Un spectacle qui dessine en creux le portrait d’un homme et d’un auteur, et qui montre son impact sur son époque et sur la notre

La ligne directrice d’une création-éclair : l’histoire de la  fondation de Mahagonny, la ville-piège

Je vais expliquer ici comment s’est construit le spectacle en à peine deux semaines autour de cette idée de montrer divers aspects de Brecht certes, mais de façon narrative, avec comme point de départ la première scène de Grandeur et Décadence de la ville de Mahagonny, qui permet de développer une trame autour de la vision du monde de l’auteur qui apparaît à travers ses différentes œuvres. Il me semble en effet important de parler en premier lieu de la dimension narrative,puisque, comme le dit Brecht dans le Petit organon pour le théâtre : « Tout est fonction de la fable, elle est le cœur du spectacle théâtral ».
Ainsi, cette première partie, d’analyse plutôt dramaturgique, s’attache à montrer le procédé de création à partir des choix de textes, de réécritures et d’ordre, qui se sont effectués de façon rapide et franche bien que ces textes soient pris dans le paradoxe de vouloir montrer tout Brecht et de n’être que des extraits choisis par un metteur en scène.

Le choix des textes et de leur agencement

Nous allons commencer par analyser l’organisation du spectacle, en la comparant à l’histoire de Grandeur et Décadence de Mahagonny, afin de voir comment les deux sont liés, et ce que cela signifie pour laportée symbolique du spectacle.

comparaison du déroulé du spectacle et de la dramaturgie de Grandeur et décadence de la ville de Mahagonny

