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Diversité des Polynoidae
Les Polynoidae sont une famille appartenant au sous-ordre des vers à élytres : les Aphroditiformia. Les limites et les relations entre familles de ce sous-ordre ne sont pas encore robustement définies et les changements récents de la classification sont importants. Les Aphroditiformia comptent environ 1 200 espèces réparties dans plus de 200 genres (Norlinder et al., 2012) et sont actuellement généralement divisés en 6 familles (Gonzalez et al., 2017a) : Acoetidae, Aphroditidae, Eulepethidae, Pholoidae, Polynoidae et Sigalionidae. La famille des vers Polynoidae ne possède pas de caractère synapomorphique clair et le placement d’une espèce dans cette famille n’est souvent basé que sur l’absence de certains caractères, caractéristiques des autres familles.
La famille de vers Polynoidae est la plus diversifiée au sein des Aphroditiformes : d’après WoRMS (Read et Fauchald, 2017), elle comporte environ 900 espèces réparties en 177 genres. Ils sont retrouvés dans tous les environnements marins : de la zone intertidale aux grandes profondeurs, depuis les eaux froides de l’Arctique ou de l’Antarctique jusque dans les zones tropicales (Guggolz et al., 2018), dans les environnements profonds et oligotrophes ou dans les milieux enrichis en matière organique comme les sources hydrothermales, les suintements froids, les bois coulés (Amon, 2013 ; Chevaldonné et al., 1998). La morphologie des animaux est très variable au sein de la famille (cf. figure II.2) : d’une quinzaine de segments à plus d’une centaine, pour des tailles allant de quelques millimètres à trente centimètres de long (Eulagisca gigantea). La plupart des espèces connues sont benthiques au moins à l’état adulte. Cependant, certaines espèces sont holopélagiques (vivent dans la colonne d’eau durant toute leur vie), comme les espèces de la sous-famille Admetellinae, ou encore les espèces des genres Natopolynoe, Drieschia et Podarmus ou l’espèce Bylgides sarsi (Jumars et al., 2015 ; Sarvala, 1971). Certaines espèces de Polynoidae vivent cachées sous des pierres, dans des anfractuosités ou des tubes, tandis que d’autres espèces peuvent rester enfouies dans le sédiment (Jumars et al., 2015). De nombreuses espèces vivent en symbiose obligatoire ou facultative (Martin et Britayev, 1998 ; Shields et al., 2013 ; Britayev et al., 2014 ; Serpetti et al., 2017). Par exemple, les espèces placées dans la sous-famille hydrothermale Branchipolynoinae vivent de manière commensale avec des espèces de moules Bathymodiolinae (Pettibone, 1984, 1986 ; Miura, 1991).
La famille des Polynoidae est subdivisée en sous-familles dont la validité est encore discutée. Leur nombre et leurs relations ne sont pas précisément connus et de nombreux remaniements ont été proposés ces 40 dernières années. Dans son livre sur les familles et genres de Polychètes, Fauchald (1977) ne reconnaissait que quatre sous-familles en se basant sur la structure de la région antérieure (nombre et position des antennes). Uschakov (1977) reconnait aussi ces quatre sous familles, mais utilise en plus d’autres caractères relatifs aux fourreaux antennaires et tentaculaires pour en créer une nouvelle (Admetellinae), le menant ainsi à reconnaitre cinq sous-familles. Muir (1982), lors d’une révision des caractères génériques des Polynoinae qu’il étend aux Aphroditiformes, propose douze sous-familles de Polynoidae, y compris une correspondant à la famille actuelle des Acoetidae (Polyodontinae dans l’article). Les caractères morphologiques inhabituels (e.g. : absence d’yeux, nombre de segments réduits et les papilles ventrales allongées, etc…) de certaines espèces des milieux profonds (vivant à des profondeurs de plus de 200 m) rendent difficile leur inclusion dans les sous-familles déjà existantes et ont donc mené certains auteurs à décrire de nouvelles sous-familles. Pettibone (1976) a créée notamment cinq nouvelles sous-familles (Macellicephaloidinae, Macelloidinae, Bathyedithinae, Polaruschakovinae et Bathymacellinae) pour placer les espèces profondes décrites plus tôt. De même, la découverte des sources hydrothermales a mis en évidence des Polynoidae morphologiquement originaux et a conduit à proposer cinq sous-familles pour accommoder la diversité morphologique rencontrée dans cet environnement (Branchinotogluminae, Branchipolynoinae, Branchiplicatinae, Lepidonotopodinae et Vampiropolynoinae). La dernière sous-famille en date, Uncopolynoinae Wehe, 2006, a été créée pour une seule espèce, elle-même imparfaitement connue. Au final, 20 sous-familles sont considérées actuellement (tableau II-1), beaucoup ne contenant parfois qu’une seule espèce ou un seul genre.
Les derniers changements dans la classification se fondent sur des phylogénies moléculaires et morphologiques (Norlinder et al., 2012 ; Gonzalez et al., 2017a). Ces auteurs proposent des remaniements parfois importants. En particulier, la sous-famille des Iphioninae pourrait être érigée au rang de famille. Cependant les auteurs de ces études soulignent qu’une révision taxonomique formelle incluant des données morphologiques et moléculaires sur un échantillonnage taxonomique couvrant mieux l’ensemble des sous-familles reste nécessaire. Dans notre étude, nous continuerons par conséquent à classer les Iphioninae au rang de sous-famille incluse dans les Polynoidae.
