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Les big data interrogรฉs en sciences humaines et sociales
Sโil existe des incertitudes quant ร lโorigine des big data et de ce qui fonde leur ยซ nouveautรฉ ยป, les dis-cours concourant ร ce mouvement mettent nรฉanmoins en scรจne son caractรจre ยซ rรฉvolutionnaire ยป et le ยซ tournant ยป, le changement quโils incarneraient. Que les big data tiennent ou non leurs promesses, les discours qui les accompagnent, sโadressant ร la fois aux scientifiques, aux citoyens, mais รฉgale-ment aux dรฉcideurs financiers et aux responsables politiques, proposent de nouveaux agencements socio-techniques et ce faisant performent la ยซ Sociรฉtรฉ ยป (Latour, 2007). Ceci amรจne les chercheurs en sciences sociales ร se positionner vis-ร -vis de ces discours et ร les interroger.
Dans cette partie, nous souhaitons donc, dans un premier temps, dรฉployer les di๏ฌรฉrents question-nements proposรฉs par les chercheurs รฉtudiant ce mouvement des big data, avant dโinterroger le ca-ractรจre construit des donnรฉes et des รฉlรฉments de mรฉthodes associรฉes ร leur mobilisation. Enfin, ce caractรจre construit nous amรจne ร entamer une rรฉflexion sur la dรฉsignation de ce qui se constitue comme ยซ donnรฉe ยป dans le cadre de nos analyses.
Les enjeux du big data pour les sciences humaines et sociales
Dans un contexte de montรฉe en puissance du mouvement des big data, les promoteurs de ces der-niers multiplient les dรฉclarations enthousiastes quant ยซ connaissances ยป que la mise en ลuvre des technologies associรฉes aux big data permettraient dโobtenir :
Nous disposons de capacitรฉs nouvelles dโanalyse de ces donnรฉes, lesquelles pourraient nous en apprendre plus sur nous-mรชmes et notre environnement que nous ne lโaurions cru possible ยป (Babinet, 2015, p. 22โ23).
Ce fantasme de pouvoir mesurer le ยซ rรฉel ยป ร mรชme le monde (Rouvroy & Stiegler, 2015, 4), sans
lโinterfรฉrence ยป de thรฉories, de catรฉgories, considรฉrรฉes comme nรฉcessairement subjectives et in-fluencรฉes par une vision particuliรจre du monde, renouvelle lโambition positiviste dโune science ยซ vรฉ-ritablement ยป objective, comme le rappelle Dominique Cardon :
Les big data rรฉaniment le projet dโobjectivitรฉ instrumentale des sciences de la nature, mais cette fois sans le laboratoire : cโest le monde qui devient directement mesurable et calculable. Leur ambition est de mesurer au plus prรจs le ยซ rรฉel ยป, de faรงon exhaustive, discrรจte et ร grain trรจs fin ยป. (Cardon, 2015, p. 44)
Cโest le projet dโune science ยซ du social ยป instrumentale qui se passerait de catรฉgorie, orientรฉe non plus vers lโexplication mais vers la corrรฉlation et la prรฉdiction ; une science qui abandonnerait lโรฉtude du terrain trop local et facilement influenรงable, pour observer les interactions au travers des ยซ traces ยป numรฉriques des pratiques quotidiennes. Ce projet suscite le malaise des chercheurs en sciences hu-maines et sociales face ร certaines dรฉclarations annonรงant la fin de ces sciences et lโobsolescence de leurs mรฉthodologies :
Cโest un monde dans lequel des quantitรฉs massives de donnรฉes et les mathรฉmatiques appliquรฉes remplacent tous les autres outils qui pourraient รชtre utilisรฉs. Exit toutes les thรฉories sur les comportements humains, de la linguistique ร la sociologie. [. . . ] Qui peut savoir pourquoi les gens font ce quโils font ? Le fait est quโils le font, et que nous pouvons le tracer et mesurer avec une fidรฉlitรฉ sans prรฉcรฉdent. Si lโon a assez de donnรฉes, les chi๏ฌres parlent dโeux-mรชmes ยป. (Anderson, 2008 ; traduit par Cardon, 2012)
Si cette dรฉclaration, devenue trรจs cรฉlรจbre, a provoquรฉ autant de rรฉactions de la part des chercheurs en sciences sociales, cโest parce quโelle sโinscrit dans un contexte de plus en plus prรฉgnant de remise en question de ces disciplines (Lahire & Fourgeron, 2016). Alors que les principes gestionnaires issus du privรฉ sโappliquent de plus en plus aux politiques publiques (Boussard, 2008), que les dรฉci-deurs politiques et รฉconomiques se voient pris de plus en plus dans des considรฉrations ร court terme (de Gaulejac & Hanique, 2015), et que lโaction se voit privilรฉgiรฉe au dรฉtriment de lโexplication et de lโanalyse, certains auteurs des sciences humaines craignent de voir les approches du big data capter toute lโattention et les financements des dรฉcideurs (Boullier, 2015a, 5) au dรฉtriment de leurs disci-plines. Ils redoutent รฉgalement que des enjeux renouvelรฉs de contrรดle social et de pilotage des Sociรฉtรฉs par des thรฉories implicites du social ne soient dรฉjร ร lโลuvre (de Gaulejac & Hanique, 2015). Face ร cette situation, des chercheurs en sciences humaines et sociales plaident pour que celles-ci รฉvoluent en ยซ humanitรฉs numรฉriques ยป afin dโรฉviter leur disparition (Boullier, 2015c, 4).
Boullier identifie trois types de posture adoptรฉe face ร la montรฉe du big data : (1) la premiรจre posture, adoptรฉe par la majoritรฉ des ยซ humanitรฉs numรฉriques ยป, consiste ร appliquer aux donnรฉes numรฉriques les mรชmes mรฉthodes et les mรชmes concepts des gรฉnรฉrations prรฉcรฉdentes des sciences sociales ; (2) dโautres, ร lโinverse, appliquent les mรฉthodes du big data en reprenant leurs exigences et leurs prin-cipes, et en abandonnant la posture critique des sciences humaines ; et (3) la derniรจre, selon Boullier, consiste ร considรฉrer que ces ยซ donnรฉes numรฉriques ยป nรฉcessitent de nouvelles conventions pour les analyser et participer ร la production dโautres mรฉthodes et concepts pour les apprรฉhender (Boullier, 2015c, 4). Ainsi concernant les ยซ humanitรฉs numรฉriques ยป, nous pouvons observer que, contraire-ment ร leur intitulรฉ laissant penser ร une certaine unitรฉ de mรฉthode et dโapprรฉhension du numรฉrique, elles regroupent plusieurs approches de cet objet que serait le big data, en particulier, et le numรฉrique, en gรฉnรฉral. Il nous semble que demeure une ambiguรฏtรฉ certaine autour du terme ยซ humanitรฉ numรฉ-rique ยป. Dรฉsigne-t-il les sciences humaines et sociales qui utilisent les technologies du numรฉrique ou celles qui ont ces technologies comme objet de recherche ?
