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État des lieux de la Surveillance épidémiologique à Djibouti
Les maladies diarrhéiques constituent les principales causes de morbidité et de mortalité dans les pays en développement. En 2006, les pays du continent africain ont signalé 234 349 cas de choléra, dont 6 303 mortels soit un taux de létalité de 2,7 %. Quatre d’entre eux (l’Angola, l’Éthiopie, la République Démocratique du Congo et le Soudan) ont notifié au total 186 928 cas, dont 4 988 mortels ce qui représente 80 % des cas et des décès par choléra signalés en Afrique. Le nombre de cas notifiés a augmenté de 87 % par rapport à 2005 pour atteindre les niveaux enregistrés à la fin des années 1990 [1, 2]. À l’ère du sida, du paludisme et de la tuberculose ré-émerge en Afrique une maladie qui accentue le poids de la pauvreté : le choléra. Il a continué de hanter les pays en développement du fait de l’importance de la létalité due au manque d’hygiène et la promiscuité avancée d’une importante partie de la population dans ces pays. L’accès limité des populations à l’eau potable et le péril fécal en ont constitué le meilleur véhicule. Depuis 1817, sept pandémies ont frappé l’humanité [3, 4]. La septième pandémie ayant diffusé en 1961 à travers l’Asie s’est installée en Afrique de l’Est depuis 1994 [5, 6, 7]. Djibouti a, depuis 1973, été frappé par une succession d’épidémies de choléra [8].
Les principales maladies transmissibles infectieuses qui semblent prévaloir à Djibouti sont les suivantes : Diarrhées aigues, VIH/SIDA, TB, hépatites A et E, fièvre typhoïde, pneumonies aigues, paludisme et dengue.
L’incidence annuelle du paludisme est de 4 000 cas pour 100 000 habitants. Pour le VIH/SIDA, la séroprévalence est de 2,9 % (Estim.2003). L’incidence annuelle de la tuberculose est de 3 572 cas /100 000. La malnutrition chez les moins de 5 ans est de 17,9 % et la couverture vaccinale : DTCP (50 %), Rougeole (48 %), Tétanos chez femme enceintes (45 %).
Djibouti, dont la population est évaluée à 720 000 habitants selon la DISED en 2006, est divisé administrativement en 6 régions y compris la capitale (Djibouti). Le rôle de l’administration centrale est de superviser les régions, analyser des données et de donner la rétro information.
L’autorité sanitaire de la région (Centre médico-hospitalier) coordonne les activités au sein de la région à travers la planification, la supervision, le monitoring et fournit l’appui logistique aux niveaux de proximité (postes de santé).
Circuit de recueil et d’analyse des données de la surveillance épidémiologique Schéma de transmission des données de la surveillance épidémiologique
La transmission de l’information épidémiologique se fait par l’intermédiaire des personnes chargées d’alerter appelées « coureurs » (des villages ou des campements) vers les postes de santé. Le personnel de santé, suite à la vérification de l’information, transmet l’information au CMH en utilisant les postes radiophoniques de l’armée et/ou la police. Le CMH, à son tour, transmet l’information au niveau central par téléphone et par fax. A Djibouti-ville, les centres de santé communautaires et les hôpitaux transmettent les rapports de la surveillance épidémiologique à l’unité de surveillance épidémiologique par fax selon un rythme hebdomadaire ou journalier selon la maladie à déclarer.
Avec l’appui de l’OMS, nous avons conduit une enquête de consensus dite DELPHI auprès des acteurs de la santé pour arrêter la liste des maladies sous surveillance.
Les maladies à déclaration immédiate sont la Grippe Aviaire H5N1, la Grippe A H1N1, la rougeole, la paralysie flasque aigue et le choléra.
Les maladies à déclaration hebdomadaire sont les diarrhées cholériformes, les diarrhées sanglantes, les autres diarrhées aigues, la Grippe Aviaire H5N1, le syndrome grippal, les fièvres hémorragiques, la coqueluche, la diphtérie, la malnutrition aigue sévère, le paludisme, la diphtérie, le tétanos néonatal, la méningite, les oreillons, la rubéole, la manifestation post-vaccinale et tout événement émergent.
