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De 1937 à la fin des années 50
Les décrets de 1937 et de 1938 (cf. annexe 3 et 4 p.38 et 41) mettent en place ces deux nouvelles fonctions : les maîtres d’internat (MI) e t les surveillants d’externat (SE). La circulaire du 28 novembre 1938 prévoit que «progressivement, tous les établissements d’enseignement du second degré vont […] être pourvus d’un cadre de fonctionnaires spécialement chargés de la surveillance – soit d’internat, soit d’externat. […] les postes de surveillants d’externat […] comme ceux de maîtres d ’internat doivent être attribués à des jeunes gens laborieux et ayant donné des preuves de leur volonté de labeur, pour les aider temporairement dans la préparation d’examens et de concours ». L’apparition de ces nouveaux auxiliaires va logiquement conduire le surveillant général à prendre en charge des actions éducatives. Pour comprendre cette évolution,il faut se pencher sur la formation de ces jeunes. Il faut savoir que lorsqu’un décret, une circulaire, une loi est décidé, cela se met progressivement en place et peut, parfois, mettre des années avant de voir les choses aboutir ce qui est le cas ici. En effet, sous la IIIème république, l’institution scolaire veut des surveillants formés et efficaces. Mais ce n’est qu’en 1946 que des stages de formation pour les maîtres d’internat sont mis en place. Un décalage qui peut s’expliquer par le blocage du pays avec la seconde guerre mondiale. Cette formation consiste à donner un sens au rôle de maître d’internat. Pour cela, l’institution leur ap porte des connaissances sur les adolescents et leurs besoins, sur l’institution elle-même et les spaces de vie. Les surveillants qui bénéficiaient de ces stages étaient familiarisés ecav une nouvelle approche de l’éducation comme le respect des enfants, le souci de leur éducation, et certains plus centrés sur leur rôle comme le sens de la responsabilité, la recherche dela qualité de la vie collective.
Parallèlement, dans les années 1950 jusqu’à la fin des années 1960, la société française connaît une forte croissance des vacances collectives d’enfants et d’adolescents dû à l’élévation du niveau de vie (plein emploi, augmentation des salaires,…) connue après la seconde guerre mondiale. Pour encadrer ces centres de vacances, le ministère de la Jeunesse et des Sports exige que les cadres soient diplômés. Il met en place un brevet de moniteur de colonies de vacances ou de centres de vacances d’adolescents, le B.A.F.A.4 actuel. Ceux qui ont été formés dans le cadre des centres de vacances ou dans celui de l’éducation nationale, les maîtres d’internat et les surveillants d’extern at ont acquis une bonne qualification dans l’encadrement des adolescents. Les surveillants généraux ont pu ainsi recevoir des personnels de surveillance compétents avec un bagage d’animation qui va se révéler important dans le climat de l’établissement et le relationnel avec les élèves .
Une évolution progressive de la fonction après al seconde guerre mondiale jusqu’en 1968
Dans cette partie, je vais tenter d’observer comment et grâce à quelles évolutions le métier de surveillant général va progressivement reêtamené à se transformer (Rémy et al., 2010). Je me suis également servi des différents xtes officiels consacrés aux responsabilités des surveillants généraux, permettant ainsi une réflexion sur leur statut.
Un contexte d’après-guerre favorable au dévelopement des collèges d’enseignement technique (C.E.T.)
Pour commencer, il faut être conscient qu’après laseconde guerre mondiale, la France se trouve dans un contexte de reconstruction du pays et de forte croissance : économique, démographique (le baby-boom). En ce qui concerne lesystème scolaire, nous pouvons repérer un rapide développement de l’enseignement professionnel public dû, en partie, au contexte économique du pays. Pourtant, c’est dans les années30 que nous pouvons observer une nouvelle finalité liée à l’école. En effet, à l’époque, l’état commençait à voir en l’école une finalité économique. On a pu ainsi observer une orientation professionnelle liée aux enseignements techniques dans le but de créer un lien plus direct entre métier et école. En 1939, 75% des élèves arrêtent l’école à 13 ans et vidennent apprentis. Une idée commence à apparaître, celle que l’école peut fournir une main-d’œuvre par rapport aux besoins économiques du pays. Cette idée, nous la retrouvonsplus présente à la libération. Tout est à reconstruire, remettre en place. Il faut donc des jeunes qualifiés d’où un rapide développement de l’enseignement professionnel public.
