Valeur prédictive négative de la Procalcitonine

En médecine de premier recours, une mono- ou oligoarthrite aiguë doit faire évoquer en premier lieu une arthrite septique. Une arthrite microcristalline, une arthrite rhumatismale ou une poussée congestive d’arthrose sont les principaux diagnostics à évoquer ensuite. L’arthrite septique requiert un diagnostic urgent en raison de la mise en jeu du pronostic fonctionnel de l’articulation, voire du pronostic vital du patient . Elle nécessite une prise en charge hospitalière urgente, tandis que les autres arthrites peuvent être traitées en ambulatoire dans un délai moins urgent. Cette difficulté diagnostique incite le praticien à adresser facilement le patient aux urgences. Or, l’arthrite septique reste un diagnostic relativement peu fréquent : approximativement 18% (8-27%) des patients se présentant aux urgences pour une monoarthrite aiguë sont atteints d’arthrite septique .

Les éléments d’orientation de première ligne actuellement utilisés sont la protéine C réactive (PCR) et les globules blancs (GB), et le gold standard pour le diagnostic d’arthrite septique est à ce jour la microbiologie sur ponction de liquide articulaire, dont les résultats sont disponibles en 2 à 5 jours, et positifs uniquement dans 75% des cas . La PCR est sensible mais peu spécifique pour le diagnostic d’arthrite septique . De plus, sa valeur peut être faussement abaissée par certains traitements des rhumatismes inflammatoires ou microcristallins (corticoïdes, anti-interleukine ), rendant le diagnostic différentiel d’une arthrite septique plus difficile. Les GB ne sont pas non plus spécifiques pour le diagnostic d’arthrite septique et peuvent être augmentés dans certaines situations cliniques(exercice physique, anxiété, tabagisme…) et lors de la prise de certains traitements (lithium, corticostéroïdes…) .

La procalcitonine (PCT) est un peptide de 116 acides aminés . Elle est le précurseur de la calcitonine, sécrétée au niveau des cellules C de la thyroïde, et en moindre mesure au niveau des cellules neuroendocrines pulmonaires. Cette sécrétion est régulée par le gène CALC-1 situé sur le chromosome 11. En situation physiologique, ce gène s’exprime de façon sélective dans les cellules neuroendocrines thyroïdiennes. La quasi-totalité de la procalcitonine sécrétée est transformée en calcitonine, le dosage de la PCT en situation physiologique est donc virtuellement nul (< 0,05 ng/mL). En situation d’infection bactérienne, le taux de PCT sanguin augmente en réponse à des stimulations encore mal définies. Les cytokines inflammatoires semblent impliquées (notamment le tumor necrosis factor (TNF), les interleukines (IL) -1, IL-2 et IL-6) . La PCT est également élevée dans certaines situations non septiques : maladie de Still, maladie de Kawasaki, post-traumatisme grave, cancer médullaire de la thyroïde, cancer du poumon à petites cellules, pancréatite, choc cardiogénique.

Le rôle de l’augmentation de la procalcitonine plasmatique en cas d’infection n’est pas connu. Elle représente cependant un marqueur pronostique avec une gravité de l’affection d’autant plus élevée que son taux plasmatique est élevé , et son immunoneutralisation permet une augmentation de la survie chez des modèles animaux de sepsis .

La concentration plasmatique de la PCT commence à s’élever 4 heures après une stimulation par une endotoxine, atteignant un pic 6 à 8 heures après, puis une phase de plateau pendant plus de 24 heures. Il n’existe pas d’enzyme plasmatique détruisant la PCT. Ainsi, la PCT sécrétée dans le plasma durant les infections bactériennes possède une demi-vie de 25 à 30 heures . En opposition, la PCR n’atteint son pic qu’au bout de 24 à 48 heures . Le taux de PCT n’est pas diminué par la prise d’anti-TNF ou d’anti IL-6 , ni de corticoïdes. Il n’est pas non plus lié à la leucocytose et peut donc avoir un intérêt en cas de neutropénie .

La PCT est disponible en ville, les résultats sont rapidement disponibles, même si son coût n’est pas négligeable (environ 20€, 73B avec B=0,27€) . Les dosages de PCR et de GB coûtent 8B et 25B respectivement (soit 2,16€ et 6,75€). La procalcitonine pourrait donc être un marqueur prometteur dans l’arsenal diagnostique d’une arthrite aiguë indifférenciée. Ce travail a pour but de déterminer la performance diagnostique de la PCT, seule ou en association avec la CRP ou les GB, devant une mono- ou une oligoarthrite aiguë, notamment sa capacité à éliminer le diagnostic d’arthrite septique.

Résultats

CARACTERISTIQUES CLINIQUES DES PATIENTS 

Au total, 174 dossiers ont été screenés entre mars 2019 et juin 2020. Les dossiers ne présentant pas d’arthrite, une présentation à type de polyarthrite (≥ 4 articulations touchées) ou une arthrite chronique (> 3 mois d’évolution), ainsi que ceux présentant une infection concomitante traitée ou non, ont été exclus. Une prise d’antibiotiques préalable pour l’indication « suspicion d’arthrite septique » n’a pas été considérée comme un critère d’exclusion afin de se rapprocher au plus de la pratique clinique quotidienne. Quatre-vingthuit patients ont été inclus (Figure 1).