Face ร ces injonctions pour une รฉvolution des sciences humaines โ- quโelles prennent le big data comme un outil de recherche, un terrain ou comme un objet sur lequel il faut รฉtablir de nouvelles conventions, de nouvelles mรฉthodes โ, il nous semble que le programme ยซ critique ยป des sciences humaines et sociales, leur capacitรฉ ร dรฉconstruire les discours, ร ouvrir les ยซ boรฎtes noires ยป est plus que jamais dโactualitรฉ. Lโenjeu pour les sciences humaines et sociales ne se rรฉsume pas ร appliquer les technologies et les mรฉthodes du big data mais ร en explorer les implicites, les prรฉconรงus et ร mettre au jour les impensรฉs politiques quโelles vรฉhiculent. En e๏ฌet, les donnรฉes (Ollion & Boelaert, 2015, et les algorithmes (Cardon, 2015) sont toujours construits. Ils nโรฉmanent pas dโun ยซ ailleurs ยป, dรฉtachรฉ de la subjectivitรฉ humaine, mais sont issus de choix quant aux dรฉfinitions et aux conceptions quโils vรฉhiculent. Ces choix ne proviennent pas dโune rationalitรฉ, supposรฉe la seule ยซ vraie ยป, mais sont construits au travers de compromis et de nรฉgociations entre di๏ฌรฉrentes conceptions du monde, entre di๏ฌรฉrents implicites politiques.
Ce programme critique des sciences humaines et sociales (Lahire & Fourgeron, 2016) en ce qui concerne le big data regroupe di๏ฌรฉrents questionnements, parmi lesquels nous avons identifiรฉ : (1) ceux qui explorent la constitution des donnรฉes, et plus particuliรจrement des ยซ donnรฉes brutes ยป (De-nis & Pontille, 2012 ; Denis & Goรซta, 2013 ; Denis, 2015), (2) ceux relatifs ร la construction des algorithmes (Cardon, 2015), (3) ceux concernant le travail dโinterprรฉtation du corpus que constituent les big data (Boullier, 2015a, 5 ; Bastard et al., p.d.) ; et enfin (4) les prรฉconรงus agissant derriรจre le discours des promoteurs du big data, notamment ceux concernant la confusion qui sโopรจre entre la rรฉalitรฉ et la vรฉritรฉ (Rouvroy & Stiegler, 2015, 4).
Nous devons ouvrir le dรฉbat โ alors quโil nโen existe aucun de sรฉrieux actuellement โ ร propos des di๏ฌรฉrentes temporalitรฉs, spatialitรฉs et matรฉrialitรฉs que nous sommes sus-ceptibles de reprรฉsenter grรขce ร nos bases de donnรฉes, avec, en vue, une conception per-mettant une flexibilitรฉ maximum, et autorisant, autant que possible, lโรฉmergence dโune polyphonie et dโune polychronie. Lโexpression ยซ donnรฉes brutes ยป est un oxymore au-tant quโune mauvaise idรฉe ; au contraire, les donnรฉes devraient รชtre cuisinรฉes avec soin. ยป (Bowker, 2005, p. 183โ184, traduit par P. Grosdemouge et F. Pailler)
Le caractรจre construit des donnรฉes et des algorithmes
Les donnรฉes ne sont pas donnรฉes mais construites ยป (Terrier, 2011), en cela les donnรฉes ne sont pas des dons de la ยซ Nature ยป ou de la ยซ Rรฉalitรฉ ยป. Quantifier le monde, le rรฉduire ร une sรฉrie dโindicateurs nรฉcessite tout un processus, explicite ou non, de nรฉgociations autour des dรฉfinitions, des mesures, et des normes (Desrosiรจres, 2000). Le big data suppose de ยซ dรฉcontextualiser ยป les donnรฉes pour pouvoir en traiter de grandes quantitรฉs au travers des algorithmes (Ibekwe-Sanjuan, 2014). Cependant, rendre les ยซ donnรฉes brutes ยป nรฉcessite tout un travail dโidentification, de sรฉlection et de ยซ brutification ยป (Denis & Goรซta, 2013). Ainsi, explorer la construction des donnรฉes et de leur contexte est un enjeu pour les sciences humaines et sociales (Boyd & Crawford, 2012, 5).
Le big data repose sur des capacitรฉs de calcul trรจs puissantes, les algorithmes. Plutรดt que de tester des hypothรจses avec un petit jeu de donnรฉes, ce sont les corrรฉlations entre de grands ensembles de donnรฉes qui sont censรฉes gรฉnรฉrer des hypothรจses, testรฉes par la suite avec dโautres corrรฉlations selon un principe dโessai/erreur ร haute frรฉquence (Boullier, 2015a, 5). Ce principe laisse penser que la thรฉorisation devient inutile puisque ce sont des donnรฉes quโรฉmergent les hypothรจses. Cependant, ยซ la plupart des mรฉthodes dโapprentissage sont dites ยซ supervisรฉes ยป : ceux qui fabriquent les calculs leur donnent un objectif ยป (Cardon, 2015, p. 61). De mรชme que les donnรฉes sont constituรฉes dans un but prรฉcis, les algorithmes se voient รฉgalement attribuer un objectif par leurs concepteurs. De cet objec-tif et des dรฉfinitions quโattribuent leurs auteurs aux di๏ฌรฉrentes variables dรฉpendent les pondรฉrations qui entrent dans la conception des algorithmes. Ainsi lโintรฉrรชt nโest pas forcรฉment dโanalyser lโalgo-rithme lui-mรชme, mais dโinterroger les prรฉconรงus, les implicites, les conventions et les objectifs qui ont fondรฉs sa conception (Cardon, 2015).
Les sciences humaines et sociales se doivent de questionner le travail dโinterprรฉtation des nouveaux corpus que reprรฉsente le big data (Boullier, 2015a, 5). En e๏ฌet, selon Bastard, Cardon, Fouetillou et al. (2013), les big data font plusieurs promesses quโil est nรฉcessaire dโinterroger. Ainsi, la plupart des promoteurs du big data considรจrent les donnรฉes issues du Web comme รฉtant des enregistrements directs de la Sociรฉtรฉ. Ces enregistrements sont supposรฉs objectifs, ne nรฉcessitant pas de catรฉgories et dโenquรชtes de chercheurs. Cependant, le lien entre la Sociรฉtรฉ et les ยซ traces ยป laissรฉes par les pratiques quotidiennes des individus nโest pas รฉvident sans enquรชte approfondie (Boullier, 2015a, 5).
Enfin, il est nรฉcessaire de questionner les implicites de cette mise en chi๏ฌres, de cette ยซ sacralisa-tion ยป de la quantification (Ogien, 2013). En e๏ฌet, ยซ le concept de vรฉritรฉ se trouve de plus en plus repliรฉ sur celui de la rรฉalitรฉ ou de lโactualitรฉ pure, au point, finalement, que les choses semblent parler pour elles-mรชmes ยป (Rouvroy & Stiegler, 2015, 4). Ainsi sous lโinfluence du positivisme et du fonc-tionnalisme, dont le projet est de rรฉduire le monde ร quelques fonctions maitrisables (de Gaulejac & Hanique, 2015), une confusion sโรฉtablit entre la trace et la chose (Rouvroy & Stiegler, 2015, 4). La confusion entre le monde complexe et ses reprรฉsentations simples ont alors tendance ร rendre toute critique impossible (Rouvroy & Stiegler, 2015, 4).