Par conséquent, après la seconde guerre mondiale, on se trouve dans un contexte ème ème scolaire avec trois types d’établissements : les cours complémentaires (de la 6 à la 3 ) où il n’y a pas de surveillant général, les lycées classiques et modernes qui ont un internat donc un surveillant général puis, les établissements professionnels avec leur surveillant général. Les établissements d’enseignement professionnel créés ne 1949 sous le nom de centres d’apprentissage deviendront des collèges d’enseignement technique (CET) en 1959. Comme ils étaient récents, l’éducation nationale formuleun cadre pour ceux-ci et précise quelles sont les « attributions et libertés de service des surveillants généraux des établissements d’enseignement technique» par la circulaire n°2950/2 du 9 octobre 1956. Dans la continuité des textes précédents, celle-ci indique dans un premier temps que les « surveillants généraux, membres du personnel administratif des établissements sont chargés, sous l’autorité du chef d’établissement, du maintien de l’ordre et de la discipline». Le surveillant doit donc se charger :
– « de l’application du règlement intérieur de l’école ;
– de l’ordre matériel et de la discipline dans toutes les parties de l’établissement et notamment dans les salles d’étude, le réfectoire etles dortoirs ;
– de l’application de la circulaire n° 1449-4 du 28 septembre 1949 portant interdiction des brimades entre élèves ;
– de l’organisation et du contrôle des départs et des rentrées des élèves internes ;
– du contrôle des absences et des rentrées des élèves externes et demi-pensionnaires ;
– de la prise en charge des élèves en cas d’absence de professeur ;
– de l’organisation de la surveillance et du contrôle du lever et du coucher des élèves internes, de l’arrivée et du départ des élèves pourla promenade, des mouvements, des récréations d’avant-classe et d’après-classe, des orties collectives, des mouvements à l’extérieur de l’établissement, des visites médicales et de la présence des élèves à ces visites. Il rend compte technique (C.E.T.)
En plus de la mission de « maintien de l’ordre » au service de l’enseignement, les surveillants généraux se voient attribuer une «action pédagogique et éducative» puisque ces derniers « participent au contrôle des effectifs, de la condu ite et du travail des élèves et veillent à leur éducation ». A ces titres sont subordonnés aux surveillants généraux « les adjoints d’enseignement lorsqu’ils sont chargés du service des études surveillées ou d’un service de surveillance, les répétiteurs, les maîtres d’internat et les surveillants d’externat ». Les surveillants généraux doivent organiser l’emploidu temps de ces personnels. De plus, les C.E.T. sont dirigés par un directeur ou par une directrice mais ne disposent pas d’adjoint. Par défaut, le surveillant général assume cette fonctionet cela explique une partie de la circulaire qui pose que « en cas d’absence de courte durée du chef d’établissement, le remplacement de ce dernier est assuré par le surveillant général ils’ n’y a pas de directeur des études ». Par la multiplicité des tâches exposées dans cette circulaire, il n’est pas rare de rencontrer plusieurs surveillants généraux dans un même établissement enseignementd’ technique (Delahaye, 2009).
Par ce contexte favorable, les surveillants générauxsemblent avoir un rôle plus important que dans l’enseignement classique. Ils sont amenés, peu à peu, à prendre en considération la dimension éducative de leur métier, du fait des temps libres des jeunes à l’internat. S’opposera, dès lors, progressivement,deux manières de concevoir leur métier. De plus, une augmentation des effectifs ainsi que le souci d’occuper tous ces jeunes va amener le surveillant général à revoir certaines de ses pratiques.
Une inadaptation du système scolaire aux besoins de la vie adolescente
A partir des années 60, une nouvelle population de jeunes va faire son entrée dans les établissements et poser de nouveaux problèmes. En 1959, la loi Berthoin fait passer l’obligation scolaire de 14 ans, à 16 ans. A cet in stant, les établissements se sont ouverts à une « masse » d’adolescent avec toutes leurs complexités.
Cette massification scolaire se trouva confrontée, dans un premier temps, a un manque de place d’où une croissance dans la construction d’établissements scolaires, surtout dans les collèges d’enseignement technique. Étant pourvu d’i nternats importants, les C.E.T.5 sont pourvus d’un poste de surveillant général spécifique.
