Apports thรฉoriques
La communication
Afin de mieux apprรฉhender et mieux comprendre certains รฉlรฉments de notre travail de recherche, il nous semble judicieux de devoir dรฉfinir quelques notions clรฉs. Selon Larousse, ยซ La communication dรฉsigne le fait dโรชtre en relation avec une ou plusieurs personnes afin de transmettre quelque chose. ยป. La communication peut รชtre considรฉrรฉe comme un simple regard entre plusieurs personnes, mais aussi par un รฉchange verbal dans le but de transmettre une รฉmotion, un savoir, un message.
En effet, Cosnier nous confirme cette idรฉe en 1977, selon lui ยซ la communication humaine totale utilise ainsi un ensemble dโรฉlรฉments verbaux et non verbaux passant par diffรฉrents canaux ยป. Nous retrouvons dans son article, le canal auditif par lequel passe le verbal et la vocalitรฉ, puis le canal visuel qui regroupe la statique (posture et attitudes) ainsi que la cinรฉtique (mimogestualitรฉ). Ces diffรฉrents canaux utilisรฉs pour la communication relient un รฉmetteur et un rรฉcepteur et permettent de transmettre un message apportant une information. Il nous indique quโune diffรฉrence doit รชtre รฉtablie entre la communication et le langage. Dโaprรจs les propos de Watzlawick et Helmick (1979), ยซ on ne peut pas ne pas communiquer ยป, la communication est toujours prรฉsente or, le langage reprรฉsente uniquement un mode de communication. ยซ Lorsquโun รฉlรจve ne travaille pas, lโenseignant se questionne sur ce manque dโinvestissement. Il parvient souvent ร dรฉbloquer la situation en allant รฉchanger avec lui. Cette conversation est essentielle pour expliquer ce qui est attendu, ce quโil projette pour lui. Lโadolescent sโexprime aussi pour dire ce quโil attend du professeur, du cours, de la situation dโapprentissage. Cela donne du sens ร son investissement.
Cet รฉchange entre les deux interlocuteurs est donc constructif mais nโest pas une fin en soi. ยป (Beneteau, 2019). Alors, une รฉvidence a รฉtรฉ pointรฉe par Watzlawick et Helmick (1979), celle de la prรฉsence de cinq axiomes de la communication. Dans son mรฉmoire, Freslon (2019) nous explique succinctement ces diffรฉrents axiomes : ยซ Le premier axiome est que ยซ l’on ne peut pas ne pas communiquer ยป car tout comportement ร une valeur de message. Le deuxiรจme axiome est que toute communication prรฉsente deux aspects : ยซ le contenu et la relation ยป. Le contenu concerne le message transmis et la relation a un impact sur celui-ci car si elle est mauvaise, le contenu sera dรฉformรฉ ou ignorรฉ. Le troisiรจme axiome est que ยซ la nature dโune relation dรฉpend de la ponctuation des sรฉquences de communication entre les partenaires ยป alors chaque comportement d’un acteur induit le comportement d’un autre acteur. (โฆ) Le quatriรจme axiome est que ยซ la communication humaine utilise simultanรฉment deux modes de communication : digitale et analogique ยป. Enfin, le dernier axiome est que ยซ la communication est soit symรฉtrique, soit complรฉmentaire ยป : une relation symรฉtrique est une relation dโรฉgalitรฉ alors quโune relation complรฉmentaire exprime une diffรฉrence (lโun des deux acteurs est socialement supรฉrieur ร lโautre) ยป.
Au travers ces axiomes, deux types de communications peuvent en ressortir : la communication verbale, et la communication non verbale. Ces deux types de communication ont la mรชme finalitรฉ : celle de la communication entre deux individus.
Une chose les distinguent : la communication non verbale est inconsciemment davantage mobilisรฉe que la communication verbale lors dโune interaction. En effet, selon Mehrabian (1967) lโutilisation de la CNV reprรฉsente 93% de la communication, et lโutilisation des mots seulement 7% du message. Ainsi selon Freslon (2019) ยซ Cesdeux modes de communication sont tous deux complรฉmentaires et importants danslโacte de communiquer. ยป.
La communication verbale
La communication verbale (CV) est le fait de communiquer avec autrui par la parole et reprรฉsente ยซ toutes les informations qui sont รฉchangรฉes verbalement ยป (Boizumault, 2013). Cette-ci est utilisรฉe pour transmettre des informations. Dans lโenseignement, elle est utilisรฉe pour donner des consignes, des conseils aux รฉlรจves.
