Aborder les questions d’équité entre les genres en matière de développement n’est pas une nouveauté : les appels pour accorder plus d’attention à ces questions ont émergé vers la fin des années soixante. Mais pour quelle importance ? A Madagascar, selon les statistiques officielles, les femmes représentent plus de la moitié de la population malgache. Elles sont une véritable force de travail. Elles s’occupent toutes les tâches existantes spécifiquement féminines qui commencent par les travaux domestiques et se terminent par des activités génératrices de revenu dont elles font en dehors de la maison dans le but de compléter les ressources de la famille.
L’APPROCHE GENRE
L’approche genre est une démarche d’analyse et de réflexion sur la situation des femmes. Elle est aussi un moyen de promotion, sociale qui permet aux femmes de faire valoir leurs droits juridiques et fondamentaux, d’exercer leurs droits politiques et entretenir des rapports égalitaires avec les hommes.
Notion de genre et de sexe
Les spécialistes des sciences sociales et ceux du développement utilisent deux termes distinctes pour expliquer les différences de traitement ou plus précisément les disparités et discriminations observés entre hommes et femmes. Le terme sexe est réservé aux différences biologiques entre femmes et hommes. Il marque les caractéristiques biologiques, permanentes et immuables, des hommes et des femmes, communs à toutes les sociétés et à toutes les cultures. Le genre, par contre, n’est pas déterminé biologiquement comme étant le résultat de caractéristiques sexuelles féminines ou masculines. C’est un facteur social. Il est utilisé pour décrire les règles, traditions et relations sociales qui, dans les diverses sociétés et cultures, déterminent ensemble ce qui est considéré comme féminin et masculin .
Mesures des inégalités sociologiques entre les sexes
L’analyse des disparités sociologiques entre les sexes dans un pays est réalisée à l’aide de deux types d’indicateurs : l’ISDH et l’IPF. Alors que l’ISDH mesure le niveau moyen atteint par chaque pays, l’ISDH corrige ce niveau de façon à refléter les inégalités sociologiques entre femmes et hommes suivant les trois aspects que sont l’espérance de vie à la naissance, le niveau d’instruction et le revenu estimé du travail.
Quant à l’IPF, il mesure les inégalités entre mes sexes dans les domaines de la participation et de la prise de décision dans les secteurs économiques et politiques clés.
a. Indicateur sexospécifique de développement humain (ISDH)
Selon le Rapport Mondial sur le Développement Humain 2003, Madagascar fait mieux que plusieurs autres pays en matière de réduction des inégalités entre les sexes. L’écart homme/femme dans le pays, qui n’avait jamais été important depuis le début des années 90 s’est considérablement amenuisé au cours des dernières années, pour presque disparaître aujourd’hui. En effet, on note que la valeur de l’ISDH du pays qui est de 0,477 en 2002 est quasiment égale à celle de l’IDH (0,479 pour 2002), témoignant de l’absence de discrimination entre hommes et femmes du point de vue des trois composantes de l’indicateur du développement humain. Ce résultat s’explique par la réduction des écarts en terme de scolarisation mais aussi en termes de revenus de travail.
b. Indicateur de la participation des femmes
En 2001, l’IPF de Madagascar est encore faible car il n’est que de 0,396. Autrement dit, les opportunités offertes aux femmes pour s’introduire dans les domaines clés de la participation et de la prise de décision politique et économique restent limitées. Pour cette année là, les femmes occupent seulement 8% des sièges parlementaires, 28,9% des postes de direction et de fonctions techniques. Elles subissent encore des traitements inégalitaires dans le domaine des potentialités économiques e particulier.
Le domaine politique reste toujours un terrain de prédilection des hommes (seulement 5% des sièges dans la chambre basse et 15% dans la chambre haute en 2003 sont occupés par des femmes). Au niveau des postes du pouvoir exécutif, la représentation des femmes dans les différents gouvernements ne dépasse pas la seuil de 15% et aucune femme n’a jamais été ni Premier Ministre, ni Président de la République, ni Président du Parlement depuis l’indépendance en 1960. Aucune femme n’occupe de poste de gouverneur/Chef de province. Les femmes sont donc presque entièrement écartées de la conduite au plus haut niveau des affaires politico-administratives des provinces. Or les retrouve à des niveaux plus bas comme les sous-préfets, dont elles e représentent d’ailleurs qu’un peu moins du quart de l’ensemble.
