UTILISATION DE LA MÉLATONINE EN ÉLEVAGE CAPRIN 

UTILISATION DE LA MÉLATONINE EN ÉLEVAGE CAPRIN 

UTILISATION DE LA MÉLATONINE EN ÉLEVAGE CAPRIN

Importance du mode de distribution de la mélatonine

La régularité et la durée du traitement par la mélatonine sont des critères à respecter. L’application quotidienne d’un traitement mélatonine est indispensable au déclenchement précoce de l’activité sexuelle. Ainsi, des brebis Suffolk et Cheviot, recevant de la mélatonine une fois ou trois fois par semaine seulement, déclenchent leur activité ovulatoire à la même date que les animaux témoins. En revanche, les femelles recevant le traitement quotidiennement ou portant un implant sous-cutané permettant une libération continue, déclenchent leur activité un mois plus tôt que les témoins (Ronayne et al., 1989).
De la même façon, de trop faibles durées d’administration de mélatonine par voie sous-cutanée ne permettent pas d’obtenir une réponse satisfaisante. La durée optimale, pour obtenir un déclenchement plus précoce des ovulations chez au moins deux tiers des animaux et une cyclicité ovarienne régulière, est supérieure à 36 jours mais inférieure à 93 jours (Nowak et Rodway, 1987). La durée optimale pour un traitement sous forme d’implants sous-cutanés est sans doute aux alentours de 70 jours. La dose de mélatonine libérée doit permettre d’obtenir une concentration plasmatique voisine de 50% du niveau moyen nocturne des animaux témoins, pour aboutir à une avance de l’activité ovulatoire. En dessous de ce seuil, la réponse des brebis semble dépendre de leur niveau endogène en mélatonine : quand celui-ci est élevé, il faut apporter plus de mélatonine exogène avec le traitement (Delgadillo et al., 1993).
En pratique, des implants de Mélovine® sont utilisés. Il s’agit d’implants de trois millimètres contenant dix-huit milligrammes de mélatonine ; déposés à la base de l’oreille de la chèvre (annexe 4). La Mélovine® ne possède une autorisation de mise sur le marché (AMM) que pour les ovins. Cependant, deux éléments permettent aux praticiens de prescrire Mélovine® pour l’espèce caprine
La mélatonine est classée pour les ovins et caprins dans l’annexe II du règlement (UE) n°2377/90 sur les limites maximales de résidus par le règlement N°508/1999. Cette annexe contient les substances pour lesquelles il n’apparaît pas nécessaire pour la protection de la santé publique de fixer une limite maximale de résidus (LMR).
Aucun produit comparable n’est enregistré en France pour la même indication dans l’une ou l’autre des deux espèces.
Par conséquent, le produit relève d’une prescription vétérinaire hors AMM, pour les caprins, avec un délai d’attente nul puisque la LMR de la mélatonine, conformément à l’article L5143-4 du code de la santé publique, ne pose aucune inquiétude vis à vis des résidus potentiels dans la viande ou le lait.

Principes de l’utilisation de la mélatonine : mimer les jours courts

Les implants de mélatonine permettent de mimer les jours courts, même si les yeux de la chèvre perçoivent des jours longs.Lorsque l’on souhaite effectuer une période de fécondation en pleine contre-saison, ce qui est le cas de la forte demande actuelle dans l’espèce caprine, il est nécessaire de rétablir la sensibilité à la mélatonine, qui est en général très faible en fin d’hiver. Pour ce faire, on soumet les animaux à un éclairement supplémentaire par rapport à la lumière naturelle, avant de réaliser la pose de l’implant de mélatonine.Il sera donc nécessaire d’appliquer artificiellement une période de jours longs en fin d’hiver pour rétablir la sensibilité à la mélatonine et espérer induire une activité sexuelle au printemps.