Selon Caprais (2017), nous communiquons verbalement dรจs le plus jeune รขge par ยซ des sons, tels que des cris, des pleurs, des rires ou des grognements ยป puis nous remplaรงons ses sons par des mots pour exprimer clairement notre message. Ces mots, ces paroles sont exprimรฉs diffรฉremment en fonction de la faรงon de parler, de lโintonation de la voix, du dรฉbit vocal. Ainsi ces critรจres peuvent รชtre considรฉrรฉs comme des aspects vocaux faisant parti de la communication vocale. Selon Boizumault (2013), ยซ Les trois principaux constituants de lโรฉnoncรฉ total (โฆ) sont donc la verbalitรฉ (que lโon peut transcrire), la vocalitรฉ (que lโon peut dรฉcrire) ; la kinรฉsique (que lโon peut dรฉcrire). ยป. Ainsi dans notre mรฉmoire, nous intรฉgrerons ยซ la vocalitรฉ ยป dans la communication non verbale.
La gestualitรฉ
La gestuelle constitue une grande partie des communications non verbales employรฉes par l’enseignant. En effet, cette derniรจre peut รชtre utilisรฉe pour diverses raisons : dรฉmontrer, dรฉsigner, et peut donc รชtre classifiรฉe selon ses typologies. En ce sens, la gestualitรฉ est une CNV trรจs variรฉe, on y retrouve des gestes pouvant donner des informations supplรฉmentaires ร la parole, des gestes significatifs ou non, des gestes codifiรฉs ou non. Ainsi, Moulin (2004) propose une typologie de gestes : ยซ gestes de rรฉpression ยป, ยซ gestes de provocation ยป, ยซ gestes dโinjonction ยป, ยซ gestes de dรฉsapprobation ยป, ยซ gestes de destination ยป, ยซ gestes de stimulation ยป, ยซ gestes de lรฉgitimation ยป, ยซ gestes dโaffection ยป, ยซ gestes de sรฉduction ยป, ยซ gestes dโapprobation ยป, ยซ gestes de dรฉsignation ยป, ยซ gestes de sollicitation ยป, ยซ gestes de consolation ยป, ยซ gestes dโintรฉgration ยป et ยซ gestes de captation ยป. Alors, chaque geste a une signification particuliรจre, renforรงant ou remplaรงant le verbal. De plus, dans la plupart des cas, ils sont prรฉsents afin d’accentuer l’aspect affectif. En effet lorsque l’รฉlรจve effectue un exercice qu’il rรฉussit, il va alors inconsciemment se tourner vers l’enseignant, cherchant un geste de rรฉussite, par exemple un pouce levรฉ de la part de son enseignant.
Le regard
Ce dernier peut รชtre utilisรฉ afin de capter l’attention des รฉlรจves. Ainsi, afin d’obtenir l’attention d’un รฉlรจve discutant, l’enseignant peut alors mettre en place un regard fermรฉ ou soutenu afin de faire comprendre ร l’รฉlรจve en question ce qu’il attend de lui : quโil soit ร l’รฉcoute, ce, sans mรชme prononcer un mot. En ce sens, le regard est un moyen pรฉdagogique fort, un outil important pour l’autoritรฉ.
Selon Cosnier (1996), lors dโune interaction, le regard a une valeur importante. En effet, il permet de ยซ marquer lโengagement et le dรฉsengagement ยป, cโest-ร -dire quโil permet ยซ la suspension ou la reprise de la conversation ยป. S’ajoutent ร cela les รฉmotions que l’enseignant peut utiliser comme des expressions faciales. Ces derniรจres ont alors pour objectif de faire รฉprouver des sentiments, des รฉmotions par les รฉlรจves.
La proxรฉmie
Cosnier (1996) explique que la proxรฉmie ยซ constitue un signe indicateur spรฉcial, qui peut manifester lโintimitรฉ de la relation mais aussi lโemprise et la dominance ยป. En ce sens, ce comportement permet d’entrer dans l’intimitรฉ du public. Cette proxรฉmie peut avoir plusieurs fonctions. Tout d’abord celle de pouvoir restreindre un comportement dรฉviant. En effet, en posant sa main sur lโรฉpaule dโun รฉlรจve, l’enseignant peut obtenir lโattention, lโรฉcoute de ce dernier. De plus ce geste peut รชtre interprรฉtรฉ par lโรฉlรจve comme une rรฉelle considรฉration de lโenseignant et peut ainsi le mettre en confiance.
