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Les particularités de la London Maritime Arbitration Association
Nous avons vu précédemment que la London Maritime Arbitration Association était la première place d’arbitrage maritime mondiale. Cela est en partie dû à l’histoire de l’organisation mais également à certaines de ses particularités.
En effet, un nombre important de connaissements, de chartes parties et autres contrats de transport maritime contiennent une clause d’arbitrage renvoyant les parties aux règles de la London Maritime Arbitration Association et ce alors même qu’aucun lien particulier ne rattache la situation litigieuse à l’Angleterre. On peut croire que c’est davantage par habitude que les parties décident de se référer à la London Maritime Arbitration Association, étant donné que celle-ci n’a plus à faire la réputation de ses arbitres et de la qualité de ses sentences. Aussi, la langue anglaise doit fort jouer dans le choix du siège de l’arbitrage, l’anglais étant la langue du commerce international. De plus, la London Maritime Arbitration Association a la particularité de proposer une pluralité de procédures afin de mieux répondre aux attentes des parties : Small Claims Procedure, Intermediate Claims Procedure, FALCA Rules, Mediation Terms. Ces procédures seront expliquées postérieurement dans le développement sur les barèmes des honoraires de la London Maritime Arbitration Association.
II. La Chambre Arbitrale Maritime de Paris : un centre spécialisé en arbitrage maritime en plein essor
Le but sous-jacent de cette démarche de création d’un centre spécialisé en arbitrage maritime à Paris était d’éviter au maximum le recours à l’arbitrage maritime londonien, généralement plus coûteux et plus long. Le règlement des conflits à Londres et à Paris est appréhendé de façon distincte.
Dans un premier temps nous étudierons les origines de la Chambre Arbitrale Maritime de Paris (A) pour enfin en analyser ses particularités (B).
Les origines de la Chambre Arbitrale Maritime de Paris
La création de la Chambre Arbitrale Maritime de Paris datant de l’année 1966 a permis l’essor de l’arbitrage maritime en France. L’objectif premier de la Chambre Arbitrale Maritime de Paris est la résolution de conflits commerciaux en lien avec l’activité du transport maritime.
L’Ordonnance de la marine de Colbert de 1681, faisait déjà allusion à l’arbitrage en tant que mode de règlement des litiges. Dans l’article III relatif à la police d’assurance il est fait mention de la « soumission des parties aux arbitres en cas de contestation ».
Il est noté que « pour régler à l’amiable et sans frais les différends qui pourraient survenir entre les parties pour raison de la police d’assurance ;il faut même absolument et à peine de nullité, que la police d’assurance contienne la soumission des parties aux arbitres convenus et nommés par la police d’assurance, ou dont les parties conviendront, et qu’elles nommeront entre elles, s’il arrive quelque contestation ; devant lesquels arbitres les parties seront tenues de se pourvoir, sauf à se pourvoir contre leur sentence arbitrale par appel aux parlements : sans que les parties puissent, se pourvoir en justice réglée ; l’Ordonnance voulant qu’elles aient auparavant épuisé les voies de douceur (…) 7 ».
La Chambre Arbitrale Maritime de Paris est une association privée et indépendante chargée d’arbitrer et d’encadrer les litiges du domaine maritime. La Chambre Arbitrale Maritime de Paris a une compétence particulière relative au domaine maritime.
Des professionnels du domaine du transport maritime tels que des armateurs ou des affréteurs sont à l’initiative de ce projet. Ces derniers souhaitaient voir leurs différends résolus par des professionnels du monde maritime. Des personnes qui par leurs expériences seraient mieux à même de cerner les litiges et les résoudre plus rapidement avec une vision qui leur est coutumière. Il est nécessaire d’insister sur ce point car il y a aujourd’hui une multitude de chambres d’arbitrage qui se constitue mais essentiellement animées par des anciens magistrats ou des juristes. Il est important de souligner que la Chambre Arbitrale Maritime de Paris n’est pas par essence une chambre de juristes sinon de praticiens du secteur maritime.
L’arbitrage maritime est un mode de règlement privé des litiges étant entendu que les arbitres sont des juges qui ne sont pas des juges étatiques. L’idée est de permettre aux professionnels de faire trancher par des personnes du même milieu leurs contestations. Les parties vont choisir librement leurs arguments, c’est un mode conventionnel de règlement des litiges.
Il est intéressant de noter que dans la hiérarchie quantitative, la Chambre Arbitrale Maritime de Paris occupe la troisième place mondiale concernant l’arbitrage maritime. La Chambre Arbitrale Maritime de Paris a une place significative dans le monde maritime étant donné que la France est la deuxième puissance maritime mondiale juste après les Etats-Unis8.
Les particularités de la Chambre Arbitrale Maritime de Paris
L’une des principales particularités de la Chambre Arbitrale Maritime de Paris relève de la qualité de ses arbitres. Comme nous l’avons brièvement évoqué précédemment, les arbitres de la Chambre Arbitrale Maritime de Paris sont essentiellement des professionnels du secteur maritime.
Dans la liste des arbitres proposée par la Chambre nous pouvons dénombrer environ 40% de praticiens, 30% de juristes et 30% d’experts. Il existe trois grandes catégories d’arbitres :
• Les praticiens tels que les armateurs, affréteurs, assureurs, courtiers ou encore les commissionnaires .
• Les juristes tels que les professeurs, magistrats, juristes d’entreprise ou encore les avocats .
• Les techniciens tels que les experts sur les marchandises et ingénieurs du génie maritime.
Il existe un équilibre entre les personnes qui composent le corps arbitral au sein de la Chambre. L’un des grands avantages de la Chambre est de proposer des professionnels du monde maritime, familiers aux usages. Les arbitres savent ce qu’est une charte-partie, un moteur de navire ou encore une société de classification.
Les principales contestations qui sont portées devant la Chambre sont celles relatives aux chartes parties. Dans toutes les chartes parties quelles qu’elles soient, on y retrouvera une clause prévoyant le recours à l’arbitrage en cas de litige entre les parties. Cette clause renverra à l’un des centres d’arbitrage spécialisés en droit maritime. Pour exemple, l’article 28 de la charte-partie Synacomex renvoie à un arbitrage devant la Chambre Arbitrale Maritime de Paris en cas de litige entre les parties qui l’auraient souhaitées.
Certaines des particularités de la Chambre ne manquent pas d’essuyer certaines critiques, on lui reproche souvent le système de sa liste fermée d’arbitres. Les parties n’ont pas le choix et doivent nécessairement choisir parmi un des arbitres figurant dans la liste proposée par la Chambre.