La donnรฉe : un ยซ obtenu ยป instaurรฉ comme ยซ donnรฉ ยป
Nous avons vu que la pensรฉe ingรฉnieur repose sur des objets quantifiant et qualifiant un ยซ รฉtat du monde ยป, et prรฉsentรฉs comme des ยซ donnรฉes ยป. Lโhomogรฉnรฉitรฉ que semble confรฉrer ce terme ainsi que sa forte di๏ฌusion masque la relative indรฉtermination ร pouvoir prรฉciser ce quโest justement une donnรฉe ยป. En e๏ฌet, les donnรฉes peuvent รชtre ยซ des mesures physiques, du signal, des observations, des variables, des paramรจtres, des indicateurs, des images, des informations… ยป (Dubois, 2014, p. 19). Sโil est impossible de proposer une dรฉfinition qui serait ร la fois prรฉcise et exhaustive de ce que re-couvre ce terme, il nous semble nรฉanmoins nรฉcessaire de lโinterroger dans la mesure oรน les donnรฉes sont souvent prรฉsentรฉs comme รฉtant ยซ dรฉjร -lร ยป (Denis & Goรซta, 2013 ; Dubois, 2014), comme par-lant dโelles-mรชmes (Mayรจre, 2016). Or, ยซ le monde ne fait pas don de lui-mรชme ร la science comme sโil รฉtait obligรฉ par une forme dโengagement ยป (Ingold, 2013, p. 352 ; citรฉ par Dubois, 2014). Au contraire, lโรฉtablissement de faits scientifiques nรฉcessite tout un ensemble de traductions et de compromis (La-tour, 2006 ; Callon, Barthe & Lascoumes, 2001). Ainsi, ยซ les donnรฉes ne sont pas donnรฉes mais construites ยป (Terrier, 2011). Elles sont obtenues (La-tour, 2001). Ceci nous amรจne ร nous questionner sur la pertinence de mobiliser le terme de donnรฉe dans le cadre de nos analyses et de lโรฉventualitรฉ de lui prรฉfรฉrer le terme dโobtenu.
Les ยซ donnรฉes ยป ne sont pas donnรฉes, mais leur mobilisation ne lโest pas non plus. En e๏ฌet, les donnรฉes ยป รฉtant ancrรฉs dans un contexte, dans des pratiques dans lesquels ils sโinsรจrent et quโils per-forment (Feenberg, 2004 ; Denis & Goรซta, 2013), leurs mobilisations, leurs dรฉplacements vers dโautres lieux, vers dโautres pratiques ne sont pas donnรฉs, mais leurs circulations entraรฎnent des ยซ frictions ยป (Edwards et al., 2011, 41). De plus, les travaux de Jรฉrรดme Denis et Samuel Goรซta (Denis & Goรซta, 2013 ; Denis & Goรซta, 2017 ; Denis, 2015 ; Goรซta, 2016) ont montrรฉ que lโidentification des don-nรฉes mobilisables et leurs intรฉgrations e๏ฌectives dans des ยซ รฉcologies informationnelles ยป ne va pas non plus de soi, mais nรฉcessite de nombreux dรฉplacements, de nombreuses nรฉgociations.
Rosenberg a montrรฉ que pendant longtemps en science les donnรฉes รฉtait considรฉrรฉ comme un prรฉmisse du raisonnement sans prรฉconรงus par rapport ร la rรฉalitรฉ : ยซ When a fact is proven false, it ceases to be a fact. False data is data nonetheless ยป (Rosenberg, 2013, p. 18). Cependant, lโextension de lโusage de ce terme aux รฉlรฉments issus de lโexpรฉrimentation et de la ยซ collecte ยป amรจne ร considรฉrer les donnรฉes ยป comme acquises une bonne fois pour toutes et comme fondement ร lโargumentation et ร lโรฉtablissement de faits scientifiques (Rosenberg, 2013). Ainsi, le terme de donnรฉe renvoie ร quelque chose de figรฉ, de stabilisรฉ. lโopposรฉe, le terme dโobtenu renvoie ร lโidรฉe que ces รฉlรฉments sโinscrivent dans un processus conti-nue de construction. Il dรฉsigne ร la fois le processus et le rรฉsultat.
Cependant, si le terme dโobtenu nous permet de mettre lโaccent sur le travail de sรฉlection, de com-binaison, de hiรฉrarchisation et de mise en forme de ces รฉlรฉments, nous allons dans la suite de la thรจse mobiliser le terme de ยซ donnรฉe ยป. En e๏ฌet, si nous souhaitons mettre ร distance et interroger le vo-cabulaire mobilisรฉe par les acteurs observรฉs, il ne sโagit pour autant pas de les en dessaisir (Denis & Goรซta, 2013). De plus, dans leurs travaux sur ยซ lโouverture des donnรฉes ยป dans les collectivitรฉs pu-bliques, Jรฉrรดme Denis et Samuel Goรซta ont mis en รฉvidence le fait que si ces donnรฉes sont fabriquรฉes, il nโen demeure pas moins quโelles ยซ sโapparentent ร des dons, des matรฉriaux de dรฉpart o๏ฌert ร la col-lectivitรฉ ยป (Denis & Goรซta, 2013, p. 17). Dans le cadre de notre รฉtude, nous ne nous concentrons pas, certes, sur la fabrique des donnรฉes en tant que telle ; nรฉanmoins en sโintรฉressant ร la construction du sens univoque que les acteurs tentent dโattribuer ร ces donnรฉes, en observant ร travers la construc-tion de cet assemblage de donnรฉes, de mรฉthodes et de reprรฉsentations comment les acteurs essaient de clรดturer en ยซ boรฎte noire ยป destinรฉe ร รชtre mobilisรฉe dans les pratiques quotidiennes des destina-taires, nous observons รฉgalement des processus dont le rรฉsultat est vรฉcu comme un don par les acteurs, comme permettant ยซ dโaider ร la dรฉcision ยป.
Comment mettre au travail la notion de big data en sciences de lโinformation et de la communication
Les discours accompagnant la promotion du big data annoncent ainsi la possibilitรฉ dโobtenir des
connaissances sur le monde ยป (Babinet, 2015) et de pouvoir construire des prรฉdictions et des outils de ยซ dรฉcision ยป ou ยซ dโaide ร la dรฉcision ยป. Ces outils sont considรฉrรฉs comme dโautant plus ยซ perfor-mants ยป, ยซ vrais ยป et ยซ rationnels ยป quโils se fondent sur des รฉlรฉments supposรฉs relever dโune ยซ rรฉalitรฉ empirique ยป dรฉnuรฉe de toute subjectivitรฉ et intersubjectivitรฉ (Anadรณn & Guillemette, 2007, Hors Sรฉrie). Cet espoir se fonde sur un accรจs au monde ยซ rรฉel ยป de faรงon automatisรฉe sans recourir aux actions et aux interprรฉtations humaines, soupรงonnรฉes dโรชtre sources de biais et dโincertitude (Bรฉnรฉ-jean, 2015, 190โ191). ร ce titre, les tenants du big data portent une attention particuliรจre aux traces numรฉriques rรฉputรฉes pour รชtre dรฉnuรฉes dโintentionnalitรฉ (Merzeau, 2013a). On ne fabrique pas une trace, on la laisse, et ce sans intention aucune […] ร la di๏ฌรฉrence du signe que nous crรฉons, la signification dโune trace existe au-delร de lโintention de celui qui la gรฉnรจre. Cโest justement ce qui รฉchappe ร notre attention, ร notre contrรดle ou ร notre vigilance qui, ร partir de nos actes, prend la forme dโune trace ยป (Krรคmer, 2007/2012)
En e๏ฌet, dรฉnuรฉes dโintention, ces traces seraient donc dรฉpourvues de sens pour ceux qui les produisent et donc constitueraient un tรฉmoin ยซ objectif ยป de lโactivitรฉ des acteurs.
Si dans le cadre de la thรจse, nous nโรฉtudions pas ร proprement parler des ยซ traces numรฉriques ยป, cโest-ร -dire que les ยซ donnรฉes ยป inscrites dans le module de formation ne proviennent pas de lโacti- vitรฉ dโindividus sur le web, les travaux des chercheurs en sciences de lโinformation nous permettent dโinterroger les discours et les prรฉconรงus accompagnant la montรฉe en puissance des technologies du numรฉriques.