Deuxiรจmement, cette proxรฉmie peut avoir comme fonction de motiver l’apprenant, par exemple en lui tapant sur la main pour lui signifier qu’il a rรฉussi ce qu’il effectuait.
Alors, nous pouvons remarquer que ces deux fonctions peuvent avoir un impact fort sur l’individu. La proxรฉmie est donc une CNV qui peut avoir un effet sur l’รฉmotion et le comportement de l’รฉlรจve (Moulin, 2004).
Des concepts comme points ressources
Afin de rรฉpondre ร notre question de recherche, nous nous sommes appuyรฉes sur diffรฉrents travaux et concepts, notamment le concept ยซ dโimmediacy ยป de Andersen (1979) et Merhabian (1971). Ce concept ยซ peut รชtre dรฉfini comme les manifestations non verbales qui produisent un effet sur lโefficacitรฉ de lโenseignement. Lโidรฉe est que la proximitรฉ favorise les liens. Ces รฉtudes montrent lโimpact positif des CNV sur les apprentissages affectifs et cognitifs en classe et sur la motivation, amรฉliorรฉs significativement par ces comportements des enseignants. ยป (Boizumault et Cogรฉrino, 2012). La maniรจre dont les enseignants se manifestent impacterait donc sur le climat de classe. Ces CNV peuvent devenir des techniques thรฉรขtrales pour certains enseignants, en abusant mรชme pour obtenir un comportement souhaitรฉ de la part des รฉlรจves.
Dans notre travail de recherche, nous voulons comprendre pour quelles raisons lโenseignant utilise un type de CNV plutรดt quโun autre, quels impacts il veut avoir sur les รฉlรจves ou un รฉlรจve en particulier. Quels types de CNV sont susceptibles d’influencer plus ou moins les รฉlรจves selon eux. Plusieurs travaux se sont dรฉjร intรฉressรฉs ร ce type de recherche. En effet, les travaux de Boizumault et Cogerino (2012) nous dรฉmontrent que le professeur d’EPS, enseignant dans des lieux multiples et variรฉs, est amenรฉ ร utiliser des communications spรฉcifiques comme une communication par le corps pour montrer, dรฉmontrer, corriger ร des distances variรฉes. Ainsi, de nombreuses CNV peuvent รชtre mises en place ร des fins diffรฉrentes : communicationnelles, techniques et relationnelles.
Dans notre รฉtude de recherche, nous allons รฉtudier et analyser deux contextes diffรฉrents. Nous allons comparer deux enseignants de deux รฉtablissements diffรฉrents : un รฉtablissement ยซ ordinaire ยป et un ยซ รฉtablissement rรฉgional dโenseignement adaptรฉ ยป.
Selon Boizumault (2013) ยซ Les communications non verbales (CNV) diffusent des informations auprรจs des รฉlรจves, peuvent รชtre contradictoires avec les communications verbales, les desservir, ou transmettre, ร leur insu, les attentes des enseignants. ยป. Ainsi, en ce sens, les CNV permettent de crรฉer une interaction avec les รฉlรจves dont lโobjet peut รชtre pรฉdagogique ou didactique. Ces CNV peuvent alors รชtre utilisรฉes en appui sur la parole, mais peuvent รฉgalement รชtre employรฉes de maniรจre isolรฉe.
Alors au sein mรชme de ces CNV, des ยซ moyens ยป peuvent รชtre plus dรฉterminants que d’autres. Bless (2018) explique que ยซ le regard pouvait รชtre un outil puissant pour lโenseignant si celui-ci est pleinement prรฉsent ร ses รฉlรจves, notamment pour susciter leur attention en rencontrant leur regard, mais aussi en le redirigeant vers le savoir ร transmettre. ยป. Ainsi, seul le regard pourrait alors suffire pour obtenir un comportement voulu de la part des รฉlรจves. Cette derniรจre nous dรฉmontre รฉgalement dans son รฉtude, que les gestes ยซ peuvent รชtre para-verbaux, prosodiques, dรฉictiques, iconiques et autonomes. ยป. Toutes ces fonctions ont plusieurs intรฉrรชts. En effet, les gestes peuvent servir autant ร ยซ provoquer lโattention par leur aspect dรฉmonstratif ou bruyant, quโร motiver les รฉlรจves par lโรฉnergie quโils leur transmettent ยป. En ce sens, ces derniers peuvent permettre de ยซ dรฉcrire un รฉlรฉment de savoir ยป facilitant ainsi sa comprรฉhension. (Bless, 2018)
S’ajoute ร ces deux aspects (le regard et les gestes), la voix. Selon GausmandRuelle (2013), la voix peut รฉgalement avoir une influence sur la place deย l’enseignant, ce qu’il attend de la part des รฉlรจves. Cette derniรจre nous explicite dans son mรฉmoire que la voix et plus prรฉcisรฉment son intonation, le rythme, le dรฉbit peuvent avoir des effets sur le comportement des รฉlรจves. Foussard (2011) ยซ souligne que la voix reste ยซ lโoutil privilรฉgiรฉ des enseignants ยป. Une voix calme, claire et posรฉe permet dโavoir une รฉcoute attentive de la part des รฉlรจves. Une voix forte et un ton ferme sont parfois nรฉcessaires lorsque les รฉlรจves sont dispersรฉs.