Afin de déterminer une trame commune, jevais commencer par donner un résumé de l’un et de l’autre. En commençant par l’œuvre de Brecht, écrite en collaboration avec Kurt Weill, qui est en effet une œuvre musicale, créée en 1930. Mahagonny est le nom d’une ville fondée par trois brigands afin de dépouiller les riches chercheurs d’or grâce à l’alcool et la prostitution. La pièce commence avec cettefondation et voit la ville s’étendre et gagner en popularité, jusqu’à ce qu’un homme, Paul Ackermann, ajoute une devise à la ville : « tout est permis ». A partir de ce moment la situation va dégénérer jusqu’à ce que la pièce s’achève avec la pendaison de Paul, prononcée par la « justice » de la ville (les trois brigands), et l’incendie dévastateur qui marquent la fin de Mahagonny. En second lieu, le spectacle, interprété comme une seule histoire, peut être résuméde la façon suivante : le spectacle commence avec la première scène de Grandeur et décadence de la ville de Mahagonny, c’est-à-dire la fondation de la ville par les brigands. Viennent ensuite les chansons, en particulier de prostituées, puis le grand crash boursier avec Sainte Jeanne des Abattoirs.Ensuite, s’installe l’état militaire avec La Résistible ascension d’Arturo Uiet Grand Peur et Misère du IIIeme Reich. Pour finir, on assiste au procès de Brecht et aux poèmes érotiques. On peut penser que si la Brecht’s Nachtpeut s’appuyer sur cette œuvre, c’est en partie parce qu’elle a été écrite tôt,et que de nombreux thèmes qui commencent à être évoqués, seront ensuite développées dans différentes œuvres.
Je vais ainsi faire un parallèle, en plus dela scène d’ouverture, qui est la même, entre les étapes suivantes :
-première étape : rencontre des filles et des quatre hommes (scène 5) face à Lux in tenebris, où Padduk et la macquerelle s’opposent.
– deuxième étape : la crise à l’hôtel de l’homme riche (scène 7) à laquelle répond l’effondrement des cours de la bourse avec Sainte Jeanne des Abattoirs.
-troisième étape : le cyclone qui permet de mettre en place les lois voulues par les hommes de l’Alaska et la débaucheentraînant des morts (scènes10 à 15) correspondent à la catastrophe de La résistible ascension d’Arturo Ui, annoncé par Dialogues d’exilés, et qui se solde par le temps de crise de Grand Peur et Misère du IIIeme Reich.
-dernière étape : le procès de Paul Ackermann et les cortèges (scènes 19 et 20) face au procès de Bertolt Brecht et aux poèmes érotiques.
Afin de mieux cerner ce rapport, je vais développer ici la mise en relation de la troisième étape, qui est peut-être la moins évidente, car plus métaphorique et complexe -en particulier par le pivot que représente Paul Ackermann, personnage très nuancé de Mahagonny, ce qui est intéressant lorsqu’on voit qu’on peut également l’assimiler à Brecht (le procès en est une bonne preuve). Ainsi, on note tout d’abord le thème de l’étranger à travers la figure des hommes de l’Alaska et des exilés.On relève donc la figure annonciatrice de changement : « Ah, tout votre Mahagonny, jamais ça ne rendra/ Un homme heureux/ Parce que c’est trop calme/ Parce qu’il y a trop de concorde/ Et beaucoup trop de choses solides et sûres » , harangue de Paul Ackermann à la fin de la scène 9 de Grandeur et décadence de la ville de Mahagonny, fait écho à ces répliques de Zieffel et Kalle de Dialogues d’exilés: « Cette bière n’est pas de la bière, mais les cigares non plus ne sont pas des cigares, ça s’équilibre» ou « L’ordre c’est le gaspillage méthodique » . Le thème de l’ordre et du mécontentement sontdonc mis en opposition par ces figures qui évoquent par leur statut la prise de distance, le fameux « regard de l’étranger ». En revanche, ce sont des personnages bien différents : ainsi, quand les hommes de l’Alaska sont francs et directs, les exilés sont eux plus en retrait et ironiques. On peut donc mettre en valeur ce parallèle, en montrant bien les nuances : en effet, les deux textes de Brecht ont dix ans d’écart. Ensuite, « l’ascension d’ArturoUi au milieu de la crise » peut donner l’impression d’être métaphorisé par la réussite de Paul Ackermann au milieu du cyclone.
On peut voir le même type de personnages avec Gobola et Paul : ce sont les conseillers qui « assouplissent » leur maître, Gobola proposant à Arturo Ui d’adopter un « genre cordial, en manche de chemise et le regard candide » , tandis que Paul montre à la Begbick qu’il vaut mieux faire soi-même ce que l’ouragan pourrait faire s’il arrive sur la ville : « renverser tes écriteaux, tes règlements, tes murs » (Mah.p31). La suite de ce chamboulement apparaît comme le chaos : d’unepart les scènes s’enchaînent en se finissant par la mort d’un personnage à cause de ses excès, d’autre part, les scènes de Grand Peur et Misère du IIIeme Reich,montrent une autre forme de chaos, dans lequel on ne peut plus se fier à personne, ni même à la logique, sous peine de mort. Ces deux passages illustrent la fin d’unelogique : la suppression des limites et la saturation de limites ; qui arrivent au même résultat, la lâcheté. Ainsi dans le combat sans espoir entre Joe et Moïse, ce dernier répète plusieurs fois qu’il regrette, mais finalement tue Joe ; de même dans La Femme Juive, le mari dit plusieurs fois qu’il ne laissera pas sa femme s’exiler seule, mais l’aide à préparer ses affaires.