Pour certains professionnels il faudrait renouveler cette liste fermée. Les arbitres de la Chambre Arbitrale Maritime de Paris étant avant tout des professionnels du secteur maritime français ou international se verraient vite impliqués dans un potentiel conflit d’intérêt. Effectivement, le monde du transport maritime est un monde très restreint qui engendre vite la connaissance des uns et des autres. Les détracteurs de la Chambre Arbitrale Maritime de Paris souhaitent que la liste soit renouvelée afin d’insuffler un souffle nouveau à la liste proposée. Ce genre de critiques risquerait d’entacher la réputation de la Chambre et le manque d’impartialité de ses arbitres serait vivement souligné.
Le Président actuel de la Chambre Arbitrale Maritime de Paris, P.DELEBECQUE s’est permis de répondre à ces critiques :
« Lire une charte-partie, comprendre le mécanisme des cas exceptés dont un transporteur maritime peut se prévaloir, apprécier le rôle d’un pilote, faire la part du droit et de l’équité dans l’assistance (…) ne peut être mis en musique. On ne voit donc pas comment les arbitrages maritimes pourraient se développer sans faire appel à des gens de métier régulièrement nommés et agissant non pas sous le contrôle d’un Comité, mais avec l’assurance que leurs sentences seront lues et relues et que leur attention aura bien été attirée sur telle ou telle difficulté particulière 9 ».
D’autre part, les détracteurs de la Chambre Arbitrale Maritime de Paris ont souvent tendance à critiquer l’organisation procédurale de celle-ci. Le second degré proposé par la Chambre est vu d’un mauvais œil car il entraine le rallongement de la procédure. Le second degré entraîne automatiquement l’ouverture d’une nouvelle procédure, une nouvelle consignation est déposée, on réécoute les parties etc. Cependant, il est préférable de voir en ce second degré une opportunité de répondre au mieux aux intentions des parties.
Une brève présentation du nouvel opus de l’Arbitration Act
Les Arbitration Act de 1950, 1975 et 1979 ont été abrogés et remplacés par l’Arbitration Act de 1996. Ce dernier volet est venu apporter des améliorations qui étaient alors nécessaires pour le droit de l’arbitrage anglo-saxon. Le texte est entré en vigueur le 31 janvier 1997 et est divisé en quatre parties.
En effet de lourds inconvénients existaient à l’égard des parties. Les procédures avaient tendance à être particulièrement longues car il fallait renvoyer le litige devant les tribunaux judiciaires à chaque fois qu’il existait un désaccord sur un point de droit. Ceci était dû essentiellement à la procédure anglaise du « special case ».
Le nouveau texte a été adopté suite à un long processus de consultations entre divers groupes, qui étaient chargés de rédiger ce nouvel opus. Ces groupes sont par exemple le D.A.C « Departmental Advisory Commitee »10.
Un comité ministériel encadré par Lord Justice MUSTILL est à l’origine du texte de 1996 (« Mustill Report »). Une première version a été déposée en 1989. Le rapport rendu par ce comité était « défavorable à l’adoption d’une loi-type CNUDCI en Angleterre, Pays de Galles et en Irlande du Nord mais préconisait une nouvelle loi pour codifier les principes les plus importants de l’arbitrage en Angleterre en suivant autant que possible le plan et la terminologie de la loi-type »11.
Cette révision législative avait pour objectif de faciliter la procédure arbitrale anglaise afin d’être toujours plus compétitive et attractive pour les parties. Plusieurs apports significatifs sont à relever, c’est ce dont nous traiterons dans notre prochain développement.
Les apports de l’Arbitration Act de 1996
Nous venons de retracer brièvement le contexte dans lequel l’Arbitration Act de 1996 a été adopté. Ainsi, dans ce développement nous nous attacherons à traiter des apports que consacre l’Arbitration Act dans sa version de 1996.
Il existe deux apports qui à notre sens peuvent sembler les plus significatifs. L’un consacre le principe d’autonomie de la clause d’arbitrage et l’autre traite du principe de compétence-compétence.
Cette nouveauté vient renforcer l’acceptation de l’arbitrage par le législateur anglais. De plus, elle vient rallier d’autres droits qui reconnaissent déjà l’autonomie de la clause compromissoire comme c’est le cas en France.
Si le contrat principal est considéré comme étant nul pour un quelconque vice, la clause d’arbitrage qu’il contient « survit » et continue d’être valide malgré tout. La clause d’arbitrage est autonome par rapport au contrat principal. Récemment une série de jurisprudences anglaises a consacré ce principe de « separability 13 ».
Cette section donne le droit aux arbitres du tribunal arbitral de statuer sur leur propre compétence. Aussi, cela donne le droit aux arbitres de décider quels litiges dépendent de la convention d’arbitrage.
Ces deux sections de l’Arbitration Act de 1996 consacrant l’autonomie de la clause compromissoire et le principe de compétence-compétence ont été fortement inspirées par l’article 16 de la loi-type CNUDCI. Celui-ci dispose que : « Le tribunal arbitral peut statuer sur sa propre compétence, y compris sur toute exception relative à l’existence ou à la validité de la convention d’arbitrage. A cette fin, une clause compromissoire faisant partie d’un contrat est considérée comme une convention distincte des autres clauses du contrat. La constatation de nullité du contrat par le tribunal arbitral n’entraîne pas de plein droit la nullité de la clause compromissoire 15”.
Les nouveautés apportées par le Décret n°2011-48 du 13 janvier 2011
Le décret n°2011-48 a été très influencé par des années de jurisprudences françaises. Nous allons nous concentrer sur les apports du décret n°2011-48 en matière d’arbitrage international. Le domaine du droit maritime relève essentiellement et en toute logique de l’arbitrage international du fait des éléments d’extranéité que chaque échange commercial maritime comprend.
Nous pouvons énumérer pas moins de quatre apports importants dans ce nouveau texte. Dans un premier temps il y a eu un apport essentiel concernant la convention d’arbitrage international. Le nouvel article 1507 du Nouveau Code de Procédure Civil vient affirmer que la convention d’arbitrage international n’est soumise à aucune condition de forme.
De plus, le nouveau texte est venu apporter deux nouvelles compétences au juge d’appui. Celui-ci va pouvoir être saisi dans les cas d’un déni de justice mais également lorsque l’arbitrage international ne se déroule pas forcément en France ou lorsque les parties n’ont pas convenu d’appliquer la loi de procédure française à l’arbitrage.
La compétence du juge d’appui est à la fois supplétive et subsidiaire. Elle est supplétive dans la mesure où les parties peuvent décider de l’écarter dans la convention d’arbitrage. Elle peut être subsidiaire car le juge d’appui pourrait malgré tout intervenir dans le cas où le fonctionnement des mécanismes internes à l’institution d’arbitrage ne permettrait pas de résoudre le problème de constitution ou serait la cause même de la difficulté de la constitution.