Lโenseignant peut beaucoup jouer de sa voix et cela influence alors le comportement des รฉlรจves. En ce sens il est inutile de lever le ton lorsque le niveau sonore de laclasse est dรฉjร รฉlevรฉ, cela ne fera que renforcer le brouhaha rรฉgnant dans la classe. ยป (Gausmand-Ruelle, 2013).
Problรฉmatique
La parole est un moyen incontournable pour transmettre une consigne, un savoir, mais qu’en est-il dans lโenseignement de lโEPS ? Lorsque l’enseignant doit faire face ร un gymnase partagรฉ, par consรฉquent รชtre en prรฉsence de nombreux bruits. Qu’en est-il lorsque ce dernier doit exercer devant une classe dite ยซ difficile ยป et ยซ agitรฉe ยป, des รฉlรจves n’รฉtant pas ร l’รฉcoute ? Face ร diffรฉrents รฉlรฉments perturbateurs, bloquant ou modifiant la transmission du message de l’enseignant, causant ainsi des problรจmes de communication. Lโenseignant est ainsi amenรฉ ร utiliser diffรฉrentes stratรฉgies pour pouvoir accompagner les รฉlรจves dans leurs apprentissages. De plus, en cours dโEPS, les รฉlรจves peuvent bouger, ils ne restent pas assis comme ils le sont dans les autres matiรจres. La gestion des รฉlรจves dans les grands espaces est un aspect important dans cette discipline. Il s’agit donc pour l’enseignant d’obtenir un certain ordre afin de pouvoir faciliter l’apprentissage de ses รฉlรจves.
Ainsi, plusieurs questions peuvent รชtre posรฉes sur le comportement adoptรฉ par lโenseignant pour obtenir une adhรฉsion, un apprentissage de ses รฉlรจves.
L’enseignant va-t-il adapter son style d’enseignement en fonction des effets qu’il cherche ร produire sur l’รฉlรจve? Quelles postures et attitudes lโenseignant va-t-il adopter pour motiver ses รฉlรจves ? Comment va t-il utiliser son corps pour obtenir lโattention de ses รฉlรจves ? Quelles rรฉactions veut-il provoquer chez ses รฉlรจves en les fixant du regard, en se mettant ร leur hauteur ?
Les entretiens
Aprรจs avoir conรงu le guide de questionnement citรฉ prรฉcรฉdemment, nous avons pris rendez-vous avec nos collรจgues afin de faire les entretiens. Ces entretiens avaient pour but de comprendre les ยซ choix ยป des CNV des enseignants face ร leurs รฉlรจves.
Ils ont eu lieu ร distance par appel vidรฉo grรขce ร lโoutil ยซ zoom ยป. Nous avons choisi un appel en vidรฉo afin de nous rapprocher le plus possible dโun entretien lambda en face ร face. Nous avons veillรฉ ร enregistrer lโappel grรขce ร un dictaphone et un logiciel enregistreur installรฉ sur lโordinateur, afin de pouvoir rรฉcupรฉrer toutes les donnรฉes postรฉrieurement et pouvoir รชtre le plus disponible possible pendant lโentretien. Lors de cet entretien, nous nous sommes appuyรฉes sur le guide de questionnement et nous avons donc posรฉes des questions ouvertes telles que ยซ quโest-ce que tu cherches ร faire ? Pourquoi fais-tu cela ? ยป demandant une rรฉponse plutรดt argumentรฉe de la part de lโenseignant. Chacune dโentre nous a interrogรฉ le/ la collรจgue quโelle a รฉtรฉ observer quelques semaines plus tรดt afin de pouvoir faire des comparaisons entre lโobservation sur le terrain et les affirmations des enseignants. Pendant lโentretien, lโutilisation du silence a รฉtรฉ un moyen de laisser rรฉflรฉchir lโenseignant mais aussi de lui permettre de relancer son discours.