5 Dans le système scolaire, il existe une distinction entre le surveillant général dit de CET et le surveillant général dit de lycée qui se situe au niveau du recrutement. L’un doit être bachelier, avoir accompli 5ans de service et être âgé de 28 ans. L’autre doit posséder une licence d’enseignement et avoir accompli 3 années de service d’enseignements et être âgé de 25 ans. (Voir leurs attributions au 2.1)
Aujourd’hui, nous sommes en mesure de dire que c’es t dans ces établissements qu’une nouvelle conception du rôle de surveillant généralva naître. En effet, les surveillants généraux vont être amenés à changer progressivement leurs pratiques professionnelles. Dans les CET, le climat de l’internat s’impose naturellement à l’ ensemble de l’établissement. Un nombre important d’élèves, souvent supérieur à la moitié del’effectif total, est interne. Dès lors, un souci se pose aux surveillants généraux pour occuper ces jeunes. Étant dans des établissements professionnels, ces élèves ont peu detravail personnel à faire et les longues heures d’études, habituelles en lycée, sont donc inutiles pour eux et seraient surtout insupportables. Cette nécessité de donner des occupations aux internes pendant les temps libres va amener les surveillants généraux à revoirleurs pratiques professionnels et introduire, ainsi, des activités nouvelles de loisirs comme le foyer socio-éducatif. Cette activité socio-éducative fût expérimentée dès le milieu des années50 par la Fédération des Œuvres Educatives et de Vacances de l’Enseignement Technique (FOEVET) et les Associations Régionales des Œuvres Educatives et de Vacances de l’Enseignement Technique (AROEVET). Le foyer socio-éducatif était, au départ, un modèle d’association adapté à l’échelle des C.E.T. Avant, les textes officiels de 1996, le foyer socio-éducatif fût toujours un soutien oral6. Dans les CET, les surveillants généraux l’utilisent comme un outil d’éducation. Il permet aux jeunes de se responsabiliser et d’acquérir une certaine autonomie puisqu’ils collaborent avec les adultes bénévoles à faire fonctionner cette activité.Les jeunes ne sont pas les seuls à voir un côté bénéfique par le biais deces activités. Le surveillant général observe progressivement une transformation dans sa pratique qui devient plus éducative. Un décalage se fait ainsi ressentir avec sa pratique disciplinaire traditionnelle. Une évolution de sa pratique l’amène à réfléchir sur son identité professionnell. L’idée d’une mise à distance avec l’image du surgé commence à naître. Néanmoins, tous les surveillants généraux ne pensentpas la même chose. En effet, un écart s’est également produit entre la pratique dessurveillants généraux dit de CET et ceux de lycées. Les temps hors cours étant gérés différemment selon la présence ou non d’internat à l’intérieur des établissements, une opposition se ormef. D’un côté celle des « surgés », fidèles aux traditions, à la discipline traditionnelle. De l’autre, une nouvelle conception du métier de surveillant général, souhaitant une évolution de urle statut et rejetant le modèle traditionnel. Monsieur A. témoigne bien de ce décalage dans son ntretien : « si vous rencontrez d’autres vieux comme moi, ils vous le diront mais y en avait dans les lycées professionnels. […] c’est que dans les lycées professionnels, il y avait des surveillants généraux, quelques surveillants généraux qui s’occupaient de l’équipe de foot quivaient ce côté-là. Ils jouaient un rôle, et c’est là-dessus que c’est fondé la catégorie d’ailleurs. » Le rôle dont il parle, ici, est bien un rôle éducatif mais rendu possible par la configuration de ces établissements-là. Ayant beaucoup de temps libre, il fallait occuper ces élèves autrement que par le travail.
Ainsi peut-on constater une tension entre les établissements professionnels et les lycées : «les surveillants généraux de lycée (recrutés à partir dela licence) considèrent leurs collègues de CET avec un léger mépris ; ils sont, pour la plupart, persuadés que les activités socio-éducatives sont démagogiques et n’ont pas leur place à l’école. » (Rémy et al., 2010). Ils ne comprennent pas l’utilité d’une évolution puisque dans leurs propres établissements, on ne ressent pas le besoin de remettre en cause les pratiques du « surgé ». Leurs établissements fonctionnent bien comme ça alors pourquoi changer ?