Issues de la traรงabilitรฉ, voire mรชme plutรดt de la ยซ traque ยป, de lโactivitรฉ numรฉrique des individus, les traces relรจvent du tatouage, dโune ยซ marque invisible ยป articulรฉe ร ยซ un acte informationnel rare-ment perรงu comme tel ยป (Merzeau, 2009). Ce faisant les traces opรจrent une ยซ rupture sรฉmantique ยป (Collomb, 2016), puisquโelles nโassocient plus un signifiant ร un signifiรฉ. En e๏ฌet, ยซ elles se dรฉtachent des procรฉdures qui enchรขssaient les รฉnoncรฉs, ouvrant sur des รฉnonciations โincertainesโ, nomades et di๏ฌรฉrรฉes ยป (Merzeau, 2009, p. 72). Ces traces construites de faรงon a-signifiante et non-intentionnelle nโont dโintรฉrรชt et de sens que pour ceux qui les traitent (Merzeau, 2009 ; Merzeau, 2013a), puis-quโelles permettent de discrรฉtiser (Bachimont, 2004 ; Gout, 2015) les individus en les associant ร des ยซ unitรฉs isolables, agenรงables et calculables ยป (Pรฉdauque, 2006, p. 186) Ce faisant les traces sont dรฉliรฉes du contexte dans lequel elles ont pris formes (Merzeau, 2009 ; Merzeau, 2013a ; Collomb, 2016).
Sรฉparรฉes de leur contexte, ces traces numรฉriques sont stockรฉes et encodรฉes de faรงon non directe-ment intelligibles pour les รชtre humains (Collomb, 2016). En e๏ฌet, enregistrรฉes sous forme binaire, les traces ne sont accessible aux รชtre humains que par des inscriptions successives (Jeanneret, 2011) via lโintermรฉdiation technologique (Merzeau, 2009). Ainsi, elles ne prennent sens quโau travers des actions de ceux qui les traitent, quโร travers leurs calculs, leurs combinaisons et leurs assemblages (Merzeau, 2013a ; Collomb, 2016).
Ainsi, les traces comme les donnรฉes numรฉriques sont des รฉlรฉments dรฉ-sรฉmantisรฉs sรฉparรฉs de leur contexte. Elles ne sont pas porteuses dโun sens qui serait ยซ dรฉjร -lร ยป, intrinsรจque mais supposent un certain nombre dโopรฉrations, de manipulations et de traductions afin quโelles puissent se voir attribuer une signification et une orientation de lโaction par ceux qui les traitent. Cependant, ces actions sont invisibilisรฉes par les discours et les fantasmes vรฉhiculรฉs par les promoteurs des big data (Mayรจre, 2018).
Ce faisant, le mouvement des big data fait รฉcho ร la rรฉflexion proposรฉe par Daniel Bougnoux en 1999 (Bougnoux, 1999). Cet auteur voit dans lโessor du recours ร la Technique mobilisรฉ pour limiter les ยซ biais ยป liรฉs aux interprรฉtations humaines (Bรฉnรฉjean, 2015, 190โ191), une ยซ course ร la standar-disation des formats et des protocoles ยป (Bougnoux, 1999). Cette ยซ course ยป repose sur une forme de mise en relation universelle par la mise en place dโรฉlรฉments conรงus comme gรฉnรฉriques et dรฉcon-textualisรฉs. Il sโagit alors ยซ de rendre les รฉnoncรฉs partout compatibles, mais aussi les piรจces dรฉtachรฉes, les informations, les rรจglements, les voies de circulations, les logiciels ou les cachets dโaspirine qui doivent tous fonctionner universellement, cโest-ร -dire indรฉpendamment des circonstances locales de leur mise en service ยป (Bougnoux, 1999, p. 104). Dans le mรชme temps que se dรฉveloppe cet impรฉratif de standardisation, Bougnoux observe un mouvement inverse visant ร la ยซ personnalisation des biens et des marchandises ยป (Bougnoux, 1999).
Le mouvement des big data ne se prรฉsente pas seulement comme un technique de traitement massif de donnรฉes mais aussi comme permettant une forme de personnalisation (Rouvroy & Berns, 2013). Il ne sโagit plus seulement dโobserver des rรฉcurrences mais des singularitรฉs (Merzeau, 2013b). Ainsi, le mouvement des big data peut รชtre perรงu comme une tentative dโaddresser cette contradiction soulevรฉe par Daniel Bougnoux entre une injonction ร lโobjectivitรฉ technique supposant la mise en place de pro-cรฉdures gรฉnรฉriques et dรฉcontextualisรฉes et un impรฉratif de personnalisation de plus en plus prรฉgnant (Bougnoux, 1999). Par consรฉquent, il sโagit dโรฉtudier comment ces assemblages socio-techniques gรฉ-nรฉriques visant ร prescrire, ร agir sur le cours de lโaction, se recontextualisent (Feenberg, 2004) afin de sโadapter aux situations locales. Si ces รฉlรฉments techniques sont dรฉ-contextualisรฉs, il ne sโagit pas de considรฉrer les technologies nu-mรฉriques comme ยซ ne faisant rien ยป, comme nโinfluenรงant pas le cours de lโaction. Lโinscription sous forme de listes permet de fixer la parole (Goody, 1979) et ยซ substitue ร lโentendre successivement le voir ensemble ยป (Bachimont, 2000). En mรชme temps, la mise en forme sur des supports matรฉriels, par lโagencement spatial sur des supports (relativement) permanents, les signes peuvent susciter lโรฉmer-gence de nouvelles significations et de nouvelles orientations de lโaction. Cependant, la production de sens ne provient pas de la seule inscription dans des supports mais de la mobilisation et de lโactua-lisation de ces inscriptions ร travers les pratiques dโacteurs (Bachimont, 2000).
Ainsi, les technologies du big data ne sont pas tant des technologies produisant des connaissances et des prรฉdictions sur le ยซ monde ยป, que des technologies du signe permettant de nouveaux agence-ments, de nouveaux combinatoires. En e๏ฌet, ยซ il ne su๏ฌt pas, du tout que les technologies โtraitentโ de lโinformation (cโest-ร -dire soumettent les objets du monde ร un certain type dโรฉcriture mathรฉma-tique) pour quโelles โproduisent de lโinformation (cโest-ร -dire modifient la perception que nous avons du monde, informent notre esprit, mettent en forme notre relation au rรฉel) ยป (Jeanneret, 2000, p. 42). Par consรฉquent, en prรฉsentant les big data comme permettant dโaccรฉder au ยซ rรฉel ยป sans passer par le biais de la subjectivitรฉ humaine, les discours accompagnant cet ensemble de technologies, de mรฉ-thodes, et de faรงon de voir invisibilisent le travail menรฉ par ceux qui par et ร travers leurs pratiques tentent dโen produire du sens (Mayรจre, 2018). Cette invisibilisation ยซ sโรฉtend de proche en proche ร la production de sens, ร celle des liens sociaux, de lโintercomprรฉhension, et enfin de celles et ceux qui sont au travail ou sujet du travail ยป (Mayรจre, 2018).
Cette invibilisation se retrouve notamment dans le vocable utilisรฉe. En e๏ฌet, le renseignement de bases de donnรฉes est dรฉsignรฉ comme de la ยซ collecte ยป (Mayรจre, 2018), la rรฉcupรฉration de donnรฉes travers di๏ฌรฉrentes bases est dรฉcrite comme du ยซ moissonnage ยป (Toonders, 2014), les processus de ยซ mise ร disposition ยป de donnรฉes sont qualifiรฉs de processus ยซ dโouverture ยป des donnรฉes (Denis & Goรซta, 2013 ; Denis & Goรซta, 2017), et les calculs, les recombinaisons sont supposรฉes รชtre des ยซ informations ยป parlant dโelles-mรชmes (Mayรจre, 2016). Ce vocabulaire laisse ร penser que le travail des donnรฉes recouvre des activitรฉs simples, ne requรฉrant pas de rรฉflexion ou de discussion, quโil se-rait presque possible dโautomatiser (Mayรจre, 2018). Or, les activitรฉs de saisie sont bien loin dโรชtre automatisables (Denis, 2009). Elles requiรจrent de discrรฉtiser le ยซ rรฉel ยป (Collomb, 2016), de lโassigner di๏ฌรฉrentes catรฉgories, assignation qui nโa rien dโune รฉvidence (Suchman, 1993). Le terme ยซ mois-sonnage ยป des donnรฉes invisibilise les opรฉrations nรฉccessaires pour articuler des bases de donnรฉes hรฉtรฉrogรจnes (Cardon, 2015). De mรชme, lโexpression ยซ open data ยป ou ยซ ouverture des donnรฉes ยป pro-pose une vision des donnรฉes comme รฉtant dรฉjร -lร , emprisonnรฉes dans les organisations et dont ils su๏ฌraient dโouvrir le ยซ robinet ยป pour que ces flux de donnรฉes puissent nourrir de nombreux algo-rithmes (Cardon, 2015 ; Denis & Goรซta, 2013 ; Denis & Goรซta, 2017 ; Goรซta, 2016). Enfin, dรจs lors que les donnรฉes sont dรฉ-sรฉmantisรฉes, discrรฉtisรฉes afin dโรชtre calculรฉes et combinรฉes, elles ne peuvent รชtre considรฉrรฉes comme une ยซ information ยป, comme ยซ mettant en forme notre perception du rรฉel ยป (Jeanneret, 2000). Cโest ร travers le travail de celui qui les mobilise, qui les rรฉassigne ร une signifi-cation, qui les recontextualise et les insรจre dans une intrigue, que celles-ci peuvent participer de la signification et de lโorientation du cours de lโaction (Mayรจre, 2018). Ce travail du sens est invisibilisรฉ parce quโil ยซ contredit la logique des technologies miraculeuses, et lโargumentaire รฉconomique associรฉ du retour sur investissement par diminution du temps de travail requis ยป (Mayรจre, 2018). Ce travail est รฉgalement empรชchรฉ car ces techniques, ces procรฉdures, ces ยซ prรชts-ร -penser ยป sont dรฉveloppรฉs afin de sโassurer de la ยซ rationnalitรฉ ยป du cours de lโaction et de rรฉduire ยซ lโincertitude inhรฉrente aux collectifs humains ยป (Bouillon, 2013 ; citรฉ par Bรฉnรฉjean, 2015, 190โ191).
Ainsi, le mouvement des big data promeut la mise en place dโassemblages socio-techniques prรฉsen-tรฉs comme universels et gรฉnรฉriques associรฉs ร des procรฉdures, des รฉlรฉments de mรฉthodes, des ยซ faรงons-de-voir ยป et des ยซ faรงons-de-penser ยป. Il importe alors de questionner les processus de conception, mais รฉgalement dโarticulation de ces assemblages dans des situations, des pratiques et avec dโautres as-semblages socio-techniques. Il sโagit de donner ร voir les ยซ coulisses ยป (Denis & Goรซta, 2013 ; Denis, 2015 ; Goรซta, 2016) du travail de production de sens et de mise en relation par et ร travers les interac-tions des humains et des non-humains. ยซ Pour ce faire, il importe de prendre au sรฉrieux tout ce travail de re-sรฉmantisation, de reconstruction de sens dans cette double acceptation dโidentification dโune signification et dโorientation de lโaction ยป (Mayรจre, 2018). Par consรฉquent, dans le cadre de la thรจse, loin de considรฉrer la construction du module de formation comme ยซ allant de soi ยป, comme ยซ parlant de lui-mรชme ยป, nous nous attachons ร interroger comment la construction de cet รฉchafaudage, sup-posรฉ gรฉnรฉrique et universel, de donnรฉes, dโรฉlรฉments de mรฉthode, de reprรฉsentations, de dรฉfinitions et de ยซ prรชts-ร -penser ยป, visant ร prolonger la capacitรฉ dโaction ร distance de ses concepteurs, amรจnent ces derniers ร dรฉfinir et redรฉfinir le sens de lโaction.
Un objet dโรฉtude qui sโinscrit dans des politiques publiques en รฉvolution et en tension
Ce projet sโinscrit dans un contexte global de rรฉorganisation de la gouvernance publique, et plus particuliรจrement territoriale. En e๏ฌet, depuis la fin des annรฉes 1960, lโexercice du pouvoir par un รtat fort est de plus en plus remis en question, car considรฉrรฉ comme manifestant un ยซ totalitarisme ar-chaรฏque ยป (Lardon, Tonneau, Raymond, Chia & Caron, 2008), qui le rendrait menaรงant pour les libertรฉs individuelles, arbitraire, rigide et รฉconomiquement ine๏ฌcace (de Man, 2011 ; Esman, 1988). La mise en cause de ce modรจle de gouvernement accompagne la montรฉe, depuis les annรฉes 1970, au niveau europรฉen des idรฉes dites ยซ libรฉrales ยป, favorable ร la rรฉgulation par le marchรฉ (Desrosiรจres, 2008 ; Supiot, 2015) et au niveau franรงais dโun processus de dรฉcentralisation engagรฉe dans les annรฉes 1980. Appliquรฉe au domaine de la gestion publique, ces idรฉes y introduisent des mรฉthodes issues du management privรฉ (Theys, 2002 ; Boussard, 2008). Les principes de gestion qui la fondent insistent sur le caractรจre rationnel et innovant que doivent avoir les politiques publiques et sur les justifica-tions qui doivent รชtre apportรฉes au plan de leur consommation รฉconome de ressources humaines et budgรฉtaires. Dans ce contexte de rationalisation des politiques publiques et de gouvernance, a รฉmergรฉ lโidรฉe, ร partir des annรฉes 1970, dโaccompagner les politiques publiques dโinstruments de mesure et dโรฉvaluation (Balestrat, 2011 ; Sรฉnรฉcal, 2007) afin de justifier de lโe๏ฌcacitรฉ, de la rationalitรฉ et des impacts des politiques mises en ลuvre. Cette production renouvelรฉe dโinstruments et de donnรฉes a, aussi, รฉtรฉ suscitรฉe et favorisรฉe par des processus de rationalisation des mรฉthodes organisationnelles, notamment au travers des normes (ISO 9000), et par di๏ฌรฉrentes directives, notamment la directive INSPIRE 2007/2/CE (Infrastructure for Spatial Information in the European Community).