Pour l’ensemble de ces maladies, il s’agit d’un recueil épidémiologique journalier basé sur la notification des cas vus en consultation par les médecins généralistes portant sur l’ensemble des cas pris en charge à Djibouti ville et dans les régions sanitaires de l’intérieur. Sur le plan éthique, les notifications sont strictement anonymes. Il s’agit d’un recueil épidémiologique ne modifiant en aucune façon la prise en charge médicale habituelle des personnes, ne portant pas atteinte à l’intégrité physique ou psychique et ne nécessitant pas de visite particulière de suivi pour les personnes.
À Djibouti-ville, la rétro-information se fait directement aux structures de santé. Dans les régions, elle est transmise aux centres médico-hospitaliers qui à leur tour la répercutera aux postes de santé.
Complétude et promptitude des rapports épidémiologiques hebdomadaires des structures du secteur publique et parapublique
L’indicateur global de complétude, qui se définit par le rapport entre le nombre de rapports reçus sur ceux attendus par l’unité de surveillance épidémiologique. Pour les structures sanitaires du secteur public de Djibouti ville est de 93 % ce qui est très satisfaisant car l’indicateur est supérieur à la cible qui est de 90 %. Deux sites de notification ont une complétude inférieure à la cible soit Arhiba avec une complétude de 85 % et Ambouli avec une complétude de 85 % et le service de pédiatrie de l’HGP avec une complétude de 77 %
L’indicateur de complétude pour les CSC de Djibouti ville est très encourageant et ceci est du aux différents efforts réalisés par l’unité de surveillance épidémiologique afin de renforcer le système de surveillance dans la capitale de Djibouti ; cependant les deux CSC d’Arhiba et d’Ambouli devraient mettre plus d’effort pendant l’année 2009 afin d’atteindre le seuil acceptable d’au moins 90 %.
Sensibilité du système d’alerte précoce aux épidémies
Nous définissons la sensibilité du système de surveillance comme sa capacité à détecter des émergences épidémiques. Il faudrait pour mesurer cette sensibilité disposer d’une source concurrente d’information, nous nous contenterons ici, comme souvent dans ce genre d’évaluation, de rapporter les émergences détectées par le système, en nous attachant à montrer qu’elles ont été identifiées dans chaque cas à un moment précoce de leur histoire et pas après une circulation massive. La « source concurrente » étant ici en quelque sorte le temps. Nous présenterons l’intérêt du recueil épidémiologique des cas de certaines maladies à déclaration obligatoire. Nous mettons en exergue dans cette partie les principaux événements détectés par le système de surveillance épidémiologique. En particulier, l’épisode de choléra est traité en détail avec les enseignements tirés. La Corne de l’Afrique a été durement touchée par une flambée apparue au sud du Soudan, laquelle s’est ensuite propagée vers le nord pour, en avril, atteindre Gambella en Éthiopie avant de poursuivre sa route vers le nord du Soudan où l’ensemble des 15 États ont été touchés et pour finalement atteindre Djibouti [1].
La dynamique de l’épidémie du Choléra suivie par le système d’alerte mis en place
Pour Djibouti, les déterminants de l’épidémie de choléra en 2007 contrastent avec les épidémies des années précédentes. Grâce à la mise en place d’un système d’alerte précoce, nous tentons d’expliquer la dynamique de cette maladie à travers notre pays et pour la région.
La population surveillée est l’ensemble des patients admis dans l’une des structures de prise en charge des cas de diarrhées aigues atteint du choléra.
En dehors d’une épidémie, tout cas cholérique se définit comme un sujet âgé de plus de deux ans présentant une diarrhée liquidienne aqueuse aigue, aspect eau de riz, afébrile avec examen bactériologique positif au Vibrio cholerae.
En période d’épidémie, tout patient ayant une diarrhée liquidienne aqueuse aspect eau de riz afébrile et âgé de plus de 2 ans.
Schéma d’identification et de suivi des maladies à déclaration obligatoire : cas du Choléra
Il s’agit du recueil épidémiologique journalier des notifications. Nous avons mené des analyses biologiques détaillées sur 20 souches pures tirées au sort au sein des selles positives au Vibrio cholerae à l’examen microscopique direct pour déterminer le profil du germe.