Seulement ces personnels n’avaient certainement pas prévu que l’évolution de la société française aurait une répercussion sur le système scolaire. Même si dans les CET, la cohabitation avec les adolescents se fait sans trop de heurts, ce n’est pas le cas pour les lycées et les collèges classiques et modernes. En effet, en dehors de l’école, les attentes, les besoins des jeunes vont progressivement évoluer et avoir unimpact direct sur ces établissements.
Une évolution à l’égard de la psychologie de l’enfant se répercutant sur une vision nouvelle de la pédagogie
Dans le but d’avoir une vision d’ensemble, je m’appu ierai, principalement, sur la revue Sciences Humaines à la rubrique « Psychologie de l’ enfant : 150 ans d’histoire » ainsi que sur les travaux d’un historien (Prost, 2004) et sur les entretiens que j’ai menés afin d’illustrer mes propos.
Pour commencer, il faut être conscient que jusqu’auXVIIIème siècle, la psychologie de l’enfant n’existe pas. La conception dominante est encore celle de Platon : « l’enfant est un adulte en miniature ». L’enfant était considéré comme dépourvu de raison.L’environnement et l’éducation n’ajoutaient rien dans sa construction puisque l’on considérait que l’enfant n’avait pas de comportements propres mais seulement ceux calqués sur l’adulte. A la fin du XVIIIème siècle, cette conception va commencer à changer avec les idées de quelques rares précurseurs, comme par exemple Comenius, qui vont connaître un certain succès. On voit alors naître une conception nouvelle à l’égard de la psychologie de l’enfant. On commence à reconnaître l’importance de celle-ci dans l’éducation. L’un des précurseurs de cette vision est Jean-Jacques Rousseau. A travers son livre L’Emile (1792), il expose une nouvelle conception pédagogique : « commencez donc par bien étudier vos élèves, car, très assurément, vous ne les connaissez point ». Il ajoute même « el petit homme n’est pas simplement un petit homme». Une phrase qui le positionne clairement en opposition avec la conception platonicienne. Pour Rousseau, il existe une réalitépsychologique propre à l’enfant. A partir de cet instant, le regard de la société sur l’enfant va progressivement changer. On reconnaît que l’enfant est différent de l’adulte en lui attribuant des manières propres d’agir, de penser, de voir. Cette pensée de Rousseau fût reprise par la suite avec différentes expériences qui aboutiront au XXème siècle à reconsidérer plus sérieusement l’éducation à l’école.
En effet, on peut constater qu’après la première guerre mondiale, une conception nouvelle fait son apparition : l’éducation active. Elle s’oppose aux méthodes traditionnelles puisqu’elle a pour objectif de rendre l’élève/l’enfant acteur de ses apprentissages afin qu’il construise ses savoirs à travers des situations de recherche et non plus comme une simple marionnette qu’on dirige à sa guise. Même si cette méthode a des sources très anciennes ce n’est seulement qu’à cette époque qu’elle prend tout e son importance. Ces nouvelles idées sont portées par des mouvements de l’éducation populaire telle que les Centres d’Entraînement aux Méthodes d’Education Active (C.E.M.E.A.)8. L’un des principes de cette éducation active se base essentiellement sur la façon dont le savoir est transmis. Il n’est plus mis au centre du système pédagogique nouveau, maisl’élève/l’enfant. L’idée qui en ressort est que celui-ci ne doit pas recevoir la connaissance toute faite. Il lui appartient de la découvrir, de la construire lorsqu’il en éprouve lebesoin. Le psychologue J. Piaget ainsi que le pédagogue C. Freinet vont, entre autres, renforcer cette idée de l’éducation dont l’enfant serait acteur de son apprentissage. Les critères qui dominent cette méthode sont l’activité, la liberté et l’auto-éducation. On parle d’activité car, contrairement à l’adulte, l’enfant a besoin de concret, de réel. Il doit pouvoir manipuler, observer pour apprendre. La liberté renvoie à un choix volontaire, une initiative. L’acte pédagogique doit répondre aux besoins de l’enfant/l’élève.
