Modèles structure-fonction (Functional Structural Process Models)
Pour pallier aux inconvénients des PBM, les agronomes et les informaticiens ont créé les modèles structures fonctions qui consistent à donner aux organes mis en place par les méristèmes un rôle fonctionnel. On se place dans la classe botanique des arbres informatiques. Pour autant les modèles structure-fonction n’ont pas essayé de rivaliser avec les PBMs dans le domaine de la production végétale, mais plutôt se sont concentrés sur le fonctionnement physiologique détaillé de l’individu plante. La structure topologique issue du développement permet d’interconnecter les organes entre eux et la structure géométrique par le biais des maillages, permet de calculer l’interception de la lumière par chaque feuille et de faire circuler les sèves brute et élaborée dans le réseau ramifié de l’architecture de la plante. Toutes les simplifications validées et utilisées dans les PBMs sont ignorées dans les FSPMs ou l’objectif est le recours à tout simuler dans le détail en concentrant un maximum de connaissances (Marcelis 1998) :
1. L’interception de la lumière sera simulée par des logiciels de transferts radiatifs opérant sur la maquette 3D maillée par des polygones.
2. La photosynthèse sera simulée au niveau de chaque feuille compte tenu de son microclimat.
3. un modèle transport-résistance diffuse selon un pas de temps et un gradient physiologique, la matière produite par les organes sources aux organes puits en utilisant le réseau des branches maillé en éléments finis.
4. les coûts de la respiration (transport, entretien) sont évalués, ils diminuent d’autant l’assimilation par la structure de la matière produite par les feuilles. Toutes ces opérations sont coûteuses en temps et en mémoire dès que l’on monte à l’échelle d’un arbre qui produit des milliers voire des centaines de milliers d’éléments. Le temps de calcul du développement de la plante est proportionnel au nombre d’éléments à mettre en place auquel il faut ajouter le temps de calcul de la croissance. Se pose alors le problème de la fiabilité de la simulation elle-même, qu’il est difficile voire impossible de calibrer sur des fonctions mathématiques. Ces simulations sont sans preuves au sens informatique du terme. La dérivation du code est généralement impossible, ce qui empêche la résolution des problèmes inverses, l’optimisation et le contrôle de s’appuyer sur des algorithmes mathématiques efficaces et il faut recourir aux méthodes heuristiques qui obligent à lancer des milliers de fois le calcul de la plante. Les codes des FSPMs apparaissent davantage donc comme des outils de capitalisation des connaissances et sont utiles en tant que tels à l’enseignement par exemple, plutôt que comme des nouveaux outils utilisables en Agronomie. Pour finir les FSPMs concernent le fonctionnement de la plante individuelle. Un autre problème est celui du passage de la plante au peuplement que nous n’aborderons pas ici. Au travers de ce panorama des différentes classes de modèles de croissance de plante on se rend compte que la manière dont un modèle est conçu dépend étroitement de la question que l’on se pose au sujet de l’objet que l’on cherche à modéliser et qui définit sa problématique : « To an observer B, an object A* is a model of an object A to the extent that B can use A* to answer questions that interest him about A” (Minsky, 1965).
Classes de simulateurs
Nous présentons ici différentes approches qui permettent de simuler un modèle.La simulation quasi continue, où le système se présente sous la forme d’un système d’équations (souvent différentielles) à résoudre. Elle permet de suppléer à la résolution analytique quand celle-ci est impossible. Effectuée au départ sur des calculateurs analogiques, elle s’est effectuée aussi sur des ordinateurs ainsi que des machines hybrides, et un troisième type de calculateurs qui n’a pas eu de lendemain, les calculateurs stochastiques.La simulation à évènements discrets (Leroudier, 1980). Dans ce formalisme, le système est représenté par un jeu de variables dont le nombre de valeurs possibles est fini. Le changement de valeur de ces variables se produit lors de moments précis. L’ordonnancement de ces évènements nécessite un échéancier piloté par un contrôleur central. Une combinaison de valeurs des variables représente un état du système. Un ensemble d’états sont définis pour un système donné. Les transitions entre états sont les évènements, ils sont datés. Dans ce type de simulation, le système est soumis à une succession d’évènements qui le modifient. Ces simulations ont vocation à appliquer des principes simples à des systèmes de grande taille. La simulation discrète se divise en deux grandes catégories : Dirigée par horloge : dans cette catégorie on simule à chaque fois le passage d’uneunité de temps (ou pas de temps) sur tout le système qui est réévalué globalement, on parle également de gestion du temps dirigée par horloge. Dans ce genre de simulation le choix de la valeur du pas de temps de réévaluation est critique et s’adapte au traitement d’un système dont les changements d’états interviennent globalement de manière régulière et diffuse sur l’ensemble du système (Coquillard, 1996). Les grammaires constituent un exemple classique d’application de simulation dirigée par horloge (Lindenmayer, 1990). Une grammaire formelle (ou, simplement, grammaire) est constituée de quatre éléments :
-Un ensemble fini de symboles, appelés symboles terminaux (qui sont les « lettres » du langage), notés conventionnellement par des minuscules.