Un apport non négligeable est relatif aux voies de recours. En effet, les parties peuvent par convention spéciale, et ce à tout moment, renoncer au recours en annulation proposé par l’article 1522 du Code de Procédure Civil.
Les parties ne sont pas privées pour autant de recours car elles peuvent faire appel de l’ordonnance d’exequatur pour l’un des motifs énumérés à l’article 1520 du Code de Procédure Civil. Le recours en annulation n’est ouvert que si :
– Le tribunal arbitral s’est déclaré à tort compétent ou incompétent ou .
– Le tribunal arbitral a été irrégulièrement constitué ou .
– Le tribunal arbitral a statué sans se conformer à la mission qui lui avait été confiée ou .
– Le principe de la contradiction n’a pas été respecté ou .
– La reconnaissance ou l’exécution de la sentence est contraire à l’ordre public international 18 ». Antérieurement au décret de 2011, l’article 1506 de l’ancien Code de Procédure civile prévoyait un effet suspensif de l’exécution de la sentence lorsqu’un recours était formé à l’encontre de la sentence ou d’une ordonnance d’exequatur. Désormais, le décret n°2011-48 via l’article 1523 du Nouveau Code de Procédure Civil octroie la possibilité d’un appel dans le cadre suivant : « La décision qui refuse la reconnaissance ou l’exequatur d’une sentence arbitrale internationale rendue en France est susceptible d’appel.
L’appel est formé dans le délai d’un mois à compter de la signification de la décision Dans ce cas, la cour d’appel connaît, à la demande d’une partie, du recours en annulation à l’encontre de la sentence à moins qu’elle ait renoncé à celui-ci ou que le délai pour l’exercer soit expiré ».
Comme l’a justement indiqué le Professeur P.BONASSIES19, avec l’Arbitration Act de 1996 on assiste à un renversement des tendances. L’Angleterre qui est historiquement un pays de droit jurisprudentiel, c’est le législateur qui a essentiellement agi en faveur d’une réglementation sur l’arbitrage. Tandis qu’en France, pays de droit écrit, ce sont des années de jurisprudences qui sont à l’origine du décret de 2011 et non le législateur.
La pierre angulaire de l’arbitrage international : la Convention de New York de 1958 relative à la reconnaissance et l’exécution des sentences étrangères
Nous ne pouvions terminer notre développement sur les textes en vigueur en matière d’arbitrage sans aborder la Convention de New York du 10 juin 1958 relative à la reconnaissance et à l’exécution des sentences étrangères.
Un nombre impressionnant d’Etats en sont parties, 146 Etats plus précisément. Cette adhésion démontre l’importance et la pertinence de cette Convention internationale dans le domaine du droit privé. La Convention de New York est un instrument juridique de portée mondiale.
La convention s’applique seulement à la question de la reconnaissance et de l’exécution des sentences arbitrales étrangères. En principe, l’article Ier §1 dispose qu’une sentence étrangère est une sentence rendue sur le territoire d’un Etat étranger. Cependant, la convention s’applique également aux sentences qui, bien que rendues sur le territoire national, ne sont pas considérées comme nationales. Cette disposition assez inattendue a été introduite pour satisfaire certains Etats qui voulaient pouvoir appliquer la Convention à des sentences rendues sur leurs territoires mais qu’ils souhaitaient considérer comme étrangères car elles étaient issues d’une procédure arbitrale régies par une loi étrangère. En pratique, il n’arrive pratiquement jamais qu’un Etat applique la Convention sur une sanction rendue sur son territoire.
Il faut bien garder à l’esprit que la Convention de New York n’a en général aucune incidence sur le contrôle qui pourrait être exercé sur la sentence dans le pays où elle a été rendue. Par exemple, dans pratiquement tous les pays, la règle est qu’on peut faire un recours sur les sentences rendues sur le territoire national, or la Convention n’a aucune incidence sur le contrôle qui peut être fait dans le cadre de ce recours en annulation.
Par ailleurs, l’article Ier §3 de la Convention permet de faire deux réserves :
-‐ la réserve de réciprocité : les Etats qui font cette réserve choisissent de ne pas appliquer la Convention si la sentence a été rendue dans un Etat non contractant. La France maintient actuellement cette réserve.
-‐ la réserve de commercialité : elle permet aux Etats de limiter les effets de la Convention aux arbitrages rendus en matière commerciale. A l’origine, la France avait fait cette réserve mais elle l’a levée en 1989.
En réalité, la Convention de New York ne limite pas son objet à la seule reconnaissance des sentences étrangères. Certaines de ses règles ont un champ d’application plus large. En effet l’article II pose un certain nombre de règles relatives au traitement des conventions d’arbitrage et des exceptions d’arbitrage. Ces règles ont vocation à s’appliquer avant qu’une sanction soit rendue et surtout, quelque soit la localisation du siège de l’arbitrage. Les Etats contractants reconnaissent la licéité des conventions d’arbitrage, aussi bien les compromis que les clauses compromissoires. Enfin, si le juge d’un Etat contractant est saisi au fond, et que le défendeur invoque une convention d’arbitrage, le juge doit renvoyer les parties à l’arbitrage « à moins qu’il ne constate que la dite convention est caduque, inopérante ou non susceptible d’être appliquée ». Il s’agit ici clairement d’une référence au mécanisme du principe de compétence-compétence, sujet de notre deuxième partie.
Dans la Convention de New York, nous trouvons également la « more favorable right provision » qui correspond à la disposition de réserve du droit national plus favorable. Cette disposition joue un rôle très important, notamment en France. L’idée est que les conditions de reconnaissance qui figure à la Convention de New York constituent un plancher de libéralisme et non pas un plafond. En effet, l’article VII §1 réserve le droit pour toute partie de se prévaloir d’une sentence arbitrale dans la mesure où elle est admise par la législation ou les traités du pays où la sentence est invoquée. Cela signifie que, même nous avons une sentence qui a priori se heurte à un motif de non reconnaissance de l’article V, il reste toutefois possible d’obtenir l’exequatur dans un Etat contractant si, dans le droit de celui-ci, il y a à côté de la Convention de New York un régime de reconnaissance plus libéral, qui permet à la sentence d’être appliquée.
