Représentation en biomécanique
Dans un système anatomique projeté sur un plan sont schématisés les leviers osseux et leur axe de rotation. Les muscles sont alors représentés par des vecteurs qui ont leur origine au niveau correspondant à leur insertion supposée fixe. De plus afin d’étudier la dynamique des forces au sein du système il est indispensable d’introduire la notion de moment d’une force. Supposons qu’une force agisse en un point M sur un corps susceptible de tourner autour d’un point O ou d’un axe D. Si la force n’est pas dirigée vers O ou D elle a pour effet de faire tourner le corps. Cette force fait tourner le corps d’autant plus efficacement que la distance entre la droite d’action de la force et le point O ou l’axe D est grande.
Cette distance est appelée bras de levier. C’est l’exemple de la porte qu’on ouvre : on pousse la porte en un point le plus éloigné possible des gonds (axe de rotation). La norme du moment d’une force est égale à l’intensité de la force multiplié par le bras de levier (distance OM) 27. Figure 12
Equilibre et forces musculaires
La notion de forces musculaires étant à l’origine du nouveau modèle de l’articulation, il semble ainsi important qu’elles jouent un rôle non seulement dans la locomotion mais aussi dans l’équilibre du système articulaire. De plus Slocum, en modélisant le membre postérieur avec une configuration à trois éléments, a montré que l’intervention de forces musculaires était indispensable pour expliquer l’absence de collapsus du membre (fig 15).
La configuration de droite est identique à celle de gauche excepté la position du point de charnière (C ou D) . Le bloc de base (en noir) est relié au bloc intermédiaire par un point charnière qui sur le montage de gauche se situe sur la ligne de force du poids de l’animal. Le montage de droite, lui, possède le point de charnière en avant de cette ligne de force ce qui correspond à la réalité c’est à dire au point de contact fémoro-tibial.
La force de gravité engendrée par le poids de l’animal passe par le point C du montage de gauche et il n’y a pas de collapsus du montage. Par contre sur le montage de droite lorsque l’on applique la force de gravité le système se collabe en 0,64 secondes. Ainsi il apparaît évident que l’intervention de forces musculaires antagonistes de la force de gravité est nécessaire à l’équilibre de l’articulation.
Représentation biomécanique
Les éléments importants de ce modèle sont donc les forces du poids de l’animal ainsi que les forces musculaire en addition des contraintes passives représentées par les ligaments, les os et la capsule articulaire. Les muscles sont les protagonistes de forces qui entrent en jeu dans l’équilibre du grasset ; c’est cet aspect de l’articulation qui était absent dans l’ancien modèle. L’équilibre musculaire du grasset peut être défini, comme pour tout système biomécanique, lorsque la somme des moments des forces appliquées à l’articulation est nulle.
C’est à dire lorsque les moments des forces de flexion du genou (engendrés par la traction du biceps fémoral, du groupe musculaire de « la patte d’oie » (pes anserinus), du semi-membraneux et du fléchisseur superficiel des doigts) sont compensés par les moments des forces d’extension du genou (engendrés par la traction du quadriceps et l’extenseur des doigts). Figure 18.
Poussée tibiale crâniale et rupture du LCCr : premiers raisonnements
Ainsi la modélisation de l’articulation du grasset grâce aux forces s’y appliquant, fait apparaître la notion de poussée tibiale crâniale qui était absente dans le modèle précédent. Cette poussée vers l’avant tend donc à faire avancer le tibia crânialement. Pour s’opposer à elle il existe deux systèmes. Un actif représenté par les muscles tirant le tibia vers l’arrière et un passif représenté par le LCCr et la corne caudale du ménisque latéral. Lorsque l’intensité de la poussée tibiale crâniale est trop importante ce sont les structures passives (LCCr et corne méniscale) qui se lèsent. 48 Cette notion de poussée tibiale crâniale dans l’étude de la rupture de LCCr ouvre une nouvelle porte dans le domaine l’étiopathogénie de cette affection. Ainsi la rupture de LCCr survenant chez des chiens en surplus pondéral, sans activité et sans commémoratifs de trauma pourrait s’expliquer par une augmentation de la force compressive au niveau du tibia (du fait du poids trop élevé) à l’origine d’une poussée tibiale crâniale fragilisant le LCCr.