-Un ensemble fini de symboles, appelés non-terminaux, notés conventionnellement par des majuscules.
-Un élément de l’ensemble des non-terminaux, appelé axiome, noté conventionnellement S.
-Un ensemble de règles de production, qui sont des paires formées d’un non-terminal et d’une suite de terminaux et de non-terminaux ; par exemple, A → ABa. Appliquer une règle de production consiste à remplacer dans un mot une occurrence du membre de gauche de cette règle par son membre de droite ; l’application successive de règles de productions s’appelle une dérivation. Le langage défini par une grammaire est l’ensemble des mots formés uniquement de symboles terminaux qui peuvent être atteints par dérivation à partir de l’axiome. Dirigée par évènements : dans cette catégorie on calcule l’arrivée du prochain événement, et on ne simule qu’événement par événement, ce qui permet souvent des simulations rapides, bien qu’un peu plus complexes à programmer. Les automates constituent un exemple classique de simulation dirigée par évènements. La simulation à évènement discrets présente plusieurs avantages. Tout d’abord elle permet de se focaliser sur les événements par ordre d’importance et permet de découper les traitements de la simulation par blocs fonctionnels imbriqués ou tout du moins hiérarchisés. On dispose ainsi d’une approche d’aide à la modélisation souple. Elle est bien adaptée aux traitements par ordinateur et propose naturellement un traitement quasi-parallèle. Par contre ce type de simulation est couteux en ressources informatiques tant pour son traitement que pour assurer la convergence de ses estimateurs. Le résultat n’est bien souvent pas prédictible autrement qu’en effectuant la simulation. En particulier dans le cas des processus stochastique toutes les étapes doivent être simulées. La simulation par agents : la simulation est segmentée en différentes entités qui interagissent. Elle est surtout utilisée dans les simulations économiques et sociales, où chaque agent représente un individu ou un groupe d’individus. Par nature, son fonctionnement est asynchrone.
Description de l’architecture végétale (modèles descriptifs) développement, port d’une plante.
Hallé et Oldeman (1970) ont proposé une classification des arbres tropicaux en « modèles architecturaux » qui repose sur le fonctionnement des méristèmes. Pour le spécialiste, le modèle de RAUH, le modèle de TROLL évoquent des images d’arbres bien définies. Cependant cette classification n’est pas d’un grand secours pour la conception d’un logiciel de simulation de la croissance des végétaux (ou encore moteur de croissance d’arbre). Des changements progressifs du fonctionnement des méristèmes font passer insensiblement d’un modèle à l’autre. Ainsi les modèles de RAUH et ATTIMS diffèrent par une ramification rythmique chez l’un (ex. hévéa), diffuse chez l’autre (ex. eucalyptus). Du point de vue de la simulation, on passera de l’un à l’autre en changeant seulement la valeur numérique d’un paramètre de ramification. Cela ne justifie pas d’en faire deux classes de modèles au sens numérique. De même le modèle de RAUH et le modèle de MASSART diffèrent par des branches orthotropes chez le premier, plagiotropes chez le deuxième. Du point de vue de la simulation, on modifiera les valeurs numériques des paramètres géométriques (angles de branchements et de phyllotaxie) et mécaniques (module d’élasticité du bois). On peut donc constater qu’un seul et même programme peut simuler toute une variété de modèles, sans qu’il y ait besoin de faire des traitements informatiques particuliers. Le point de vue des modèles de croissance ne se situe pas au même niveau que celui des modèles architecturaux. De plus ces derniers concernent des architectures tropicales, qui sont souvent soumises à des règles de croissance particulières. Les conditions du milieu sont le plus souvent favorables et la plante exprime un rythme de développement endogène. En climat tempéré, l’hiver puis le printemps ont un effet de resynchronisation forcée sur le fonctionnement des méristèmes. Hallé et Oldeman (1970) ont opéré, de plus, des simplifications légitimes pour les besoins de leur classification, mais en contrepartie ils ont laissé dans l’ombre des éléments essentiels pour renseigner la simulation. Ainsi les modèles architecturaux reposent essentiellement sur des types d’axes décrits comme des entités, alors que la simulation nécessite un fonctionnement feuille à feuille. Certes l’unité de croissance (U.C.) y est intégrée comme un élément essentiel constitutif de l’axe végétatif et lui confère une rythmicité, mais ses spécificités ne sont pas décrites précisément. Or lorsque l’on aborde l’architecture des arbres en détail, on s’aperçoit qu’il existe des particularités incontournables. Ainsi il faudra préférer la notion de « type d’axe », ou si l’on veut d’âge physiologique, à la notion d’ordre de ramification, pour décrire l’architecture. Il faudra introduire la notion de préformation et de néoformation dans la constitution de l’unité de croissance. Enfin, il faudra prendre en compte le polycyclisme et les rameaux à développement immédiat (Barthélémy, 2007). On peut déjà imaginer sans entrer dans les détails une classification obligée des modèles de fonctionnement, basée sur des paramètres qui auront une incidence importante sur la simulation.
