Utilisation de donnees du Web communautaire à des fins de surveillance de l’usage de medicaments

La société Kappa Santé

Kappa Santé est une société de recherche indépendante, de droit privé, créée en 2003. Spécialisée dans la pharmacoépidémiologie et dans les interventions en santé publique et numérique, elle réunit aujourd’hui une équipe de 32 personnes. L’entreprise produit des études épidémiologiques sur l’efficacité et la sécurité d’emploi des médicaments. Kappa Santé est constituée de professionnels de la santé et de la recherche (médecins, pharmaciens), de l’informatique (développeurs, gestionnaires de bases de données) de la statistique (statisticiens, data managers).

Les activités de Kappa Santé se déclinent selon deux axes : l’épidémiologie et les technologies de l’information et de la communication (TIC). En tant que prestataire de service pour l’industrie pharmaceutique et les institutions de santé, Kappa Santé intervient sur de multiples aires thérapeutiques telles que la Pneumologie, l’Oncologie, la Psychiatrie, l’Hématologie ou encore l’Allergologie. Ainsi, l’entreprise est amenée à travailler pour plus d’une dizaine de laboratoires pharmaceutiques (GSK, Astra Zeneca, Boiron, Sandoz, Sanofi, …) ainsi que pour des sociétés savantes ou des institutions, telles que la Communauté européenne, le ministère de la Santé, l’Agence Nationale de Sécurité du Médicament et des Produits de Santé (ANSM). Kappa Santé est également membre de l’Alliance Big Data et du groupe de travail de l’Association Française de Normalisation (AFNOR) sur la normalisation du Big Data.

Le projet Detec’t 

Depuis 2012, Kappa Santé entreprend une diversification vers la santé digitale. L’entreprise propose des solutions basées sur les technologies Big Data et les méthodes d’apprentissage automatique. C’est dans ce contexte que le projet Detec’t est initié par Kappa Santé. Detec’t est un projet de mise en place d’un système de surveillance des effets indésirables des médicaments basé sur l’exploitation et l’analyse de données issues du web communautaire. Ce projet a été initié en 2012 par Stéphane Schück, président et directeur scientifique de Kappa Santé dans le cadre de cette diversification.

Nos travaux
Cette thèse s’est déroulée dans le cadre d’un projet CIFRE proposé par la société Kappa Santé pour la conception et le développement de la solution Detec’t. Notre apport dans ce projet a consisté en la conception d’un prototype d’outil de détection d’informations dans les messages rédigés par les patients sur les forums de santé français. La série d’algorithmes constituant ce prototype sont détaillés dans ce manuscrit.

Médias sociaux et pharmacovigilance

Les effets indésirables liés aux médicaments constituent un important problème de santé publique. La pharmacovigilance a pour objectif d’analyser ces effets indésirables, de les expliquer et de mettre en place des mesures pour les prévenir. Son organisation repose principalement sur la notification spontanée des effets indésirables par les professionnels de santé. Des directives européennes et françaises ont été mises en place afin de renforcer la pharmacovigilance et ont donné aux patients la possibilité de déclarer eux-mêmes des effets indésirables sur les sites des autorités de santé [1, 2]. L’avènement des nouvelles technologies de l’information a profondément modifié la relation médecin-malade. Les patients cherchent des informations sur internet et partagent leurs expériences notamment sur les médicaments prescrits et les effets indésirables ressentis. Il existe ainsi une importante source de données, encore peu exploitée à ce jour, pour la pharmacovigilance sur les forums de discussions. La nouvelle réglementation européenne en pharmacovigilance et les bonnes pratiques qui en résultent, applicables depuis 2012, s’intéressent au traitement des données de pharmacovigilance identifiées sur internet et les médias numériques. Cette ouverture vers d’autres sources d’informations non structurées, produites en grand volume (Big Data), s’accompagne d’une évolution des procédures et méthodes de détection des cas d’effets indésirables et d’identification de signaux.

À ce jour, l’élaboration et la validation de ces méthodes ont fait l’objet de travaux dans le cadre de démarches exploratoires sur des périodes et des périmètres de surveillance limités [3–5]. La mise au point de méthodes de détection de signaux dans un contexte plus large de surveillance continue dans le temps et sur de nombreux sites est à consolider. Si des méthodes de détection de signaux en pharmacovigilance existent à partir de bases de données telles que les bases FDA Adverse Event Reporting System (FAERS) aux USA [6,7] ou Eudravigilance en Europe, ces méthodes doivent être maintenant adaptées à la particularité des données issues du web communautaire.