La variable dépendante était la confirmation bactériologique du Vibrio cholerae qui est la présence d’une mobilité caractéristique du vibrion à l’examen microscopique directe des selles ou l’identification du Vibrio cholérae à la culture.
Les variables indépendantes sont les informations relatives à l’âge, le sexe, le lieu géographique, la date d’admission, l’adresse, le stade de déshydratation, l’antibiothérapie utilisée, la thérapie l’évolution, les résultats de l’examen microscopique direct ou celui de la culture.
L’identification repose sur l’aspect après coloration Gram, la recherche d’une mobilité caractéristique à l’examen direct dite « vol de mouche », l’étude des caractéristiques biochimiques (oxydase et galerie d’identification API20E, Biomérieux) après ensemencement sur milieu TCBS pendant 24 heures à température ambiante (environ 28°C) et l’agglutination par antiserum polyvalent 01 (Diagnostic Pasteur). La production d’indole a aussi été recherchée. Les tests de chimiosensibilité ont été réalisés en gélose de Mueller –Hinton. L’identification du profil d’antibiogrammes nous a conduit à tester les antibiotiques suivant : ampicilline, l’amoxicilline, l’amoxicilline + acide clavilunanique, chloramphenicol, gentamicine, ciprofloxacine, norfloxacine, tetracycline furazolidone et l’acide nalidixique. L’interprétation des résultats de l’antibiogramme est réalisée conformément aux standards de la Société Américaine des Laboratoires de Santé Publique (APHL : American Public Health Laboratories).
Les examens de laboratoire ont été réalisés en début de l’épidémie et en cours de l’épidémie à travers un plan de tirage au sort des échantillons parmi les sujets admis pour diarrhées cholériformes au centre du traitement du choléra.
Au niveau de chaque centre de traitement de choléra, un registre a été mis en place. Ce registre a permis de recueillir les informations suivantes auprès des malades : l’âge, le sexe, le stade de déshydratation (selon l’OMS), le traitement mis en place (Soluté de Réhydratation par voie Orale, Antibiothérapie prescrite, Perfusion de soluté) et l’évolution.
La saisie des données du recueil épidémiologique a été réalisée sur la plate-forme de l’unité de surveillance épidémiologique utilisant le logiciel Excel de Microsoft Office 2003®. Le taux d’attaque est calculé en fonction de la population vivante au sein de la circonscription au moment de la survenue de l’épidémie.
La cartographie est réalisée à l’aide du logiciel du Système d’Information Géographique ARGIS 9®. Nous avons identifié les différentes localités fréquentées à l’issue d’un suivi de la route des clandestins et des populations nomades lors des flambées épidémiques. Une base de données géoréférencées des principaux points d’eau sur le territoire et des localités affectées et traversées est réalisée en utilisant les appareils Global Position Station Garmin®. Ainsi, les principaux axes de migrations ont pu être établis. Un rayon de 20 Km est décrit autour de chaque centre de santé pour déterminer les zones d’enclavement sanitaire.
Pour prédire l’évolution de l’épidémie, nous avons utilisé le modèle de Serfling. Il s’agit d’une méthode de détection automatique des épidémies sur la base de séries des données temporelles. Elle est utilisée comme méthode de détection des épidémies à travers un modèle cyclique de régression périodique qui utilise une tendance linéaire d’harmonisation pour créer un modèle de périodes non-épidémiques [9-11]. A partir de ces séries temporelles pour épidémie, un seuil d’alerte est déterminé. Ce modèle est d’habitude utilisé pour la grippe saisonnière ou pour les diarrhées saisonnières. La récurrence des pics épidémiques nous a motivé à tester ce modèle sur une durée relativement courte. Les intervalles de confiance ont été calculés à 95 %.
Chaque semaine, les données déclarées sont vérifiées en utilisant la procédure de contrôle de la qualité des données de la surveillance épidémiologique.
Promiscuité et Hygiène (Figure 3)
Le suivi de la piste des clandestins nous a permis d’identifier le circuit de migrations. Les flambées épidémiques enregistrées se trouvent sur le trajet des clandestins et des nomades. Il ressort deux modes d’immigrations : l’une conduite par les clandestins et l’autre par les nomades ou les populations locales.
