Une approche bayésienne de l’inversion

Dans notre vie quotidienne, l’interaction entre les ondes en général et le monde physique fournit une grande quantité d’informations sur les objets qui nous entourent. Des exemples illustrant ces propos sont : la réflexion de la lumière qui nous permet de voir notre entourage, la propagation du son dans l’espace qui nous permet de localiser une source sonore, la radiographie X et l’échographie ultrasonore qui nous permettent d’inspecter l’intérieur du corps humain. L’étude de la physique de cette interaction a suscité beaucoup d’intérêt et ceci afin de mieux comprendre les informations contenues dans ces ondes. Un mode particulier de cette interaction, appelé mode de diffraction, a lieu quand la longueur d’onde devient proche des dimensions de l’objet ou de ses inhomogénéités. Ceci donne lieu à une résonance de l’onde dans l’objet puis au rayonnement d’une onde diffractée.

Dans un problème d’imagerie de diffraction par ondes électromagnétiques, on cherche à reconstruire une image d’un objet inconnu éclairé par une onde connue à partir des mesures de champ diffracté autour de lui. Les mesures de ce champ sont réalisées pour plusieurs positions de source d’éclairage et/ou de fréquences d’excitation. L’image recherchée représente une cartographie des paramètres électromagnétiques de l’objet en question, plus précisément, sa permittivité diélectrique et sa conductivité (εr et σ), l’objet étant supposé ici non magnétique.

Du point de vue pratique, ce problème d’imagerie se pose pour de nombreuses applications. Par exemple en imagerie micro-onde, les tissus malins et sains ont des permittivités bien différentes [CMST84, JZLJ94], ce qui laisse présager l’obtention d’images présentant un bon contraste [LH01]. Cette imagerie est aussi utilisée dans l’exploration géophysique [Ric09], la détection d’objets enfouis [CLH06] et dans des applications de contrôle non destructif (CND) [CMPD04]. Récemment, sont apparues des applications de tomographie optique par diffraction destinées à imager des objets de dimensions nanométriques, comme des cellules biologiques ou des objets artificiels issus des nanotechnologies [CKC+07, HSG07].

Principe de l’imagerie 

On peut classer le problème d’imagerie en deux catégories  : l’imagerie passive où l’objet à imager émet lui même des rayonnements électromagnétiques que l’on observe et que l’on utilise pour reconstruire l’image (imagerie astronomique, thermographie infrarouge, … ) et l’imagerie active où on utilise une source éclairant l’objet et on observe le rayonnement résultant de l’interaction afin d’obtenir une image de l’objet. La classification suivante est aussi possible : l’imagerie qualitative et l’imagerie quantitative. En imagerie qualitative, on cherche à déterminer la forme et la position de l’objet inconnu. Par contre, en imagerie quantitative, les valeurs des paramètres physiques tels que la permittivité et la conductivité doivent elles aussi être obtenues.

Le cas sans diffraction

Pour les petites longueurs d’onde λ, la propagation des ondes est modélisée grâce à l’optique géométrique [Sch04]. On suppose que l’onde se propage selon des lignes droites (rayons) et l’interaction avec des obstacles change sa direction et/ou son intensité. Selon la nature de l’obstacle, différents phénomènes sont constatés . Les principaux sont les suivants :

1. Réflexion/ réfraction : ces deux phénomènes se produisent quand le rayon rencontre une interface régulière entre deux milieux. Ce sont les bases de la modélisation dans les applications liées à l’imagerie optique classique.
2. Diffusion : ce phénomène est observé lorsque le rayon rencontre une interface irrégulière ou traverse un milieu quasi-transparent avec de nombreux petits diffuseurs petits obstacles sur lesquels le rayon change de direction plusieurs fois. Le modèle direct est souvent décrit par les équations de transport. Ce principe de propagation est utilisé dans l’imagerie de tissus mous [MSO+04] et l’imagerie fonctionnelle cérébrale [Arr99].
3. Absorption : dans ce cas le rayon perd en intensité lorsqu’il traverse un milieu dense. On suppose que le rayon garde sa direction et subit seulement une perte d’énergie. Ce phénomène est la base de la modélisation directe dans les applications de tomographie classique comme la tomographie X [BBM+00] et la tomographie à émission de positons [OF97].

Le cas avec diffraction

Lorsque la dimension de l’obstacle devient proche de la longueur d’onde, l’interaction entre l’onde incidente et l’objet entre dans le domaine de résonance. Pour modéliser ce phénomène, plusieurs choix sont possibles :
– on repart des équations de Maxwell où on travaille directement sur les équations aux dérivées partielles. On distingue entre deux domaines de travail :
1. le domaine fréquentiel : on utilise la méthode des élément finis (FEM) qui consiste à résoudre ce système d’équations en décomposant la solution sur une base de fonctions élémentaires [Jin02].
2. le domaine temporel : la méthode des différences finies dans le domaine temporel (FDTD) est utilisée afin d’obtenir la solution en approchant les termes dérivés par des différences temporelles finies [Yee66, TH05].