En effet, même si cette éducation nouvelle ne s’impose pas totalement dans le système scolaire français, elle permet, toutefois, d’amener un nouveau souffle dans la conception de l’enfant dans la société. Avec l’obligation scolaire jusqu’à 16 ans et dans un contexte de plein emploi, entre autres, la famille perd sa fonction économique et développe, par conséquent, sa fonction de loisir et d’épanouissement. Dans les familles, l’exercice de l’autorité va progressivement laisser place à l’affection. Ainsi et sûrement par rapport à l’évolution de la psychologie de l’enfant, bien élever son enfant vient à respecter son autonomie, à encourager ses initiatives. Seulement, la famille ne semble plus sûre de son « excellence éducative » (Prost, 2004 p. 37). Envahi par une société de consommation, les parents se rendent vite compte qu’ils ne pourront certainement plus suffire à la socialisation de leurs enfants. Dans ce contexte, ils sont conscients qu’il va être important d’apprendre très tôt à l’enfant à vivre avec d’autres. D’où l’apparition d’une socialisation juvénile dès l’école maternelle. La famille ne va plus seulement partager une fonction éducatrice avec l’école mais également une fonction de socialisation. Dès lors, apparaît à cette époque, un nouvel acteur collectif : les copains. La jeunesse apparaît, ainsi, comme un groupe social.
Cette nouvelle approche de l’enfant et de l’adolesc ent dans la société va peu à peu mettre à mal le consensus social mis en place entre les parents, les jeunes et l’école. En effet, ce consensus reposait sur le fait que l’éducation ppartenait aux parents. Par conséquent, le jeune n’était pas considéré en tant qu’individu à’école mais comme un élève qui doit respecter ses obligations scolaires. Pour résumer, l’élève obéit et c’est tout ! Ainsi, aucune contestation de l’autorité n’est possible puisque esl adultes ont une autorité totale sur les jeunes. Dès lors, un écart se creuse entre l’école,toujours autoritaire et ne prenant que très peu en compte l’opinion des jeunes et la société prenantplus en compte les spécificités du jeune. Un décalage qui débouchera sur un certain Mai 68 qui perturbera cet équilibre social…
De nouvelles fonctions pour le surveillant général
Dans cette nouvelle sous-partie, je vais voir en quoi les évolutions, détaillées précédemment, vont avoir un impact sur l’évolutiondu métier de surveillant général. On s’appuiera essentiellement, sur les circulaires de 1965, concernant les nouvelles tâches qui leurs sont attribuées .
Suite à la loi Berthoin, on peut constater que le s ystème scolaire français commence à connaître un nouveau phénomène : la massification colaires. Ce phénomène renvoie à la volonté de l’institution de démocratiser l’enseignement en France et accroît, par conséquent, les demandes de scolarisation. Dès lors, on observe, progressivement, une augmentation du nombre d’élèves à l’intérieur des établissements ainsi qu’une croissance du nombre d’adolescents plus âgés. En raison de ces nouveautés, le surveillant général va se voir attribuer de nouvelles missions à partir de 1965. U ne première circulaire les concernant apparaît le 9 octobre 1965 faisant référence à ce phénomène nouveau :« L’accroissement incessant des effectifs scolaires aboutissant à la naissance, dans les établissements, de quartiers ou de groupes de classes, la multiplication des tâches et leur complexité accrue sont venues alourdir les charges des surveillants généraux. Par ailleurs, les notions d’ordre et de discipline ont considérablement évolué et les problèmes d’éducation prennent de plus en plus d’importance dans la vie scolaire. Aussi, compte tenu de ces nouveaux facteurs, est-il apparu indispensable de définir la place exact que le surveillant général occupe actuellement dans l’établissement et de fixer, dans leurs grandes lignes, la nature et le contenu de leurs missions». A la lecture de cette circulaire, on constate que le système scolaire est conscient que le fait de donner l’accès à l’école à tous et j usqu’à 16 ans va compliquer le travail pour les surveillants généraux par la multiplication des tâches à effectuer et la multiplicité des élèves. De plus, ils prennent conscience qu’ils vont êtreconfrontés aux problèmes d’éducation liés en partie à l’adolescence. On constate également une évolution dans la prise en charge psychologique de l’enfant qui induit par conséquent des modifications en ce qui concerne le maintien de l’ordre et la discipline dans les établissements scolaires. On peut aussi voir une notion s’affirmer dans cette circulaire qui est celle de « vie scolaire9 ». En effet, avec la massification scolaire, le système scolaire ne peut plus ignorer la vie des élèves à l’intérieur même des établissements et tente de cadrer cela avec la circulaire n° 65-419 du 17 novembre 1965 (cf. annexe 5 p. 43) « sous l’autorité du chef d’établissement et éventuellement de son adjoint direct, le surveillant général est chargéedl’organisation de la vie scolaire. A ce titre, les personnels de surveillance et d’éducation lui sont subordonnés : il prévoit leur service et contrôle leurs activités ». Lorsque le chef d’établissement n’a pas d’adjoint, il « peut déléguer au surveillant général ou à l’un des surveillants généraux certaines de ses attributions relatives aux tâches de direction ». Par conséquent, le surveillant général se retrouve à gérer la vie scolaire et à prendre plus ou moins une place d ans l’équipe de direction. Nous pouvons le constater plus loin dans la même circulaire : «Action pédagogique et éducative : en tant qu’il participe à cette action, le surveillant général est appelé à siéger dans les différents conseils d’établissement. Il a à connaître toutes les activités qui s’exercent en vue de contribuer à l’éducation des élèves en dehors des heures de classe et est chargé, sous l’autorité du chef d’établissement, de les coordonner et de les animer. Il peut également se voir confier la garde des matériels d’enseignement et le fonctionnement des bibliothèques d’élèves. Un surveillent général peut être spécialement chargé par le chef’établissementd de responsabilités plus étendues pour un groupe limité de classes (tenues ed dossiers des élèves, contact avec les professeurs, les parents).» Le texte de 1965 place également le surveillant général comme un personnel d’encadrement ayant « une bonne connaissance des élèves».
