Une constellation d’organismes en lutte

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LA THEORISATION DU GENRE COMME CONSTRUCTION SOCIALE

La définition du genre comme construction sociale s’est développée au 20ème siècle, en parallèle à l’essor des luttes féministes, qui sont d’ailleurs bien antérieures à cette théorisation. Sur quelles idées se construit la définition du genre comme construction sociale ?

La déconstruction d’une vision naturaliste

Les féministes telles que Simone de Beauvoir9 et Christine Delphy10 renversent les perspectives en étudiant le genre d’un point de vue sociologique et culturel et non plus seulement sur une différenciation biologique. Elles remettent en cause le naturalisme, un courant de pensée qui détermine la définition du genre comme un système de division des individus selon leur sexe (mâle et femelle) mais c’est « le genre (qui) crée le sexe »11. Pour ces figures du féminisme français, le genre n’est pas un héritage du sexe biologique mais il s’apprend ; «
On ne naît pas femme, on le devient »12 de Simone de Beauvoir illustre le fait que par l’assignation d’un sexe à la naissance (homme ou femme), les individus se construisent par rapport à des normes sociales de genre.
Les normes de genre sont transmises dès le plus jeune âge par le biais d’une éducation genrée, afin de transmettre aux individus leur rôle de genre.
L’exemple le plus frappant et traditionnel est la répartition des jouets : on donne des poupées, des cuisinières, des aspirateurs aux petites filles, afin qu’elles assimilent leur futur rôle de mère au foyer, et des voitures et des engins de chantier, et des armes aux petits garçons afin qu’ils apprennent les symboles de la virilité.
Pour Christine Delphy, la différenciation des individus est « la façon dont, depuis plus d’un siècle, on justifie l’inégalité entre les groupes »13. Le système de différenciation par le genre crée des rapports des dominations car il assigne aux individus des rôles de genre, dont la répartition, en termes de travail, de privilèges, et de valeurs est asymétrique.
L’image du « sexe fort » et « sexe faible » illustre cette hiérarchisation : le sexe féminin serait par nature plus faible que le sexe masculin, ce qui lui vaudrait de dépendre de lui pour sa survie.
Les rôles de genre sont construits et alimentés par des stéréotypes (ex : les hommes sont plus forts que les femmes), qui sont une image généraliste des caractéristiques associées aux hommes et aux femmes, sans prendre en compte les particularités. En ce sens, on peut affirmer que la féminité et la masculinité sont le regroupement de ces stéréotypes, formant un modèle de l’homme et de la femme « idéal ». Cependant, la conception de la féminité et de la masculinité, tout comme les critères de beauté, varie d’une époque à une autre, d’un pays à un autre, car elle résulte d’une
construction sociale et culturelle. Partant de ce constat, les études de genre et féministes affirment
qu’il n’existerait donc pas une féminité et une masculinité, mais des féminités et des masculinités.

