Une brève histoire de Rome
L’histoire de Rome est bien trop vaste pour qu’elle soit traitée dans cet ouvrage, s’étendant de -753 (date légendaire de la fondation de la ville) à 476 (date marquant la fin de l’empire romain d’occident) [1]. On pourrait même extrapoler jusqu’en 1453, chute de l’empire Byzantin, qui fit suite à l’empire romain d’orient [2]. Soit une période de plus de 2200 ans. Maintes fois traitée dans de très bons ouvrages, nous nous contenterons d’un bref rappel historique allant de sa création à la période qui nous intéresse, à savoir le premier siècle ap-JC. Selon la légende, l’histoire de Rome débute à la suite de la chute de Troie. Le prince troyen Enée, fils de Vénus se lance dans un long périple le conduisant dans la région du Latium en Italie. Ce récit fut immortalisé par Virgile dans l’Enéide. Des années après naissent Romulus et Remus, des jumeaux, enfants du dieu de la guerre Mars. Ils furent élevés par une louve. Romulus tua son frère alors qu’il traçait un sillon sacré autour de la colline du Palatin en -753. Rome venait de faire son entrée dans l’histoire. La réalité semble bien différente. La ville se serait formée par le rassemblement de divers villages installés sur les collines avoisinantes. Les Etrusques, peuple installé en Italie centrale depuis l’âge du bronze, ont participé à la fondation de la ville et à son essor. Des rois romains étaient même Étrusques [1]. La république fait suite à la monarchie (-509 pour la légende, vraisemblablement en -475). La res publica, signifiant « la chose publique », désigne une politique commune à tous les citoyens, et donc supérieure à la res privata, « la chose privée ». Ce pouvoir repose sur les magistrats, le sénat et le peuple, d’où la devise de Rome, le fameux SPQR (Senatus Populus Que Romanus), le sénat et le peuple de Rome. Cette période est marquée par une lente et progressive conquête de la botte Italienne, l’épanouissement de la domination romaine en Méditerranée occidentale puis orientale [1]. La domination romaine en méditerranée a bien failli être stoppée lors de la 2e guerre punique (-218/-201). C’est à ce moment que le général carthaginois Hannibal Barca envahit l’Italie et que Rome a failli disparaître. La chute de Carthage a permis à Rome de prendre un essor considérable en Méditerranée [3].
Le 1ersiècle av-JC est principalement marqué par les excès d’hommes ambitieux (Sylla, César, Antoine…), d’abus de pouvoir et de violation des institutions. Les guerres civiles qui en découlèrent mirent un terme à la république. C’est Octave qui, en devenant Auguste, en 27 av-JC, réussit à mettre fin aux combats fratricides. Un régime monarchique conciliable avec la tradition républicaine fut instauré. Nommé principat par ses contemporains, appelé empire par la postérité. Ce changement de régime fut en partie justifié par l’apport de la paix au monde romain, la pax romana [4]. L’empereur cumule les pouvoirs. Il est nommé le Princeps, le premier citoyen à la tête de l’état. Mais également Imperator, le chef des armées et Augustus. Ce dernier titre étant religieux. Il dirige directement la moitié des provinces de l’empire. Les autres sont sous la responsabilité du Sénat. Si en théorie le sénat continue à jouer son rôle, en pratique les conseillers de l’empereur joue un rôle grandissant, ce qui diminue considérablement le pouvoir des anciennes institutions républicaines [1]. L’autorité impériale n’est pas héréditaire et la succession dépend du sénat. Dans les faits, il n’a que peu de pouvoir et se plie aux volontés de l’empereur. L’armée peut même avoir son mot à dire (nous le verrons plus loin avec Claude) [1]. Les transitions s’accompagnent souvent d’intrigues politiques. Ce fut le cas pour les règnes suivants avec Tibère, Caligula et Claude. L’empire perdura encore 400 ans pour la partie orientale. Il connut de nombreuses crises politiques et culturelles (notamment la montée du christianisme, les flux migratoires des peuples barbares…). Il sut toutefois s’adapter aux différentes situations. Il prit fin en 476 sous le règne d’un empereur au nom sibyllin, Romulus Augustulus [3].
Chronologie
Les dates précédées du sigle « – » ce situ avant notre ère, celle n’en comportant pas se situent durant notre ère.