Bien que le texte de la Convention ne le prévoit pas expressément, il faut certainement considérer que cette réserve du droit national plus favorable vaut aussi à l’égard de la disposition de l’article II relative à la convention d’arbitrage. Par exemple, toujours selon l’article II, la convention doit nécessairement être conclue par écrit. Mais, un droit national peut parfaitement écarter cette exigence et valider les conventions d’arbitrage en la forme orale. Cette extension de la portée de la clause du droit national plus favorable est d’ailleurs préconisée par une recommandation de la Commission des Nations Unies pour le Développement du Commerce International adoptée le 7 juillet 2006 suivie d’une résolution de l’Assemblée Générale de l’Organisation des Nations Unies. Néanmoins, la Convention de New York n’a pas une grande incidence pratique en France. En effet, il existe des règles de sources nationales figurant dans le Code de Procédure Civile et dans la jurisprudence ainsi que des solutions du droit commun français qui sont pratiquement toujours plus libérales que les solutions prescrites par la Convention de New York. Les juridictions françaises n’appliquent presque jamais la Convention de New York. D’ailleurs, il peut arriver que la combinaison de l’article VII §1 et des dispositions du Code de Procédure Civil aboutisse à des résultats spectaculaires.
Enfin, le droit anglais et le droit français de l’arbitrage ont des similitudes qui ne cessent de s’accroitre avec la réforme de l’Arbitration Act de 1996. Les deux systèmes juridiques sont favorables au règlement des différends via l’arbitrage, l’évolution des textes en est la preuve. Selon le Professeur P.BONASSIES, les apports de l’Arbitration Act de 1996 évoqués précédemment, autonomie de la clause d’arbitrage et principe de compétence-compétence, sont la preuve que « le droit anglais contemporain a progressé selon une ligne identique à celle suivie par le droit français20 ».
Malgré cette progression législative du droit anglais de l’arbitrage il reste des différences fondamentales dans la pratique de l’arbitrage à Londres et à Paris. Le prochain développement nous permettra de comparer les deux systèmes selon des critères objectifs précis. Ces critères nous permettront de dégager les avantages et les faiblesses de chacune des deux places d’arbitrage.
Les arbitres de la Chambre Arbitrale Maritime de Paris : de réels praticiens du secteur maritime
Comme nous l’avons indiqué précédemment les arbitres de la Chambre Arbitrale Maritime de Paris sont avant tout des praticiens du secteur maritime. L’un des arbitres praticiens de cette institution, J-P GAUTIER a donné une définition du praticien des plus pertinentes lors d’une Assemblée générale de l’Association Française du Droit Maritime du 22 mars 2007 « Hommes et femmes d’expérience ayant eux mêmes vu et vécu des situations difficiles en un domaine ou l’accident reste toujours possible, ou le commerce s’exerce avec des partenaires de toutes nationalités, toutes mentalités, dans des pays où aléas climatiques et politiques restent un souci constant 22 ».
Chacune des parties choisit un arbitre, le troisième arbitre étant choisi par le Comité de la Chambre. Ce Comité est une instance au sein de la Chambre Arbitrale Maritime de Paris qui va désigner, en fonction de la spécificité et de la difficulté de l’affaire, le troisième arbitre. Tout dépendra donc de l’objet du différend. Certains arbitres seront mieux à même de trancher le litige que d’autres. Chaque arbitre a sa spécialité : transporteur, armateur, chargeur etc. N’oublions pas que ce sont les seuls arbitres qui ont l’entière maîtrise de l’arbitrage.
Le troisième arbitre, celui choisi par le Comité de la Chambre, présidera alors le tribunal arbitral. Selon certains détracteurs de la Chambre cela peut être critiquable car ce troisième arbitre n’a pas été choisi par les parties et a été « imposé » par la Chambre.
Néanmoins, on peut penser que ce troisième arbitre choisi par la Chambre Arbitrale Maritime de Paris permettra à celle-ci d’avoir une certaine vue sur l’arbitrage et de garder un certain contrôle. La Chambre Arbitrale Maritime de Paris a une certaine ligne directrice à suivre en terme de jurisprudences, une certaine « tendance » à respecter, tout comme les autres chambres d’arbitrage.
Le règlement de la Chambre Arbitrale Maritime de Paris permet également de donner la compétence à un seul arbitre lorsqu’il y a une urgence par exemple, celle-ci devant être justifiée. Dans ce cas là l’arbitre peut prendre des mesures provisoires et peut décider sur le fond mais attention cela n’équivaut pas à une procédure de référé.
Lorsque qu’il s’agit d’un petit contentieux il paraît plus opportun d’opter pour un seul arbitre. Tout comme le troisième arbitre choisi par le Comité de la Chambre, cet arbitre unique sera également élu par le Comité.
Les arbitres au sein de la Chambre Arbitrale Maritime de Paris ont la chance de travailler dans une grande souplesse juridique. Selon l’ancien Président de la Chambre Arbitrale Maritime de Paris, F.ARRADON :
« Pour mener à bien la mission juridictionnelle que les parties lui ont confiée, le collège arbitral a toute latitude, dans le cadre du règlement de la Chambre pour trancher en praticien du commerce maritime ou du droit maritime les litiges qui lui sont soumis en tenant compte des usages du commerce maritime 23».
Les arbitres de la Chambre doivent connaître les usages du commerce maritime. On peut entendre par usage maritime le fait pour un arbitre de connaître la notion des cas exceptés dont peut se prévaloir un transporteur maritime ou encore la notion d’assistance maritime. Personne n’est mieux placé que les propres professionnels du monde maritime pour connaître ces usages. Un simple juriste, s’il n’est pas spécialisé en droit maritime, ne saura pas d’emblée quelles sont les particularités du secteur maritime et ne sera pas familier à cette discipline.
Les arbitres de la London Maritime Arbitration Association ne sont pas des professionnels du secteur maritime mais possèdent plus une formation juridique. De fait, leur vision du litige maritime ne sera pas abordée sous le même angle qu’un réel praticien du domaine maritime.
Les arbitres de la London Maritime Arbitration Association : la nécessité d’un « background » juridique
Initialement les arbitres de la London Maritime Arbitration Association étaient des professionnels du secteur maritime tels que des courtiers. Cependant, avec le temps et d’autres facteurs telle que la complexité de la procédure anglaise cela a engendré un renouveau dans l’origine des arbitres. Désormais, la majorité des arbitres de la London Maritime Arbitration Association sont des juristes ou des juges. L’idée d’un arbitrage de praticiens du monde maritime a peu à peu disparu.
Dans la procédure arbitrale anglaise, l’arbitre doit être choisi pour ses diverses qualités. Selon P.PESTEL DEBORD un arbitre au sein de la London Maritime Arbitration Association doit avant tout maîtriser les rouages juridiques telle que la procédure civile et le droit de la preuve. A l’inverse des arbitres de la Chambre Arbitrale Maritime de Paris, les arbitres de la London Maritime Arbitration Association ne doivent pas nécessairement avoir des connaissances en matière maritime. L’auteur nous explique que sans de solides connaissances juridiques, un arbitre de la London Maritime Arbitration Association risquerait de ne pas être compétent au sens de l’arbitrage maritime londonien24.