Les minorités de genre

Le genre comme système de différenciation divise les individus en deux catégories exclusives. Les individus non conformes aux normes de genres, dont l’identité de genre ne serait pas conforme au sexe (un homme non considéré comme « masculin », ou une femme non considérée comme « féminine »), ne sont donc pas conformes au modèle majoritaire. Il n’existe pas de catégories de genre intermédiaire au féminin et masculin dans la langue française, pour désigner ce qui est «non conforme », ou alors il est désigné par le sens commun comme le « neutre».
Pourtant, le sexe « masculin » et le sexe « féminin » se définissent sur différents critères, de nature génétique, anatomique, gonadique et hormonal. Il arrive que des individus ne possèdent pas toutes ces caractéristiques réunies. Considéré.e.s comme des malformations dans le domaine médical et ne pouvant pas être classé.e.s clairement dans l’une ou l’autre des catégories «homme » ou « femme », iels sont qualifié.e.s d’intersexe.
Si l’on regarde le genre comme une construction sociale, les personnes intersexe apparaissent finalement comme des victimes du système de catégorisation du genre, qui exclut d’office les catégories intermédiaires, d’un point de vue médical jusque dans notre système grammatical. L’argument médical est également construit par cette norme de genre dans le fait de reconnaître que les personnes intersexe sont considérées comme « malades » et doivent subir des interventions médicales pour se rapprocher de l’une des deux catégories.
En sociologie, il est question d’analyser des phénomènes sociaux en partant d’une étude de l’individu. Dans les études de genre, on parle de l’identité de genre d’un individu pour désigner son
« degré » de masculinité ou de féminité.
Il arrive que des personnes possèdent toutes les caractéristiques biologiques assimilées au « sexe masculin » ou au sexe féminin » mais ne possèdent pas l’identité de genre correspondant à leurs caractéristiques biologiques. Ces personnes, qualifiées de transgenre, sont donc non conformes au système de classification du genre. Le choix d’effectuer une transition (c’est-à-dire de vivre pleinement son identité en « changeant » de genre) peut parfois s’accompagner de changement d’état civil, ou de transformation physique par des interventions chirurgicales. Dans ce dernier cas, ces personnes sont qualifiées de personnes trans sexuelles.

L’hétéronormativité

La féminité et la masculinité sont construites à travers un certain nombre de critères biologiques, dont le constat de la complémentarité du sexe masculin et du sexe féminin dans la reproduction. L’hétérosexualité, considérée comme la forme de sexualité majoritaire dans notre société occidentale actuelle, conforte donc le système de genre basé sur une différenciation biologique des individus en deux catégories exclusives. La sexualité, que l’on différencie de la reproduction, est également construite socialement et culturellement, car elle doit être conforme aux caractéristiques biologiques affiliées à la féminité et la masculinité, c’est-à-dire l’hétérosexualité.
La « révolution sexuelle » des années 70 aux Etats-Unis, met en évidence cette normalisation de la sexualité ; les féministes de ce mouvement de revendication dénoncent les oppressions de genre en affichant des pratiques et orientations sexuelles minoritaires . En défiant l’hétérosexualité comme seule pratique sexuelle possible, ces femmes sortent du modèle de la femme hétérosexuelle stéréotypée ; elles subvertissent les normes de genre en créant une nouvelle conception de la féminité, pas nécessairement hétérosexuelle.
L’hétéronormativité désigne alors les normes définies par les pratiques sexuelles et leur symbolique de l’hétérosexualité, considérée comme majoritaire. Selon Judith Bulter14, les normes de genre sont perpétuées par des pratiques du corps, à tel point qu’elles semblent « naturelles ». Dans les études de genre, on envisage la sexualité au delà de l’hétérosexualité, dans toute la diversité des pratiques et des orientations sexuelles ; pour décrire cette diversité, on est amené à parler non pas de la sexualité mais des sexualités.

les études de genre ?

L’ensemble du travail de théorisation sur le genre produit à partir des luttes des années 60 et 70 a mené à la création d’un champ de recherche académique : les études de genre. Ce champ de recherche est pluridisciplinaire et croise différentes disciplines des sciences humaines (la psychologie, la sociologie, la biologie, la philosophie, l’économie, la psychanalyse, la géographie, les sciences politiques, l’anthropologie, etc.).
Il est donc basé sur les recherches produites à partir de la création du concept du genre et de recherches antérieures. En France, l’institut du genre a été créé en 2012 et vise à rassembler les différentes études menées sur les rapports sociaux entre les sexes et à étudier les « masculinités » et les « féminités ».

Qu’est-ce que la théorie du genre ?