Cette rationalisation des politiques publiques sโaccompagne de lโรฉmergence de nouveaux enjeux (environnement, urbanisation) ou la rรฉorientation dโenjeux plus anciens (santรฉ, agriculture) (Lascoumes Simard, 2011, 1). Ceci est particuliรจrement vrai dans le contexte de lโamรฉnagement des terri-toires, oรน les acteurs se doivent conduire et concilier des politiques plurielles, complexes et parfois contradictoires. Ces acteurs pris dans des injonctions paradoxales (de Gaulejac & Hanique, 2015) se doivent dโarbitrer notamment les conflits quant ร lโusage des sols. Aujourdโhui, les deux tiers de la population mรฉditerranรฉenne vivent en zone urbaine (Balestrat, 2011). Lโaccroissement de la taille des villes se fait alors souvent aux dรฉpens des espaces naturels et agricoles, en particulier dans les espaces pรฉriurbains et les plaines littorales. Cette urbanisation amรจne ร repenser les relations entre la ville et la campagne, notamment la place de lโagriculture par rapport ร la ville (terres agricoles comme rรฉserves fonciรจres, agriculture nourriciรจre de la ville, prรฉservation du paysage par lโagriculture, lโagriculture pour se prรฉserver certains risques naturels . . . ) (Balestrat, 2011). De nombreuses questions critiques se posent alors quant ร lโamรฉnagement du territoire (Poulot, 2008). Ces questions sont dโautant plus prรฉgnantes dans la Rรฉgion Languedoc-Roussillon, que cette derniรจre a vu sa dรฉmogra-phie fortement augmenter ces derniรจres annรฉes (Martin-Scholz, 2011), cette nouvelle population sโinstallant principalement en zone pรฉri-urbaine et dans la plaine littorale (Balestrat, 2011). Cette urbanisation augmente ainsi le taux dโimpermรฉabilisation des sols dans une rรฉgion dรฉjร fortement exposรฉe au risque dโinondation. De plus, se faisant principalement en plaine, cette urbanisation hy-pothรจque la possibilitรฉ de conduire des cultures vivriรจres dans les sols les plus aptes ร les accueillir. Ainsi ces phรฉnomรจnes suscitent un lot de questionnements auxquels les acteurs de lโamรฉnagement se doivent de rรฉpondre. Oรน et comment loger ces nouveaux habitants ? Comment assurer leur ac-cรจs aux infrastructures qui leur sont nรฉcessaires ? Comment gรฉrer les risques, naturels ou non, liรฉs ร la concentration de la population et ร la consommation dโespaces naturels ou agricoles ? Comment prรฉserver aussi les paysages et la biodiversitรฉ ?
La mise en tension de ces di๏ฌรฉrents enjeux et prรฉoccupations se joue รฉgalement dans un contexte de reconfiguration des acteurs en charge de lโamรฉnagement des territoires, sous lโaction de la dรฉcentrali-sation et du dรฉsengagement progressif de lโรtat franรงais au niveau local et de la montรฉe en compรฉtence des collectivitรฉs territoriales dans ce domaine. Ce contexte voit ainsi un rรฉorganisation des missions des services dรฉconcentrรฉs des di๏ฌรฉrents Ministรจres intรฉressรฉs ร lโamรฉnagement du territoire. Ces ser-vices dรฉconcentrรฉs au niveau dรฉpartemental ou rรฉgional sont des services rattachรฉs ร un ou plusieurs Ministรจres. Ils sont chargรฉs de veiller ร lโapplication des politiques et des directives รฉmanant de leurs Ministรจres de tutelle concernant les territoires sur lesquels ils sont dรฉconcentrรฉs. Ces services font partie, avec les collectivitรฉs locales, du systรจme dโadministration territoriale qui regroupe ยซ lโensemble des institutions publiques qui concourent ร lโadministration du territoire et ร la mise en ลuvre terri-toriale des politiques publiques ยป (Bezes, 2005). Ces services sโinscrivent de plus en plus sous lโautoritรฉ du prรฉfet qui dโordonnateur secondaire a vu son rรดle se renforcer (Kamel, 2010). Ce renforcement du rรดle du prรฉfet sโinscrit dans la rรฉorganisation des services de lโรtat, dont le ยซ leitmotiv repose sur le souci de di๏ฌรฉrencier les fonctions stratรฉgiques de dรฉcision, de conception, de pilotage, mais aussi de contrรดle ou dโรฉvaluation des politiques publiques, des fonctions dites ยซ administratives ยป chargรฉes de la mise en ลuvre, de la prise en charge des politiques publiques ยป (Bezes, 2005). Ce leitmotiv se traduit notamment par la diminution de la prรฉsence des services de lโรtat dans les territoires et la fin de leurs missions dโingรฉnierie publique auprรจs des communes (Marcou, 2012). Ainsi, les services dรฉconcentrรฉs de lโรtat voient dรฉsormais leur rรดle de conseil et information se recentrer en amont de la conception des documents dโurbanisme tels que les Plans Locaux dโUrbanisme (PLU) ร lโรฉchelle communale ou les Schรฉmas de Cohรฉrence Territoriale (SCoT) ร lโรฉchelle intercommunale. Ils doivent dรฉsormais assurer la transmission du ยซ portรฉ-ร -connaissance ยป et le contrรดle aval, sans plus intervenir directement dans lโรฉlaboration stricto sensu des di๏ฌรฉrents documents dโurbanisme. Ainsi, les services dรฉconcentrรฉs de lโรtat sโinscrivent dans un contexte oรน ils doivent conduire de faรงon ยซ rationnelle ยป des politiques publiques de plus en plus complexes tout en voyant se restreindre leur capacitรฉ dโaction. Dans ce contexte, certains acteurs cherchent de nouvelles voies pour trouver des moyens dโintervention et รฉventuellement de ยซ pilotage ร distance ยป via la recommandation de certaines donnรฉes et de certaines mรฉthodes afin dโinformer les processus dโรฉlaboration de documents dโurbanisme.
Prรฉsentation de lโobjet dโรฉtude
Prรฉsentation des di๏ฌรฉrents organismes et individus impliquรฉs dans le projet
Notre objet dโรฉtude se constitue ร travers le suivi dโun projet dโรฉlaboration dโun module de forma-tion (et de son corrigรฉ), autour des conflits dโusages des sols et notamment de la place de ยซ lโagricul-ture ยป dans les documents dโurbanisme. Ce projet a รฉtรฉ menรฉ entre les agents de plusieurs services de lโรtat, relevant de di๏ฌรฉrents Ministรจres et dโun laboratoire de recherche, ร savoir :
โ la Direction Rรฉgionale de lโAlimentation, de lโAgriculture et de la Forรชt (DRAAF),
โ la Direction Rรฉgionale de lโEnvironnement, de lโAmรฉnagement et du Logement (DREAL) de la Rรฉgion Languedoc-Roussillon 1,
โ la Direction Dรฉpartementale des Territoires et de la Mer de lโHรฉrault (DDTM34)
โ lโUnitรฉ Mixte de Recherche Territoire, Environnement Tรฉlรฉdรฉtection et Informations Spatiales (UMR TETIS).
La DRAAF, la DREAL et la Direction Dรฉpartementale des Territoires (DDT) 2 sont des services dรฉconcentrรฉs de lโรtat, cโest-ร -dire quโils sont en charge de faire appliquer les politiques de leurs Mi-nistรจres respectifs. Les relations fonctionnelles quโils entretiennent sont prรฉsentรฉes par la figure 4.1.
ร lโheure oรน nous รฉcrivons ces lignes lโentitรฉ administrative correspondant ร la Rรฉgion Languedoc-Roussillon a fusionnรฉ avec celle de Midi-Pyrรฉnรฉes, afin de former la Rรฉgion Occitanie/Pyrรฉnรฉes-Mรฉditerranรฉe. Cette fusion ayant eu lieu le 1er janvier 2016, soit aprรจs la fin du suivi de notre objet dโรฉtude, nous continuerons ร utiliser le terme de Languedoc-Roussillon pour dรฉsigner la Rรฉgion de rattachement des directions rรฉgionales รฉtudiรฉes.