On peut noter une évolution de la profession d’arbitre maritime en Angleterre. On est passé d’un arbitrage de praticiens du secteur maritime à un arbitrage de purs juristes. Selon la vision anglaise, arbitrer c’est avant tout rendre la justice, il paraît donc essentiel d’avoir les connaissances légales requises pour ce genre de procédure. Lord SALMON résume parfaitement la qualité de l’arbitre, « Arbitrators are in much the same position as judges 25 ».
Il existe différentes possibilités pour désigner les arbitres. Dans un premier temps, l’arbitre (« sole arbitrator ») ou les arbitres peuvent être choisis d’un commun accord par les parties. La clause d’arbitrage conclue entre les deux parties donnera compétence aux arbitres afin de résoudre le différend.
De plus, le choix des arbitres peut également être opéré par le tribunal de droit commun à l’occasion d’un procès devant le tribunal.
Enfin, les arbitres peuvent être nommés lorsque la loi prévoit le recours à l’arbitrage.
Une des innovations de l’Arbitration Act de 1996 est la figure du « chairman ». La Section 16§5 dispose que : Cette nouvelle figure du « chairman » vient éclipser l’ancienne figure de l’ « umpire ». Ce dernier n’existe presque plus, il a été remplacé par un troisième, le chairman, arbitre qui délibère avec les deux autres. L’umpire quant à lui peut siéger avec les deux autres arbitres mais n’a pas le pouvoir d’intervenir dans la procédure tant que ces derniers ne sont pas en désaccord. Récemment, nous avons pu relever une évolution de la mission d’arbitre. Cette mission était souvent exécutée par des coutiers maritimes ou par d’autres personnes mais certainement pas par des avocats ou toute autre personne exerçant une activité légale. Les avocats avaient plus tendance à être consulté en amont de la procédure arbitrale. Auparavant tout était plus simple, la procédure était moins complexe et ne se résumait pas à une multiplication d’audiences et d’expertises. Par conséquent, l’arbitrage était d’emblée moins coûteux qu’il peut l’être aujourd’hui. Vers la fin des années 1960, une petite décennie après la création de la London Maritime Arbitrators Association les avocats étaient de plus en plus présents. Selon B.HARRIS il y avait plusieurs raisons à cela .
Les avocats ont tenté d’imposer leur vision juridique, calquée sur le schéma existant devant les cours de justice, à la procédure arbitrale. Pour les arbitres professionnels qui n’avaient pas le « background » légal nécessaire ils se sont vus vite dépasser par ces nouvelles procédures plus complexes.
Avec la présence des avocats dans les procédures arbitrales, ce sont celles-ci qui sont devenues de plus en plus difficiles à comprendre. De fait, les professionnels tels que les courtiers ou les armateurs ont été de moins en moins appelés à siéger, à la différence des personnes ayant une expérience légale.
La procédure au sein de la Chambre Arbitrale Maritime de Paris : la simplicité d’une procédure arbitrale
Les arbitrages qui se déroulent au sein de la Chambre Arbitrale Maritime de Paris sont régis à la fois par les règles du Code de Procédure civile mais également par le règlement de la Chambre. Le règlement fixe les règles concernant la procédure arbitrale, les frais de l’arbitrage, la nomination des arbitres etc.
La procédure qui se déroule devant le tribunal arbitral de la Chambre Arbitrale Maritime de Paris peut être résumée en cinq étapes.
Dans un premier temps, les mémoires sont présentés par les parties afin que les arbitres puissent les étudier. Les arbitres vont alors se pencher sur la question de savoir s’il faut nommer un expert ou non.
La présence des parties lors de l’audience n’est pas obligatoire, les arbitres peuvent juger seulement sur pièces. Dans les faits, il est quand même très rare de voir un arbitrage sans audience. L’audience est organisée de manière contradictoire, les arbitres vont être à l’écoute des arguments des deux parties. Enfin, a lieu la mise en délibérée ainsi que la clôture des débats. La sentence est généralement rendue dans un délai de six mois. Le devoir de célérité auquel sont tenus les arbitres est mis en avant. Ce court délai est un avantage par rapport à la justice étatique. Ce délai de six mois est parfois respecté mais il reste tout de même très court, ce qui a tendance à entraîner des demandes de prorogation. La prorogation sera accordée dans une limite de trois mois. Rappelons que le délai réel moyen court entre huit et dix mois, délai qui reste très raisonnable en comparaison avec celui de la Chambre de Commerce Internationale où là il est de deux à trois ans.
Enfin, la sentence est notifiée aux parties après avis du Comité de la Chambre. Les arbitres composant ce Comité, trois personnes indépendantes des arbitres impliqués dans l’instance en cours, vont relire la sentence afin de vérifier si elle a été correctement rendue notamment au regard des usages du commerce maritime.
Plus précisément, le Comité est chargé de vérifier si une bonne présentation des faits a été faite, si les prétentions des parties et les différentes demandes des parties ont été prises en compte dans la sentence. Les arbitres doivent répondre à toutes les demandes des parties et ne surtout pas aller au delà de ce qui leur a été demandé.
De surcroît, le Comité peut donner son avis sur l’orientation de la sentence et faire des observations sur celle-ci. Les arbitres composant le tribunal arbitral sont libres de tenir compte ou non de ces observations émises par le Comité. Cela reste la sentence des arbitres du tribunal arbitral et non pas celle de la Chambre Arbitrale Maritime de Paris.
Ces observations sont essentielles car elles permettent d’élaborer une jurisprudence de la Chambre Arbitrale Maritime de Paris, comme il peut en exister une au sein de la London Maritime Arbitration Association. A travers les membres de ce Comité, la Chambre Arbitrale Maritime de Paris veille à garder une même « tendance ». L’objectif est de respecter cette tendance afin de donner une certaine sécurité et prévisibilité aux professionnels du monde maritime qui viennent régler leur litige au sein de la Chambre Arbitrale Maritime de Paris. Il faut avant tout veiller à une certaine harmonisation et uniformisation des sentences rendues par la Chambre sans pour autant qu’elles soient systématiques, les faits ayant toute leur importance.
De plus, une des originalités procédurales que l’on peut relever au sein de la Chambre Arbitrale Maritime de Paris est qu’il est possible, une fois la sentence rendue, d’aller au « second degré ». La partie qui a perdu peut saisir la Chambre pour engager un second degré. Si la partie s’engage au second degré, la sentence qui a été précédemment rendue perd son efficacité et devient un simple projet, elle n’a plus aucune autorité de la chose jugée.
Le barème d’honoraires de la Chambre Arbitrale Maritime de Paris : des frais raisonnables
Concernant les coûts d’un arbitrage à la Chambre Arbitrale Maritime de Paris il faut se référer au barème des frais d’honoraires en vigueur depuis le 11 juin 2014.