Nous avons veillรฉ ร adopter un questionnement le plus ouvert possible en induisant donc le moins possible de rรฉponses de notre part. Lโentretien avec Sylvie a durรฉ 40 minutes et lโentretien avec Julien a durรฉ 1 heure.
Procรฉdure dโanalyse des donnรฉes
Notre mรฉthode d’analyse a รฉtรฉ la suivante. Dans un premier temps, ร la suite des entretiens, nous avons retranscrit mot pour mot les propos de nos collรจgues grรขce ร lโenregistrement. Nous avons donc fait deux retranscriptions dont une faisant 10 pages (Annexe 3) et l’autre un peu plus de 20 pages (Annexe 4), police 12, interligne 1,5. Cette diffรฉrence s’expliquant par les temps diffรฉrents des entretiens. De plus, nos observations sur le terrain effectuรฉes avant les entretiens, ont รฉtรฉ utilisรฉes comme donnรฉes complรฉmentaires aux entretiens et non pas comme des donnรฉes systรฉmatiques.
Pour lโanalyse des donnรฉes, nous avons utilisรฉ une dรฉmarche plutรดt dรฉductive. En effet, lors de nos entretiens, nous avions un questionnement ouvert mais pour lequel des catรฉgories d’analyses รฉtaient prรฉdรฉfinies (exploitation de l’espace, posture, attitude…). Cela nous a permis lors de lโanalyse, de facilement retrouver ces catรฉgories et de pouvoir comparer les rรฉponses de Sylvie et de Julien dans chacune dโelle. Cependant, malgrรฉ des questions orientรฉes sur diffรฉrentes catรฉgories prรฉcises, les enseignants rรฉpondaient parfois ร un aspect dโune autre catรฉgorie.
Nous avons donc cherchรฉ ร regrouper ces rรฉponses dans la catรฉgorie dรฉdiรฉe. Nous avons repris les catรฉgories de notre guide de questionnement en dissociant certaines catรฉgories et en en regroupant dโautres pour organiser notre prรฉsentation de rรฉsultats : La dรฉfinition de la CNV, lโexploitation de lโespace, lโattitude et la posture, la gestualitรฉ, la proxรฉmie, lโexploitation du silence et les รฉlรฉments sonores, ainsi que lโutilisation de lโespace et les expressions faciales. Puis, nous avons prรฉsentรฉ les rรฉponses des deux enseignants dans chaque partie. Enfin, nous avons fait une comparaison des deux enseignants dans chacune des catรฉgories.
Par la suite, avec nos donnรฉes rรฉcoltรฉes et mises en commun, nous avons pu รฉtablir un profil correspondant ร chacun des enseignants en fonction des CNV utilisรฉes par ces derniers. Ce qui nous a permis de comparer ces deux profils, dans l’objectif de comprendre et d’รฉclaircir nos hypothรจses sur l’impact et l’utilisation de ces CNV par les enseignants.
RESULTATS
Lors de lโentretien ร distance, composรฉ de questions ouvertes, les enseignants nous ont orientรฉes vers leurs visions de la CNV, pourquoi ils utilisaient telle ou telle faรงon d’รชtre ร l’รฉgard de leurs รฉlรจves et dans quels objectifs.
Prรฉsentation dรฉtaillรฉe
Qu’est-ce que la CNV, avec quelle fonction et dans quelles conditions est-elle exploitรฉe ?