Parmi ces 20 sous-familles, certaines ont des répartitions très larges en terme de profondeur, tandis que d’autres vivent à des profondeurs plus restreintes. Cinq sont composées d’espèces rencontrées exclusivement en milieu littoral (Arctonoinae, Gesiellinae, Lepidastheniinae, Lepidonotinae, Uncopolynoinae) et quatre autres sont composées d’espèces littorales, bathyales (inférieur à 2 000m) et d’espèces abyssales (inférieur à 6 000 m) (Eulagiscinae, Iphioninae, Polynoinae et Macellicephalinae). Ces neuf sous-familles comprennent la grande majorité des espèces décrites à ce jour. Parmi les Macellicephalinae, 18 des 21 genres sont connus en milieu abyssal (plaine sédimentaire à des profondeurs généralement supérieures à 2 000 m), deux genres sont retrouvés à proximité des sources hydrothermales (Levensteiniella et Bathykurila) et un genre dans les grottes anchialines (Pelagomacellicephala). Les 11 sous-familles restantes sont exclusivement profondes (plus de 200 m de profondeur) et seulement une centaine d’espèces sont à ce jour connues. Initialement décrites comme restreintes aux sources hydrothermales, des espèces de Branchinotogluminae ont été récoltées sur d’autres milieux enrichis en matière organique (Pettibone, 1993) et des Branchipolynoinae ont été collectés au niveau de suintements froids (Pettibone, 1986). Trois sous-familles, Branchiplicatinae (une seule espèce), Vampiropolynoinae (une seule espèce) et Lepidonotopodinae (neuf espèces), n’ont à ce jour été récoltées que près des sources hydrothermales (Pettibone, 1985 ; Miura, 1994 ; Marcus et Hourdez, 2002 ; Sui et Li, 2017). En plus de ces sous-familles exclusivement associées aux environnements à base chimiosynthétique, certaines espèces décrites de ces environnements appartiennent à la sous-famille des Iphioninae qui comporte aussi des espèces de faible profondeur et d’environnements à base photosynthétique (Pettibone, 1986 ; Imajima, 2005).
Le but de notre étude est de déterminer si les espèces des sous-familles érigées pour accommoder les espèces hydrothermales, proposées sur la base de différences morphologiques, forment des groupes monophylétiques lorsque l’on considère uniquement des caractères moléculaires. L’objectif de ce travail est de replacer les taxons morphologiquement diversifiés et originaux découverts dans les sources hydrothermales au sein d’une phylogénie moléculaire incluant un échantillonnage d’espèces recouvrant la diversité taxonomique et écologique des Polynoidae. Cette approche nous permettra d’inférer l’histoire évolutive des taxons hydrothermaux.
Sélection des taxons pour l’étude
Critères géographique et environnemental : diversité des milieux échantillonnés
La majorité des spécimens utilisés dans cette étude provient de campagnes océanographiques qui couvrent des zones géographiques et des environnements variés (tableau II.2). Parmi elles : 16 campagnes ont été menées sur des environnements profonds chimiosynthétiques (suintements froids ou sources hydrothermales) ; 7 autres campagnes ont été menées à des profondeurs bathyales voire abyssales (au-delà de 2000 m de profondeur). Parmi celles-ci, plus de la moitié sont issues du programme Tropical Deep-Sea Benthos (TDSB), mené par le MNHN (Muséum National d’Histoire Naturelle) et l’IRD (Institut pour la Recherche et le Développement), et se déroulent principalement dans des habitats bathyaux variés de la zone tropicale Indo-Pacifique (Samadi et al., 2010 ; Pante et al., 2012). Ces campagnes ont pour but d’échantillonner la faune de milieux divers, difficiles d’accès et peu explorés pour en documenter la biodiversité. L’échantillonnage des milieux profonds a été complété par des espèces provenant d’environnements moins profonds (côtier à bathyal supérieur). Des échantillons de trois campagnes menées en Antarctique en milieux côtier à bathyal supérieur (entre 1 m et 300 m de fond) ont été inclus. D’autre part, certaines espèces ont été récoltées sur le littoral tempéré en Europe et aux Etats Unis. Les trois espèces d’Arctonoe (A. fragilis, A. pulchra, et A. vittata) ont été récoltées près de Friday Harbor Marine Lab (Etat de Washington, USA) et nous ont été fournies par Bruno Pernet (Washington State University, USA) qui les a identifiées morphologiquement. Laetmonice hystrix, Acholoe astericola, Alentia gelatinosa, Harmothoe clavigera, Lepidonotus clava, Malmgrenia ljungmanni, Malmgrenia sp., Pettibonesia furcosetosa et Subadyte pellucida ont été récoltées sur les côtes du Finistère (Roscoff ou Brest). Les échantillons des campagnes TDSB et des campagnes Antarctiques KREVET 2013 et ANT-XXIX-3 et REVOLTA ont été récoltés soit par dragage (drague Warén), soit avec un chalut à perche. Les échantillons de la campagne POLARIS 2016 (Terre Adélie), ainsi que certains de Walter’s Shoal ont été récoltés en plongée. L’ensemble des échantillons réunis ont été fixés juste après la récolte dans de l’éthanol à 85%.