Avant la naissance de Claude
❖ -900: Installation des Étrusques en Italie
❖ -753 le 21/04: Fondation légendaire de Rome et assassinat de Remus par Romulus
❖ -600: Naissance « historique » de la ville de Rome
❖ -509: Chute de Tarquin le Superbe, fin de la royauté et avènement de la république. (réellement fondée en -449)
❖ -63 le 23/10: Naissance d’Octave, le futur Auguste
❖ -49 le 12/01: César franchit le Rubicon, début de la guerre civile l’opposant à Pompée
❖ -31 le 02/09: Bataille d’Actium, Cléopatre VII et Marc Antoine sont vaincu par Octave.
❖ -27 le 16/01: Avènement d’Octave-Auguste, date de fondation de l’empire .
La vie de Claude avant son avènement
❖ -10 le 01/08: Naissance de Claude à Lugdunum (actuel Lyon)
❖ 8-12: Premier mariage de Claude avec Plautia Urgulanilla
❖ 14: Mort d’Auguste à l’âge de 76 ans et avénement de Tibère.
❖ 24: Seconde noce de Claude avec Aelina Paetina
❖ 37 le 16/ 03: Mort de Tibère et intronisation de Caligula, année de l’entrée de Claude au sénat, le 15/12: Naissance de Néron
❖ 38: Claude épouse Messaline, l’année suivant née Octavie leur premier enfant .
Le règne de Claude
❖ 41 le 24/01: Assasinat de Caligula, de sa femme et de sa fille. Claude, sous la pression de la garde prétorienne devint le 4e princeps de Rome
❖ 41 le 12/02: Naissance de Britannicus
❖ 41 à 54: Réalisation de divers chantiers urbains dans Rome
❖ 42: Annexion du royaume de Maurétanie
❖ 43 à 51: Conquête du sud de Britannia (actuelle Grande Bretagne)
❖ 46: Annexion du royaume de Thrace
❖ 48: Claude prononce un discours en faveur des premiers citoyens de Gaule (retranscrit sur la table claudienne)
❖ 49: Claude épouse Agrippine la jeune; le pomerium (enceinte sacré de la ville de rome) est agrandi
❖ 50: Adoption de Néron par Claude
❖ 52: Claude tombe gravement malade
❖ 54 le 13/10: Mort de Claude, avec l’aide de Sénéque et du prefet du prétoire Burrus, Néron est reconnu par le Sénat comme nouveau princeps. Claude est divinisé par le Sénat.
❖ 55 le 11/02: Mort de Britannicus .
Contexte médico-historique de la Rome antique
C’est au cours du IIe siècle avant notre ère que Rome connut véritablement les médecins, via la médecine grecque [8]. Il ne faut pas croire pour autant à un désintérêt total pour les soins du corps au sens large. En effet le souci du corps fut toujours un sujet important chez les romains. C’était pour eux une marque d’urbanisme et donc de civilisation [1]. La médecine romaine a su se développer allant jusqu’à en faire un savoir de référence pour les siècles à venir. Tout au long de ce chapitre nous allons nous pencher sur la condition de la pratique médicale de la Rome antique, afin de comprendre au mieux la prise en charge.
Une petite histoire de la médecine romaine
Durant les premiers siècles de l’histoire de Rome la tâche de prodiguer des soins revient au Pater familias [1]. Les méthodes utilisées sont ancestrales, mêlant sorcellerie et usage des simples. Les plantes sont très utilisées à des fins thérapeutique. A titre d’exemple la Laserpicium, de la famille des ombellifères, possède une vocation quasi-universelle. Elle agit au niveau de la digestion, aide à la cicatrisation, combat le venin de serpent…[1]. On s’adresse initialement aux dieux, secondairement aux guérisseurs puis en dernier recours à la médecine [9]. Les divinités sont très présentes. Le panthéon médical est composé d’Esculape (le penchant latin du dieu Asclépios), Hygie, Diana Therma (divinité des sources chaudes), Salus (La santé), Fébris (la fièvre), Mephitis…[1]. Un sanctuaire était présent sur l’île tibérine à Rome [10]. Les historiens estiment que les premières représentations d’une médecine « scientifique » apparaissent à Rome durant le IIe et le Ie siècle avJC [11]. Etat construisi au grec Archagotos de Sparte, une clinique sur le Forum dans laquelle il s’installa en 219 av-JC. Il fut rejeté des années plus tard du fait de ses pratiques, surnommé le boucher par la population. Il fut présenté comme chef de file des pneumatistes, école médicale liant la théorie des humeurs de l’école grecque des dogmatistes avec la théorie du pneuma des stoïciens. Ce dernier en pénétrant dans l’organisme par la respiration, devenait un souffle psychique dans le cœur. La santé de chaque organe dépendait donc de la tension de son pneuma .