Un récapitulatif de ces pistes est établi sur la figure 3.
L’itinéraire emprunté par les clandestins est commun au début de l’épidémie. Au niveau des régions de Tadjourah et d’Obock, il diffère selon la période estivale ou hivernale. En effet, il suit surtout les points d’eau.
Pour les nomades, trois importants axes de migrations ont été identifiés : du Lac- Assal à Kala-Assa, de Yoboki à El Daare ; de As-Eyla à Koutta Bouyya. L’épisode, quelque peu isolé de Tadjourah entre la 20ème et la 25ème semaine, correspondrait davantage à une affection des populations nomades vivant le long des dépressions des Allols et qui se rendent souvent dans la zone frontalière avec l’Ethiopie (Kala-Assa). Le démarrage aussitôt des affections à Obock montre que cet événement considéré au début comme d’origine locale et isolé du reste ne l’était probablement pas. Cet épisode isolé semble indiquer aussi l’interrelation importante des populations nomades avec celles des migrants clandestins. En effet, les migrants clandestins se trouvent affectés en cours de route. Les migrants initialement indemnes viennent de Dikhil et en traversant le Lac Assal à la suite d’un contact avec les populations nomades vendeuses de sel se déplaçant entre Kala-Assa (Ethiopie) et le Lac Assal, se retrouvent affectés et responsables des affections secondaires au niveau d’Obock.
Des flambées ont été décrites sur 13 localités et 8 centres de traitement du choléra ont été dressés. La ville de Djibouti, coeur de l’économie du pays, constitue la destination finale des populations locales et de quelques clandestins.
Sur le plan de la gestion de l’épidémie, il a été mis en place un comité intersectoriel de lutte contre le choléra. La surveillance épidémiologique active et journalière du Choléra a été installée. Les équipes mobiles de renfort ont été acheminées sur les zones touchées.
Lors de ces différents épisodes, des centres de traitement temporaires ont été installés à Djibouti-ville, Dikhil-ville, Yoboki, As-Eyla, Tadjourah-ville, Hagandé, Hayouc-hourmali, Kalaf, Ass-Hougoub, Obock-ville. La durée moyenne de fonctionnement des centres était de 15 jours [IC95 %, 7-28]. Les activités de désinfection et de javellisation ont été massives sur l’ensemble du territoire et surtout à Djibouti ville (photo ci-après).
Mesures santé environnementales
La potabilité de l’eau de consommation, le traitement des eaux usées et l’hygiène individuelle et collective représentent les meilleurs moyens de lutte contre cette maladie. Le coût élevé de la mise en place des mesures d’assainissement adéquates limite l’accès de ces populations à une eau et une hygiène adéquate et donc à la sécurité sanitaire de ces populations. Il en résulte la mort de plus de 4 500 enfants de moins de 5 ans par jour des maladies diarrhéiques évitables dans le monde [13]. Après la contamination des principales sources d’eau sur la route des clandestins, l’absence des mesures d’hygiène chez les villageois et les nomades ont constitué les meilleurs véhicules de cette maladie. En effet, le bas niveau d’hygiène a permis la circulation du germe par voie manu portée au sein des familles. L’épidémie qui a explosé à As-Eyla (localité de la région de Dikhil) en constitue un excellent exemple où l’on a pu retracer qu’en deux semaines une centaine de personnes ont été affectées par une seule personne en provenance de Yoboki, première zone affectée dans la région de Dikhil. En début d’épidémie, beaucoup de sujets sont décédés avant d’accéder aux structures de soins. Le nombre de décès relativement élevé au sein des structures de soins était principalement dû à l’absence d’immunité de la population au sérotype Inaba, affecté dans le passé par le sérotype Ogawa. Aussi, l’éloignement des structures de soins ainsi que le faible réflexe de référence aux structures des soins de la communauté ont été autant de causes additives.