Question des coupes et respect du texte original

Les textes présentés sont souvent des extraits d’extraits… L’implication du metteur en scène dans le spectacle ressort ainsi particulièrement, et on peut se demander la raison de certains choix, et en quoi cela influence la compréhension de l’œuvre, et d’un même coup de l’auteur. Cette question a pu également susciter des débats entre les comédiens et le metteur en scène puisque chacun avait un ou deux textes à charge, à couper comme il l’entendait. Cependant tout le monde n’était pas d’accord à propos des coupes et changements, et certains auraient parfois préféré garder le texte tel qu’il a été traduit dans leur édition. Je trouve cette étape très intéressante et pleine de contradictions : on peut ainsi noter des questions de nuances pour ceux qui tenaient le texte original, en particulier dans la traduction, comme par exemple le débat autour d’un mot prononcé par Madame Hogge.
La comédienne disait initialement « bévue », mais le terme semblait d’un niveau de langue supérieur à celui d’une macquerelle, donc plusieurs mots furent proposés en échange : « bêtise », « erreur » ou encore « connerie » , eton lui fit dire finalement « bêtise », bien que cette fois ci, le terme parût un peu faible. En revanche, certaines phrases ont été coupées à la hache, ou bien modifiées sensiblement, selon les critères suivant : « les gens ne savent pas qu’il y a mieux » ou encore « il ne va pas se retourner dans sa tombe le père Bertolt »…
On peut donc prendre quelques « adaptations », sans parler des réécritures dont on analysera la portée dans la partie suivante, afin de voir l’effet produit par le changement.
En premier lieu, il est intéressant de voir à quel endroit les scènes ont été coupées : « La Femme juive », par exemple, devait tout d’abord être jouée en entier, puis, par manque de temps, la décision fut prise de couper une des deux parties. Le problème : laquelle ? Même si les deux parties fonctionnent très bien l’une sans l’autre, chacun était déçu de ne pas voir soit la montée, soit la chute. En effet, cette scène est construite en deux temps, avec les appels de la femme juive, Judith Keith, qui annonce son départ, d’abord à des connaissances puis à des personnes de plus en plus proches, avec une évolution, du discours mondain à des confessions plus intimes : de « Oui le printemps doit être beau làbas » à « Non, il le faut, ça devient trop difficile » ; puis avec un monologue dans lequel elle répète la discussion qui suivra avec son mari dont elle devine si bien les paroles que l’ironie en devient cruelle comme le souligne surtout cette phrase du monologue : « Alors, ne dis pas : en somme c’est l’affaire de quelques semaines, en me donnant le manteau de fourrure dont je n’aurai besoin que l’autre hiver », qui résonne dans les deux dernières répliques.

Place de l’écriture

Ce terme d’écriture intervient au sens large, c’est-à-dire que je veux parler ici des interventions du metteur en scène et de leur insertion dans le spectacle. Ainsi, il s’agit d’écriture dans le sens où c’est un ajout, néanmoins on va peut être surtout utiliser le mot « parole ». En effet les interventions ne sont pas « écrites » et fixées, mais au contraire bénéficient d’une certaine spontanéité et d’une capacité d’adaptation.
La place que prend cette parole se quantifie déjà en nombre d’interventions, et nous allons donc voir à quel moment le metteur en scène s’adresse au public. Pour commencer, c’est lui qui donne le top du départ, en venant chercher les spectateurs devant l’entrée habituelle et en leur expliquant sommairement qui est Brecht, et où va les mener leur voyage. Ensuite il les emmène derrière le théâtre, où la première scène à lieu. Il se place donc comme guide au milieu de ce labyrinthe. On le retrouve ensuite à chaque moment charnière : entre Lux in tenebris et les chansons, où il présente l’Opéra de quat’sous, puis pour l’annonce de Sainte Jeanne des Abattoirs, où il s’intègre dans l’histoire en faisant l’annonce de l’effondrement de la Bourse : « Gigantesque effondrement du cours de la Bourse ! Ventes d’actions massives. Slift, anciennement Mauler, entraîne dans sa chute les cours de tout le trust de la viande ! » (BN). Puis il annonce la soupe, comme chaque autre plat du repas, en Monsieur Loyal. Avant La résistible ascension d’Arturo Ui, il raconte l’exil, et prend à nouveau part à l’histoire en quelque sorte puisque c’est lui qui joue le rôle du bonimenteur qui introduit la pièce de Brecht, même si là encore, le texte est modifié. Il revient ensuite faire un point sur les pièces de guerre (et chante en continuité, « Le chant des canons »), puis annonce le plat principal.L’étape suivante est à nouveau marquée par une chanson et le dessert, qu’il est important de bien démarquer des scènes de Grand peur et Misère du IIIème Reichqui précédent. Enfin, les interventions se font beaucoup plus nombreuses dans les dernières parties, où le metteur en scène parle de la fin de l’exil, des poèmes érotiques, de la vie de la jeunesse intellectuelle de l’époque, et enfin revient sur la situation de l’amphithéâtre, avec les remerciements et la reprise de la chanson de Mahagonny.
On voit donc que cette parole prend la place d’un fil rouge qui emmène le spectateur le long du spectacle. Néanmoins, il n’y a pas que cette valeur de repère qui compte, on peut également parler de ce que Michel Belletante a appelé le « coté pédago assumé » : en effet, le but d’une nuit étant d’enrichir les connaissances sur un auteur, une partie narrée et expliquée ne paraît pas de trop. On note donc des points d’explications (contexte, date, traduction), de narration (anecdote, chronologie), et enfin des points de discussion (remise en question de clichés, sur le procédé distanciation par exemple). Le spectateur réticent ou peu enclin à une forme d’enseignement pourra donc être lassé par ces interventions, qui, étant en partie improvisées, peuvent se révéler longues, et perdre l’intérêt dynamique du spectacle. D’autre part, les interventions contiennent parfois de l’humour et des clins d’œil au public, qui sont mis en valeur par cette prise de parole aux allures d’improvisation, qui se fait comme un dialogue entre le « je » , le « nous », et le « vous », et permet de créer une grande complicité avec le public.
Et puis, cette façon de présenter le spectacle est aussi un moyen pour le metteur en scène de se mettre en lumière, et de rendre honneur en même temps à ce métier, qu’exerçait également Brecht.