|
Table des matières
Introduction
Partie I : Rome, son peuple, sa médecine
I- Une brève histoire de Rome
II- Chronologie et dates importantes
A- Avant la naissance de Claude
B- La vie de Claude avant son règne
C- Le règne de Claude
III- Contexte médico-historique
A- Une petite histoire de la médecine romaine
B- La profession de médecin dans la Rome antique
C- Pharmakon: de la médecine aux poisons
D- Rome, la ville et ses maladies
IV- L’alimentation
A- Les boissons
B- Les matières grasses
C- Les condiments
D- Les viandes
E- Légumes, fruits et céréales
F- Les champignons
G- Les repas
V- L’hygiène
Partie II : Claude, l’empereur inattendu
I- Biographie
A- La dynastie des Julio-Claudiens
B- Avant le principat
C- Du règne au trépas
II- Le portrait de l’homme
A- Physionomie
1- La littérature
2- La numismatique
3- La sculpture
4- Les camées
B- Les antécédents familiaux
1- Parenté au 1er degré
2- Parenté au 2eme degré
3- Parenté au 3eme degré
4- Parenté au 4eme degré
5- Parenté au 5eme degré et plus
6- Synthèse
C- L’empereur et les maladies, antécédents somatiques
1- Le tableau physique dressé par les différents auteurs
2- Un contexte de prématurité?
3- Épisodes infectieux durant l’enfance
4- Maladie d’ordre neurologique
5- Maladie d’ordre métabolique
6- Maladie d’ordre digestif
7- Autres événements pathologiques
8-Une maladie systémique?
D- Capacités intellectuelles
E- Le mode de vie
1- La vie au palais
2- Les plaisirs de la table
3- La consommation d’alcool
4- Le sommeil
5- La sexualité et la vie sentimentale
6- La passion des jeux
7- La littérature
III- Les différentes sources antiques
A- Auteurs contemporains de Claude
B- Auteurs du Ier et IIeme siècle
C- Auteurs postérieurs au IIeme siècle
IV- Analyse sémiologique de la mort
A- Tableaux décrits par les différents auteurs
1- Nature de la mort
2- Contexte du décès
3- Tableau sémiologique de la mort
4- Mis en cause
B- Une origine toxique?
1- Intoxication secondaire à l’ingestion de champignons supérieurs, macromycètes
2- Intoxication secondaire à l’ingestion de plantes
3- Intoxication secondaire à l’ingestion de minéraux
C- Étiologie somatique possible
1- Présence d’une fièvre avec troubles de la conscience secondaire à la prise d’alcool
2- Troubles de la conscience suite à une alcoolisation massive sans fièvre
3- Présence d’une fièvre avec troubles de la conscience non lié à une alcoolisation massive
4- Troubles de la conscience non liée à une alcoolisation massive et apyrexie
V- Les différentes formes médico-légales du décès
A- Mort naturelle
B- Mort accidentelle
C- Mort homicidaire
D- Mort par suicide
VI- Synthèse et ouverture
Partie III: Britannicus
I- Biographie
II- Le portrait de l’homme
A- Physionomie
1- La littérature
2- La numismatique
3- La sculpture
4- Les camées
B- Les antécédents familiaux
1- Parenté au 1er degré
2- Parenté au 2eme degré
3- Parenté au 3eme degré
4- Parenté au 4eme degré
5- Parenté au 5eme degré et plus
6- Synthèse
C- Les antécédents somatiques
1- Le tableau physique dressé par les différents auteurs
2- L’épilepsie dans les temps anciens
3- Un possible terrain atopique
4- Une maladie systémique?
D- Le mode de vie
1- La vie au palais
2- L’éducation
III- Les différentes sources antiques
A- Auteurs contemporains de Britannicus
B- Auteurs du Ier et IIeme siècle
IV- Analyse sémiologique de la mort
A- Tableaux décrits par les différents auteurs
1- Nature de la mort
2- Contexte du décès
3- Tableau sémiologique de la mort
4- Conséquences et funéraille
5- Mis en cause
B- Une origine toxique?
1- Poison à effet rapide
2- Le cas du cyanure
C- Étiologie somatique possible
1- La mort subite
2- Étiologies d’origine cardiaque
3- Étiologies d’origine vasculaire
4- Étiologies d’origine neurologique
5- Relation entre état de stress et mort subite
Conclusion