Identification et sélection des spécimens récoltés
Stéphane Hourdez a divisé en morpho-espèces les spécimens récoltés lors des campagnes listées dans le tableau II.2 et attribués à la famille des Polynoidae. A l’aide des clefs de détermination morphologique disponibles, il a ensuite identifié ces morpho-espèces au plus bas rang taxonomique possible. Toutes les morpho-espèces présentes sur des sites hydrothermaux sont incluses dans l’analyse phylogénétique. Pour les autres environnements, la sélection des spécimens visait à obtenir les plus grandes couvertures taxonomique et écologique possibles. L’objectif a donc été d’inclure le plus grand nombre de sous-familles et de genres, tout en évitant de biaiser la représentation des genres les plus diversifiés (ou les mieux échantillonnés). La sélection a donc été faite en limitant la redondance pour les morpho-espèces les plus représentées. Dans le cas de la sous-famille des Polynoinae, la diversité spécifique est particulièrement importante et les phylogénies publiées à ce jour (Gonzalez et al., 2017a ; Zhang et al., 2018) suggèrent de la polyphylie* parmi les genres. Pour les espèces de Polynoinae profondes, une attention particulière a été portée afin d’identifier plus précisément leur habitat et notamment les associations avec d’autres organismes (gorgone, éponges, etc….) ou le substrat (notamment bois coulés). Pour l’ensemble des morpho-espèces ainsi
sélectionnées, jusqu’à trois spécimens ont été utilisés pour en extraire l’ADN afin de confirmer par un critère génétique la délimitation morphologique initiale.
Obtention et sélection des séquences moléculaire
Extraction de l’ADN et amplification des marqueurs
Les extractions des ADN totaux ont été effectuées en utilisant le protocole CTAB (CetylTrimethylAmmonium Bromide) avec un ajout de PVPP (PolyVinylPolyPyrrolidone) (Doyle et Dolye, 1987). Le CTAB est un détergent qui facilite la séparation des polysaccharides qui peuvent être retrouvés dans le mucus des annélides. L’ajout de PVPP permet d’éliminer les polyphénols, potentiellement inhibiteurs de PCR (Koonjul et al., 1999).
Les amplifications PCR ont été effectuées dans un volume final de 25 µL et contiennent une concentration finale de tampon de réaction de 1X, 2 mM de MgCl2, 0,2 µM d’amorces, 0,05 mM de dNTPs et 0,5 unités de polymérase d’ADN (UptiTherm, Interchim). Les cycles d’amplification consistent en une étape de dénaturation initiale de 3 minutes à 94°C, suivie par 35 cycles de dénaturation à 94 °C, hybridation et extension à 72°C puis terminent avec 5 minutes d’élongation finale à 72°C. Les températures d’hybridation et les cycles d’amplification pour les différents fragments amplifiéscsont indiqués dans le tableau II.3. L’amplification du marqueur COI n’étant pas toujours facile, un deuxième profile de cycle de PCR a été utilisé, qui comprend cinq cycles préliminaires avec une température d’hybridation des amorces plus basse (47°C).
Après amplification, les produits ont été visualisés sur un gel agarose à 1,5% par fluorescence sous éclairage UV. Le séquençage dans les deux directions des produits positifs par la méthode Sanger a été fait par la compagnie EUROFINS. Les données de séquençage ont été visualisées et les séquences des amorces ont été éliminées manuellement avec le logiciel Codon-Code Aligner v.7.0.1.
Plusieurs séquences de Polynoidae (sous-famille des Macellicephalinae et Polaruschakovinae) proviennent d’articles en cours de publication ont été obtenues par le biais d’une collaboration avec Paulo Bonifacio et Lenaïck Menot (Laboratoire Environnement Profond, Ifremer Brest), qui étudient la biodiversité des Polynoidae associés aux nodules polymétalliques dans le Pacifique Oriental.
Gènes sélectionnés
Les marqueurs COI et 16S permettent de résoudre les relations récentes (entre espèces d’un même genre ou entre des genres proches). Pour inférer les relations phylogénétiques plus profondes, il est généralement nécessaire d’utiliser plus de marqueurs afin d’améliorer le signal phylogénétique et de cibler des marqueurs plus conservés pour éviter la saturation du signal. De plus, concaténer plusieurs marqueurs indépendants, provenant à la fois des génomes mitochondriaux et nucléaires (ou éloignés dans le génome nucléaire) permet de plus fidèlement reconstruire la phylogénie des espèces et non seulement la phylogénie des gènes. Les marqueurs moléculaires choisis pour replacer les espèces hydrothermales de Polynoidae par rapport aux autres membres de la famille correspondent aux fragments pour lesquels des amorces universelles (qui peuvent s’hybrider sur un grand nombre de taxons) sont disponibles. De plus, nous avons ciblé les marqueurs déjà utilisés dans les études antérieures pour pouvoir bénéficier des données déjà acquises et disponibles sur les bases de données. En plus des fragments des gènes mitochondriaux COI et 16S, nous avons donc utilisé deux marqueurs nucléaires : un fragment du gène codant pour la sous-unité ribosomale 18S et deux fragments du gène codant pour la sous-unité ribosomale 28S (28SD1 et 28SD9-10).
Séquences provenant des bases de données et réduction du jeu de données
Afin de couvrir la plus grande diversité taxonomique possible, parmi les séquences de Polynoidae disponibles sur NCBI en août 2017, celles correspondant à des spécimens pour lesquels au moins deux des marqueurs sélectionnés étaient disponibles ont été téléchargées. Pour vérifier cette condition nous avons en priorité sélectionné des spécimens ayant un numéro de voucher*, qui peuvent donc être considérés comme des hologénophores (tous les gènes séquencés proviennent du même spécimen ; Pleijel et al., 2008), ou à défaut des spécimens identifiés par un numéro d’isolat.