Mélatonine et traitement lumineux

Le remplacement d’un jour long réel est possible par l’éclairement seulement pendant la phase « photosensible » (moment privilégié de la période nocturne dont l’éclairement provoque la lecture d’un jour long), située avec exactitude 17 à 18 heures après l’aube chez les ovins, et supposée être au même moment chez les caprins. Il n’est en effet pas nécessaire de fournir des jours longs réels aux animaux ; l’éclairement de cette phase photosensible est suffisant pour aboutir à la lecture d’un jour long et rétablir la sensibilité à la mélatonine.Dans ce cas, il est cependant nécessaire de réaliser une aube fixe par un éclairement artificielle la chèvrerie. Lorsque l’éclairement naturel quotidien devient suffisant (puisque les animaux sont la plupart du temps en bâtiment ouvert), l’éclairement artificiel est arrêté, puis redémarré entre 16 et 18 heures après cette aube fixe, soit de 22 à 24 heures, si l’aube fixe est réglée à 6 heures (figure 7), (annexe 5).L’éclairement est apporté par des tubes fluorescents ou des lampes halogènes, fournissant au moins 200 lux au niveau des yeux des animaux (Chemineau et al., 1996). L’intensité minimale d’éclairement pour obtenir un effet jours longs est probablement inférieure à 200 lux (Laferté et al., 1997). La détermination de cette intensité minimale fait encore l’objet d’expérimentations (annexe 6). Dernièrement Bernard Leboeuf a montré qu’à 50 Lux cela fonctionne aussi bien.Par la suite, les jours courts seront mimés par l’insertion d’implants sous-cutanés de mélatonine.

Utilisation de la mélatonine sur les boucs : l’effet bouc

Le démarrage de l’activité ovulatoire après la succession de jours longs et mélatonine sans utilisation de l’effet bouc, ne se fait que pour six chèvres sur douze traitées (Chemineau et al., 1988). Il est donc absolument nécessaire d’introduire des boucs inducteurs, pour que l’activité ovulatoire se déclenche et puisse persister, même si ceux-ci ne sont pas utilisés, pour réaliser les fécondations.L’effet bouc consiste à introduire un mâle au sein d’un groupe de femelles dont il a été séparé pendant six à huit semaines.Cet effet permet d’induire des ovulations synchrones (deux à trois jours après l’introduction du mâle) souvent suivies d’un corps jaune de courte durée. Après ce cycle court, l’activité et le comportement sexuels sont rétablis à condition que l’on ne soit pas trop éloigné de la saison sexuelle (Chemineau, 1989).Comme nous l’avons décrit auparavant, les boucs sont aussi sujet à une grande variation saisonnière de l’activité sexuelle. C’est pourquoi, pour une mise à la reproduction en contre-saison, il est nécessaire d’utiliser, également chez le bouc, la mélatonine associée ou non à un programme lumineux, en fonction de la date de mise à la reproduction.D’un point de vue pratique, on traitera les boucs avec trois implants de mélatonine à 18 mg (Mélovine®), 49 jours avant l’introduction au sein du groupe de femelles. On en profitera pour le séparer des femelles : ni vue, ni ouïe, ni odeur. Pour des saillies avant le 26 juin, les boucs subiront, comme les chèvres, un traitement lumineux pour mimer un période de jours longs.

Protocoles d’utilisation

Mélatonine utilisée seule

L’utilisation de mélatonine seule, sans traitement lumineux au préalable, est envisageable à partir du 15 mai. Il s’agit alors d’un programme de reproduction en avance de saison et non en pleine contre-saison. Les saillies seront prévues à partir du 27 juin, et les mises bas débuteront en décembre.Si l’on implante des chèvres avant le 15 mai, sans programme lumineux, l’état réfractaire aux jours courts ne sera pas levé et la mélatonine n’aura pas l’effet voulu, puisque la sensibilité à la mélatonine n’aura pas été rétablie.Pour les boucs, il faudra prévoir l’implantation sept jours avant celle des femelles, soit aux alentours du 8 mai. Il sera prudent de prévoir un ou deux boucs pour les retours au bout de 90 à 100 jours, moment où les boucs implantés présenteront une forte baisse de libido. Une nouvelle alternance de jours longs et de jours courts permettra aux boucs de retrouver leur libido. Pour mimer une période de jours courts à cette époque, il est possible d’avoir recours aux implants de Mélovine®.Les femelles ayant reçu l’implant et non fécondées, reviennent en anœstrus 90 jours après la pose de l’implant. Une nouvelle alternance de jours longs et jours courts sera nécessaire pour qu’une activité sexuelle cyclique réapparaisse.