La rupture partielle de LCCr pourrait avoir la même explication. La rupture serait due à une dégénérescence du ligament ce qui confirme l’hypothèse de certains auteurs 20. De plus la rupture de LCCr survenant sur des chiens jeunes sans commémoratifs de traumas pourrait avoir pour origine un angle d’inclinaison du plateau tibial trop important d’où là aussi une poussée tibiale crâniale trop importante pour le LCCr. Cette forte inclinaison du plateau tibial pourrait être à l’origine de l’échec de certains traitements chirurgicaux de la rupture de LCCr. En effet la trop forte poussée tibiale crâniale pourrait fragiliser la prothèse (synthétique ou naturelle) visant à remplacer le LCCr lésé et aboutir à sa rupture.
Modifications dans le plan sagittal
La rupture du LCCr entraîne une instabilité postéro-antérieure. Ainsi le tibia a tendance à glisser crânialement. En conséquence, le point d’application de F va s’éloigner et se retrouver en arrière du plan neutre. ARNOSCKY 4 a démontré lors d’une étude que lors de RLCCr le déplacement du tibia était de 2mm en extension, et de 9,5 mm à 90° de flexion sur genou disséqué. SAWAYA 61 estime, à partir de ses expériences , que sur un animal vivant lors d’une flexion de 140° ce déplacement peut être compris entre 3 et 5mm. La position anormale qui en résulte crée un moment de flexion au niveau des surfaces articulaires entraînant ainsi des contraintes en compression en arrière dans une zone de contact caudale moins résistante et des contraintes en traction sur la partie crâniale du plateau tibial. En région sous-épiphysaire, on remarque une inversion du sens des contraintes sur l’os. Figure 31.
Le déplacement du tibia démontré par ARNOSCKY et SAWAYA implique un point d’application O’ de la force F (notée F’ lors de RLCCr) plus en arrière par rapport au point d’application normal O sur un genou normal. Les contraintes en compression sont notées par des flèches avec la lettre c à côté. Les contraintes en traction par des flèches et la lettre t à côté. Sur un genou normal A) F s’applique en O. Au niveau des surfaces articulaires les contraintes sont proches de la compression pure. Plus en aval, F crée un moment de flexion Ms par rapport au plan neutre (Pf). Les contraintes sont alors en compression crânialement à Pf et en traction caudalement. Après RLCCr B) : F s’applique en O’ (caudalement à O), F’ se retrouve alors décalée en arrière par rapport à F.
Ceci engendre un moment de Flexion M’ au niveau des surfaces articulaires . Les contraintes sont alors de double nature au niveau de l’articulation : des contraintes en compression caudalement à Pf et en traction crânialement à Pf.
