoup de discours indiquant le besoin d’une validation de procédés ont été faits par les autorités et l’expression « procédé de fabrication validé » a finalement été définie dans le programme de conformité d’inspections de processus de médicament en 1978 [4]. En Mai 1987, une directive sur les principes généraux de validation de procédés était écrite pour les industries pharmaceutiques et vétérinaires et depuis, des inspections complètes de procédés sont régulièrement exécutées par la FDA [5]. Cette directive est rapidement devenue une source importante d’informations pour les fabricants pharmaceutiques, intéressés par l’établissement d’un programme de validation de procédés. Au même moment, la validation informatique, ou la validation de procédés informatisés, sont devenues également des sujets importants. Récemment, cette directive a été mise à jour et donne la définition la plus précise du concept de validation de procédés [6]. En 1989, la première édition du Guide européen GMP a remplacé toutes les directives nationales dans l’Union Européenne. Ce guide de la Commission Européenne, en accord avec les directives de l’EMEA, a servi de modèle pour tous les pays européens. Comme aux Etats-Unis, la validation des procédés stériles et aseptiques fut acceptée et mise en pratique dès que les premières directives réglementaires l’ont exigées [7]. Pendant les années 1980, les inspecteurs rapportaient souvent que les procédés n’avaient pas été validés ou avaient été insuffisamment validés. Les échecs de fabrication des lots étaient souvent associés à des procédés de fabrication non validés. La FDA a publié un certain nombre de lettres réglementaires aux fabricants concernés citant le manque de validation adéquate du procédé comme une déviation réglementaire vis-à-vis des cGMP, engendrant la non conformité du médicament. En 1997, S. Roman [8] a trouvé la validation comme étant l’un des outils principaux de l’assurance qualité, aboutissant à des coûts de production et des contrôles réduits présenta des calculs montrant que le coût de validation comparé aux coûts totaux de l’usine était approximativement de 1,2 % et de 7,8% comparé aux coûts totaux du département qualité de l’AFSSAPS a évalué la signification des directives et a déclaré qu’elles devaient servir principalement de structure pour la validation[9] . Elles devraient donner des conseils pour une pratique documentaire raisonnable mais elles devraient donner seulement des instructions détaillées dans des cas particulièrement sensibles, comme la prévention des contaminations croisées [10]. La validation de procédés est devenue une partie de gestion stratégique de qualité et d’amélioration de performances ; tous ces avantages (pour les patients aussi bien que les fabricants) ont été reconnus et dorénavant, le défi est de trouver le juste niveau de validation rentable, sans sacrifier la sécurité des patients.
La validation de procédés pharmaceutiques s’est grandement développée pendant ces dernières années. Pour la plupart des industries, elle est, à l’origine, apparue comme une exigence réglementaire et, de là, était souvent considérée comme un fardeau. Malgré les critiques initiales, la validation de procédés de fabrication est maintenant bien acceptée et considérée comme une partie de la gestion de qualité. L’avenir de la validation de procédé est d’un grand intérêt, particulièrement avec l’expansion mondiale de la fabrication pharmaceutique et le désir de normes et d’exigences internationales harmonisées. De nombreux fabricants travaillent sur des stratégies pour réduire le coût de la validation et considèrent la validation dès la conception même du produit et son développement. De nouvelles technologies en développement pour l’analyse à 100 % des médicaments et d’autres innovations dans l’industrie pharmaceutique peuvent aussi avoir un effet significatif sur les concepts de validation de procédés [11].
Les bases réglementaires en vigueur
Compte tenu de l’importance de la validation en termes de qualité du médicament, les tendances de l’inspection pour le futur s’articulent autour de la formation continue de ses agents, du renforcement de sa collaboration dans l’évaluation des dossiers d’AMM, en particulier lors du changement de site de fabrication, et de sa participation à l’évolution des textes afin que ceux-ci tiennent compte au mieux des réalités du terrain. Un certain nombre de facteurs doivent être respectés pour fournir l’assurance de la qualité d’un médicament, incluant la sélection des matières, la conception du procédé, le contrôle du procédé et les essais en cours de fabrication et à libération. Chaque étape du procédé de fabrication doit être contrôlée pour augmenter la probabilité que le produit fini possède toutes les spécifications de qualité désirées. Pour chaque étape de fabrication, deux types de contrôles peuvent être réalisés : le contrôle des paramètres du procédé de fabrication (par exemple, lors d’une granulation, le suivi continu de la température du produit) et le contrôle du produit après chaque étape (par exemple, la réalisation d’un test d’aptitude à l’écoulement après granulation).