Ces circulaires de 1965 semblent être annonciatrices de nombreux changements dans la fonction de surveillant général même si celle-ci mblese paradoxale sur la place réel accordée aux surveillants généraux. En effet, d’un côté elletire la fonction vers le haut avec la responsabilité des tâches éducatives fondamentales puis d’un autre, elle place le surveillant général comme un auxiliaire des enseignants.
Mai 1968 : un tournant dans l’évolution du système scolaire français
Dans cette partie, nous allons nous attacher à tenter d’expliquer en quoi les conséquences du mouvement de Mai 68 fût un tournantsur la pratique du surveillant général ainsi que dans l’institution.
Le contexte
Sur le plan économique, à cette époque, la France connaît un déclin. Paradoxalement, elle se trouve à l’apogée des « Trente Glorieuses » au début de 1968. Néanmoins, des indices indiquent une détérioration de la situation économique en France. Le nombre de chômeurs s’accroît régulièrement. Le gouvernement crée, ainsi, en 1967 l’A.N.P.E. 10 dans le but d’y faire face. Ils sont près de 500 000 chômeurs au début de l’année 1968 et les premiers touchés sont les jeunes. On constate également que deux milions de travailleurs sont payés au S.M.I.G.11 et se sentent ainsi exclus de la prospérité. Les alaires réels commencent à baisser et les travailleurs s’inquiètent pour leurs conditions de travail.
Parallèlement à cette situation, les années 60 sont également l’affirmation de la jeunesse en tant que catégorie socioculturelle. La jeunesse a sa propre culture, avec une presse qui lui est destinée (Actuel, Hara-kiri !), des émissions de radio très suivies (Salut lescopains !) ou ses chanteurs attitrés (les Beatles, les Rolling Stones, etc.). Elle a aussi ses propres malaises et ses propres revendications (notamment en matière de liberté sexuelle) que les pouvoirs publics et le monde adulte tardent à comprendre.
Cette affirmation de la jeunesse est permise, entre autres, par l’évolution des mœurs dans la famille. Les jeunes sont progressivement pris en considération et écoutés. L’éducation devient plus libérale et s’ouvre sur l’importance des copains, d’une sociabilité juvénile (Prost, 2004). Une tension semble, néanmoins, se former entre l’école et la famille. A l’intérieur des écoles, il semble que les élèves ne sont toujours asp considérés en tant qu’individu et sont très souvent peu ou pas du tout écoutés. Un décalage quidébouchera sur une adhésion aux évènements de Mai 68 des lycéens, au côté des étudiants.
Suite à la massification de l’enseignement supérieur d’innombrables problèmes de locaux, de manque de matériel ainsi que de transports apparaissent. En 1967-1968, le gouvernement reparle aussi de sélection, ce qui inquiète les étudiants avec la crainte de se retrouver au chômage.