Premiรจrement Sylvie, fait une diffรฉrence entre la communication verbale qu’elle dรฉfinit comme sโexprimer ยซ oralement haut et fort devant les รฉlรจves ยป tandis que selon elle, la CNV se dรฉfinit comme ยซ tout ce qui est plutรดt expressif et qui vient de mon attitude comportement (โฆ) Tout ce qui vient de la gestuelle. Tout ce que je peux ajouter en plus de la parole, ou bien mรชme sans la parole d’ailleurs ยป. Selon Julien, la diffรฉrence entre la CV et la CNV se fait au niveau du mรฉdia utilisรฉ, ยซ soit le langage corporel, soit le langage verbal ยป. Pour lui, ยซ cโest vraiment deux faรงons de communiquer qui sont vraiment hyper complรฉmentaires ยป. Il dรฉfinit la communication non verbale comme ยซ une communication qui se fait sans les mots, uniquement avec le corps, sur des signaux visuels ยป. Il ajoute ร cela : ยซ si on fait du langage verbal, il y a toujours du non verbal ร cotรฉ, cโest difficile de (โฆ) dissocier les deux. ยป
Ces deux enseignants semblent avoir une dรฉfinition similaire de la CV et de la CNV, nous remarquons dans leurs propos cette notion de complรฉmentaritรฉ entre ces deux communications.
Ainsi, en lien avec ces dรฉfinitions autour des diffรฉrents types de communication, nous avons dรฉcidรฉ de nous pencher sur le versant รฉlรจve, en nous demandant si les CNV peuvent sensibiliser les apprenants. Sylvie, avec son expรฉrience et la mise en place de ces CNV durant ses leรงons, pense que quand les รฉlรจves sont en situation de stress ou d’incertitude/de questionnement, effectivement on peut influencer/influer des รฉlรจves (pas tous) par notre attitude non verbale pour pouvoir les aiguiller nรฉgativement ou positivement. Ainsi, notre comportement aurait un impact sur leurs apprentissages que ce soit, selon elle, de maniรจre positive ou nรฉgative. Cependant, deux distinctions sont nรฉcessaires selon cette derniรจre quant ร l’utilisation des CNV.
En effet, ยซ Je resterai sur la parole dans un premier temps et trop dโinterrogations chez les รฉlรจves, trop de questionnements, lร je rassemble tout le monde et je reprends du frontal avec tout le monde pour rรฉexpliquer et renvoyer les รฉlรจves en situation. Le non verbal sera plutรดt dans les interventions individuelles ou par petits groupes, des ateliers pour essayer faire mรปrir la rรฉflexion et รฉlaborer des rรฉponses de la part des รฉlรจves. Utilisรฉ plutรดt de maniรจre individuelle. ยป nous dit cette derniรจre.
Ainsi, celle-ci utiliserait davantage les CNV de maniรจre individuelle ou face ร un petit groupe d’รฉlรจves dans un souci de rรฉflexion sur leur activitรฉ proposรฉe.
Lโenseignant de lโEREA, nous affirme que ยซ certains y sont sensibles ยป, mais ils n’en ont pas ou peu conscience. Pour ses รฉlรจves, la CNV est une prรฉmisse, il se doit dโajouter un langage verbal en plus de cette CNV pour รชtre sรปr que ses รฉlรจves aient bien compris le message. En effet, selon lui ses รฉlรจves de lโEREA ยซ nโont pas tous les codes ยป, ils ne comprennent pas forcรฉment les signaux visuels utilisรฉs par lโenseignant. Ainsi pour lui, ยซ cโest difficile de se passer des mots malgrรฉ tout, il y en a besoin ยป, la communication verbale semble donc nรฉcessaire pour se faire comprendre. Julien nous donne lโexemple suivant : lorsquโil attend le silence de la part dโun รฉlรจve et quโil le fixe volontairement, lโรฉlรจve ne va pas interprรฉter ce regard, il continuera ร discuter avec son camarade, et les autres รฉlรจves ne vont pas forcรฉment rรฉagir non plus. A la diffรฉrence des รฉlรจves du lycรฉe professionnel qui, selon lui, ยซ comprennent par un regard ou une posture ยป et il ajoute que ยซ si la personne ร qui tu tโadresses nโa pas compris, les autres vont le comprendre et lui transmettre le message. ยป
Ces deux enseignants sont persuadรฉs que les CNV impactent les รฉlรจves, leurs comportements. Cependant nous remarquons quโils nโaffirment pas que les CNV impactent tous les รฉlรจves mais certains dโentre eux et ร certains moments. Ainsi certaines CNV toucheraient plus tels ou tels รฉlรจves et dโautres CNV impacteraient davantage dโautres รฉlรจves.