Validation des procédés de fabrication : définitions générales
Validation prospective
C’est une validation effectuée avant la production de routine de produits destinés à la vente ou sur un produit fabriqué selon un procédé modifié, comportant des modifications importantes pouvant se répercuter sur les caractéristiques du produit [12].
Validation rétrospective
Pour des produits plus anciens, la validation prospective n’était pas encore applicable. Par conséquent, ces produits doivent être à présent validés par une validation rétrospective [12]. La validation rétrospective est réalisée pour un médicament déjà commercialisé et est définie comme l’établissement de la preuve documentée qu’un système fait ce qu’il prétend faire, « sur la base des données relatives à la fabrication, aux essais et au contrôle du lot » [12].
Validation concomitante (ou simultanée)
C’est une validation réalisée durant la production de routine de produits destinés à la vente qui n’est utilisée qu’à titre exceptionnel et qui doit être justifiée [12].
Maîtrise des changements, revue qualité périodique et revalidation
Maîtrise des changements
La maîtrise des changements est un système formel par lequel des représentants qualifiés des disciplines concernées examinent les changements proposés ou effectifs, susceptibles de modifier le statut validé des installations, systèmes, équipements ou procédés [13].
Revue qualité périodique
La RQP s’intègre dans le cycle développement / validation / maîtrise des changements. C’est une revue régulière, périodique, concernant tous les médicaments commercialisés par une industrie pharmaceutique. Cette revue doit être menée avec l’objectif de vérifier la répétabilité des procédés existants, la pertinence des spécifications en cours pour les matières premières et les produits finis, de mettre en évidence toute évolution et d’identifier toutes les améliorations pour les produits et les procédés. Elle permet, selon la réglementation en vigueur, de mettre en place des mesures préventives et de détecter les éventuelles variations réglementaires ou qualité à introduire [12].
Revalidation
La revalidation fait suite à la maîtrise des changements et à la revue qualité périodique. La revalidation est divisée en 2 catégories :
❖ revalidation après introduction d’un changement : renouvellement de la validation du procédé en vue de démontrer que les changements introduits dans le procédé ou l’équipement, conformément aux procédures de maîtrise des changements, ne comportent aucun risque pour les caractéristiques du procédé et la qualité du produit [12] ;
❖ revalidation périodique : Renouvellement régulier de la validation suivant une fréquence bien définie.
|
Table des matières
INTRODUCTION
PREMIERE PARTIE : CONTEXTE REGLEMENTAIRE ET DEFINITIONS RELATIVES A LA VALIDATION
CHAPITRE 1 : CONTEXTE REGLEMENTAIRE ET DEFINITIONS RELATIFS A LA VALIDATION
I. CONTEXTE REGLEMENTAIRE DE LA VALIDATION
I.1. Pourquoi valider ?