Les DDT sont des DDTM quand leur dรฉpartement est bordรฉ par la mer (dโoรน le M).
La DRAAF et la DREAL sont les reprรฉsentantes en rรฉgion respectivement du Ministรจre en charge de lโagriculture et du Ministรจre en charge de lโenvironnement et de lโamรฉnagement territorial. Ces deux Ministรจres sont รฉgalement reprรฉsentรฉs au niveau dรฉpartemental par les DDTs issues de la fusion en 2010 des Directions Dรฉpartementales de lโAgriculture et de la Forรชt (DDAF) et des Directions Dรฉpartementales de lโรquipement (DDE). Les Ministรจres exercent ainsi une autoritรฉ hiรฉrarchique sur leurs di๏ฌรฉrents services dรฉconcentrรฉs (Martin-Scholz, 2011).
La DRAAF et la DREAL sont en charge de nombreuses missions. Mais en ce qui concerne le projet, elles sont toutes deux chargรฉes dโorienter et dโencadrer lโaction des DDTs ainsi que de rรฉaliser (ou faire rรฉaliser) un certain nombres dโรฉtudes et de donnรฉes.
La DDT quant ร elle rรฉalise et gรจre aussi un certain nombre dโรฉtudes et de donnรฉes. Elle est surtout en charge du suivi des processus dโรฉlaboration des documents dโurbanisme que ce soit en amont oรน elle rรฉalise des dires de lโรtat, notamment le ยซ portรฉ-ร -connaissance ยป 3, ou en aval pour la validation de ces documents. Si dans la thรฉorie, les DDTs sont autant encadrรฉes par la DRAAF que par la DREAL, dans la pratique les DDTs ont une plus grande proximitรฉ avec la DREAL. Cela est en partie dรป au fait que les DDAF regroupaient moins dโagents que les DDE, ainsi lors de la fusion ce sont majoritairement des agents issus de lโรquipement qui se sont retrouvรฉs en charge de lโamรฉnagement territorial.
LโUMR TETIS est une unitรฉ de recherche regroupant des chercheurs du Cirad, dโIrstea et dโAgro-ParisTech. Ses recherches sont axรฉes sur la ยซ chaรฎne de lโinformation spatiale ยป, cโest-ร -dire que ses travaux vont de lโacquisition de donnรฉes gรฉolocalisรฉes ร lโaccompagnement et lโรฉvaluation des usages
Le ยซ portรฉ ร connaissance ยป est un document prรฉsentant les informations quโil semble pour lโรtat, reprรฉsentรฉ par la DDT, pertinent de communiquer aux รฉlus et techniciens (contraintes rรจglementaires, informations dรฉmographiques…) et signale รฉgalement les รฉlรฉments dont il ne dispose pas mais quโil serait utile, selon lui, de prendre en compte qui en sont fait. Le projet de formation ne fait pas intervenir lโUMR TETIS dans son ensemble mais la composante Irstea. LโInstitut national de recherche en sciences et technologies pour lโenvironnement et lโagriculture (Irstea) est un organisme de recherche, anciennement connu sous le nom de Cemagref, dont une des missions est lโappui aux politiques publiques. Cette mission est un hรฉritage de lโรฉpoque, lointaine, oรน le Cemagref รฉtait non pas un organisme de recherche mais le centre dโรฉtude technique du Ministรจre en charge de lโagriculture.
Le projet de formation ne constitue pas une terra incognita ; il ne performe pas une situation ยซ vier-ge ยป de tous projets, de toutes interactions passรฉes. Au contraire, les di๏ฌรฉrents acteurs du projet vont le rattacher ร des situations, des collaborations passรฉes ; ce faisant ils lโinscrivent dans une intrigue plus gรฉnรฉrale mais รฉgalement le stabilise. Parmi ces di๏ฌรฉrentes collaborations, passรฉes et/ou en cours durant lโรฉlaboration de la formation, avec lesquelles les acteurs รฉtablissent des liens avec le projet de formation, nous souhaitons en dรฉployer ici trois, celles qui ont fait fortement agir et qui รฉtaient trรจs rรฉguliรจrement prรฉsentifiรฉes (Cooren, 2010), ร savoir le ยซ projet DRAAF/TETIS/LISAH ยป, lโatelier rรฉgional ยซ consommation dโespace ยป auteurisรฉ par la DRAAF et la DREAL, et la formation ยซ connais-sance des sols et indice de qualitรฉ ยป organisรฉe par les agents de la DRAAF en 2010.
Le ยซ projet DRAAF/TETIS/LISAH ยป est un projet qui a eu lieu entre 2008 et 2010, entre la DRAAF, lโUMR TETIS et le Laboratoire dโรฉtudes des Interactions Sol-Agrosystรจme-Hydrosystรจme (UMR LI-SAH). Les agents de la DRAAF souhaitant que les processus dโรฉlaboration des documents dโurbanisme et des projets dโamรฉnagement considรจrent le ยซ sol ยป comme une ressource finie et un patrimoine ร prรฉserver ont mandatรฉ lโUMR TETIS et lโUMR LISAH pour construire des donnรฉes quantifiant et qualifiant la ยซ consommation ยป des espaces agricoles par lโartificialisation (Balestrat, Barbe, Chery, Lagacherie & Tonneau, 2011). Cโest dans le cadre de ce projet que lโUMR TETIS a construit, ร partir dโimages satellites, une donnรฉe dรฉsignรฉe comme รฉtant la ยซ taches artificialisรฉes ยป (Balestrat, 2011 ; Balestrat, Barbe & Dupuy, 2011). Cette donnรฉe est censรฉe localiser et faire visualiser lโรฉvo-lution de ยซ lโartificialisation ยป, dรฉsignรฉe ici comme les espaces oรน il ne sera plus possible de cultiver (Martin-Scholz, 2011). LโUMR LISAH, quant-ร -elle, a รฉlaborรฉ les Indicateurs de la Qualitรฉ des Sols (IQS), en considรฉrant un sol de qualitรฉ comme รฉtant un sol ร mรชme de permettre la culture de cรฉ-rรฉales avec le moins de contraintes et dโintrants possibles. Ces IQSs se prรฉsentent comme des indica-teurs ร deux indices : le premier donnant une indication sur la capacitรฉ du sol ร restituer de lโeau aux plantes (la rรฉserve utile), tandis que le second reprรฉsente dโautres caractรฉristiques des sols qui peuvent contraindre leur mise en culture (pH 4, battance 5, hydromorphie 6 et pierrositรฉ 7) (Balestrat, 2011). Par la suite, lโUMR TETIS, considรฉrant les IQS comme di๏ฌcilement comprรฉhensibles par des non-initiรฉs, a dรฉcidรฉ de proposer une recombinaison de ces indices en se fondant uniquement sur la rรฉ-serve utile, concevant ainsi ce qui est dรฉsignรฉ comme les Classe de Potentiel Agronomique des Sols (CPAS) (Martin-Scholz, 2011). Les IQSs, les CPAS et les ยซ tรขches artificialisรฉes ยป sont รฉgalement dรฉ-signรฉes lors du projet de formation comme les ยซ donnรฉes DRAAF/TETIS/LISAH ยป. Les agents de la DRAAF et de lโUMR TETIS inscrivent le projet de formation comme le ยซ prolongement ยป du projet DRAAF/TETIS/LISAH, lโa๏ฌliant ainsi ร une gรฉnรฉalogie et le renforรงant. Ce faisant, ils tentent dโy inscrire รฉgalement les reprรฉsentations et les dรฉfinitions รฉlaborรฉes et nรฉgociรฉes lors de la construction de ces donnรฉes, ainsi quโune visรฉe que doit remplir la formation, ร savoir faire partager lโidรฉe que le sol serait une ressource ร prรฉserver, et ยซ cadrer ยป les usages qui peuvent รชtre faits de ces donnรฉes.
