Valeur juridique du consentement du patient

La notion de droits du patient fait rรฉfรฉrence dโ€™une part aux droits universels de lโ€™homme et du citoyen, dโ€™autre part aux droits plus directement liรฉs ร  la prรฉsence du patient dans lโ€™รฉtablissement de santรฉ et cโ€™est un ensemble de principes qui garantissent un respect de la dignitรฉ humaine. Ces droits qui concernent essentiellement lโ€™accรจs aux soins, la libertรฉ de choix, et le respect de la dignitรฉ humaine sont dรฉgagรฉs par la ยซ Dรฉclaration sur les droits du patient ยป de lโ€™Association Mรฉdicale Mondiale, Lisbonne 1981, Bali, 1995 et ils tรฉmoignent de la prioritรฉ accordรฉe au respect de la dignitรฉ de toute personne ayant accรจs au service public hospitalier. Le consentement constitue un champ spรฉcifique de ces droits du patient dโ€™autant quโ€™il est corollaire de lโ€™autonomie de la volontรฉ de la personne malade.

Aussi le consentement du patient est reconnu comme un principe fondamental ร  la dignitรฉ humaine et cette reconnaissance a รฉtรฉ proclamรฉe aussi bien par la lรฉgislation sรฉnรฉgalaise que franรงaise ร  travers la charte du malade dans les รฉtablissements publics de santรฉ hospitaliers mais aussi ร  travers la loi franรงaise du 4 Mars 2002 dans ses dispositions relatives ร  lโ€™information du patient. Principe fondamental de la dignitรฉ de la personne du patient, le consentement lโ€™est รฉgalement de par des textes internationaux comme la dรฉclaration dโ€™Helsinki rรฉvisรฉe de 1975, les directives de Manille de 1981 entre autres.

Cโ€™est autant dire lโ€™importance quโ€™un tel consentement prodigue pour une meilleure prise en charge et une meilleure protection de la dignitรฉ de la personne du patient. En effet, le principe du respect de lโ€™intรฉgritรฉ du corps humain impose le recueil du consentement du malade avant tout acte mรฉdical, hors les cas oรน le malade est dans lโ€™impossibilitรฉ de le donner. Ce consentement devant รชtre libre et รฉclairรฉ. Situer la problรฉmatique du consentement du patient reviendrait ร  le contextualiser dans le cadre gรฉnรฉral des droits des malades. Donc, possibilitรฉ est offerte au patient de se transformer en acteur, dโ€™oรน la nรฉcessitรฉ absolue dโ€™information, de consentement, de co-dรฉcision, de participation active du malade ร  son traitement. Ainsi, lโ€™intangibilitรฉ de lโ€™intรฉgritรฉ corporelle de chaque personne et lโ€™indisponibilitรฉ du corps humain sont des principes fondamentaux auxquels il ne peut รชtre dรฉrogรฉ que par nรฉcessitรฉ thรฉrapeutique pour la personne et avec son consentement prรฉalable. Cโ€™est pourquoi aucun acte mรฉdical ne peut รชtre pratiquรฉ sans le consentement du patient, hors le cas oรน son รฉtat rend nรฉcessaire cet acte auquel il nโ€™est pas ร  mรชme de consentir. Cโ€™est ce que confirme le code civil franรงais en ses articles 16-3 et 16-1 qui disposent ยซ il ne peut รชtre portรฉ atteinte ร  lโ€™intรฉgritรฉ du corps humain quโ€™en cas de nรฉcessitรฉ thรฉrapeutique pour la personne. Le consentement de lโ€™intรฉressรฉ doit รชtre recueilli prรฉalablement, hors les cas oรน son รฉtat rend nรฉcessaire une intervention thรฉrapeutique ร  laquelle il nโ€™est pas ร  mรชme de consentir ยป. Quant ร  lโ€™article 5 de lโ€™arrรชtรฉ ministรฉriel nยฐ 005776 portant charte du malade, il dispose : ยซ aucun soin ne peut รชtre dispensรฉ au malade sans son consentement libre et รฉclairรฉ, celui des parents ou des reprรฉsentants lรฉgaux, sauf en cas de force majeure ยป .

LES PRINCIPES RELATIFS AU CONSENTEMENT DU PATIENT

Le consentement ร  tout contrat doit รชtre valable, cโ€™est ร  dire donnรฉ en pleine connaissance de cause. Cela suppose que les cocontractants se fournissent mutuellement une information prรฉalable, complรจte et claire sur les รฉlรฉments du contrat, sur ce quโ€™ils proposent et ce quโ€™ils attendent de la part de lโ€™autre. A dรฉfaut, ils risquent de donner leur consentement sans avoir connaissance de tous les รฉlรฉments du dรฉbat, auquel cas ce consentement sera imparfait ou viciรฉ.