Les patients ont été classés en deux groupes selon le diagnostic final : arthrites septiques (n=46) et arthrites non septiques (n=42). Dans le groupe arthrites septiques, on compte 19 patients atteints d’arthrite septique sur matériel chirurgical.

Parmi les arthrites septiques, les microorganismes isolés étaient majoritairement Staphylococcus aureus (n=21), puis Streptococcus agalactiae (n=4), Escherichia coli (n=3), Streptococcus oralis (n=3), Staphylococcus epidermidis (n=1), Proteus mirabilis (n=1), Streptococcus mitis (n=1), Staphylococcus capitis (n=1), Enterobacter cloacae (n=1), Micrococcus luteus (n=1), Fusobacterium necrophorum (n=1), Streptococcus constellatus (n=1). Quatre arthrites septiques étaient polymicrobiennes et 12 sont restées sans documentation bactériologique : le diagnostic a été retenu devant la présentation clinique, paraclinique et l’évolution sous antibiotiques.

Enfin, le modèle utilisant la PCR « ou » les GB à leurs seuils respectifs de 98 mg/L et 7,2 G/L (sensibilité = 80 %) permet d’obtenir un RVN à 0, soit une probabilité post-test négligeable si le test est négatif (Figure 3e). Une analyse en sous-groupes pour comparer les taux de PCT et PCR entre les arthrites septiques sur matériel chirurgical et les arthrites septiques sur articulation native retrouve une médiane [min-max] de PCT à 0,56 ng/mL [0,050 – 73] et 0,17 ng/mL [0,01 – 12] respectivement (p = 0,003), et une médiane de PCR à 195,5 mg/L [20,6 – 572,9] et 140,6 mg/L [5,4 – 501,3] respectivement (p = 0,11). Il n’a pas été retrouvé de différence statistiquement significative avec les GB (p = 0,68).

Discussion

Nous avons analysé la performance diagnostique de la PCT chez 88 patients suspects d’arthrite septique. Quarante-six arthrites septiques ont été diagnostiquées (52,3%). Une sensibilité de 80 % est obtenue au seuil de 0,07 ng/mL au détriment d’une spécificité à 48 %. Au contraire, le seuil du laboratoire de 0,5 ng/mL permet une spécificité à 88% pour une sensibilité à 39%. Les rapports de vraisemblance sont modérés (RVN au seuil de 0,07 ng/mL : 0,41 et RVP au seuil de 0,5 ng/mL : 3,29) . Les seuils intermédiaires ne sont ni sensibles ni spécifiques. La valeur de l’AUC de la PCT est la même que celle de la PCR, marqueur que l’on sait sensible mais peu spécifique . Pour améliorer ces performances, nous avons considéré l’association de la PCT, de la PCR et/ou des GB aux valeurs seuils correspondant au meilleur indice de Youden, puis aux valeurs seuils permettant une sensibilité de 80%. Les modèles PCT « ou » PCR et PCR « ou » GB, aux valeurs seuils de sensibilité à 80 % offrent un RVN respectivement d’intérêt diagnostic fort et très fort.

RECHERCHE D’UN SCORE COMPOSITE
L’utilisation du modèle PCT « ou » PCR aux valeurs seuils 0,07 ng/mL et 98 mg/L respectivement nous a permis d’obtenir une bonne sensibilité (96 %) et un RVN d’intérêt fort (0,12) au détriment toutefois de la spécificité (36 %). Autrement dit, la probabilité d’être atteint d’arthrite septique est divisée par 8 si la PCT est inférieure à 0,07 ng/mL et si la PCR est inférieure à 98 mg/L, ce qui en fait un outil valable d’élimination diagnostic. En revanche, la probabilité d’être atteint d’arthrite septique si l’une de ces deux valeurs est supérieure au seuil défini ne sera multipliée que de 1,35 environ, ce qui n’augmente pas suffisamment la probabilité post-test pour confirmer le diagnostic. Le modèle « ou » associant la PCR et les GB aux valeurs seuils de 98 mg/L et 7,2 G/L respectivement, a permis d’obtenir une sensibilité à 100%, et un RVN à 0. Ce modèle est donc le plus performant pour écarter le diagnostic d’arthrite septique dans notre étude.

Le rapport de stage ou le pfe est un document d’analyse, de synthèse et d’évaluation de votre apprentissage, c’est pour cela chatpfe.com propose le téléchargement des modèles complet de projet de fin d’étude, rapport de stage, mémoire, pfe, thèse, pour connaître la méthodologie à avoir et savoir comment construire les parties d’un projet de fin d’étude.

Table des matières

Introduction
Matériel et méthodes
Résultats
Discussion
Conclusion
Bibliographie
Annexes

Lire le rapport complet

Télécharger aussi :

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *