Une histoire mouvementée à l’image de la succession heurtée des époques

Les immeubles bâtis

Les corps de logis principaux des châteaux d’origine de Kerguéhennec et Loyat, selon les projets d’Olivier Delourme, étaient fort ressemblants. Les deux constructions étaient extrêmement sobres, presque sévères, en maçonnerie de moellons enduits, avec encadrement des nombreuses fenêtres et chaînes d’angle en granit. Les façades comprenaient un rez-dechaussée, un premier étage et un comble, couronnés par une toiture élevée en pente simple (à l’exception de la façade principale et de la façade latérale ouest de Loyat, ainsi que de la façade latérale ouest de Kerguéhennec, qui comprenaient un étage de plus).
Au centre des façades principales donnant sur les cours d’honneur, un avant-corps était surmonté d’un fronton courbé sur lequel étaient sculptées respectivement les armes des Hogguer pour Kerguéhennec99 et des Coëtlogon et des Auvril de la Roche pour Loyat100. De part et d’autre de l’avantcorps étaient disposées trois travées de fenêtres rectangulaires. Deux pavillons symétriques terminaient les façades principales et postérieures des édifices, à l’ouest et à l’est de celles-ci ; ils étaient nettement plus saillants à Kerguéhennec qu’à Loyat ; ils étaient chacun couronnés d’un fronton triangulaire et coiffés d’une toiture pyramidale. Sur la toiture du corps de logis principal étaient percées de petites lucarnes fermées par des volets de bois.
Les façades latérales étaient analogues aux façades principales. Toutefois de grandes lucarnes en pierre éclairaient les combles. A Loyat, la façade latérale ouest donnant sur la cour des cuisines, ne disposait que de rares ouvertures, sans doute du fait de sa coexistence pendant de nombreuses années avec l’ancien château attenant.
Les façades postérieures ( au nord) présentaient les mêmes dispositions que les façades principales mais simplifiées et dépourvues de frontons surmontant les motifs centraux.
Enfin de hautes souches de cheminées se dressaient sur l’ensemble des toitures. A l’exception des armoiries sculptées d’origine, vraisemblablement disparues durant la Révolution, ces dispositions extérieures du corps de logis principal sont demeurées pratiquement identiques au projet d’Olivier Delourme à Loyat, depuis trois cents ans. Cela a aussi été le cas pour les pavillons entourant la cour d’honneur du château.
Il n’en a pas été de même à Kerguéhennec, en raison des grands travaux de restauration entrepris par Paul-Henri de Lanjuinais, sous la direction de l’architecte parisien Ernest Trilhe, à partir de 1873 et jusqu’en 1877.
Les principales modifications alors apportées à la disposition extérieure du château ont consisté à remplacer les petites lucarnes d’origine en bois de la toiture du corps de logis central donnant sur la cour d’honneur, jugées trop modestes, par de grandes lucarnes de pierres aux frontons cintrés et triangulaires alternés et à encadrer la porte d’entrée principale de la demeure, par un péristyle surmonté d’un balcon. à la mode antique redécouverte à cette époque par les architectes en vogue de la capitale, dans un but certes louable d’ajouter à grand prix des éléments décoratifs à cette façade plutôt sévère, mais au risque d’en rompre la simplicité et l’harmonie majestueuse d’origine. L’installation au centre du toit d’un campanile élevé à horloge, heureusement disparu à l’occasion de travaux de restauration ultérieurs, n’ajoutait rien non plus à l’ordonnancement général du Monument. Les architectes et inspecteurs des Monuments historiques concernés n’ont d’ailleurs pas été abusés par ces prétendus embellissements postérieurs du château de Kerguéhennec, puisqu’au moment des procédures préalables au classement de cet édifice en 1988, plusieurs voix autorisées ont émis des avis réservés, voire tout à fait défavorables à un tel classement au titre des Monuments Historiques.101 Il faut tenir compte du fait qu’à cette époque le dix-neuvième siècle n’avait pas encore la cote parfois excessive qu’il a obtenue depuis auprès de l’administration en charge de la conservation du patrimoine bâti.
Le classement a finalement été décidé, en raison des volontés politiques convergentes du moment, du projet d’installation dans le parc d’une collection de sculptures modernes et du poids dans la balance du nouveau propriétaire public concerné. Il a permis ultérieurement de faire procéder à de très importants travaux de restauration et d’aménagement tant du château lui même que de ses admirables communs, avec l’aide de substantielles subventions de l’Etat et de la Région Bretagne.
Mais les modifications apportées au château de Delourme par l’architecte Trilhe n’ont pas concerné que la façade extérieure donnant sur la cour d’honneur du château.
Elles ont également et surtout porté sur l’agencement intérieur du château, toujours dans un but louable d’apporter à la demeure des éléments de confort et de luxe en rapport avec la position sociale et la richesse du nouveau commanditaire.103 Le vestibule et l’escalier d’honneur ont été ainsi profondément remaniés et une rampe en pierres certes fort décorative mais également marquée par le nouveau goût de l’époque est venue remplacer l’élégante et légère rampe en fer forgé d’origine.
La salle à manger a été considérablement agrandie grâce à la démolition d’un mur de séparation antérieur. Une imposante bibliothèque permettant d’abriter les importantes collections de livres du nouveau propriétaire, président de la Société des bibliophiles bretons, a été installée de toutes pièces dans la salle de l’aile est donnant sur la Cour d’Honneur. Il a même fallu condamner deux fenêtres pour permettre d’abriter toutes les travées nécessaires. Cette bibliothèque figure sous le numéro 18 dans le plan de l’actuel château.
Au premier étage, un couloir long et large dessert neuf chambres possédant, chacune un vaste cabinet de toilette. L’ensemble de ces chambres permet d’héberger facilement jusqu’à vingt personnes en même temps.
Dans les combles, dix chambres supplémentaires sont destinées à l’importante domesticité ou à d’éventuels visiteurs de passage. Quatre d’entre elles seulement sont équipées d’un cabinet de toilette.
Les importantes modifications apportées par le Comte de Lanjuinais à sa décoration intérieure et aux abords du château seront évoquées dans les deux sous-parties suivantes.
Après lui, peu de modifications substantielles sont à signaler à Kerguéhennec, à part la disparition du campanile à horloge central, à une époque inconnue mais relativement récente, puisqu’il figure encore sur des cartes postales datées de l’entre deux guerres.
Au château originel de Loyat, tel que réalisé sous la direction d’Olivier Delourme, peu de transformations de l’ampleur de celles apportées à Kerguéhennec sous la direction d’Ernest Trilhe, sont à signaler.La salle des gardes du rez-de chaussée, à l’est du grand vestibule d’honneur avait dû être transformée en chapelle domestique, peu après le décès d’Olivier Delourme, quand l’ancienne chapelle dédiée à Sainte Barbe avait été rasée en même temps que l’ancien château et que le colombier de la même époque, situé à proximité immédiate de celle-ci, à proximité de la rive nord du miroir d’eau.
Il est très vraisemblable que les plafonds de l’étage noble aient été remplacés vers le milieu du dix-neuvième siècle par de nouveaux d’une épaisseur nettement plus importante que précédemment, comme il était de coutume à cette époque.
Le remplacement des très nombreuses croisées de fenêtres s’est vraisemblablement accompagné de l’installation de plus grands carreaux de verre que précédemment.
L’orangerie située au sud-est du bâtiment et mentionnée spécifiquement dans la description du projet de Delourme n’ayant pas pu être retrouvée, la question reste posée de savoir si elle a effectivement existé et dans l’affirmative où ?
La transformation et la rénovation du bâtiment des écuries dans les communs datent également du milieu du dix-neuvième siècle, avec l’ouverture des trois grandes portes à l’extrémité nord-est du bâtiment, pour le passage des calèches, et le percement de nouvelles fenêtres dans la grange située à l’étage, afin d’y entreposer le foin nécessaire à la nourriture des chevaux.
De même, sous les Champagny, toute l’ancienne chambre du Maître, dans l’aile ouest, fut transformée en une importante bibliothèque de dimensions impressionnantes, La tradition raconte que la Comtesse, qui pratiquait elle-même la reliure de nombre de ses livres, y avait installé des presses à relier d’un poids tel qu’une des poutres maîtresses soutenant le plancher de la bibliothèque avait fini par céder sous leur poids excessif. Des vestiges de cette catastrophe demeurent avec l’inégalité du plancher de cette pièce ayant résulté de cet effondrement, ainsi qu’à l’étage inférieur, dans la grande cuisine du château, une poutre effectivement cassée et artisanalement réparée, s’appuyant sur un support de forme cylindrique en fonte qui la relie au sol, en traversant la grande table centrale rectangulaire de la cuisine…
Cette anecdote, vraie ou supposée, est dans tous les cas illustrative de l’état de fortune précaire de la Comtesse de Champagny à partir de la seconde moitié du dix-neuvième siècle, en raison d’une part des frais d’entretien et de restauration considérables de sa grande propriété et d’autre part d’interminables procès et actions de justice diverses qui contribuaient à la « saigner à blanc » et à enrichir tout un petit monde d’avocats, avoués, huissiers et autres auxiliaires de justice divers et variés, au moins aussi sûrement que les médecins et apothicaires entretenant la santé du vicomte de Loyat au siècle précédent.

Les décors intérieurs

Peu ou pas de décoration intérieure datant de la période des Hogguer subsiste dans l’actuel château de Kerguéhennec. En contrepartie, de nombreux éléments de décoration de la période Lanjuinais sont heureusement conservés à ce jour, principalement au rez-de- chaussée du corps de logis et dans la chapelle du château.
A Loyat, au contraire, la rampe d’origine en fer forgé du grand escalier d’honneur et les boiseries et cheminées ainsi que certains miroirs de l’étage noble ont pu être conservés malgré les adjudications et ventes successives du domaine, depuis la fin du dix-huitième siècle, ces éléments étant généralement considérés comme immeubles par nature.
Lors de la vente de Kerguéhennec en 1732 à la famille de Rohan-Chabot, il était pourtant expressément stipulé dans l’acte que tous ces éléments de décoration intérieure faisaient intégralement partie de la vente à partir du moment où ils étaient fixés au mur, « même par des clous ». Comme ils n’ont pas pu être retrouvés lors de la vente de 1972 au Conseil général du Morbihan, c’est donc qu’ils ont disparu entre ces deux dates, vraisemblablement par échange en raison d’un état de dégradation de plus en plus avancé au fil des temps.
Au début du dix-neuvième siècle, le domaine appartient à la famille de Janzé qui n’y réside pas et n’y fait donc pas procéder à de substantiels travaux de décoration intérieure. Ce n’est qu’en 1872 qu’il passe par alliance au Comte Paul-Henri de Lanjuinais, ( descendant du célèbre conventionnel Jean-Denis Lanjuinais 109), député puis Président du Conseil général du Morbihan.
Celui-ci fait de Kerguéhennec sa résidence principale et outre les grands travaux de restauration et d’embellissement des façades du château dans le nouveau goût de l’époque, il y entreprend des travaux renouvelant entièrement les décors intérieurs , également sous la direction de l’architecte parisien Ernest Trilhe, auteur par ailleurs en Bretagne des décorations du château de Combourg en 1876.
Ernest Trilhe, élève de Félix Duban, restaurateur à cette époque des châteaux de Blois et de Fontainebleau, est inspiré par ces grands chantiers. Le vestibule et l’escalier d’honneur synthétisent ainsi les deux grandes références stylistiques, Renaissance et Baroque, qu’il adopte pour l’ensemble de la nouvelle décoration intérieure du château. La superbe fontaine de marbre polychrome du vestibule ainsi que la voûte redécorée rappellent les fastes de Versailles. La nouvelle rampe en pierres blanches imposante et massive, à la façon de l’escalier de François Ier à Blois, porte le monogramme d’Henri de Lanjuinais, mais on peut regretter l’élégante rampe d’origine en fer forgé du dix-huitième siècle, comparable dans son dessin à celle conservée à Loyat, ou dans d’autres hôtels urbains datant de la même époque, qui a disparu, de ce fait à Kerguéhennec ; au sommet, une frise légère énumère, à la manière des palais italiens , les armes d’alliance de la famille du comte et de sa deuxième femme, née Boisgelin. Au sol, le pavement en grès incrusté du Beauvaisis, répond par la délicatesse de ses entrelacs aux toiles marouflées sur les murs de la cage .
Le château de Loyat ne dispose pas d’une décoration intérieure aussi somptueuse que celle du rez-de-chaussée du château de Kerguéhennec. Mais, à l’exception de la bibliothèque qui date du dix-neuvième siècle, ainsi que des niches du vestibule d’honneur, de facture retour d’Egypte, la quasi- totalité des décors boisés des pièces en enfilade de la partie sud de l’étage noble, ainsi que l’ancienne salle à manger et trois chambres au nord du même étage, dont la chambre de Madame, ont conservé leurs boiseries, cheminées et parquets du dix-huitième siècle.
La chapelle installée pour les Coëtlogon dans l’ancienne salle des gardes du château, à l’angle sud-est de celui-ci est meublée d’un bel autel d’époque Restauration orné de deux statues d’anges orants du dix-huitième siècle et d’un Christ de la même époque de facture rurale. La tapisserie au petit point, qui sert de devant d’autel, est un travail anglais du dix-septième siècle ; elle représente les quatre évangélistes.
Mais le riche mobilier du château de Loyat, ses tapisseries ainsi que ses tableaux ne sont pas d’origine, la plupart ayant été acquis par le grand collectionneur qu’était Léon-Auguste Delprat, le plus souvent en salles des ventes, à la fin du dix- neuvième siècle et au début du vingtième siècle. Toujours choisis avec un goût très sûr, ils contribuent à donner durablement à la demeure un aspect habité et agréable à vivre. Plusieurs pièces de mobilier ou d’objets d’art d’un exceptionnel intérêt ont fait l’objet d’un classement spécifique au titre des monuments historiques au tournant du vingt et unième siècle. Les livres et périodiques de la bibliothèque, ainsi que plusieurs meubles et tableaux ont également été apportés au château de Loyat par la famille Delprat ainsi que par les familles alliées, Bonnefon, Regnault de Prémesnil, Dargnies et Roquefeuil- Pradt, aux dix-neuvième et vingtième siècles.

Les jardins et les parcs

Si les châteaux de Kerguéhennec et de Loyat, même modifiés au fil des temps, continuent à demeurer les joyaux, témoins de l’architecte Olivier Delourme en Bretagne intérieure, ils ne sauraient être dissociés de leurs écrins végétaux qui contribuent à les mettre en valeur au quotidien. Il est même permis de penser que depuis l’installation des sculptures contemporaines à demeure dans le Parc du château de Kerguéhennec, celui-ci, à son tour, est devenu l’écrin végétal servant à mettre en valeur cette collection. Mais que reste- t-il au juste du projet initial d’Olivier Delourme à leur sujet, tant à Kerguéhennec qu’à Loyat ? A vrai dire, pas grandchose, si ce n’est la description minutieuse qu’en a faite l’architecte vannetais au début du dix-huitième siècle pour Loyat, pour accompagner un plan aujourd’hui malheureusement disparu.
A Kerguéhennec, le traitement des abords, à l’exception de la cour d’honneur, ne semble pas avoir fait l’objet ni de plans détaillés, ni à fortiori de réalisations élaborées pour les Hogguer. Le domaine devait surtout être de rapport forestier et agricole ; il était donc entouré de tous côtés soit par des bois principalement au nord et à l’ouest, mais également par des prairies, voire par des marais au sud et à l’est de l’édifice. Les murs entourant un potager de grandes dimensions, ( un hectare), datant très probablement de l’époque Hogguer, ont été conservés pour la plupart en bon état d’entretien.
A Loyat, l’intérêt des oncles de René- Charles- Emmanuel de Coëtlogon, et surtout de l’évêque de Quimper, Mgr François de Coëtlogon pour les projets d’Olivier Delourme expliquent l’importance accordée aux projets de plans des jardins et du parc de la demeure dès le tout début du dixhuitième siècle.

Pour Loyat

Les perspectives d’avenir du Domaine de Loyat dépendront d’une part de l’évolution des politiques publiques en faveur des Monuments Historiques privés ouverts au public et d’autre part de la stratégie de la famille actuellement propriétaire.
Concernant la première condition, elle semble aussi difficile à appréhender aujourd’hui pour un Monument Historique privé breton comme le château de Loyat que pour le château de Kerguéhennec, appartenant au département du Morbihan.
La tendance des dix dernières années en matière de subventions publiques dans le département français sans doute le plus privilégié de ce point de vue, a été marquée par un mouvement régulier de diminution du taux global de subvention pour les gros travaux de restauration, qui est ainsi passé de 90% du montant total des travaux TTC à moins de 75% aujourd’hui, ce qui reste un taux tout à fait privilégié par rapport aux autres régions françaises.
Une seule certitude est que le retour au taux encore en vigueur il y a dix ans n’est pas envisageable, l’hypothèse d’une nouvelle diminution étant au contraire fort plausible.
Le transfert de tout ou partie de la responsabilité de la gestion de ces subventions de l’Etat à la Région est également possible à plus ou moins brève échéance, avec au passage une éventuelle nouvelle diminution du taux global des subventions publiques.
Dans de telles conditions, l’avenir des Monuments Historiques privés ouverts au public, mais peu visités, comme Loyat, serait gravement compromis.
Le choix familial a dans ce cas consisté à viser le double objectif de l’ouverture au public et du maintien d’une vie familiale dans les lieux, qui servent de résidence secondaire et de rassemblement entre Pâques et la Toussaint principalement. Le reste de l’année, une présence permanente sur place est assurée par un ménage de gérants polyvalents.
Après de nombreux projets avortés, ( installation d’un terrain de golf dans le parc forestier, musée du boomerang, musée de l’Amérique française, concours de sculptures sur granit, implantation d’une étape d’ un éventuel circuit de la « Vallée des Saints », etc.) et la multiplication d’animations ponctuelles aux résultats plutôt décevants ( Expositions variées et salons estivaux, concerts, ateliers de cuisine, intervention de conteurs ou de jeux de rôles, visites du quercetum et du parc forestier, accueil de classes des écoles voisines dans le cadre de leur programme culturel, candidatures pour des tournages de films, projet de valorisation collective du potager, concours de photos, etc.), souvent en liaison avec l’Office du tourisme de Ploërmel, Terres de légendes et/ou le pays d’accueil touristique de l’Oust à Brocéliande, le choix de mise en valeur économique principale du site et du château s’est porté durablement sur l’accueil de rassemblements familiaux ou d’entreprises, qui n’a cessé de se développer depuis une dizaine d’années, pour atteindre une recette annuelle correspondant à peu près au poste des dépenses de personnel, ou encore à celui des dépenses d’entretien courant. ( 30.000 Euros chacun).

Une histoire mouvementée à l’image de la succession heurtée des époques

Sans remonter au déluge, les deux sites de Kerguéhennec et Loyat ont de très longue date été le siège d’importants domaines, souvent dispersés sur de nombreuses paroisses plus ou moins proches, en fonction notamment des apports aux patrimoines familiaux concernés par les dots des épouses.
Concernant Kerguéhennec, il semble très probable que l’acquisition par les frères Hogguer de cet important domaine boisé, et des forêts environnantes de la famille de Kermeno du Garo, en 1703, ait été surtout dicté par le souci d’effectuer un placement foncier lucratif et nettement moins risqué que les opérations financières et commerciales auxquelles ils étaient accoutumés par ailleurs et qui avaient contribué à la création rapide de leur immense fortune à la fin du siècle de Louis XIV.53
Le lien éventuel avec l’installation de la Compagnie des Indes à Lorient, dans laquelle ils auraient été personnellement impliqués n’a pas pu être établi de sources d’archives certaines, malgré les allégations à ce sujet répétées dans plusieurs ouvrages consultés. De même je n’ai pas pu établir à ce jour de quelconques liens de la famille Hogguer avec les finances des Etats de Bretagne, au cours du premier quart du dix-huitième siècle.
Dans les archives les concernant conservées au service départemental des archives du Morbihan, ce sont Vannes et Nantes, et non Lorient, qui reviennent régulièrement dans les correspondances conservées entre les Hogguer et M. Bodin à Rennes.
Ainsi, dans une lettre signée Hogguer de Bignan à Bodin datée du 30 janvier 1711, celui-ci écrit-il « Je vous prie Monsieur d’envoyer à M. du Breiljarno, avocat à Vannes, un extrait du contrat judiciaire que vous avez en vos mains de mes terres comme elles ont été achetées sous le nom de Daniel
et Laurent Hogguer et le Baron de Reding. Cet pour rendre aveu à la chambre des comptes de Nantes, pour les fiefs de Barathon et Boismoreau et lorsque vous n’aurez plus besoin du contrat judiciaire, de me le renvoyer au château, car je crois que le procès de Mr. Rivière est tombé à l’eau.(sic) ».
Quelques mois plus tôt, une lettre de Delas à Bodin, datée de Lyon le 16 octobre 1710, est ainsi libellée : « Vous m’obligerez beaucoup de me marquer en quel estat les choses sont et aussi ce que vous scavez être encore dû par la vente des bois de la forest de la Tribonnière par le sieur Delourme et autres ». Cette correspondance fait allusion aux relations d’affaires des Hogguer et d’Olivier Delourme, qui ne se réduisaient pas à la construction du château de Kerguéhennec, mais s’étendaient notamment à d’importants négoces de bois d’oeuvre tirés des forêts appartenant notamment aux banquiers suisses.
Peu après, les Hogguer de Bignan sont rattrapés par les désastres financiers de la fin du règne de Louis XIV, malgré le soutien personnel que leur accorde Madame de Maintenon, et plus encore sous la Régence, après la mort de Louis XIV. Cela n’empêche pas leur frère Jean-Jacques d’acquérir en 1715 le domaine de Coppet en Suisse et de le restaurer à grands frais.
Les années 1720, marquées notamment par la faillite de Law, achèvent de porter des coups fatals à la fortune familiale et suite au décès de Daniel Hogguer en 1731, le domaine de Kerguéhennec est vendu par ses héritiers à Louis Auguste de Rohan-Chabot, cousin et futur successeur du Cinquième Duc de Rohan. afin d’apurer une partie des dettes accumulées par les financiers faillis.
Ainsi, en moins d’une trentaine d’années, le domaine de Kerguéhennec a-t-il été le témoin de l’enrichissement accéléré d’une famille de négociants et financiers internationaux, avec des ramifications multiples tant en France que dans les pays européens voisins. Le château lui-même entièrement restauré par les soins d’Olivier Delourme, en quelques années seulement, grâce à la puissante fortune familiale, demeurait l’expression de cette richesse rapidement acquise. Mais le déclin de celle-ci en moins d’une génération allait entraîner la fin de l’épisode Hogguer en Bretagne, même si les générations suivantes de la famille eurent de nouveau de nombreuses occasions de s’illustrer sur d’autres scènes européennes, au cours des décennies suivantes.

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Table des matières

INTRODUCTION
PREMIERE PARTIE – Les châteaux et leurs domaines
Introduction : Inscription dans l’environnement rural et architectural
A ) Analyse architecturale comparée
B ) Le choix de l’architecte : Olivier Delourme
C ) Le déroulement des travaux
DEUXIEME PARTIE – Les propriétaires successifs
Introduction : Une histoire mouvementée à l’image de la succession heurtée des époques
A ) Chronologie comparée
B ) La succession des propriétaires
C ) La situation actuelle des deux monuments
TROISIEME PARTIE – Les modifications apportées au fil des temps
Introduction : Chaque propriétaire a tenu à laisser sa marque propre
sur les édifices, leurs abords et/ou leur décoration intérieure.
A) Les immeubles bâtis
B) Les décors intérieurs
C) Les jardins et les parcs
CONCLUSION : Perspectives d’avenir

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