Pour l’ensemble des spécimens sélectionnés dans l’échantillonnage des campagnes océanographiques, l’ensemble des gènes a été amplifié. Dans un premier temps, toutes les séquences acquises (téléchargées et produites) ont été vérifiées gène à gène afin de détecter les éventuelles contaminations. Pour ce faire, les alignements ont été effectués en utilisant l’algorithme MUSCLE (Edgar, 2004) avant d’être ajustés à la main, en particulier pour les jeux de données avec d’importantes insertions/délétions comme les gènes d’ARN ribosomaux (16S, 18S, 28S). Puis, chaque gène a été analysé en construisant des arbres rapides grâce au logiciel MEGA v.5.05 (Tamura et al., 2011) par la méthode de Neighbor-Joining sur des distances Kimura-2-paramètres (K2P). Lorsque des séquences sont identiques pour un marqueur alors qu’elles proviennent de spécimens attribués morphologiquement à des taxons distincts et pour lesquels des séquences différentes ont bien été obtenues pour les autres marqueurs, ces séquences sont considérées comme contaminées. Dans ce cas, les séquences pour ce marqueur ont été supprimées du jeu de données et/ou re-séquencées lorsque cela était possible.
Dans un second temps, comme il n’est pas nécessaire de conserver plusieurs spécimens appartenant à la même espèce pour reconstruire la phylogénie des Polynoidae, un seul spécimen par espèce, ou morpho-espèce, a été sélectionné parmi l’ensemble des données réunies (téléchargées et séquencées). Depuis 2003, le séquençage d’une partie du marqueur COI (ou COX1) comme «code barre» du vivant (Hebert et al., 2003) s’est beaucoup développé (Ravara et al., 2017). La séquence proposée comme « code barre » du vivant correspond aux 658 paires de bases (pb) situées à l’extrémité 5’ du gène codant pour la Cytochrome Oxydase I (COI), amplifiée par le couple d’amorces issu de Folmer et al. (1994). Les spécimens ayant à la fois moins de 3% de divergence nucléotidique pour le marqueur COI (taxonomie moléculaire) et une identification morphologique identique sont considérés comme des spécimens de la même espèce. Pour certaines espèces, les séquences de COI sont particulièrement difficiles à amplifier et le jeu de données du gène 16S est le plus complet. De plus, bien que ce gène évolue moins rapidement que le COI (Chevaldonné et al., 1998), il fournit un signal permettant de résoudre les relations phylogénétiques récentes (entre les espèces d’un même genre). Il a donc également été utilisé pour identifier moléculairement les spécimens appartenant à une même espèce. Les spécimens ayant à la fois moins de 1% de divergence nucléotidique pour le marqueur 16S et une identification morphologique identique sont considérés comme des spécimens de la même espèce. Les spécimens ayant ces deux marqueurs doivent avoir des distances inférieures aux seuils à la fois en COI et en 16S pour être considérés de la même espèce. Dans ce cas, le spécimen pour lequel le plus grand nombre de marqueurs séquencés a pu être obtenu a été conservé dans la matrice finale. Les séquences associées à des vouchers ont été, autant que possible, retenues.
Analyses phylogénétiques
Echantillonnage taxonomique final et concaténation des marqueurs phylogénétiques :
Chaque gène a ensuite de nouveau été analysé en construisant des arbres rapides (NJ sur des distances K2P) afin de vérifier la congruence des topologies construites entre les différents marqueurs. En cas d’absence d’incongruence soutenue entre les marqueurs, l’analyse phylogénétique se fait en concaténant les alignements de tous les marqueurs phylogénétiques, afin d’obtenir une super-matrice. Pour l’analyse concaténée, nous avons gardé uniquement les spécimens vérifiant une des conditions suivantes :
– Au moins trois marqueurs ont été séquencés
– Si seulement deux marqueurs étaient disponibles, au moins un des deux était le COI ou le 16S qui ont servi à l’identification moléculaire
Reconstructions phylogénétiques
Les analyses phylogénétiques des séquences nucléiques ont été effectuées à la fois en utilisant les méthodes du Maximum de vraisemblance (ML) à l’aide du logiciel RAxML version 8.2.9 (Stamatakis et al., 2014) et de l’Inférence Bayésienne (IB) avec MrBayes v3.2.6 (Ronquist et al., 2012). Le modèle d’évolution GTR + Γ + I a été utilisé pour chaque partition et pour chaque position de codon (pour le COI) dans les deux analyses. Le modèle GTR (Generalised Time-Reversible) (Tavaré, 1986) est le modèle de substitution le plus neutre. Il implique que la fréquence de chacune des quatre bases A, T, C et G soit indépendante des autres et que les taux de substitution entre chaque paire de nucléotides soient différents. Ce modèle nécessite donc quatre paramètres de fréquences des bases et six taux de substitutions différents. Ce modèle est combiné à une distribution des taux de mutation des sites qui suit une loi gamma (Γ) (fixée à quatre catégories) et une proportion de sites invariables (I). Pour l’analyse ML, la robustesse des nœuds est estimée par la méthode du bootstrap avec 1 000 itérations. L’arbre est visualisé à l’aide du logiciel FigTree v1.4.3 (Rambaut et Drummond, 2012). L’analyse bayésienne a été effectuée sur le portail en ligne CIPRES (Miller et al., 2010).