Mélatonine et programme lumineux (figure 8)

L’utilisation sur les chèvres de la mélatonine associée à un programme lumineux, permet une mise à la reproduction en pleine contre-saison, et des mises bas très tôt, en fin d’été, début d’automne.
Les saillies sont alors réparties du 1er mai au 25 juin. Pour cela, il est nécessaire d’implanter les chèvres du 15 mars au 10 mai.Pour lever l’état réfractaire aux jours courts à cette époque de l’année, il faut mettre en place un programme lumineux au préalable. Ce programme, ci-dessus décrit, devra durer deux mois et demi.Ainsi, pour une mise à la saillie au 1er mai, le programme lumineux sera appliqué de fin décembre à mi-février, afin de pouvoir implanter les chèvres à partir de mi-mars.Ce protocole, traitement lumineux et mélatonine, devra être associé à l’effet bouc pour optimiser les résultats de fécondité. Les boucs seront alors préparés de la même façon, en n’omettant pas de séparer les mâles des femelles (ni vue, ni ouïe, ni odeur) pour profiter pleinement de l’effet bouc.

Utilisation de la mélatonine sur les chevrettes (figure 9).

Pour la mise à la reproduction, les chevrettes doivent être âgées d’au moins sept mois et peser 35 kg minimum.Dans le cadre d’une reproduction à contre-saison, les chevrettes seront traitées selon deux catégories distinctes :
∗ les chevrettes conçues en saison sexuelle
∗ les chevrettes conçues en contre-saison sexuelle

Table des matières

INTRODUCTION 
I/ PHYSIOLOGIE DE LA REPRODUCTION CAPRINE ET MÉLATONINE
1.1 – Les données de base
1.2 – Variations saisonnières des l’activité sexuelle
1.2.1 – La reproduction caprine est caractérisée par une longue période de repos sexuel
1.2.2 – Saisonnalité de l’activité sexuelle chez le bouc
1.2.2.1 – Variations du comportement sexuel et du poids testiculaire
1.2.2.2 – Variations de la qualité et de la fécondance de la semence
1.3 – Contrôle de l’activité sexuelle par le changement de photopériode
1.4 – La mélatonine et le contrôle photopériodique de l’activité sexuelle
1.4.1 – Durée de sécrétion et photopériode
1.4.2 – Synthèse et dégradation
1.4.3 – Action sur l’axe hypothalamo-hypophysogonadien
II/ UTILISATION DE LA MÉLATONINE EN ÉLEVAGE CAPRIN 
2.1 – Importance du mode de distribution de la mélatonine
2.2 – Principes de l’utilisation de la mélatonine : mimer les jours courts
2.3 – Mélatonine et traitement lumineux
2.4 – Utilisation de la mélatonine sur les boucs : l’effet bouc
2.5 – Protocoles d’utilisation
2.5.1 – Mélatonine utilisée seule
2.5.2 – Mélatonine et programme lumineux
2.6 – Utilisation de la mélatonine sur les chevrettes
2.6.1 – Chevrettes conçues en contre-saison
2.6.2 – Chevrettes conçues en saison sexuelle
2.7 – Utilisation de la mélatonine et méthode de synchronisation des chaleurs
2.7.1 – L’association à un traitement photopériodique
2.7.2 – Sans traitement lumineux
III/: RÉSULTATS ET INTÉRÊTS PRATIQUES DE L’UTILISATION DE LA MÉLATONINE EN ÉLEVAGE CAPRIN
3.1 – Recommandations nécessaires à la bonne utilisation des méthodes de désaisonnement
3.1.1 – Recommandations générales sans traitement lumineux
3.1.2 – Recommandations spécifiques à l’utilisation de la mélatonine
3.1.2.1 – Conduite à tenir pour les femelles
3.1.2.2 – Conduite à tenir pour les boucs
3.2 – Le « compactage » des mises bas
3.3 – Synchroniser les mises bas
3.4 – Bénéficier des retours fertiles
3.5 – La production de lait d’hiver : intérêt économique
3.5.1 – Matériel et méthodes
3.5.2 – Résultats techniques
3.5.2.1 – La production
3.5.2.2. – Coûts et contraintes liés au désaisonnement
3.5.3 – Intérêt économique selon les groupes de laiterie et le volume produit par atelier
CONCLUSION
ANNEXES
BIBLIOGRAPHIE

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