Enjeux et conséquences dans l’Éducation nationale
L’une des causes majeures des événements de mai 68est la croissance massive du système éducatif. On constate que le second cycle des lycées est passé de 102 100 élèves en 1947-1948 à 421 700 en 1967-1968. Mais ce qui rend cette croissance complexe, c’est de se réaliser à l’intérieur de structures inchangées. Des réformes ont été faite mais seulement sur la diversification des filières. Le cadre concret, la vie quotidienne des lycées et des universités demeurent inchangés. Les établissements doivent accueillir de plus en plus d’élèves, faute demandeurs d’emploi et gérer des centres de ressources pour aider les chercheurs d’emploi dans leurs démarches et leur parcours d’avoir de nouveaux établissements construits. On pourrait s’attendre à une adaptation de l’éducation nationale en termes d’effectifs d’encadrement mais ce n’est pas le cas. Un lycée de 500 élèves, c’est un proviseur, un censeur, et une salle de professeurs. Avec 1500 élèves, c’est également un proviseur, un censeur et une salle de professeurs. Toutefois, on constate que pour les effectifs pédagogiques, un recrutement massif et rapide se met en place afin d’alléger les classes. Cependant, dans le second degré, une dégradation qualitative du recrutement va apparaître. En effet, le CAPES12 étant difficile à obtenir, l’Éducation Nationale va recruter en dessous des qualifications requises dans le but de grossir ses effectifs. On a, certes, plus de professeurs mais toujours avec les mêmes pratiques pédagogiques traditionnelles.
Cependant, la démocratisation a permis à des milieux plus modestes, dépourvus de culture de faire leur entrée dans les établissement scolaires. Une contradiction qui déboucha en mars 1968, sur un colloque à Amiens où l’on affi rme l’inadaptation totale des enseignements à ce nouveau public. Ce colloque est organisé par l’A.E.E.R.S. . Six cent personnes y participaient dont des hauts fonctionnaires de l’éducation nationale et des chercheurs en éducation. Il semble intéressant de iterc la déclaration finale du colloque tant elle est significative des malaises et des aspirations que les événements de mai vont mettre en lumière. Elle affirme « l’urgence d’une rénovation éducative aussi bien quepédagogique », qui implique une « révision déchirante» des finalités et de la conception même de l’école.« Il importe en particulier de renoncer à une concept ion exclusivement intellectualiste et encyclopédique de la culture.» L’école nouvelle « implique la transformation des relations pédagogiques, la réforme des institutions et de lavie scolaire, la restauration de la fonction de chef d’établissement et de directeurs d’études, la constitution d’équipes d’enseignants travaillant de façon coordonnée… » (Prost, 2004) Les professeurs, les hauts fonctionnaires, les syndicalistes, les journalistes et les personnalités présentent à ce colloque sont conscients qu’une « formation secondaire et supérieure de masse » n’est pas qu’une simple affaire d’équipements et de postes. Ils affirment donc la nécessité de changer l’école et de rénover toute l’éducation. (Prost, 2004)
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Table des matières
Introduction
1. Histoire de la profession : de 1819 à la fin des années
1.1. Un retour en arrière afin d’amener mon sujet : de 1819 à 1937
1.2. De 1937 à la fin des années
2. Une évolution progressive de la fonction après la seconde guerre mondiale jusqu’en 1968
2.1 Un contexte d’après-guerre favorable au développement des collèges d’enseignement technique (C.E.T.)
2.2 Une inadaptation du système scolaire aux besoins de la vie adolescente
2.3 Une évolution à l’égard de la psychologie de l’enfant se répercutant sur une vision nouvelle de la pédagogie
2.4 De nouvelles fonctions pour le surveillant général
3. Mai 1968 : un tournant dans l’évolution du système scolaire français
3.1 Le contexte
3.2 Enjeux et conséquences dans l’Éducation nationale
3.3. Les revendications des surveillants généraux
3.4 Conséquences de mai 68
4. Les années 70-80 : période de mutations
4.1 Création du statut de conseiller principal d’éducation (CPE) en 1970
4.2 La circulaire de 1972 : une évolution de la fonction à l’ombre du surgé
4.3 Mutations dans la société et dans l’institution
4.4 La circulaire de 1982 : une conception nouvelle du métier (cf. annexe 8 p. 51)
4.5 Développement et affirmation de certaines fonctions du personnel d’éducation
4.6 L’entrée en pédagogie des conseillers principaux d’éducation en 1989 et l’unification des catégories de personnels d’éducation en 1990-1991
4.7 Changement dans la relation élève/école : comportements consuméristes
Conclusion
Bibliographie
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