La prise de position

L’article de Daniel Mortier, Texte de théâtre et indétermination, à propos de L’opéra de quat’sous, extrait de la revue de littérature comparée, essaie de montrer que l’esthétique de Brecht est aussi basée sur l’indétermination (« Unbestimmtheitstellen »), c’est-à-dire que ses personnages, ses lieux, ses prises de positions, sont déstabilisés dès lors qu’on se pose certaines questions. Par exemple les personnages -qui se trouvent être complexes, et peuvent d’un côté être identifiés aux figures mythiques, de l’autre à des peronnages contemporains (Mackie a des côtés de Don Juan, mais rappelle aussi un mafioso moyen)- échappent à la classification, et donc aux stéréotypes. Ainsi, pour Daniel Mortier le metteur en scène doit « combler ces aspects » qui forment en fait une richesse, ce que Michel Belletante rejoint tout à fait en considérant que ces absurdités sont le rejet d’un côté « conformiste et bourgeois » de la comédie musicale. Le metteur en scène n’a pas vraiment ici à justifier des choix de narration puisqu’il ne reprend que les songs, néanmoins, on peut se demander quel est l’effet de ces chansons, isolées de leur histoire. Elles sont en elles mêmes une histoire et introduisent un effet d’indetermination quant au lieu, aux personnages et à leur relation ; que le metteur en scène décide d’ignorer puisqu’elles sont ostensiblement « jouées » par leur concentration autour du piano, ce qui augmente leur théâtralité et accentue l’artificialitéque donne Brecht à cette œuvre.
Cela illustre la possibilité pour le metteur en scène de seglisser dans les œuvres de Brecht, ce qu’il revendique : « Après, j’ai tiréles textes de Brecht vers des préoccupations qui me sont propres : ça c’est aussi ma façon d’intervenir dans ces adaptations, de les tirer vers un discours que moi je peux tenir ; alors qui est un peu tiré par rapport à Brecht je l’avoue, mais qui n’est quand même pas unetrahison » (Ax4). On va d’abord voir un exemple de cette affirmation, mais on pourra sedemander ensuite comment se justifie ce qui est caché ou montré à partirdes textes d’un auteur. Ainsi, on peut prendre l’exemple de la question de la psychologie des personnages -qu’on peut ajouter aux indéterminations- et en particulier de Jeanne. En effet, est-elle animée par une énergie naïve ou une énergie du désespoir ? Dans la Brecht’s nacht, une ellipse permet le passage de l’une à l’autre, montrant d’abord une femme animée par la foi,qui entonne seule des chants religieux, puis une femme sans foyer, maltraitée et enfin tuée par les hommes. Je pense que cette interprétation est la plus proche du texte, même si elle augmente la solitude du personnage, qui n’est normalement pas présente au début, puisqu’elle est encore soutenue par les Chapeaux noirs. Cette solitude de la femme qui se bat pour la classe populaire vient accentuer le pessimisme face à cette cause, et, venant contre les attentes de la compagnie, qui pensait exacerber sa solitude par le chant, vient également toucher le public, qui, pendant deux des représentations, a repris en chœur : « Jamais ne manquera de pain celui qui voue son âme à Dieu »(BN). Pour moi, cet exemple est marquant de la façon dont on peut « embarquer » le public, qui accorde ici plus de sympathie à cette femme qu’il ne l’aurait fait si elle était soutenu par un grand groupe d’ouvriers.