Rappelons ici que le contrat mรฉdical est un accord de volontรฉ entre un mรฉdecin et son patient. Aussi certains principes relatifs au consentement du patient doivent รชtre dรฉgagรฉs ร  savoir dโ€™une part les conditions de validitรฉ du consentement et dโ€™autre part la manifestation du consentement. En effet, le consentement du patient se doit dโ€™obรฉir ร  certaines conditions sans lesquelles, il ne peut avoir lโ€™effet escomptรฉ ร  savoir un consentement qui rentre dans des contours bien dรฉfinis. Pour ce qui est de la manifestation du consentement, elle obรฉit รฉgalement ร  certaines considรฉrations.

LES CONDITIONS DE VALIDITE DU CONSENTEMENT

Avant tout acte mรฉdical, le patient se doit de donner son consentement : un consentement volontaire. Cependant, pour que le patient puisse donner son consentement libre et รฉclairรฉ faudrait-il que certaines conditions de validitรฉ soient remplies. Conditions qui tournent autour de lโ€™obligation dโ€™information prรฉalable et de lโ€™autonomie de la volontรฉ.

Lโ€™ OBLIGATION Dโ€™ INFORMATION PREALABLE

Respecter la personne malade conduit ร  ne pas lui mentir. Montaigne disait : ยซ Il ne faut pas toujours dire tout, car ce serait sottise, mais ce quโ€™on dit, il faut quโ€™il soit tel quโ€™on le pense, autrement cโ€™est mรฉchancetรฉ. ยป Cela conduit ร  faire part au patient de tous les renseignements qui ont รฉtรฉ retirรฉs par le mรฉdecin du fait de sa fonction exploratoire, appelรฉ ร  sonder une intimitรฉ qui peut, au moins en partie, รฉchapper ร  la personne elle-mรชme. Le mรฉdecin se doit de communiquer au patient ce qui le touche directement. Cette communication est dโ€™autant plus importante que lโ€™information est sรฉrieuse, existentielle. Il ne faut ร  priori rien dissimuler au patient pour lui permettre de dรฉcider en connaissance de cause et lui laisser son droit ร  lโ€™autodรฉtermination, suivant sa capacitรฉ de discernement. En effet, une information convenable est nรฉcessaire pour permettre au patient de sโ€™adapter ร  la rรฉalitรฉ, de comprendre ce qui lui arrive, ce qui lโ€™attend, la nature et les raisons du traitement, ses effets prรฉvisibles.

Ainsi, pour obtenir du malade un ยซ consentement libre et รฉclairรฉ ยป ร  un acte, de diagnostic ou de soins, le mรฉdecin doit lui donner prรฉalablement une information ยซ simple, approximative, intelligible et loyale, permettant au patient de prendre la dรฉcision qui semble sโ€™imposer ยป .

En effet, cette information รฉtant :
โ™ฆ Simple, elle doit รชtre adaptรฉe aux connaissances du malade et formulรฉe en termes clairs ;
โ™ฆ Approximative, elle portera ร  la fois sur lโ€™รฉtat de gravitรฉ de lโ€™affection, sur la nature de lโ€™intervention diagnostique ou thรฉrapeutique proposรฉe, sur son rรฉsultat habituel et ses risques courants entre autres ;
โ™ฆ Intelligible cโ€™est ร  dire comprรฉhensible, lโ€™information tiendra compte des capacitรฉs intellectuelles et psychologiques du malade ร  la recevoir ;
โ™ฆ Loyale, elle ne comprendra ni dissimulation, ni mensonges injustifiรฉs.

Cette information doit avoir beaucoup dโ€™autres qualitรฉs : รชtre dรฉlivrรฉe avec tact, amabilitรฉ, disponibilitรฉ, รชtre ouverte et accueillante ร  toute demande dโ€™explication complรฉmentaire. Elle est habituellement orale, mais elle est de plus en plus souvent รฉcrite. Notons cependant que cette obligation dโ€™information pรจse รฉgalement sur le patient qui doit donner au mรฉdecin tous les renseignements relatifs ร  son รฉtat de santรฉ, ร  ses conditions de vie, ร  ses antรฉcรฉdents mรฉdicaux etc. pour lui permettre de dรฉcider du traitement ร  administrer.

Quant au mรฉdecin son obligation dโ€™information รฉtant plus vaste et plus complexe, est frรฉquemment abordรฉe par la jurisprudence, notamment en matiรจre de responsabilitรฉ mรฉdicale. En effet, lโ€™information du patient, condition indispensable de son consentement libre et รฉclairรฉ, constitue pour tout mรฉdecin une obligation morale, dรฉontologique et lรฉgale quโ€™il se doit de respecter. Mais il nโ€™en demeure pas moins quโ€™ร  cรดtรฉ de cette obligation dโ€™information corollaire du consentement, il existe une autre condition de validitรฉ du consentement quโ€™est lโ€™autonomie de la volontรฉ.