Lorsqu’on présente une requête devant de la Chambre Arbitrale Maritime de Paris, il faut l’accompagner d’une consignation. Il appartient normalement à la partie défenderesse de verser cette consignation. Si la partie défenderesse refuse de payer la consignation, il appartient alors au demandeur de payer à la place du défendeur défaillant. Cette consignation est considérée comme étant une avance sur les frais alloués postérieurement à la sentence. Le demandeur peut gagner et n’avoir rien à payer ou si non 50% correspondant aux frais d’honoraires d’arbitrage.
Dans le barème de la Chambre Arbitrale Maritime de Paris il est expliqué comment calculer le montant des frais d’honoraires d’arbitrage pour un collège de trois arbitres. Il faut additionner : « La partie forfaitaire, croissante par paliers (9 au total) .
La partie variable obtenue en multipliant le pourcentage attribué à la tranche considérée par la différence entre le montant total des demandes et le chiffre inférieur de cette même tranche 34 ». Par conséquent, un litige concernant une somme allant entre 15.000 et 49.999 Euros le forfait correspondant aux frais d’honoraires de l’arbitre sera d’un montant de 3850 Euros. A cette somme il faudra lui appliquer la partie variable qui correspond à un pourcentage de 11%.
On peut relever une autre particularité dans ce barème, celle correspondant aux honoraires lorsqu’il s’agit d’un arbitre unique. Dans ce cas, « le montant des sommes perçues par les parties est limité à 60% du barème ci-dessus tant pour la partie forfaitaire que la partie variable 35 ». Le barème de la Chambre Arbitrale Maritime de Paris prend également en compte les frais et honoraires de Médiation. En effet, il ne faut pas oublier que la Chambre tente également de résoudre les litiges entre les parties grâce à des procédures de médiations et non pas uniquement via de l’arbitrage.
Enfin, nous pouvons relever que le montant des honoraires d’arbitrage de la Chambre Arbitrale Maritime de Paris semble raisonnable pour des parties qui souhaitent une justice privée de qualité rendue par des praticiens qui sont choisis pour leurs connaissances du secteur maritime et reconnus pour leur diverses expériences.
Nous pourrons constater postérieurement que le montant des honoraires à la Chambre Arbitrale Maritime de Paris est nettement inférieur à celui de la London Maritime Arbitration Association. Cette différence de coût des honoraires est notamment due à une procédure parisienne moins formelle que la procédure londonienne.
Le barème de la London Maritime Arbitration Association : des honoraires assez onéreux
Tout a été mis en oeuvre afin de satisfaire les parties dans le règlement de leurs litiges. Un large panel de procédures leur est offert afin de résoudre au mieux leur différend.
Il existe ce que l’on appelle la « London Maritime Arbitration Association Claims Procedure ». Cette procédure a un double avantage. Elle a été mise en place afin de faciliter la résolution de « petits litiges », c’est à dire des litiges d’un montant n’excédant pas la somme de 50.000 $. De plus, elle permet également de résoudre les contentieux de façon rapide et efficace. Il s’agit d’une procédure qui nécessite la présence d’un seul arbitre qui recevra des frais d’honoraires fixes. Autres spécificités de cette procédure : « An agreement to arbitrate under the London Maritime Arbitration Association Small Claims Procedure will automatically be treated as en agreement to exclude the right of appeal36 ».
Aussi, il y a la possibilité de la procédure dite « FALCA Rules 37». Il s’agit là d’une procédure s’appliquant à des litiges inférieurs à 250.000 $. L’avantage de cette procédure c’est avant tout la rapidité à laquelle l’arbitre unique rend sa sentence et l’exclusion d’appel tout comme dans la procédure de « Small Claims Procedure ». En effet, l’arbitre dispose d’un délai de 8 mois afin de rendre sa sentence.
Enfin, récemment a été instituée en 2012 « The Intermediate Claims Procedure ». Cette procédure permet à des parties dont le montant du litige est supérieur à 50.000$ de se soumettre à ces règles. Nous les étudierons plus amplement dans la suite de notre développement.
Nous pourrions penser que cette idée de « plafonds » pour la rémunération des arbitres est intéressante. Cependant, cela ne reflète pas toujours la réalité du travail fourni par les arbitres.
En effet, selon B.HARRIS 38 nous allons parfois avoir des litiges mettant en jeu un montant peu élevé mais engendrant une quantité de travail phénoménale de la part du tribunal arbitral. Or, les honoraires des arbitres ne seront pas représentatifs de la valeur réelle du travail. A l’inverse, nous pourrions être face à un arbitrage mettant en jeu une somme très onéreuse mais le litige se réglerait très facilement et rapidement. Encore une fois, le travail des arbitres ne serait pas en adéquation avec leurs honoraires.
Pour la suite de l’exposé il semble intéressant d’approfondir davantage sur ce dernier critère des coûts de l’arbitrage. En effet, ce critère est trop peu discuté et pourtant si important et déterminant. Nous verrons que les coûts de l’arbitrage se composent de divers éléments. Aujourd’hui, il existe des tiers financeurs qui viennent aider la partie n’ayant pas la capacité financière suffisante afin de mener à bien la procédure arbitrale.
Les coûts de l’arbitrage international : un enjeu stratégique important
Les coûts de la procédure arbitrale sont déterminants pour les parties dans leur choix du siège arbitral. En effet, l’un des critères essentiels pour les parties est celui d’être soumises à un coût le moins onéreux possible.
Depuis quelques années on assiste à l’apparition de nouveaux frais qui viennent s’intégrer dans la procédure arbitrale, entraînant par conséquent une augmentation des coûts de l’arbitrage. Cette inflation des coûts est notamment due par un phénomène de « judiciarisation des procédures arbitrales mais également par l’émergence de nouveaux types de frais engagés par les parties à l’occasion de la procédure » 39 . Il a été relevé avec pertinence que « les coûts de l’arbitrage constituent aujourd’hui un enjeu stratégique et financier pour les entreprises »40.
Cette nouvelle donne engendre certaines conséquences telle qu’une inégalité entre les parties au litige face à l’allocation de ces coûts et plus précisément une primauté du critère économique dans le règlement du différend.
Les coûts traditionnels de la procédure arbitrale
On peut considérer que les coûts traditionnels de l’arbitrage se composent de frais assez généraux mais également de frais engagés dans le cadre de la défense des parties. Selon M.BUHLER .
Il faut prendre en compte les frais habituels tels que les coûts générés par les audiences, le service des interprètes si les parties ne sont pas anglo-saxonnes, le service administratif des secrétariats des chambres arbitrales etc.
Les coûts classiques de l’arbitrage correspondent également aux frais engagés par les parties dans le cadre de leur défense. Les parties font généralement appel à un avocat afin de préparer leur défense lors de la procédure arbitrale. Ces frais supplémentaires font écho au phénomène de « judiciarisation ».