Le projet de formation est aussi inscrit par les agents de la DRAAF et de la DREAL comme une ยซ ac-tion ยป de lโatelier rรฉgional ยซ consommation dโespace ยป. En e๏ฌet, la DRAAF et la DREAL ยซ pilotent ยป conjointement un ยซ plan dโaction ยป (Annexe C) dans lequel la formation en projet est supposรฉe sโins-crire au titre de ยซ lโaction 2 ยป. Lโinscription du module de formation permet dโune part de consolider le projet de formation en lโinscrivant dans une collaboration dรฉjร instituรฉe par les deux directions rรฉgionales ; elle permet รฉgalement aux agents de ces agences de justifier de la rรฉalisation dโune action issue en bonne part de leur propre initiative.
Enfin, la formation ยซ connaissance des sols et indice de qualitรฉ ยป a eu lieu en novembre 2010 ร destination des agents des DDTs. Elle a รฉtรฉ organisรฉe par les agents de la DRAAF qui ont mandatรฉ des pรฉdologues pour intervenir dans cette formation. Cette formation dโinitiation ร la pรฉdologie est surtout prรฉsentifiรฉe par les agents de la DRAAF lors du projet, qui tentent de la positionner comme un ยซ prรฉcรฉdent ยป au module de formation en chantier. Ce faisant, les agents de la DRAAF, dโune part, convoquent lโautoritรฉ scientifique et la lรฉgitimitรฉ quโils attribuent aux pรฉdologues, et, dโautre part, es-saient de dรฉterminer quels รฉlรฉments de cette formation doivent รชtre repris ou modifiรฉs dans le projet de formation en cours.
De mรชme que pour lโUMR TETIS, ce ne sont pas tous les services de la DREAL, de la DRAAF ou de la DDTM 34 qui sont impliquรฉs, ni tous les agents de ces services, mais seulement certains dโentre eux. Comme nous nous sommes engagรฉe auprรจs de ces acteurs, nous les avons anonymisรฉs en dรฉfinissant un groupe de deux ou trois lettres permettant de les rattachรฉs ร leur organisme ou ร leur service, ainsi quโun chi๏ฌre sโil existait plusieurs acteurs inscrits dans le mรชme service, le chi๏ฌre ยซ 1 ยป รฉtant rรฉservรฉ ร celui qui รฉtait le plus รฉlevรฉ hiรฉrarchiquement. Il existe un cas particulier, lโacteur dรฉsignรฉ par ยซ AMS ยป dont lโanonymisation est plus ยซ transparente ยป, puisquโil sโagit de ses initiales (Anja Martin-Scholz). Nous reviendrons plus en dรฉtail sur lโinscription de cet acteur dans le rรฉseau du projet et dans le processus de rรฉdaction de la thรจse dans les chapitres 5 et 6. Par consรฉquent :
AF (Agriculture et Forรชt) : dรฉsigne les agents de la DRAAF, TET (TETIS) : pour lโagent de lโUMR TETIS
CA (Chef Amรฉnagement) : pour identifier un des responsables du service Amรฉnagement de la DREAL
AT (Amรฉnagement du Territoire) : pour les agents de la DREAL de la division en charge de lโamรฉnagement du service Amรฉnagement
ED (รtudes et Donnรฉes) : dรฉsigne les agents de la DREAL de la division en charge des รฉtudes et de lโadministration des donnรฉes au sein du service Amรฉnagement
CEP (Connaissance, รtude et Prospective) : dรฉsigne les agents de la mission en charge des รฉtudes et de lโadministration des donnรฉes au sein de la DDTM 34
ST (Service Territoire) : pour lโagent du Service dโAmรฉnagement des Territoires de la la DDTM 34 Avant dโaller plus loi, il nous semble important de prรฉsenter quelques รฉlรฉments biographiques des individus que nous sommes amenรฉs ร croiser lors du suivi de lโintrigue de cette thรจse, oรน du moins les personnages rรฉcurrents. Ainsi les individus impliquรฉs dans le projet sont :
Pour la DRAAF :
AF1 Chef du service en charge de lโamรฉnagement au sein de la DRAAF, il a initiรฉ avec AF2, TET (TETIS) et, dans une moindre mesure, AMS (TETIS), ce projet. Il a participรฉ au dรฉpart du projet DRAAF/TETIS/LISAH dans la lignรฉe duquel sโinscrit ce projet avec AF2 et TET. Il a organisรฉ avec AF2, en faisant appel ร des pรฉdologues de lโUMR LISAH, une formation dโinitiation ร la pรฉdologie en octobre 2010 ร destination dโagents des DDTs.
AF2 Agent du service en charge de lโamรฉnagement au sein de la DRAAF, il a initiรฉ avec AF1, TET et, dans une moindre mesure, AMS, ce projet. Il a participรฉ au dรฉpart du projet DRAAF/TETIS/LISAH dans la lignรฉe duquel sโinscrit ce projet de formation avec AF1 et TET. Il a organisรฉ avec AF1 une formation dโinitiation ร la pรฉdologie en octobre 2010. Cโest lui qui a le premier inscrit le projet dans le ยซ plan dโaction rรฉgional DRAAF/DREAL
โ Consommation dโespace ยป.
Pour TETIS :
TET En charge de lโappui aux politiques publiques au sein de TETIS, il a participรฉ au projet DRAAF/TETIS/LISAH dans la lignรฉe duquel sโinscrit ce projet avec AF2 et AF1. Il a enca-drรฉ AMS lors de son stage de fin dโรฉtude pour son diplรดme dโingรฉnieur agronome sur les utilisations qui รฉtaient faites des donnรฉes rรฉalisรฉes dans le cadre du projet DRAAF/TETIS/ LISAH, ร savoir les IQSs et les CPAS.
AMS Ingรฉnieur dโรฉtudes au dรฉbut de ce projet, elle a rรฉalisรฉ une รฉtude lors de son stage de fin dโรฉtude pour lโobtention de son diplรดme dโingรฉnieur agronome sur les utilisations des IQSs et des CPAS par les personnes participants ร lโamรฉnagement territorial. Cette รฉtude a montrรฉ que les usages qui รฉtaient faits de ces donnรฉes ne correspondaient pas aux attentes de la DRAAF et, dans une moindre mesure, de TETIS (Martin-Scholz, 2011).
Pour la DREAL :
CA Agent de la DREAL faisant partie de la direction du service amรฉnagement. Cโest la ren-contre entre CA et AMS, qui a initiรฉ la participation des agents de la DREAL aux rรฉunions du projet de formation.
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Table des matiรจres
I. Constitution du cadre thรฉorique
1. Une organisation qui se constitue par et au travers de processus communicationnels
2. Un ยซ รฉchafaudage-frontiรจre ยป รฉlaborรฉ via des processus dโintรฉressement afin dโรฉquiper un Instrument dโAction Publique
3. Questionner les big data en sciences de lโinformation et de la communication
II. Terrain et dรฉmarche
4. รtudier un terrain peuplรฉ de nombreux actants
5. Mรฉthodologie : traces et focales
6. Posture du chercheur et mรฉthode dโanalyse des ยซ traces ยป
III. Contribution ร une approche info-communicationnelle
7. Des intrigues et des rรฉcits
8. Des donnรฉes et des mรฉthodes
Conclusionย
Glossaire
Bibliographieย
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