Le circuit des clandestins à travers le pays épouse celui des cours d’eau. Les points d’eau contaminée, en l’occurrence la source d’Ourguini, les puits de Kalaf, les puits de l’Oued d’Ambouli de Djibouti ville ont permis au germe de se propager plus facilement et de retracer l’épidémie. En septembre 2007, la flambée à Djibouti a été constituée de plus de 554 cas. L’approvisionnement en eau d’une grande partie de l’agglomération de Balbala, au sein de la ville de Djibouti, à partir de puits clandestins creusés dans les lits de l’oued, en a constitué une origine non négligeable. En effet, les camions citernes desservant l’agglomération de Balbala, s’approvisionnaient clandestinement dans les puits d’eaux douces creusés au sein de l’oued d’Ambouli. Les camions citernes transportaient des eaux provenant tantôt des puits de l’oued tantôt de la borne fontaine de l’Office National des Eaux et de l’Assainissement de Djibouti. Durant cette épidémie, il a été mené des actions de destruction des puits clandestins, d’interdiction d’accès au lit de l’oued, ainsi que le contrôle sanitaire stricte des camions transporteurs d’eau. Les coupures fréquentes d’eau des réseaux de la ville, l’absence de réseau d’adduction d’une grande partie de cette agglomération (du fait de l’urbanisation non contrôlée), les ruptures des canaux d’égouts et des réseaux d’assainissement sont autant de source favorisant le péril fécal dans les grandes agglomérations des pays en développement. La consommation répétée d’eau au sein de réservoirs non protégés accentue les risques de contamination. En effet, l’accès de la population à l’eau potable et à un système d’assainissement adéquat est respectivement en milieu urbain à Djibouti de 76 % et de 88 % et en milieu rural de 59 % et de 50 % [14].
À cela s’ajoute, l’ignorance des populations de l’intérêt des mesures d’hygiène (javellisation, désinfection) qui constitue le principal obstacle à l’application des mesures de contrôle de l’épidémie. La Direction de l’Épidémiologie et de l’Information Sanitaire a réalisé les prestations de javellisation, la pulvérisation spatiale de la deltamétrine pour lutte contre les vecteurs potentiels (les mouches), l’épandage du crésylol et les conseils hygiéniques aux populations affectées et contacts. Une campagne de mobilisation sociale (apprentissage à la gestion des cas par les proches, méthodologie de d’utilisation de l’eau de javel, exercices pratiques d’hygiène) a accompagné les actions thérapeutiques. Pour prévenir la survenue d’une antibiorésistance, aucune antibiothérapie n’a été dispensée ni aux malades ni aux accompagnants. Une riposte organisée démarre par la suppression des facteurs de risques potentiels et la mise en place des plans nationaux de préparation et de riposte aux épidémies [13].
Situation d’une maladie à transmission vectorielle à Djibouti : le paludisme
Plus de deux milliards de personnes vivent à risque de paludisme grave, et l’estimation de l’incidence annuelle mondiale de paludisme clinique est de plus de 300 millions de cas. Plus d’un million de personnes meurent chaque année decauses directes de la malaria, avec à haut risque les enfants de moins de cinq ans vivant en Afrique sub-saharienne 1, 2.
La région de l’Afrique de l’Est continue de faire l’objet des catastrophes majeures, qui entraînent la perte de nombreuses vies humaines, détruisent des biens et érodent les faibles moyens de subsistance des communautés touchées. Parmi les catastrophes qui ont affecté cette région, les plus communes sont les inondations, les fortes pluies, les glissements de terrain et la sécheresse. De même, les épidémies, telles que la Fièvre de la Vallée du Rift, le paludisme, le choléra, la méningite, l’épizootie de grippe aviaire, sont fréquentes.
Djibouti est l’un des pays de la région Méditerranée orientale de l’OMS, avec un contexte généralisé de transmission du paludisme, mais il est entouré par deux pays de la région africaine de l’OMS, l’Érythrée et l’Éthiopie qui sont aussi parmi les pays enregistrant une forte incidence du paludisme, selon les données rapportées par Breman et Holloway en 2007 2. Djibouti fait partie de la zone de l’Afrique tropicale où le paludisme P. falciparum est de loin prédominant et Anophèles arabiensis est le principal vecteur. Une recrudescence du paludisme a été observée à partir de 1988, parallèlement à une augmentation des activités agricoles le long de l’oued (Ambouli), qui partage Djibouti ville. En outre, le mouvement continu de population entre l’Éthiopie et Djibouti était une voie efficace de propagation du parasite du paludisme chez l’homme 3. À l’heure actuelle, il a été estimé que près de 300 000 Djiboutiens (37 %) vivent dans des régions à haut risque pour le paludisme paludisme à Djibouti est caractérisée selon les trois périodes suivantes, comme indiqué à : http://www.emro.who.int/rbm/CountryReports/Djiboui/MalariaSituation2004.do c4:
– 1901-1973: Au cours de cette période, le paludisme était sous contrôle. En fait, les facteurs favorisant l’expansion de la maladie étaient quasiment absents (très faible urbanisation, absence d’activités d’irrigation, etc.) et les activités de contrôle du vecteur pendant la saison des pluies ont été intenses. Environ 80% des cas déclarés de paludisme étaient importés des pays voisins.