L’exploration de l’espace bayésien a été effectué avec deux ensembles de chaînes de Markov Monte Carlo (MCMC) à partir de points de départ différents, sur 15 106 générations, avec une fréquence d’échantillonnage des arbres tous les 1 000 pas. La stabilité de chaque paramètre a été contrôlée à l’aide du logiciel Tracer 1.6 (Rambaut et Drummond, 2007), en vérifiant les valeurs d’« Estimate Sample Size » (ESS). L’ESS estime la quantité d’échantillons indépendants qui ont la valeur indiquée pour ce paramètre. Nous considérons la stabilité du paramètre quand ESS est supérieur à 200. La convergence des analyses a été vérifiée avec les valeurs de PSRF (Potential Scale Reduction Factor, proches de 1 si les analyses ont convergé). L’arbre consensus a été reconstruit en éliminant les premières 25% de générations échantillonnées comme un ‘burn-in’, et est là aussi visualisé à l’aide du logiciel FigTree v.1.4.3. Nous retiendrons comme significativement soutenus les nœuds présentant des valeurs d’au moins 80% de bootstrap et 0,95 de probabilité postérieure (pp).
Echantillonnage final
Les taux de réussite des amplifications par PCR n’ont pas été les mêmes pour les cinq fragments pour l’ensemble des taxons. En tout, l’ADN de 240 spécimens a été extrait, dont 27 pour lesquels l’extraction n’a finalement permis d’amplifier aucun gène. Onze spécimens appartiennent aux familles utilisées comme groupes externes (Acoetidae, Aphroditidae et Sigalionidae). A partir des 202 autres spécimens extraits, nous avons obtenu 147 séquences de 16S, 139 séquences de 18S, 98 séquences de COI, 130 séquences de 28SD1, et 107 séquences de 28SD9-10 (dont 98 spécimens ayant les 2 fragments de 28S). Pour 38 spécimens (19% des 202 spécimens de Polynoidae extraits), ni le fragment de COI ni le fragment de 16S n’ont pu être amplifiés, aussi ces spécimens n’ont pas été gardés pour les analyses. Seuls 49 spécimens (24%) ont pu être séquencés pour les 5 fragments ciblés. Les séquences de 982 Polynoidae ont été récupérées sur la base de données NCBI. Parmi ces derniers, 717 (73%) n’ont qu’une séquence de COI et 70 (7%) n’ont ni de séquence pour le fragment COI ni pour le fragment de 16S et n’ont donc pas été gardés pour les analyses. Après réduction du jeu de données, l’échantillonnage final comporte 87 nouveaux spécimens de Polynoidae provenant de notre étude et 92 spécimens provenant de NCBI ou des données fournies par Bonifacio et Menot. Parmi ces 179 spécimens, 5 sont attribués à des espèces avec les mentions affinis ou confere et 49 ne sont pas attribués à une espèce nominale (parmi eux, 13 ne sont attribués à aucun genre). Les 125 spécimens restant sont attribués à 96 espèces nominales et 59 genres nominaux différents (voir Annexe 1). Nos données de séquençage ont permis d’apporter 21 genres (dont 17 nommés) et 70 espèces (dont 42 avec un nom d’espèce) qui n’étaient pas présents dans la base de données de NCBI. Le jeu de données réuni dans notre étude couvre 13 des 20 sous-familles de Polynoidae (voir tableau II.4). Parmi les sept sous-familles manquantes se trouvent notamment les sous-familles abyssales Bathyedithinae, Bathymacellinae et Macelloidinae, la sous-famille abysso-hadale Macellicephaloidinae et la sous-famille monospécifique hydrothermale Vampiropolynoinae. Le tableau II.4 montre la répartition taxonomique parmi les sous-familles de Polynoidae couvertes par notre échantillonnage. Pour certaines sous-familles, le nombre d’espèces est plus grand que le nombre répertorié dans WoRMS, ce qui reflète la présence d’espèces potentiellement nouvelles dans nos données, dont certaines sont en cours de description (notamment dans les sous-familles Branchinotogluminae et Branchipolynoinae, com. pers. Stéphane Hourdez et dans la sous-famille Eulagiscinae, com. pers. Paulo Bonifacio et Stéphane Hourdez). Le tableau II.4 montre que la plupart des genres et des espèces provenant des milieux peu profonds sub-littoraux ont principalement été apportés par le jeu de données tiré de NCBI. Ceci est cohérent avec le fait que les milieux côtiers, plus accessibles que les milieux profonds, aient en général été plus échantillonnés dans les autres études que la nôtre, pour laquelle nous avons échantillonné principalement des milieux profonds, difficiles d’accès.
Les sous-familles Polynoinae et Macellicephalinae sont très représentées dans NCBI et sont les deux seules sous-familles avec des espèces profondes pour lesquelles l’apport de NCBI est plus important que celui de nos données de séquençage. Dans le cas des Macellicephalinae, ceci s’explique par l’apport de données moléculaires d’une étude focalisée sur les Macellicephalinae retrouvés sur les nodules profonds (Bonifacio et Menot, in press). Les données de NCBI nous permettent d’augmenter le nombre de sous-familles présentes dans notre phylogénie en apportant des séquences pour la sous-famille profonde Polaruschakovinae et les sous-familles sub-littorales Gesiellinae et Lepidastheniinae. Dans l’ensemble dans notre étude, les sous-familles profondes ont une meilleure couverture taxonomique que les sous-familles peu profondes, en grande partie car la très grande majorité des espèces décrites sont peu profondes et que la diversité profonde est certainement sous-estimée. Parmi les 13 sous-familles qui ne sont pas monogénériques, 8 sont représentées par au moins 2 genres dans notre phylogénie, permettant ainsi de tester leur monophylie. Parmi les sous-familles monogénériques, seule Branchipolynoinae n’est pas monospécifique et est représentée par plusieurs espèces (ici cinq), permettant également de tester la monophylie de celle-ci.