Fonctionnement des méristèmes : croissance, mort, ramification
Le processus de croissance d’un axe végétatif est caractérisé par l’ajout de nouveaux entre-nœuds à son extrémité. Pendant la période de croissance (Unité.de Temps et, par extension, l’ensemble des U.C. qui sont mises en place pendant cette unité de temps) il peut y avoir des variations du rythme d’émission des nouveaux entre-nœuds sans que cela change le résultat final. On parlera de dilatation de l’échelle des temps. Le temps qui sépare l’apparition de deux entre-nœuds successifs, ou temps de renouvellement, peut avoir un caractère régulier comme chez le caféier (un nouvel entre-nœud environ tous les quinze jours). La distribution du temps de renouvellement ressemble alors à une loi normale. Il peut être irrégulier et varier entre quelques heures et plusieurs jours comme chez l’abricotier. Dans ce cas la distribution du temps de renouvellement suit une loi exponentielle. On se trouve dans les conditions d’un processus de Poisson. A tout moment une nouvelle feuille peut apparaître avec une égale probabilité. Les méristèmes cessent de fonctionner pour deux types de raison : soit ils entrent en pause de longue durée après une période de fonctionnement, soit ils meurent ou se transforment. Une pousse végétative qui peut être une U.C. est alors réalisée. Les méristèmes édificateurs produisent à chaque nœud des méristèmes axillaires de diverses natures. Ainsi, classiquement, on trouvera un méristème à l’aisselle d’une feuille pouvant donner un rameau axillaire ou une inflorescence. Le long d’un axe végétatif, on peut trouver, successivement, des séries de nœuds ramifiés et des séries de nœuds non ramifiés (ex. abricotier). Des séries de rameaux alternant avec des séries d’inflorescences (ex. bégonia) … Ces séries ont très souvent des distributions d’allure géométrique si elles ne sont pas tronquées par la fin de l’U.C. porteuse.
|
Table des matières
1. Introduction
1.1 Modèles de croissance de plantes
1.1.1 Modèles de développement des plantes informatiques (Growth Models)
1.1.2 Modèles de croissance de plantes de l’agronomie.(Process Based Models)
1.1.3 Modèles structure-fonction (Functional Structural Process Models)
1.2 Simulation
1.2.1 Considérations générales
1.2.1.1Connaissances informatiques requises
1.2.1.2 Classes de simulateur
1.2.2. Simulateurs de plante
1.2.2.1 Simulateurs géométriques
1. 2.2.2 Simulateurs botaniques
1.2.2.3 Simulateurs écophysiologiques
1.2.2.4 Conclusion sur les simulateurs de plante
1.3 Problématique
2. Le Modèle AmapSim
2.1 Choix du niveau d’observation
2.2 Connaissances Biologiques requises
2.3 Connaissances mathématiques requises
2.4 Le modèle AmapSim
2.4.1 Eléments constituants de la plante
2.4.2 Axe de référence
2.4.3 Topologie
2.4.4 Simulation de l’organogenèse par un automate gauche droite
2.4.5 Géométrie de la maquette
3. La librairie Vitis
3.1 Description et gestion de la plante
3.2 Gestion du temps et des événements
3.3 Gestion des sorties de simulation
3.4 Simulation au cours du temps, persistance mémoire
3.5 Gestion de paramètres
3.6 Chargement et communication entre modules additionnels
3.7 Organisation générale
3.7.1 Synchronisation des modules
3.7.2 Echange de données entre modules
3.8 Conclusion sur la librairie Vitis
4. Le simulateur de AmapSim
4.1 Architecture logicielle
4.2 Utilisation de la simplification, performances
4.3 Simulation des modèles architecturaux de base
4.4 Utilisation des maquettes végétales.
4.4.1 Utilisation en Génétique
4.4.2 Utilisation en Agronomie
4.4.3 Utilisation en écophysiologie :
4.4.4 Utilisation en télédétection.
4.5 Conclusion sur la méthodologie de « l’Axe de Référence »
5. Utilisation de l’interface fonctionnelle de Vitis pour AmapSim
5.1. Effet géométrique du vent
5.2. Flexion des feuilles de céréales
5.3. Diffusion de la matière selon la loi de Shinozaki
5.4. Contrôle de la phénologie du tournesol
5.5. Gestion de la forme des palmes du palmier
5.6. Implémentation de GreenLab
5.7. Influence de la densité de plantation sur la croissance de la tomate
5.8. Conclusion sur l’utilisation de modules additionnels pour AmapSim
6. Conclusion
7. Bibliographie
8. Glossaire
9. Annexe. Format de description GTDS
Télécharger le rapport complet