Lโ€™AUTONOMIE DE LA VOLONTE

Aucune intervention mรฉdicale sur un patient ne peut รชtre exรฉcutรฉe quโ€™elle ne lui ait dโ€™abord รฉtรฉ proposรฉe ; il appartient en effet ร  lโ€™intรฉressรฉ, qui est un sujet ร  la fois libre et douรฉ de raison, de dรฉcider en toute indรฉpendance sโ€™il en accepte ou non la rรฉalisation. En effet, la notion de patient au sens de personne passive soumise aux dรฉcisions du monde mรฉdical est dรฉpassรฉe. Une nouvelle place est aujourdโ€™hui dรฉvolue au malade nรฉcessitant quโ€™il soit bien informรฉ afin de pouvoir se prendre en charge en pleine autonomie. Il sโ€™agit de donner ร  lโ€™usager tous les moyens dโ€™exprimer sa volontรฉ afin quโ€™il puisse รฉlaborer sa propre dรฉcision.

Il faut en effet renforcer le droit au consentement libre et รฉclairรฉ en passant dโ€™une acceptation passive par la personne malade dโ€™une dรฉcision mรฉdicale ร  une vรฉritable expression de sa volontรฉ. Le consentement devient ainsi lโ€™instrument privilรฉgiรฉ de lโ€™autonomie de la personne. Cette autonomie, mรชme si elle est le reflet de la volontรฉ du patient qui en dispose pour donner son consentement libre et รฉclairรฉ avant tout acte mรฉdical, il nโ€™en demeure pas moins quโ€™elle peut entraver des fois ร  la santรฉ du patient. Cโ€™est le cas oรน le malade refuse lโ€™acte thรฉrapeutique proposรฉ. Dans une telle hypothรจse le mรฉdecin est obligรฉ de sโ€™en tenir ร  la volontรฉ du patient mรชme sโ€™il sait que cette abstention thรฉrapeutique peut conduire ร  un dรฉsastre dโ€™autant plus que le malade est un homme libre auquel on ne peut rien imposer surtout lorsque le danger qui le menace ne vise que lui-mรชme.

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Table des matiรจres

INTRODUCTION
PREMIERE PARTIE : VALEUR JURIDIQUE DU CONSENTEMENT DU PATIENT
CHAPITRE I : LES PRINCIPES RELATIFS AU CONSENTEMENT DU PATIENT
SECTION I : LES CONDITIONS DE VALIDITE DU CONSENTEMENT
PARAGRAPHE I : Lโ€™obligation dโ€™information prรฉalable
PARAGRAPHE II : Lโ€™autonomie de la volontรฉ
SECTION II : MANIFESTATION DU CONSENTEMENT
PARAGRAPHE I : Consentement exprรจs et consentement tacite
PARAGRAPHE II : Caractรจres ou formes du consentement
CHAPITRE II : Lโ€™ ETENDUE DU CONSENTEMENT DU PATIENT DANS LE CONTEXTE SENEGALAIS
SECTION I : EVOLUTION DU CONSENTEMENT DU PATIENT PAR RAPPORT A LA REFORME HOSPITALIERE DE 1998
PARAGRAPHE I : Consentement du patient avant la rรฉforme de 1998
PARAGRAPHE II : Consentement du patient aprรจs la rรฉforme de 1998
SECTION II : PORTEE DU CONSENTEMENT DU PATIENT
PARAGRAPHE I : Le principe : une portรฉe limitรฉe du consentement du patient
PARAGRAPHE II : Les extensions opรฉratoires
DEUXIEME PARTIE : CONSENTEMENT DU PATIENT ET PROTECTION SOCIALE (OU ORDRE PUBLIC)
CHAPITRE I /PROTECTION LIEE AUX INCAPACITES
SECTION I : PAR RAPPORT AUX MINEURS
PARAGRAPHE I : Consentement du reprรฉsentant lรฉgal
PARAGRAPHE II : Consentement du mineur
SECTION II : PAR RAPPORT AUX MAJEURS INCAPABLES
PARAGRAPHE I : Considรฉrations sur la situation particuliรจre du majeur incapable
PARAGRAPHE II : Distinction malade aliรฉnรฉ/malade non aliรฉnรฉ
CHAPITRE II/ AUTRES EXCEPTIONS A Lโ€™ OBLIGATION DE CONSENTEMENT
SECTION I : LES INTERETS IMMEDIATS DU PATIENT
PARAGRAPHE I : Situation dโ€™urgence ou de nรฉcessitรฉ mรฉdicale
PARAGRAPHE II : Consรฉquences de cet รฉtat de nรฉcessitรฉ sur le consentement du patient
SECTION II : LES INTERETS DES TIERS
PARAGRAPHE I : Prรฉvention des maladies contagieuses pour une protection de la santรฉ publique
PARAGRAPHE II : Situation de lโ€™รฉtat dโ€™ivresse
CONCLUSION

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