Le syntagme « la théorie du genre » est né de « l’anxiété de voir se dissoudre la « différence des sexes »par le fait de séparer le genre du sexe. Il a été créé par les détracteurs des études de genre et des mouvements féministes. Il permet ainsi de cristalliser et regrouper les partisans de « l’anti-genre » sous un dénominateur commun.
Les premières offensives sont menées par l’Eglise catholique, notamment à partir de l’apparition de la parité dans les années 90, puis de la légalisation du mariage pour tous en 2012.
L’Eglise s’attaque aux études de genre et aux mouvements féministes dits « radicaux » car elles remettraient en cause « la distinction ontologique féminin/masculin, laquelle est au fondement de la conception de l’humanité pour les catholiques, le primat de l’hétérosexualité conjugale à finalité procréatrice et la destinée première de la maternité pour les femmes. »15.
Pour cela, elle met en place une stratégie de discréditation des études de genre, à commencer par le fait de réduire le concept du genre à « une théorie du genre ». Les partisans de la « théorie du genre » créent un discours qui simplifie et interprète la notion de genre, assimile les études de genre à une idéologie politique camouflée par un cadre académique, qui aurait pour but de « déstabiliser l’identité sexuelle et la hiérarchie entre les sexualités (promouvant, dès lors, l’homosexualité). »16.
« La « théorie du genre » est régulièrement remise d’actualité en France, particulièrement lorsqu’il est question d’introduire la notion d’égalité de genre au niveau de l’éducation ; en juillet 2018, la mesure de Marlène Schiappa , secrétaire d’Etat à l’Egalité entre les femmes et les hommes, concernant la mise en place de cours d’éducation sexuelle dans les écoles primaires fait polémique. Elle est analysée dans les médias à la manière des « partisans du genre », c’est-à-dire comme une mesure pouvant potentiellement provoquer des déviances de comportements sexuels chez les enseignants envers les élèves, et perturberait l’identité sexuelle des enfants.

Quelques Repères chronologiques

Les luttes féministes existent depuis l’Antiquité et sont inégales en fonction des pays. Le peu d’informations et de recherches historiques ne permettent pas aujourd’hui de parler d’un mouvement féministe à proprement parler existant avant le 20ème siècle.

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Table des matières

Introduction
CHAPITRE 1 – Quel genre de genre ?
1.1. Le genre, un système de classification
1.2. La théorisation du genre comme construction sociale
1.3 Les études de genre
1.4. La «théorie du genre»
1.5. Quelques repères chronologiques
1.6. Quelques définitions
CHAPITRE 2 – Les marges du genre
Récit d’expérience : la soirée de clôture du festival Pride’N’art
2.1. Les sexualités : ce qu’elles disent de notre société
2.2. Les géographies des sexualités : L’évolution des méthodologies d’enquête
2.3. L’identité queer
2.4. Entretien avec Usées coutumes, un collectif d’événementiel queer nantais
2.5. Les spatialités des minorités de
CHAPITRE 3 – Une constellation d’organismes en lutte
Enquête Les organismes de luttes contre les inégalités de genre sur Nantes
3.1. « La ville inclusive » : un nouvel enjeu pour les territoires
3.2. Le Labo 258 : des ateliers de participation citoyenne
3.3. Le Conseil d’égalité Femmes Hommes de Nantes (CEFH)
3.4. NOSIG, le centre LGBTI+ de Nantes
Récit d’expérience : La Marche des Fiertés, Nantes
3.5. La marche des Fiertés, ou Gay pride, entre militantisme et appropriation du grand public
3.6. Les Diversgens : un collectif queer militant nantais
3.7. L’Espace Simone de Beauvoir : une association féministe nantaise
CHAPITRE 4 – Le genre : une diversité d’appropriations, une transversalité des luttes
Analyse croisée des enquêtes
4.1. Les différentes appropriations du féminisme
4.2. Les sous – mouvements du féminisme
4.3. Le féminisme intersectionnel, dit identitaire
4.4. La parité : un chantier en cours
4.5. Le féminisme croisé avec d’autres luttes
4.6. Une transversalité entre le militantisme et les institutions
4.7. Les espaces de non-mixité
conclusion
BIBLIOGRAPHIE

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