De plus, les coûts exposés par les parties pour leur défense correspondent aux frais engagés dans le cadre de l’organisation de la procédure, « aux frais et honoraires des témoins et experts nommés par les parties ou encore les frais engagés dans le cadre de procédure de discovery, coûts de téléphone, fax, e-mail (…) »42.
Cette liste de frais correspondant à la défense des parties n’est pas exhaustive. Selon l’article 37§1 du Règlement Chambre de Commerce Internationale : « Les frais de l’arbitrage comprennent les honoraires et frais des arbitres et les frais administratifs de la Chambre de Commerce Internationale fixés par la Cour, conformément au tableau de calcul en vigueur au moment de l’introduction de l’arbitrage, les honoraires et frais des experts nommés par le tribunal arbitral ainsi que les frais raisonnables exposés par les parties pour leur défense à l’occasion de l’arbitrage »43.
Comme l’indique à juste titre C.DUCLERCQ44, la définition des frais correspondant à la défense des parties dans le cadre de la procédure d’arbitrage de l’article 37 du règlement est assez large. Le fait de ne pas définir en détail quels types de frais peuvent être insérés dans le coût de la défense des parties, laisse la « porte ouverte » à l’intégration de nouveaux frais dans la catégorie des coûts correspondant à la défense des parties.
On peut être amené à penser que cette liberté laissée aux parties, illustre bien le manque de consensus qui existe entre les différentes instances arbitrales. Certains tribunaux arbitraux ne prennent pas en compte dans la catégorie des coûts engagés pour la défense certains frais, tandis que d’autres tribunaux doivent quant à eux les prendre en compte. Afin de ne pas engendrer de conflits entre les parties, les règlements arbitraux préfèrent laisser le choix.
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Table des matières
CHAPITRE 1 : UNE PRESENTATION GENERALE DES DEUX SYSTEMES D’ARBITRAGE MARITIME
SECTION 1 : UNE VISION GENERALE DE L’ARBITRAGE MARITIME A LONDRES ET A PARIS
I. LA LONDON MARITIME ARBITRATION ASSOCIATION : UN CENTRE SPECIALISE EN ARBITRAGE MARITIME DE RENOM
A. HISTORIQUE ET EVOLUTION DE LA LMAA
B. LES PARTICULARITES DE LA LMAA
II. LA CHAMBRE ARBITRALE MARITIME DE PARIS : UN CENTRE SPECIALISE EN ARBITRAGE MARITIME EN PLEIN ESSOR
A. LES ORIGINES DE LA CAMP
B. LES PARTICULARITES DE LA CAMP
SECTION 2 : LES TEXTES EN VIGUEUR EN FRANCE ET EN ANGLETERRE RELATIFS A L’ARBITRAGE
I. L’ARBITRATION ACT DE 1996
A. UNE BREVE PRESENTATION DU NOUVEL OPUS DE L’ARBITRATION ACT
B. LES APPORTS DE L’ARBITRATION ACT DE 1996
II. LE DECRET N°2011-48 DU 13 JANVIER 2011 PORTANT REFORME DE L’ARBITRAGE EN FRANCE
A. LA PRESENTATION DU NOUVEAU TEXTE
B. LES NOUVEAUTES DU DECRET N°2011-48
III. LA PIERRE ANGULAIRE DE L’ARBITRAGE INTERNATIONAL : LA CONVENTION DE NEW YORK DE 1958 RELATIVE A LA RECONNAISSANCE ET L’EXECUTION DES SENTENCES ETRANGERES
CHAPITRE 2 : LES AVANTAGES ET LES INCONVENIENTS D’UN ARBITRAGE DEVANT LA LONDON MARITIME ARBITRATION ASSOCIATION ET LA CHAMBRE ARBITRALE MARITIME DE PARIS