DES STATUTS ET ROLES DES HOMMES ET DES FEMMES A TRAVERS L’HISTOIRE
Avant et pendant la période de royauté
Avant la période de royauté
Au cours de la longue période historique allant des origines jusqu’aux XIVe-XVe siècles, la femme malgache jouirait d’une image très positive. Selon la plupart des récits d’origine relatifs à Dieu et relatifs à la création du Monde, la société de l’époque VAZIMBA accorderait une place prééminente à la femme par rapport à l’homme. Des mythes identifient le ciel, soit au fils de Dieu, soit à Dieu lui-même, tandis que la terre identifiée à la femme est, soit sa fille, soit son épouse. D’autres mythes des Hautes Terres centrales présentent également la femme comme princesse du Ciel, c’est à dire fille e Dieu ou « Andriambavilanitra ».
Par son essence ou son origine divine, la femme est donc supposée posséder, de façon privilégiée et permanente, la qualité sacrée par excellence, « le Hasina » qui la rend bonne, efficiente et différente des autres mortels. C’est ce qui explique vraisemblablement le fait qu’en malgache, on ne parle que du caractère sacré de la femme « ny hasin’ny vehivavy » et du caractère sacré du genre humain « ny hasin’ny olombelona » mais jamais du « hasin’ny lehilahy » (le caractère sacré de l’homme).
Pendant la période de royauté
L’émergence et l’établissement du système patrilinéaire intervenu au sein de la société malgache autour du 16e et du 17e siècle, instaurent le pouvoir masculin dans la plupart des domaines de la vie socio-économique.
Le rôle et l’image de l’homme en tant que Chef de Famille ainsi que la pratique de la polygamie sont solidement établis aux 17e et au 18e siècles sur les Hautes Terres centrales et fortement institutionnalisés à travers les discours et les ordonnances royales. La valorisation de la filiation masculine dans la transmission de l’héritage patrimonial s’affirme et s’impose. La primante du statut de l’homme en tant que chef exclusif de la famille s’accompagne de la pratique et de l’institutionnalisation du « Kitay telo an-dalana » ou de la tierce partie attribuée à la femme lors du partage des biens à l’occasion du divorce.
Cependant, bien que le pouvoir masculin s’affirme au moyen du système patrilinéaire, la femme continue à jouer un rôle important jusqu’à la fin du 19e siècle, tout particulièrement dans le domaine politique. En effet, le système monarchique qui s’établit et s’organise à partir du 16e siècle, notamment sur les hautes terres centrales, fait appel au « hasina » de la femme pour légitimer et pérenniser le pouvoir royal.
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Table des matières
INTRODUCTION
PARTIE I : ETAT DES LIEUX DU GENRE A MADAGASCAR
Chapitre I : L’APPROCHE GENRE
Chapitre II : DES STATUTS ET ROLES DES HOMMES ET DES FEMMES A TRAVERS L’HISTOIRE
PARTIE II : FEMME, OBJET DU DEVELOPPEMENT
Chapitre III : ANALYSE DE LA SITUATION DE LA FEMME MALGACHE
Chapitre IV : LES OBSTACLES A L’INTEGRATION DES FEMMES AUX PROCESSUS DE DEVELOPPEMENT : DISPARITE DE GENRE
PARTIE III : POLITIQUES ET STRATEGIES EN VUE DE L’INTEGRATION EFFECTIVE DU GENRE DANS LE DEVELOPPEMENT
Chapitre V : REVUE DE PROGRAMMES DANS LE CADRE DE PROMOTION DE GENRE
Chapitre VI : DE L’INTEGRATION EFFECTIVE DU GENRE DANS LE DEVELOPPEMENT
CONCLUSION
ANNEXES
Liste des tableaux et des annexes
Liste des sigles et abréviations
BIBLIOGRAPHIE