Médias sociaux et non-observance au traitement

Un rapport publié par l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS) en 2003 a souligné que la non-observance (ou la non-adhérence) au traitement de longue durée était un problème mondial préjudiciable à l’efficacité globale du système de santé [8]. L’observance est définie dans ce rapport comme le degré de correspondance entre le comportement d’un patient (prendre des médicaments, suivre les règles d’hygiène et son régime alimentaire) et les recommandations faites par un professionnel de santé. Le non-respect de ces recommandations a un impact sur la qualité de vie des patients, les résultats du traitement et les coûts du système de soins. L’OMS a identifié plusieurs causes de non-adhérence aux traitements, notamment les caractéristiques du système de santé, la maladie du patient et le déroulement du traitement. Pour les patients souffrant de dépression, l’observance est liée à la fréquence d’administration d’un médicament et à un traitement concomitant. Pour les patients atteints de cancer, la crainte des effets indésirables liés au traitement a un impact négatif sur l’observance. Pour les patients diabétiques, l’observance peut varier avec l’âge, le sexe et la qualité de la relation avec le médecin. Plusieurs méta analyses ont montré que les méthodes actuelles d’amélioration de l’observance des médicaments pour les maladies chroniques étaient pour la plupart complexes et peu efficaces [9, 10]. Le groupe Cochrane [9] a conclu qu’une mesure plus systématique et objective de l’observance ainsi que les innovations pour aider les patients à suivre les prescriptions de médicaments pour les maladies croniques étaient des points importants à considérer dans ce domaine. Considérant les médias sociaux comme des plateformes où les patients peuvent discuter de leurs traitements et partager leurs témoignages, ces médias pourraient constituer une nouvelle source de données pour mesurer l’observance aux traitements de manière globale et régulière. L’utilisation des médias sociaux permet à de vastes groupes d’individus de créer et de partager des informations, des expériences et des opinions sur leurs problèmes de santé et médicamenteux grâce à des discussions en ligne [11]. Les médias sociaux fournissent aux experts en pharmacovigilance une source d’information pertinente [12]. Les médias sociaux sont un moyen prometteur pour améliorer la communication et l’engagement des patients [13]. Horvath et al. [14] et Taggart et al. [15] ont montré que le partage d’informations et la socialisation étaient les critères les plus souvent cités lorsque des patients atteints du Virus de l’Immunodéficience Humaine (VIH) décrivent un réseau social idéal. Wang et al [16] ont modélisé les discussions et les intérêts des utilisateurs d’un forum pour femmes enceintes en utilisant les topic models et ont montré que ces patientes partageaient leurs expériences, leurs peurs et leurs inquiétudes au sujet des médicaments. Stellefson et al. [17] ont passé en revue les initiatives sur les médias sociaux proposant un programme d’autogestion aux patients de plus de 50 ans pour leur maladie chronique. Les patients ont souligné l’avantage d’interagir avec d’autres patients. Par exemple, le partage d’informations via les réseaux sociaux a permis aux patients de mieux communiquer avec les professionnels de la santé. Les patients utilisent les médias sociaux pour discuter de l’observance des traitements. Mao et al. [18] ont étudié les messages de patientes atteintes de cancer du sein traitées par des inhibiteurs d’aromatase. Près de 12,8% des patientes arrêtent les inhibiteurs d’aromatase. Chary et al. [19] ont étudié les corrélations entre la distribution géographique de l’abus d’opioïdes sur ordonnance estimée à partir des médias sociaux et les données de la National Survey on Drug Usage and Health (NSDUH). Ils ont conclu que les mentions d’abus de drogues sur Twitter étaient fortement corrélées avec les estimations du NSDUH sur l’abus d’opioïdes. Les médias sociaux peuvent avoir une incidence sur l’observance du traitement. Dans l’étude de Horvath et al. [14], les résultats d’une enquête sur le Web pour les patients atteints du VIH ont montré que 52,6% des participants étaient considérés comme nonobservants. La méta-analyse publiée par Taggart et al. [15] a identifié 2 études sur les populations de VIH qui ont démontré un lien entre l’utilisation des médias sociaux et l’amélioration de la conformité au traitement chez les utilisateurs. Mao et al. [18] ont montré que les patientes atteintes de cancer du sein partagent des astuces pour faire face aux effets secondaires des médicaments et se soutenir mutuellement. Par exemple, 28,1% des messages ont mentionné une méthode pour traiter leurs arthralgies liées à la prise d’inhibiteur d’aromatase. Ces conseils, partagés par les patients, peuvent inclure de l’exercice et/ou des produits pharmaceutiques, qu’ils soient prescrits ou en vente libre. L’analyse d’un grand nombre de récits nécessite des techniques d’exploration de texte automatisées [12]. Ces techniques sont déjà utilisées pour extraire des informations à partir des dossiers médicaux électroniques. Par exemple, Topaz et al. [20] ont utilisé ces méthodes pour identifier des cas de patients insuffisants cardiaques qui ne respectaient pas leur traitement à partir de comptes-rendus médicaux. La détection des comportements de non-observance dans les médias sociaux nécessite également des techniques d’exploration de texte. Parmi ces techniques, figurent les topic models. Les topic models pourraient être utilisés pour découvrir des structures sémantiques cachées dans de grands ensembles de messages provenant des médias sociaux. Ils pourraient fournir une exploration plus approfondie des comportements de non-observance.