Notre échantillonnage a permis d’obtenir une très bonne couverture dans les sous-familles des milieux chimiosynthétiques : 83% des genres et 80% des espèces décrites sont présents dans notre jeu de données. Plus de deux espèces par genre de Branchinotogluminae et Branchipolynoinae sont présentes dans notre étude, permettant de tester la monophylie de ces deux sous-familles et des genres qui les composent. Pour la sous-famille Lepidonotopodinae, notre étude couvre les deux genres et six des neuf espèces décrites, permettant de vérifier la monophylie de la sous-famille et du genre Lepidonotopodium, qui n’est pas monospécifique. Dans le cas de la sous-famille Iphioninae, notre échantillonnage permet de couvrir trois genres sur quatre et environ la moitié des espèces placées dans cette sous-famille. Nous apportons de nouvelles espèces hydrothermales mais aussi de bois coulés et de milieu profond non chimiosynthétique. Cependant, pour pouvoir établir des hypothèses sur la colonisation du milieu hydrothermal, il est important d’échantillonner également les espèces provenant d’autres milieux.
Si le signal phylogénétique des marqueurs est suffisant, l’échantillonnage taxonomique réuni dans cette étude permet donc :
– de tester la monophylie de 9 sous-familles parmi les 13 présentes dans notre étude
– d’estimer le nombre de lignées ayant colonisé le milieu profond
– d’estimer le nombre de lignées ayant colonisé le milieu hydrothermal et de déterminer leur(s) groupe(s) frère(s)
Analyses phylogénétiques
Détails du jeu de données
Le jeu de données concaténé des marqueurs 16S, COI, 18S, 28SD1 et 28SD9-10 a une longueur de 2824 pb dont 1583 positions sont conservées et 867 sont variables et informatives en parcimonie. L’alignement contient environ 33% de données manquantes. Les topologies obtenues en ML et en IB sont similaires (figure II.6) et les marqueurs utilisés permettent de résoudre les relations à différentes profondeurs phylogénétiques. Dans l’ensemble, la topologie de l’arbre est cohérente avec celles obtenues par Norlinder et al. (2012), Gonzalez et al. (2017a) et Zhang et al. (2018) sur des échantillonnages taxonomiques plus réduits.
Relations phylogénétiques profondes et limites des sous-familles
Parmi les Polynoidae de notre phylogénie, cinq grands clades sont soutenus dans les deux analyses (au moins 80% de bootstrap et 0,95 de probabilité postérieure (pp)) qui correspondent à différents rangs taxonomiques.
Le clade 1 (soutiens de 90% en ML et 1 pp en IB) est composé de trois spécimens attribués au genre Alentia et appartenant à deux morpho-espèces différentes. Ce genre est morphologiquement placé dans les Lepidonotinae, dont les autres représentants ne sont pas positionnés de façon soutenue dans cet arbre (respectivement 24% et 0,61 pp). Le genre type de cette sous-famille (Lepidonotus) n’étant pas monophylétique dans notre arbre, ce clade n’apporte pas d’information suffisante pour réviser la définition de la sous-famille Lepidonotinae. Le clade 2 (93%, 1 pp) regroupe les espèces des sous-familles Branchipolynoinae et Branchinotogluminae. Au sein de ce clade, les espèces du genre Branchipolynoe (seul genre attribué à la sous-famille Branchipolynoinae) forment un groupe monophylétique soutenu avec les deux spécimens attribués à Branchinotogluma marianus (87% et 1 pp). Les autres spécimens regroupés dans le clade 2 sont attribués aux genres Branchinotogluma et Peinaleopolynoe (morphologiquement placés dans les Branchinotogluminae). Au sein du clade 2, les deux sous-familles (Branchipolynoinae et Branchinotogluminae) ne forment donc pas deux clades réciproquement monophylétiques. La paraphylie de ces sous-familles avait déjà été suggérée à partir d’un jeu de données incluant un nombre moins important d’espèces (Zhang et al., 2018). Les auteurs de cette étude suggéraient que ces deux sous-familles sont synonymes, ce que nos résultats confirment. Afin de respecter le principe de priorité, il faudrait conserver le nom de Branchipolynoinae Pettibone, 1984. Le clade 3 (92%, 0,98 pp) contient les représentants des deux genres de notre jeu de données attribués à la sous-famille des Lepidonotopodinae (Lepidonotopodium et Thermopolynoe), les spécimens de 2 des 16 genres de Macellicephalinae de notre jeu de données (Levensteiniella et Bathykurila) et un spécimen récupéré dans NCBI qui n’a pu être attribué à aucun genre ni sous-famille. La sous-famille Lepidonotopodinae est donc monophylétique, à la condition de lui inclure le genre Levensteiniella et l’espèce Bathykurila guaymasensis. Nous proposons donc de redéfinir les Lepidonotopodinae en y incluant ce genre et cette espèce. Le clade 4 (84%, 1 pp) correspond à tous les autres genres de Macellicephalinae présents dans notre étude, ainsi que deux espèces du genre Polaruschakov et l’espèce Gesiella jameensis, morphologiquement placés respectivement dans les Polaruschakovinae et les Gesiellinae. Ce clade contient également deux espèces du genre Hodor, non attribué dans une sous-famille. Les espèces de la sous-famille Macellicephalinae à l’exclusion Levensteiniella et Bathykurila, forment avec les genres Hodor, Polaruschakov et l’espèce Gesiella jameensis un groupe monophylétique. Ce clade, qui inclut des spécimens attribués au genre type de la sous-famille (Macellicephala McIntosh, 1885), sera donc considéré comme définissant les Macellicephalinae. Enfin, le clade 5 (100% et 1 pp) correspond à tous les spécimens attribués à la sous-famille des Iphioninae.