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Table des matières
Introduction
Première partie : Rappels physio-anatomiques du grasset du chien
ANATOMIE
1.Les surfaces articulaires
1.1. Le fémur
1.2. Le tibia
1.3. La rotule
2.Les ménisques
3.Les moyens d’union
3.1. La capsule articulaire
3.2. Les ligaments de la rotule
3.2.1. Les ligaments fémoro-patellaires
3.2.2. Le ligament tibio-rotulien
3.3. Les ligaments fémoro-tibiaux
3.3.1. La membrane caudale
3.3.2. Les ligaments collatéraux
3.3.3. Les ligaments croisés
4.Les tendons entourant le grasset
PHYSIOLOGIE
Flexion-extension
Rotation axiale
Les mouvements de latéralités
Deuxième partie : Aspects biomécaniques de l’articulation du grasset
LA MODELISATION DE L’ARTICULATION DU GENOU
1.Biomécanique : Définition et notions
1.1. Définition
1.2. Représentation en biomécanique et notion d’équilibre d’un système
2.La modélisation traditionnelle du grasset : un modèle passif
2.1. Principes de la modélisation
2.2. Limites de cette modélisation du grasset
3.Une nouvelle modélisation du genou : un modèle actif
3.1. Equilibre et forces musculaires
3.2. Représentation biomécanique
PREMIERE APPROCHE BIOMECANIQUE : L’ETUDE CINETIQUE DU GRASSET
1.Principe et méthode de détermination du C.I.R
1.1. Principe du C.I.R.
1.2. Détermination pratique du C.I.R.
2.Application de l’étude du C.I.R. : étude des libertés de glissement du genou
UNE AUTRE APPROCHE BIOMECANIQUE DU GRASSET : L’ETUDE DES FORCES S’EXERCANT SUR L’ARTICULATION
1.La poussée tibiale crâniale de Slocum
1.1. Les tests de diagnostic de la RLCCr
1.2. Etude de la poussée tibiale crâniale
1.3. Etude de l’inclinaison du plateau tibial
1.3.1. Détermination de l’angle d’inclinaison du plateau tibial
1.3.2. Valeurs de l’angle d’inclinaison du plateau tibial et ses variations
1.4. Poussée tibiale crâniale et rupture du LCCr : premiers raisonnements
2.La force « bone-on-bone » étudiée par Sawaya
2.1. Exemple d’une poutre soumise à une force F
2.2. Effets des composantes de F au niveau du plateau tibial
2.3. Etude du point d’application de F et de son orientation
2.4 Les modifications biomécanique théoriques lors de RLCCr
2.4.1. Modification dans le plan sagittal
2.4.2. Modification dans le plan frontal
2.4.3. Modification dans le plan horizontal
Troisiéme partie :Application des données biomécaniques dans le cadre de la rupture du ligament croisé crânial chez le chien
UTILISATION DE LA BIOMECANIQUE DANS L’ETUDE DES ASPECTS LESIONNELS SUITE A UNE RLCCr
1.Etude extensométrique de l’articulation en appui quadripédal
1.1. Principe de l’étude
1.2. Résultats
1.2.1. Membres intacts
1.2.2. Membres dont le LCCr a été sectionné
2.Etude extensométrique lors de la phase d’appui de la marche
2.1. Principe de l’étude
2.2. Résultats
2.2.1 Membres sains
2.2.2. Membres privés de LCCr
3.Synthèse des résultats et interprétation des lésions lors de RLCCr
Troisiéme partie :Application des données biomécaniques dans le cadre de la rupture du ligament croisé crânial chez le chien
APPLICATION DES DONNES BIOMECANIQUES A LA THERAPEUTIQUE DE LA RLCCr : ASPECT CHIRURGICAL
1.Application de l’étude du C.I.R. et de la vélocité
1.1. Utilisation du C.I.R. pour le diagnostics difficiles de la RLCCr
1.2. Utilisation du C.I.R. pour le pronostic post chirurgical des réparations du LCCr
2.Utilisation de la biomécanique dans l’étiopathogénie de la RLCCr et développement de nouvelles techniques chirurgicales
2.1. Historique et principe des traitements chirurgicaux
2.1.1. Méthodes intraarticulaires
2.1.2. Méthodes extraarticulaires
2.2. Limites des techniques chirurgicales traditionnelles
2.3. Nouvelles techniques chirurgicale prenant en compte la biomécanique du genou
2.3.1. Principes des nouveaux traitements chirurgicaux
2.3.2. Les techniques chirurgicales
2.3.2.1. La technique de base de Slocum : l’ostectomie cunéiforme du tibia proximal.
2.3.2.2. L’ostecomie de nivellement du plateau tibial de Slocum (TPLO).
2.3.2.3. La technique d’ostectomie tibiale modifiée de Montavon.
2.4. Discussion
2.4.1. Quand utiliser ces techniques chirurgicales ?
2.4.2. Facilité d’utilisation de ces techniques
2.4.3. Résultats post opératoires et nouvelle biomécanique de l’articulation
2.4.3.1. Résultats cliniques.
2.4.3.2. Nouvelle biomécanique du genou
2.5. Conclusion
Conclusion générale
Table des illustrations
Bibliographie
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