La gestualitรฉ
Nous avons pu voir que les gestes constituent une grande partie de la CNV, ainsi nous avons voulu savoir si les enseignants utilisent les gestes et pourquoi ils utilisent ou non tel ou tel geste, dans quels objectifsโฆ
Au niveau des observations de Sylvie sur le terrain, oรน, les gestes et mots ร distance รฉtaient utilisรฉs dans le but d’encourager les รฉlรจves, nous avons voulu approfondir le sens de ses comportements. Elle nous tรฉmoigne alors que les gestes ร distance peuvent รชtre utilisรฉs seulement si l’attention de l’รฉlรจve est captรฉe. Elle les utilise principalement ร des fins de ยซ comprรฉhension de mauvais comportement ยป. En effet, elle nous cite un exemple : ยซ S’il fait une bรชtise, s’il n’assure par la sรฉcuritรฉ par exemple, un regard ou un geste de la main peut suffire pour qu’il comprenne son erreur et qu’il arrรชte sa bรชtise. ยป. Elle utilise aussi beaucoup la gestuelle dans l’objectif que ses รฉlรจves comprennent mieux la situation. De plus, pour fรฉliciter un รฉlรจve, il lui arrive de taper des mains ou de ยซ lui faire un pouce ยป. Afin de capter lโattention de lโรฉlรจve, Sylvie peut utiliser la parole avant de faire son geste. En effet elle nous dit quโelle intervient ยซ de maniรจre d’abord orale en lui disant ยซ c’est bien ยป ยป et aprรจs elle lui fait ยซ un sourire accompagnรฉ d’un geste ยป. Elle utilise aussi les frappes de mains pour se faire entendre, pour que les รฉlรจves arrรชtent leur activitรฉ.
En outre, Sylvie nous indique quโil lui arrive dโutiliser son corps pour faire des dรฉmonstrations. Selon elle, la dรฉmonstration est plus efficace que la simple parole.
En effet, elle permettrait une meilleure comprรฉhension et serait porteuse de sens pour les รฉlรจves.
Tout comme Sylvie, Julien nous indique que lโutilisation des gestes peut รชtre utile uniquement si lโรฉlรจve le regarde. Selon lui, ses รฉlรจves ยซ fonctionnent beaucoup ร lโoreille ยป, il utilise donc souvent la voix pour capter lโattention de ses รฉlรจves et ร ce moment-lร lโutilisation de gestes peut รชtre efficace. Il utilise peu de gestes ยซ emblรจmes ยป comme le ยซ vient ยป, le ยซ chut ยป ou le ยซ super ยป. De plus il nous indique quโil utilise la gestuelle principalement pour illustrer ses propos. A la diffรฉrence de Sylvie, il ne tape jamais dans ses mains. Julien fait beaucoup de dรฉmonstrations dans certaines APSA et en fait peu ou pas du tout dans dโautres. Par ses dรฉmonstrations, il veut montrer ยซ lโexemple ยป, ยซ le geste attendu ยป. ยซ Tous les gestes sont accompagnรฉs de messages verbaux, dโexplications thรฉoriques ยป nous dit-il, la parole viendrait donc complรฉter le message gestuel. Pour lui, la dรฉmonstration permet de multiplier les ยซ mรฉdias ยป et ainsi rรฉpondre aux diffรฉrentes ยซ faรงons
dโapprendre ยป des รฉlรจves. En effet, comme le dit Bless (2018) les gestes ยซ favorisent lโapprentissage quand ils facilitent dโune faรงon ou dโune autre la mรฉmorisation dโun savoir. ยป. De plus la dรฉmonstration laisserait ยซ beaucoup moins de place ร lโinterprรฉtation ยป de la part des รฉlรจves, ils comprendraient plus facilement ce qui est attendu.
Nous pouvons remarquer des similitudes dans lโutilisation des gestes par ces deux enseignants. En effet, Julien et Sylvie captent tous les deux lโattention de lโรฉlรจve en utilisant leur voix et ensuite ils utilisent un geste. Les deux enseignants utilisent aussi les gestes pour illustrer leurs propos et font des dรฉmonstrations afin que les รฉlรจves aient une meilleure comprรฉhension du message transmis.
La proxรฉmie
Lors de l’observation sur le terrain, nous avons pu voir que Sylvie utilisait frรฉquemment le contact physique lors des dรฉmonstrations. Lors de notre entretien auprรจs d’elle, nous avons donc รฉvoquรฉ cet aspect observรฉ, selon cette derniรจre, ce contact physique permet de faire comprendre, donner du sens, mais รฉgalement de rassurer l’รฉlรจve comme par exemple : la parade en gym. De plus, cette manipulation tactile de lโenseignant envers les รฉlรจves permettrait de ยซ faire apparaรฎtre quelque chose de prรฉcis chez eux ยป.