– 1974 – 1987 : Cette période est caractérisée par l’apparition de cas de paludisme chez des populations le long des axes de la première pénétration de la population des pays voisins et, d’autre part dans les zones urbaines et les zones rurales dans les régions du sud et à Djibouti la capitale. Il est important de noter que, durant cette période, l’instabilité socio-politique dans les pays de la Corne de l’Afrique (Éthiopie et Somalie) a provoqué le déplacement des populations vers les frontières djiboutiennes.
– 1988 à 2004 : Augmentation des cas de paludisme dans les zones déjà touchées et expansion vers les régions indemnes en raison de l’évolution des conditions favorables à la transmission du paludisme (sédentarisation des populations, activités d’irrigations etc.).
Selon le Rapport mondial sur le paludisme (OMS, 2008), 38 673 cas de paludisme ont été rapportés en 2006 à Djibouti. Toutefois, il faut comprendre que, en raison de l’accès limité aux services de santé dans certaines régions, en particulier dans les zones rurales, la faible performance dans le diagnostic biologique dans la plupart des services de santé, la majorité des cas de paludisme ne sont pas déclarés par les services de santé au ministère de la santé.
La carte de la Figure 1 montre les zones à risque de paludisme à Djibouti, selon de Guerra6 et Hay 7.
Une population vectorielle assez diversifiée selon les régions
Durant la phase de surveillance continue des 5 premiers sites de Djiboutiville d’août 2008 à janvier 2009, nous avions constaté une importante faune culicidienne faite de Culex quinquefasciatus. Les cinq sites où nous avons positionnés des pièges sont les suivant : Site 1: Plateau du Héron (43°09’01” E; 11°37’17” N); Site 2 : Sheraton Hôtel (43°09’29” E; 11°36’09” N); Site 3 : zone portuaire, quai 9 (43°07’52” E; 11°36’21” N); Site 4 : zone aéroportuaire 1 (43°08’54” E; 11°33’07” N); Site 4: airport are zone aéroportuaire 2 (43°09’13” E; 11°33’11” N), respectivement.
Une pluridisciplinarité (Entomologie/Epidémiologie/Sociologie) requise pour faire face aux nouvelles menaces émergentes : Cas pratique de la Myiase
Suite à une alerte du 30 Avril 2008, la Région d’Arta nous a notifié 10 cas de dermatoses qui s’accompagnaient de l’extraction d’un parasite. Une investigation épidémiologique de terrain a été conduite pour identifier et mesurer l’impact sanitaire de la dermatose pour la localité. La population d’étude était les habitants de Attar, Bahour, Qoorah, Grand Douda, Petit Douda, Nagad 1, Nagad Barra, Aour-Awssa, Aad. L’investigation de terrain a duré six (6) jours (30/04, 31/04, 1er mai, 02/05, 03/05, 04.05). 70
Nous avons combiné lors de cette investigation de terrain le recueil des cas à travers un examen clinique soigneux des sujets atteints et la captures des insectes adultes à l’aide des pièges CDC. Les larves étaient prélevées lors de l’extraction du ver du corps humain.