I.2. Historique de la validation
I.3. Les bases réglementaires en vigueur
II. VALIDATION DES PROCEDES DE FABRICATION : DEFINITIONS GENERALES
II.1. Validation prospective
II.2. Validation rétrospective
II.3. Validation concomitante (ou simultanée)
II.4. Maîtrise des changements, revue qualité périodique et revalidation
III. AUTRES TYPES DE VALIDATION
III.1. Validation de la durée de stockage
III.2. Validation des méthodes analytiques
III.3. Qualification des équipements
III.4. Validation des procédés de nettoyage
III.5. Validation des systèmes informatisés
III.6. Validation des méthodes de prélèvement
III.7. Validation des matières premières
CHAPITRE 2 : GENERALITES SUR L’INDUSTRIE PHARMACEUTIQUE
I. CONTEXT
II. L’INDUSTRIE PHARMACEUTIQUE
II.1. Le médicament
II.2. Les référentiels de l’industrie pharmaceutique
II.2.1. Les référentiels réglementaires
II.2.2. Les référentiels normatifs
II.2.3. Les référentiels professionnels et autres données bibliographiques
II.2.4. Le dossier d’AMM et le CTD
II.2.4.1. Le dossier d’AMM
II.2.4.2. Le CTD
III. LA QUALITE AU SEIN DE L’INDUSTRIE PHARMACEUTIQUE
III.1. Notion de qualité
III.2. L’assurance qualité
III.3. Le contrôle Qualité
III.4. La RQP
III.4.1. Définition de la RQP
III.4.2. Aspect réglementaire des «RQP»
DEUXIEME PARTIE : TRAVAIL EXPERIMENTAL
I. OBJECTIFS
I.1. Objectif général
I.2. Objectifs spécifiques
II. CADRE DE L’ETUDE
II.1. Historique du site de l’étude
II.2. Présentation de Médis Sénégal
III. MATERIEL ET METHODES
III.1. Matériel
III.1.1. Équipements utilisés pour la fabrication
III.1.2. Matériels de laboratoire
III.1.2.1. Laboratoire microbiologique
III.1.2.2. Laboratoire physico-chimique
III.1.3. Médicaments
III.1.3.1. Gardénal 100 mg
III.1.3.2. Flagyl 500 mg
III.2. Méthodes
III.2.1. Description des procédés de fabrication et des contrôles en cours
III.2.2. Contrôles physico chimiques
III.2.2.1. Flagyl 500 mg
III.2.2.1.1. Contrôles physico chimiques du mélange granule de Flagyl 500mg
III.2.2.1.2..Contrôles physico chimiques des comprimés pelliculés du Flagyl 500 mg
III.2.2.2. Gardénal 100 mg
III.2.2.2.2.1. Contrôles physico chimiques du mélange granulé du Gardénal 100 mg
III.2.2.2.2.2. Contrôles physico chimiques des comprimés nus du Gardénal 100 mg
III.2.3. Contrôles microbiologiques
III.2.3.1. Préparation de l’échantillon
III.2.3.2. Dénombrement des germes aérobies totaux (DGAT) et moisissures et les levures totaux (DMLT)
III.2.3.2.1. Ensemencement
III.2.3.2.2. Incubation
III.2.3.2.3. Lecture et Interprétation
III.2.3.3. Recherche d’E. Coli
III.2.3.3.1. Ensemencement
III.2.3.3.2. Lecture et Interprétation
IV. RESULTATS
IV.1. Résultats physico-chimiques
IV.1.1. Flagyl 500 mg
IV.1.1.1….Résultats physico-chimiques du mélange granulé du Flagyl 500 mg
IV.1.1.1.1. Profils granulométriques
IV.1.1.1.2. Résultats des mesures d’humidité résiduelle
IV.1.1.2. Résultats physico-chimiques des comprimés pelliculés du Flagyl 500 mg
IV.1.2. Gardénal 100 mg
IV.1.2.1. Résultats physico-chimiques du mélange granulé de Gardénal 100 mg
IV.1.2.1.1. Profils granulométriques
IV.1.2.1.2. Résultats des mesures d’humidité résiduelle
IV.1.2.2.Résultats physico-chimiques des comprimés nus du Gardénal 100 mg
IV.2. Résultats microbiologiques
IV.2.1. Flagyl 500 mg
IV.2.1.1. Résultats microbiologiques du mélange granulé du Flagyl 500 mg
IV.2.1.2… Résultats microbiologiques des comprimés pelliculés du Flagyl 500 mg
IV.2.2. Gardénal 100 mg
IV.2.2.1. Résultats microbiologiques du mélange granulé du Gardénal 100 mg
IV.2.2.2. Résultats microbiologiques des comprimés nus du Gardénal 100 mg
V. COMMENTAIRES
CONCLUSION
REFERENCES BIBLIOGRAPHIQUES ET WEBOGRAPHIE