En dehors de ces quatre sous-familles ainsi validées ou redéfinies (Branchipolynoinae, Macellicephalinae, Lepidonotopodinae, Iphioninae), l’arbre obtenu n’apporte aucune information au rang sous-familial. La vaste sous-famille des Polynoinae n’est notamment pas réunie dans un clade soutenu. Ceci s’explique potentiellement par le sous-échantillonnage particulièrement marqué dans cette sous-famille très diversifiée (438 espèces d’après WoRMS). Aussi, augmenter la couverture taxonomique dans ce groupe permettre potentielement d’améliorer le soutien de ce nœud.
Relations phylogénétiques récentes et limites des genres
Parmi les quatre sous-familles bien définies, les nœuds récents sont généralement bien soutenus, nous permettant d’évaluer la validité de la définition des genres représentés par plusieurs espèces. Dans les Iphioninae, le genre Iphionella (représenté par trois espèces différentes) est monophylétique. Le genre Thermiphione est représenté par deux spécimens, dont l’un n’est pas identifié au niveau de l’espèce et provient de l’étude de Norlinder et al. (2012). La proximité génétique observée dans l’arbre, couplée au fait que ce dernier spécimen ait été récolté dans le bassin de Lau, tout comme T. fijensis, laisse penser que ces deux spécimens pourraient correspondre à l’espèce T. fijensis. Le genre Iphione forme un groupe monophylétique mais n’est soutenu que dans l’analyse bayésienne. Les spécimens attribués à ce genre n’ont, à l’exception près du spécimen MNHN-IA-2013-154 Iphione treadwelli, pas été assignés à des espèces connues. La distance génétique suggère cependant que les différents spécimens inclus dans l’analyse représentent bien des espèces différentes ce qui confirme donc la définition de ce genre. Dans les Macellicephalinae, le genre type (Macellicephala) est représenté par cinq espèces qui forment un groupe monophylétique soutenu à la condition de lui inclure l’espèce Arya acus. Le genre Bathypolaria, représenté par trois spécimens attribués à deux espèces, forme un groupe monophylétique soutenu (soutiens maximaux dans les deux analyses) avec l’espèce Austropolaria magnicirrata. Les genres Bathyfauvelia, Hodor, Polaruschakov et Yodanoe sont représentés chacun respectivement par deux espèces qui forment des clades soutenus, confirmant ainsi la monophylie de chacun de ces genres. Enfin, le genre Pelagomacellicephala est représenté par six spécimens, tous attribués à l’espèce P. iliffei. L’ensemble de ces spécimens sont très divergents en 16S et COI (distances nucléotidiques de 0,17 en 16S et 0,19 en COI au maximum entre les spécimens ZMUC_POL_2392 et ZMUC_POL_2396) et sur cette base, semblent devoir être attribués à des espèces différentes. Si cette hypothèse est retenue, la monophylie du genre Pelagomacellicephala est confirmée.
Dans les Lepidonotopodinae, les espèces du genre Bathykurila groupent de façon soutenue avec un spécimen non attribué à un genre. En revanche, Lepidonotopodium fimbriatum, espèce type du genre Lepidonotopodium, a pour espèce sœur Levensteiniella plicata. Ces deux espèces forment un clade soutenu avec l’espèce Thermopolynoe branchiata, seule espèce décrite du genre Thermopolynoe. Levensteiniella kincaidi, espèce type du genre Levensteiniella a pour espèce sœur Levensteiniella iris mais les relations avec les autres espèces de Levensteiniella ne sont pas résolues. Ce résultat suggère la synonymie de Thermopolynoe Miura 1994 et Lepidonotopodium Pettibone 1983 et la nécessité de redéfinir le contour des genres dans ce clade. Afin de respecter le principe de priorité, il faudrait conserver le nom de Lepidonotopodium.
Dans le clade 2, le genre Branchipolynoe, unique genre des Branchipolynoinae, est représenté par six espèces qui forment un clade soutenu. Les relations dans le genre Branchinotogluma (représenté par 13 espèces) ne sont pas toutes résolues, mais les espèces B. marianus et B. segonzaci se positionnent en paraphylie des Branchipolynoe avec de forts soutiens (90% et 1 pp). L’espèce type de Branchipolynoe, B. symmitilida Pettibone 1984 est placée dans notre arbre phylogénétique parmi les autres espèces de ce genre. L’espèce type de Branchinotogluma, B. hessleri Pettibone 1985, n’est pas positionnée avec confiance dans l’arbre, mais ne se situe pas dans le clade avec les Branchipolynoe. En se basant sur ces données phylogénétiques, l’espèce Branchinotogluma marianus pourrait être attribuée au genre Branchipolynoe. Parmi les Branchinotogluminae, les deux espèces de Peinaleopolynoe présents dans notre étude forment un clade soutenu, confirmant la monophylie de ce genre.
Le clade 1 est formé uniquement de deux espèces du genre Alentia, monophylétique dans notre analyse. Ce genre est morphologiquement placé parmi les Lepidonotinae, dont le reste des espèces forme un clade peu soutenu (24% et 0,61 pp).
Le genre Arctonoe, représenté par cinq spécimens et seulement trois espèces nominales, forme un groupe peu soutenu (9 %, 0,76 pp). Dans ce genre, ni les spécimens attribués à A. fragilis ni ceux attribués à A. pulchra ne forment de clade monospécifique. Les spécimens Arctonoe fragilis, Arctonoe vittata et Arctonoe pulchra ont été identifiés par Bruno Pernet, tandis que les spécimens BIOUG<CAN>:BAMPOL0484 Arctonoe pulchra et BAMPOL0389 Arctonoe fragilis proviennent de la même étude (Carr et al., 2011) et ont donc certainement été identifiés par la même personne, ne nous permettant pas de savoir si ces différences de placement dans l’arbre sont dues à des problèmes d’identifications ou des problèmes de délimitations entre ces espèces.