La pharmacovigilance

Pharmacovigilance et effets indésirables : Définitions 

L’OMS définit la pharmacovigilance comme « la science et les activités relatives à la détection, à l’évaluation, à la compréhension et à la prévention des effets indésirables ou de tout autre problème lié aux médicaments » [21]. La pharmacovigilance comprend la surveillance de l’évolution du rapport bénéfice-risque d’un médicament ainsi que l’identification de potentiels signaux d’effets indésirables.

Toujours selon l’OMS, un effet indésirable est défini comme une « réaction nocive et non voulue à un médicament, se produisant aux posologies normalement utilisées chez l’homme pour la prophylaxie, le diagnostic ou le traitement d’une maladie ou pour le rétablissement, la rectification ou la modification d’une fonction physiologique» [22]. L’exhaustivité des potentiels effets indésirables d’un traitement ne peut être garantie lors d’un essai clinique en raison du nombre de sujets inclus dans les essais qui ne reflètent pas la variabilité de la population cible. Il est nécessaire de maintenir une surveillance après l’Autorisation de Mise sur le Marché (AMM) d’un médicament [23] afin d’éviter de potentielles hospitalisations [24] ou encore des décès [25].

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Table des matières

Introduction
1 Contexte
1.1 La société Kappa Santé
1.2 Le projet Detec’t
1.3 Nos travaux
2 Introduction
2.1 Médias sociaux et pharmacovigilance
2.2 Médias sociaux et non-observance au traitement
3 État de l’art
3.1 La pharmacovigilance
3.1.1 Pharmacovigilance et effets indésirables : Définitions
3.1.2 Notifications spontanées d’effets indésirables de médicaments
3.1.3 Médias sociaux et Big Data
3.2 Extraction d’information de pharmacovigilance depuis les messages sur
les médias sociaux
3.2.1 Inventaire des approches
3.2.1.1 Choix des sources de données
3.2.1.2 Extraction des messages postés par les patients
3.2.1.3 Prétraitement des données
3.2.1.4 Identification d’entités médicales dans les messages
3.2.1.5 Relation « effet indésirable » entre médicament et concept médical
3.2.1.6 Évaluation
3.2.2 Synthèse des approches observées
3.3 Approches par filtrage
3.3.1 Les filtres sémantiques
3.3.2 Les filtres statistiques
3.4 Pharmacovigilance sur les médias sociaux : Synthèse
3.5 Non-observance au traitement, Web communautaire et Topic Models
4 Objectifs
4.1 Pharmacovigilance
4.2 Non-observance du traitement
5 Matériel
5.1 Base de données Detec’t
5.2 Données
5.2.1 Données de conception des algorithmes
5.2.2 Données d’évaluation de l’algorithme de prise
5.2.3 Annotation manuelle des jeux de données
5.2.3.1 Annotation de la prise du traitement
5.2.3.2 Annotation des effets indésirables
5.3 Dictionnaire Médical
5.4 Detec’t Annotation Tool
6 Méthode
6.1 Filtre sémantique : Algorithme de détection de prise du médicament par le déclarant
6.1.1 Description de l’algorithme de détection de prise
6.1.2 Évaluation de l’algorithme de détection de prise
6.2 Reconnaissance d’entités médicales
6.2.1 Prétraitement des données
6.2.2 Détection des noms de médicaments
6.2.3 Détection de concepts médicaux
6.2.4 Issue de la détection d’entités médicales
6.3 Filtre statistique : Algorithme des distances entre entités médicales
Conclusion

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