Cette approche est flexible pour analyser les milieux inhomogènes avec des structures complexes. Néanmoins, elle nécessite la discrétisation de l’espace sur un grand domaine et l’imposition de conditions aux limites ad hoc sur les bords de celui-ci. Ceci rend les algorithmes associés très gourmands au niveau du temps et calcul.
– Une représentation intégrale des champs obtenue à partir de l’équation des ondes de Helmholtz [Gib08, Har93].

Dans ce travail, nous optons pour une approche en représentation intégrale. On part de l’équation de Helmholtz. On applique le théorème de Green en tenant compte des conditions de rayonnement à l’infini et de continuité aux interfaces. En conséquence, on obtient une représentation intégrale des champs qui fait intervenir la fonction de Green de la géométrie considérée. Cette fonction caractérise le milieu étudié (espace libre, milieu stratifié, …) et son expression dépend de la configuration de mesure 2D ou 3D.

Approches analytiques de l’inversion

Tomographie classique

Dans les méthodes de reconstruction analytique en tomographie classique, l’objectif est de trouver l’expression de l’objet en fonction des données. Pour des sources à rayonnement parallèle, les données s’obtiennent en faisant la transformée de Radon de l’objet. La méthode d’inversion consiste alors à retrouver l’objet en appliquant la transformée de Radon inverse. On peut également lier les données à la transformée de Fourier de l’objet grâce au théorème des coupes-projections. Ceci permet d’obtenir la solution en faisant la transformée de Fourier inverse. Ces méthodes de reconstruction font l’objet de nombreux sujets de recherche [PGM96, Hir97].

Inversion dans le domaine de Fourier 

Une autre approche de reconstruction en tomographie classique est obtenue grâce au théorème des coupes-projections. En appliquant la transformée de Fourier sur les projections, on obtient les données dans le domaine de Fourier de l’objet. La reconstruction consiste alors à retrouver la transformée de Fourier inverse avec des données manquantes ; c’est un problème de synthèse de Fourier [MD88]. La méthode la plus simple de reconstruction nécessite trois étapes :
1. la transformée de Fourier de chaque projection Fr (y(θ, r)),
2. l’interpolation entre le maillage polaire des projections et le maillage cartésien de l’objet x ,
3. la transformée de Fourier inverse pour obtenir une estimation de x.

L’étape d’interpolation est cruciale pour avoir une reconstruction de bonne qualité. En effet, un choix d’interpolation au plus proche voisin conduit à des artéfacts très importants dans l’objet reconstruit. Ce problème de traitement de données avec un maillage non uniforme a été étudié dans plusieurs domaines, par exemple en astronomie [Bro75] et en imagerie médicale [O’S85]. L’idée est de convoluer les données dans le domaine de Fourier avec un noyau adapté pour faire la transition vers le maillage cartésien de l’objet.

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Table des matières

INTRODUCTION
1 Introduction générale
1.1 Contexte d’étude
1.2 Principe de l’imagerie
1.2.1 Le cas sans diffraction
1.2.2 Le cas avec diffraction
1.3 Approches analytiques de l’inversion
1.3.1 Tomographie classique
1.3.2 Tomographie par diffraction
1.4 Approches numériques de l’inversion
1.4.1 Méthodes déterministes
1.4.2 Méthodes probabilistes
1.4.3 Approche bayésienne
1.5 Contribution et plan de l’étude
2 Modélisation directe
2.1 Introduction
2.2 Tomographie classique
2.3 Imagerie de diffraction
2.3.1 Fonctions de Green
2.3.2 Cas 2D-TM
2.3.3 Cas 2D-TE
2.3.4 Cas 3D
2.4 Validation des modèles
2.4.1 Tomographie X
2.4.2 Tomographie optique
2.4.3 Imagerie micro-onde
2.5 Discussion
3 Modèles a priori
3.1 Introduction
3.2 Vraisemblances
3.2.1 Cas linéaire
3.2.2 Cas non linéaire
3.3 Modèle de Gauss-Markov-Potts
3.3.1 Contraste
3.3.2 Champ caché
3.3.3 Hyper-paramètres
3.4 Estimation Jointe
3.5 Discussion
4 L’échantillonnage stochastique
4.1 Introduction
4.1.1 L’échantillonnage d’importance
4.1.2 L’échantillonnage de rejet
4.1.3 L’échantillonnage de Metroplis-Hasting
4.1.4 L’échantillonnage de Gibbs
4.1.5 L’échantillonnage imbriqué
4.2 Choix de la méthode d’échantillonnage
4.3 Gibbs pour le modèle linéaire (gbLMGI-gbLMGM)
4.3.1 Contraste
4.3.2 Champ caché
4.3.3 Hyper-paramètres
4.4 Gibbs pour le modèle non linéaire (gbCSMGI-gbCSMGM)
4.4.1 Courants
4.4.2 Contraste
4.4.3 Champ caché
4.4.4 Hyper-paramètres
4.5 Mise en œuvre des échantillonneurs
4.5.1 Échantillonnage d’une loi gaussienne multivariée
4.5.2 Échantillonnage d’une loi de Potts
4.6 Discussion
5 L’approche bayésienne variationnelle
CONCLUSION

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