Parmi les genres attribués aux Polynoinae, seuls Bylgides et Gorgoniapolynoe, représentés chacun par au moins deux espèces, forment des groupes monophylétiques soutenus. Pour le genre Harmothoe, représenté par 22 spécimens attribués à 11 espèces nominales différentes et 4 espèces différentes non identifiées à l’espèce, les spécimens ne forment pas un clade distinct mais se répartissent dans ce groupe des Polynoinae. Quatre espèces sont représentées par plusieurs individus : H. fuligineum (3 spécimens), H. imbricata (3 spécimens), H. oculinarum (2 spécimens) et H. rarispina (3 spécimens). Pour aucune de ces espèces nominales l’ensemble des spécimens ne forme de groupe monophylétique. Pour chacune des trois espèces nominales H. fuligineum, H. imbricata et H. rarispina, deux des trois individus séquencés groupent ensemble, mais le troisième est ailleurs dans l’arbre. De plus, les deux spécimens qui forment des clades proviennent soit de la même étude (H. imbricata Carr et al., 2011 ; H. rarispina : Carr et al., 2010) soit de deux études pour lesquelles les noms d’espèces ont été attribués par un même groupe d’identificateurs (H. fuligineum : Neal et al., 2014 et Brasier et al., 2016), tandis que le troisième spécimen provient d’une autre étude (H. fuligineum : nos données de séquençage, identification par S. Hourdez ; H. imbricata : Rousset et al., 2007 ; H. rarispina Gonzalez et al., 2017b). Là encore, il n’est pas possible de savoir si ces différences sont dues à des problèmes d’identification des spécimens ou à un défaut dans la délimitation des espèces. Ce résultat, ajouté à la dispersion dans l’arbre des spécimens attribués au genre Harmothoe, montre que les contours de ce genre sont mal définis et que les caractères morphologiques utilisés pour le définir résultent possiblement de convergences évolutives.
Parmi les genres attribués aux Polynoinae, un clade intéressant est retrouvé de manière soutenu, et ne comporte que des spécimens récoltés en Antarctique (soutiens maximaux dans les deux analyses). Ce clade comporte des spécimens attribués à différents genres tels qu’Eunoe, Gorekia et Harmothoe. Ce clade semble refléter une radiation géographique plus qu’une radiation écologique. La présence de trois autres spécimens attribués au genre Eunoe ailleurs dans l’arbre, couplé à la proximité génétique entre certains spécimens d’Eunoe et d’Harmothoe suggère que le genre Eunoe est polyphylétique. Les différences morphologiques des espèces antarctiques, qui ont conduit à les positionner dans des genres présents dans d’autres environnements pourraient résulter de convergence morphologiques au cours de cette radiation antarctique.
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Table des matières
I. Introduction générale de la thèse
I.1 Contexte général
I.1.1 Une histoire de reconsidérations taxonomiques : les vers de la famille Siboglinidae
I.1.2 Etude de la colonisation des sources hydrothermales : les moules de la sous-famille Bathymodiolinae
I.2 Stratégies d’étude de la thèse
II. La phylogénie par une approche multigène : le cas des vers de la famille Polynoidae
II.1 Introduction
II.1.1 Les Polynoidae dans la faune des sources hydrothermales
II.1.2 Diversité des Polynoidae
II.1.3 Etat des connaissances de la phylogénie des Polynoidae
II.1.4 But de l’étude
II.2 Matériel et méthodes
II.2.1 Sélection des taxons pour l’étude
II.2.2 Obtention et sélection des séquences moléculaire
II.2.3 Analyses phylogénétiques
II.3 Résultats – Discussion
II.3.1 Echantillonnage final
II.3.2 Analyses phylogénétiques
II.4 Conclusions et perspectives
III. Une approche NGS : le cas des crabes de la famille Bythograeidae
III.1 Introduction
III.2 Matériel et méthodes
III.2.1 Echantillons biologiques et extraction d’ADN
III.2.2 Séquençage du génome mitochondrial en PCR longues
III.2.3 Préparation des banques pour le séquençage shotgun
III.2.4 Cartographie des reads obtenus en shotgun
III.2.5 Analyses phylogénétiques
III.3 Résultats – Discussion
III.4 Conclusion et perspectives
IV. Une approche NGS : le cas des crevettes de la famille Alvinocarididae
IV.1 Introduction
IV.1.1 Systématique des Alvinocarididae
IV.1.2 Position des Alvinocarididae au sein des Caridea
IV.1.3 Objectif de notre étude
IV.2 Matériel et méthodes
IV.2.1 Echantillonnage
IV.2.2 Méthodes
IV.2.3 Recherche et sélection de marqueurs phylogénétiques
IV.2.4 Orthologie des marqueurs sélectionnés
IV.2.5 Analyses phylogénétiques
IV.3 Résultats – Discussion
IV.3.1 Echantillonnage
IV.3.2 Assemblages des transcriptomes
IV.3.3 Recherche et caractéristiques des 425 marqueurs recherchés
IV.3.4 Evaluation de l’intérêt des marqueurs sélectionnés pour des études phylogénétiques
IV.3.5 Analyses phylogénétiques
IV.4 Conclusions et perspectives
V. Conclusions et perspectives générales de la thèse
VI. Bibliographie
VII. Annexes
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