SECTION 1 : UNE ETUDE COMPARATIVE FONDEE SUR TROIS CRITERES OBJECTIFS..27
I. LE CRITERE DE LA QUALITE DES ARBITRES
A. LES ARBITRES DE LA CHAMBRE ARBITRALE MARITIME DE PARIS :
DE REELS PRATICIENS DU SECTEUR MARITIME
B. LES ARBITRES DE LA LONDON MARITIME ARBITRATION ASSOCIATION : LA NECESSITE D’UN « BACKGROUND » JURIDIQUE
II. LE CRITERE DE LA PROCEDURE LA PLUS FIABLE
A. LA PROCEDURE AU SEIN DE LA CHAMBRE ARBITRALE MARITIME DE PARIS : LA SIMPLICITE D’UNE PROCEDURE
B. LA PROCEDURE AU SEIN DE LA LONDON MARITIME ARBITRATION ASSOCIATION : UNE PROCEDURE TROP FORMELLE
III. UN BREF APERÇU DU CRITERE DES COUTS DE L’ARBITRAGE
A. LE BAREME D’HONORAIRES DE LA CHAMBRE ARBITRALE MARITIME DE PARIS : DES FRAIS RAISONNABLES
B. LE BAREME D’HONORAIRES DE LA LONDON MARITIME ARBITRATION ASSOCIATION : DES HONORAIRES ASSEZ ONEREUX
SECTION 2 : UNE ETUDE APPROFONDIE DU CRITERE DES COUTS DE L’ARBITRAGE INTERNATIONAL
I. LES COUTS DE L’ARBITRAGE INTERNATIONAL : UN ENJEU STRATEGIQUE IMPORTANT
A. LES COUTS TRADITIONNELS DE LA PROCEDURE ARBITRALE.
B. LES NOUVEAUX COUTS DE L’ARBITRAGE : LES COUTS DITS EMERGENTS
1) LES NOUVEAUX FRAIS DE L’ARBITRAGE
A) LA POSSIBILITE D’UNE INTERNALISATION DES COUTS PAR LES ENTREPRISES PARTIES A UNE PROCEDURE ARBITRALE
B) L’EMERGENCE D’UN FINANCEMENT EXTERNE DANS LA PROCEDURE ARBITRALE : LES « THIRD PARTY FUNDING »
2) LA JUDICIARISATION DES COUTS
II. VERS UNE REDUCTION DES RISQUES DE L’ALLOCATION DES COUTS DE L’ARBITRAGE
A. LA NECESSITE D’UN CONSENSUS SUR L’ALLOCATION DES COUTS DE L’ARBITRAGE
B. LES LIMITATIONS DES RISQUES DE L’ALLOCATION DES COUTS DE L’ARBITRAGE : LES SOLUTIONS APPORTEES PAR LE LEGISLATEUR ANGLAIS
1) L’ARBITRATION ACT DE 1996 : LA MISE EN PLACE D’UNE LIMITATION DES PLAFONDS
2) UNE BREVE PRESENTATION DE LA NOUVELLE PROCEDURE DE LA LONDON MARITIME ARBITRATION ASSOCIATION : THE INTERMEDIATE CLAIMS PROCEDURE
PARTIE II : LE PRINCIPE DE COMPETENCE-COMPETENCE APPLIQUE AU DROIT MARITIME
CHAPITRE 1 : L’EFFET POSITIF DU PRINCIPE DE COMPETENCE-COMPETENCE : LE DROIT POUR L’ARBITRAGE DE STATUER SUR SA PROPRE COMPETENCE
SECTION 1 : UNE FORTE ACCEPTATION DE L’EFFET POSITIF DU PRINCIPE DE COMPETENCE-COMPETENCE
I. DEFINITION ET FONDEMENTS DU PRINCIPE DE COMPETENCECOMPETENCE DANS SON ASPECT POSITIF
A. LA CONSECRATION DE L’EFFET POSITIF DU PRINCIPE DE COMPETENCE-COMPETENCE EN DROIT FRANCAIS DE L’ARBITRAGE
B. L’ACCEPTATION DE L’EFFET POSITIF DU PRINCIPE DE COMPETENCE-COMPETENCE EN DROIT ANGLAIS DE L’ARBITRAGE : UNE CONSECRATION DEPUIS L’ARBITRATION ACT DE 1996
II. LE PARTICULARISME DE L’EFFET POSITIF DU PRINCIPE DE COMPETENCE-COMPETENCE : LES JUSTIFICATIONS DE SON SUCCES.
SECTION 2 : LA NEUTRALISATION DU POUVOIR DU JUGE ETATIQUE EXCEPTE DANS LE CADRE D’UN RECOURS CONTRE LA SENTENCE ARBITRALE
I. LES RECOURS POSSIBLES CONTRE LA SENTENCE ARBITRALE SELON LE DROIT FRANÇAIS DE L’ARBITRAGE
A. SELON L’ARBITRAGE INTERNE
B. SELON L’ARBITRAGE INTERNATIONAL
1) LES SENTENCES RENDUES EN FRANCE
2) LES SENTENCES RENDUES A L’ETRANGER
3) LES SOLUTIONS COMMUNES
II. LES RECOURS POSSIBLES CONTRE LA SENTENCE ARBITRALE SELON LE DROIT ANGLAIS DE L’ARBITRAGE
CHAPITRE 2 : L’EFFET NEGATIF DU PRINCIPE DE COMPETENCE-COMPETENCE : UN MECANISME ARBITRALE FAISANT DEBAT
SECTION 1 : VERS UN DURCISSEMENT DE L’EFFET NEGATIF DU PRINCIPE DE COMPETENCE-COMPETENCE
I. LE FONDEMENT DE L’EFFET NEGATIF DU PRINCIPE DE COMPETENCECOMPETENCE
A. L’EFFET NEGATIF DU PRINCIPE DE COMPETENCE-COMPETENCE SELON LE DROIT FRANCAIS DE L’ARBITRAGE : UNE CONSECRATION ASSEZ FORTE DU PRINCIPE
1) LE CONTROLE PRIMA FACIE : LE CAS D’UNE CLAUSE MANIFESTEMENT NULLE OU INAPPLICABLE
2) LES AVANTAGES DE L’EFFET NEGATIF DU PRINCIPE DE COMPETENCE-COMPETENCE
3) LES LIMITES DE L’EFFET NEGATIF DU PRINCIPE DE COMPETENCE-COMPETENCE
B. LA POSITION DU DROIT COMPARE CONCERNANT L’EFFET NEGATIF DU PRINCIPE DE COMPETENCE-COMPETENCE
1) LES CONVENTIONS INTERNATIONALES :UNE ACCEPTATION EN DEMI-TEINTE
2) L’EFFET NEGATIF DU PRINCIPE DE COMPETENCE-COMPETENCE SELON LE DROIT ANGLAIS DE L’ARBITRAGE
II. LA VALIDITE ET L’OPPOSABILITE DE LA CLAUSE D’ARBITRAGE A L’EGARD DU DESTINATAIRE : LA PREUVE D’UNE APPLICATION EXAGEREE DE L’EFFET NEGATIF DU PRINCIPE DE COMPETENCECOMPETENCE
A. L’OPPOSABILITE DE LA CLAUSE D’ARBITRAGE INSEREE DANS UNE CHARTE-PARTIE A L’EGARD DU DESTINATAIRE DU CONTRAT DE TRANSPORT : UNE NECESSAIRE ACCEPTATION SPECIALE ET EXPRESSE DU DESTINATAIRE
1) LE DESTINATAIRE : TIERS OU PARTIE DU CONTRAT DE TRANSPORT ?
2) LA NECESSITE D’UN CONSENTEMENT SPECIAL ET EXPRES DU DESTINATAIRE QUANT A L’OPPOSABILITE DE LA CLAUSE D’ARBITRAGE INSEREE DANS LA CHARTE-PARTIE
A) UNE EVOLUTION JURISPRUDENTIELLE ET DOCTRINALE : LE REVIREMENT OPERE PAR L’ARRET STOLT OSPREY
B) LES JUSTIFICATIONS DE L’INOPPOSABILITE DE LA CLAUSE DEROGATOIRE DE DROIT COMMUN AU DESTINATAIRE DU CONTRAT DE TRANSPORT
C) LES CRITIQUES DE LA CHAMBRE COMMERCIALE CONCERNANT LA SOLUTION STOLT OSPREY
B. L’ABANDON DU CONTROLE D’UN CONSENTEMENT EXPRES ET SPECIAL DU DESTINATAIRE : LA PORTE DES JURISPRUDENCES LINDOS ET PELLA
1) LA DIVERGENCE D’OPINION ENTRE LA PREMIERE CHAMBRE CIVILE ET LA CHAMBRE COMMERCIALE DE LA COUR DE CASSATION
2) LA FIN DU CONTROLE DU CONSENTEMENT DU DESTINATAIRE :VERS UN RAPPROCHEMENT DES DEUX CHAMBRES
3) L’ANALYSE DE L’ABANDON DU CONTROLE
SECTION 2 : LES ANTI-SUIT INJUNCTIONS : UNE MENACE POUR L’EFFET NEGATIF DU PRINCIPE DE COMPETENCE-COMPETENCE
I. UNE NOTION ISSUE DU DROIT DE LA COMMON LAW
II. L’IMPORTANCE DE LA SOLUTION FRONT COMOR : L’EXTENSION DE L’INTERDICTION DES ANTI-SUIT INJUNCTIONS AUX CLAUSES
COMPROMISSOIRES DANS L’ESPACE COMMUNAUTAIRE
CONCLUSION
BIBLIOGRAPHIE
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