Au plan entomologique, l’élevage des larves et la capture des adultes à l’aide des pièges CDC nous ont permis d’identifier l’agent causal qui était Cordilobya anthropophaga. Il s’agit d’un diptère, sous-ordre des Brachycères
Cyclorrhaphes, de la famille des Calliphoridés sous-famille des Calliphorinés. La forme clinique retrouvée est celle d’une myiase furonculoide communément connue sous le nom de ver de Cayor. 932 cas de myiase ont été retrouvés avec une moyenne d’infestation de 2 à 6 parasites par sujet. Pour une population de 4000 sujets dans la zone, le taux d’attaque était de 23.3%. Il n’y a pas eu de mortalité amputée à la myiase. C’est pour la première fois que cette parasitose émerge sous nos cieux car son environnement est normalement tropical et humide. L’apparition de cette parasitose sous un climat aride et sec nous a motivé à identifier les facteurs associés suivant lors de l’investigation épidémiologique : l’importation des animaux infestés n’ayant bénéficié d’aucun soin vétérinaire à savoir l’extraction préalable du parasite avant l’exportation, l’imprégnation des animaux d’huile ; l’entrée de tonnes de foins non désinsectisés de l’Ethiopie où le climat est tropical et humide ; la multiplication de décharges sauvages d’animaux permettant au parasite une multiplication aisée dans le corps des cadavres inertes.
Une pulvérisation pendant 3 semaines successives durant les heures d’activité du vecteur (7h-9h et de 16h-18h) de la zone infestée a été conduite. En plus de la pulvérisation spatiale massive, une compagne de mobilisation communautaire, de traitement des foins, des soins médicaux et des soins vétérinaires dans la région ont été menées.
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Table des matières
A- Première partie : Mise en place d’un système d’alerte précoce aux épidémies
A-1. État des lieux de la Surveillance épidémiologique à Djibouti
A-1-1. Organisation du système de santé
A-1-2. Circuit de recueil et d’analyse des données de la surveillance épidémiologique
A-1-3. Complétude et promptitude des rapports
A-2. Sensibilité du système d’alerte précoce aux épidémies
A-2-1. La dynamique de l’épidémie du Choléra suivie par le système d’alerte mis en place
A-2-1-1. Schéma d’identification et de suivi des maladies à déclaration obligatoire : cas du Choléra
A-2-1-2. Les enseignements tirés de l’épidémie du Choléra
A-2-1-2-1. Une épidémie en pleine expansion
A-2-1-2-2. Promiscuité et Hygiène (Figure 3)
A-2-1-2-3. Mesures santé environnementales
A-2-1-2-4. S’agit-il toujours de la septième pandémie avec un nouveau sérotype ou d’une huitième pandémie avec une nouvelle souche ?
A-2-2. Défis du système d’alerte précoce aux épidémies
A-2-2-1. La pluralité des épidémies détectées
A-2-2-2. Défis identifiés
B- Deuxième partie : Mise en place d’un système de surveillance entomologique couplé au système d’alerte précoce aux épidémies.
B-1. Pourquoi un système de surveillance entomologique ?
B-2. Situation d’une maladie à transmission vectorielle à Djibouti : le paludisme sur l’épidémiologie du VIH à Djibouti – Mise en place d’un système d’alerte précoce aux épidémies. Ammar Abdo Ahmed
B-3. Opérationnalité du système de surveillance entomologique
B-3-1. Techniques et méthodes
B-3-2. Une population vectorielle assez diversifiée selon les régions
B4- Une pluridisciplinarité (Entomologie/Epidémiologie/ Sociologie) requise pour faire face aux nouvelles menaces émergentes : Cas pratique de la Myiase
C- Troisième partie : Un système de surveillance intégré n’excluant pas des analyses approfondies sur une thématique spécifique : cas du VIH
C-1. Introduction
C-2. Méthodologie
C-3. Résultats
C-3-1. Caractéristiques sociodémographiques de la population étudiée (Tableau 1)
C-3-2. La circoncision et la sexualité
C-3-3. Facteur de risque du VIH (Tableau 2)
C-3-4. Consommation du khat et les comportements sexuels à risque (Tableau 3)
C-4. Discussion
C-4-1. Un contexte ne différant pas des autres
C-4-2. Le tabou sexuel et la circoncision pratique
C-4-3. Une addiction de la Corne de l’Afrique : le khat
C-5. Conclusion
RECOMMANDATIONS GENERALES
CONCLUSION GENERALE
REFERENCES BIBLIOGRAPHIQUES
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