Lors des observations de Julien sur le terrain, nous avons pu remarquer quโil utilisait le contact facilement avec ses รฉlรจves. Au dรฉbut de son cours, il serrait la main ร certains de ses รฉlรจves, lors du trajet pour aller au gymnase il mettait son bras autour de leur cou, pendant son cours, il รฉtait souvent proche de ses รฉlรจves et rentrait rรฉguliรจrement en contact avec eux. Lors de lโentretien, nous avons donc questionnรฉ Julien sur cette proximitรฉ. Comme Sylvie, Julien utilise le contact physique pour lโaspect sรฉcuritaire, notamment pour les parades. Mais il lโutilise aussi pour accentuer sa prรฉsence en rentrant en contact avec lโรฉlรจve. Par exemple, ยซ pour fรฉliciter, je mettrais facilement ma main sur leur bras ou ma main dans le dos ยป nous dit-il. Le contact physique peut aussi permettre de calmer, de canaliser les รฉlรจves selon lui. Lโimpact que lโenseignant veut avoir sur lโรฉlรจve est ciblรฉ grรขce au type de contact, en effet, il y a diffรฉrentes faรงons de rentrer en contact avec eux, soit un contact ยซ ferme ยป qui a pour but de ยซ les calmer et les poser ยป ou plutรดt un contact rassurant. En utilisant le contact, Julien souhaite apporter du ยซ poids, du crรฉdit ยป ร ce quโil dit, il lโutilise donc en complรฉment de la CV. Pour lui, plus les signaux sont nombreux, plus on utilise les diffรฉrents sens, plus le message se prรฉcise et mieux il sera interprรฉtรฉ par lโรฉlรจve. En effet, par la CV ; on joue sur lโaudition, par la posture, les gestes ; on joue sur la vue et par le toucher, le contact ; on joue sur le toucher, ainsi la prรฉsence de lโenseignant est renforcรฉe. Julien nous indique quโil utilise beaucoup le contact physique avec ses รฉlรจves de lโEREA mais trรจs peu avec les รฉlรจves du lycรฉe. ยซ Ce nโest pas forcรฉment nรฉcessaire ยป nous dit-il, ยซ le langage corporel plus le langage verbal รงa suffit amplement ร se faire comprendre ยป par les lycรฉens. Ainsi nous pouvons en dรฉduire quโil adapte sa proximitรฉ en fonction des รฉlรจves.
La proximitรฉ est utilisรฉe diffรฉremment par ces deux enseignants. Sylvie utiliserait le contact ร des fins pรฉdagogiques uniquement alors que Julien semble lโutiliser de maniรจre plus naturelle, pour fรฉliciter, pour prendre en considรฉration ses รฉlรจves.
Cependant nous pouvons remarquer une similitude : ils veulent tous les deux permettre une meilleure comprรฉhension du message par les รฉlรจves grรขce aux contacts physiques.
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Table des matiรจres
I. INTRODUCTIONย
I.1 Apports thรฉoriques
I.1.1 La communication
I.1.1.1 La communication verbale
I.1.1.2 La communication non verbale
I.1.2 Des concepts comme points ressources
I.2 Problรฉmatique
I.3 Hypothรจses
II. METHODE
II.1 Les Participants
II.2 Mรฉthode de recueil des donnรฉes
II.2.1 L’observation sur le terrain
II.2.2 Les entretiens
II.3 Procรฉdure dโanalyse des donnรฉes
III. RESULTATSย
III.1 Prรฉsentation dรฉtaillรฉe
III.2 Comparaisons des interventions et conceptions des enseignants
IV. DISCUSSIONย
IV.1 Interprรฉtation des rรฉsultats
IV.2 Apports pour les enseignants
V. CONCLUSIONย
V.1 Rรฉsumรฉ des apports de la recherche
V.2 Les limites de notre travail
V.3 Les perspectives
VI. BIBLIOGRAPHIE
VII. ANNEXESย
VII.1 Annexe 1 : Grille dโobservation
VII.1.1 Annexe 1.1 : Grille dโobservation de Sylvie
VII.1.2 Annexe 1.2 : Grille dโobservation de Julien
VII.2 Annexe 2: Guide de questionnement
VII.3 Annexe 3 : Entretien avec Sylvie rรฉalisรฉ par Orna-Fiona
VII.4 Annexe 4 : Entretien avec Julien rรฉalisรฉ par Mรฉmona
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