La prise de risque et Brecht

On peut voir en effet que, même si chaque «nuit » est créée rapidement, celle-là a pour particularité de ne pas compléter une œuvre jouée en entier (telle la Nuit Racine, pour laquelle les répétitions d’Iphigénieont duré plus de six semaines), et pourtant l’effet obtenu fonctionne très bien. Comme le dit le metteur en scène : « il y a une sorte de jeu qui séduit les comédiens –en tout cas ceux qui travaillent avec moi- qui est detout d’un coup lâcher les chevaux : c’est brut ; et il se trouve qu’avec Brecht le brut de décoffrage fonctionne bien, l’expressionisme éclaté fonctionne bien »(Ax4), c’est-à-dire que cette énergie neuve crée une sorte de toile autour des spectateurs qui sont à la fois embarqués dans une sorte de tourbillon, et à la fois face à Brecht. En effet, le drame expressionniste qui, « éclate en une série de tableaux ou de séquences figurant un voyage, une odyssée, un chemin de croix, en tout état decause un parcours initiatique » a une structure proche de celle de la Brecht’s nacht, et explique en partie cette sensation d’ordre dans le désordre, un idéal atteint par l’éclatement. Cet idéal c’est en quelque sorte la figure de Brecht, qui apparait pleinement à la fin du voyage, en haut de la pyramide, lors du passage du procès.
Néanmoins nous l’avons vu, cette scène n’est pas très travaillée, mais le metteur en scène explique que cela n’est pas un problème : « Pour Brecht c’est plus facile parce que ce qu’on a choisit de lui faire dire dessine assez bien le côté matois du personnage et c’est ça le principal de ce que je voulais faire ressortir. » (Ax4). Le côté « matois », c’est le côté rusé qui ne se dévoile pas, or cela fonctionne bien en effet dans la lecture du texte, auquel s’ajoute l’air malicieux du comédien. On peut tirer de cette analyse une interprétation pour le reste du spectacle : en effet, peut-être que ce « brut de décoffrage » apporte une dimension presque naïve, sous laquelle disparaissent les astuces d’interprétation que l’on a vu, et celles que l’on verra par la suite, tels que les petits changements de traduction, les coupes de textes, ou la musique, la mise en espace, etc.

L’espace scénique comme nouveau lieu, ou la transformation du théâtre en dangereuse fête foraine

Dans cette deuxième partie on peut voir comment cette « histoire » de Mahagonny s’inscrit dans un espace très particulier qui a d’une part raccourci un peu plus la création, et qui est d’autre part un formidable appui à ce long spectacle, tant il se révèle surprenant et plein de ressources pour créer un nouveau lieu qui empêche même les habitués de reconnaître leur petit théâtre.
Ainsi, nous allons voir les étapes de la transformation de l’espace, de sa conception à sa découverte par le public, en passant par l’investissement des comédiens ; et voir en même temps comment le jeu des comédiens, la musique, etc, s’emboîtent pour créer un nouveau lieu qui vient se refermer autour du public. Le théâtre devient alors « une réalité dangereuse et typique ».

Organisation de l’espace

Je montrerai ici les éventuels problèmes de compatibilité entre la volonté artistique et les possibilités techniques, qui serévèlent néanmoins très surprenantes. On reprendra les définitions d’Anne Ubersfeld , en opposant le « lieu », « élément concret topologiquement repérable », et l’ « espace », « catégorie générique abstraite donnant à voir, à sentir, et à imaginer un lieu qui peut être virtuel », c’est-à-dire qu’on utilisera généralement « lieu » pour parler de l’amphithéâtre sans Brecht, et « espace » pour parler de Mahagonny qui s’installe à l’amphithéâtre.

Installation

Dès la première réunion de travail, à laquelle ne participe pas les techniciens, le metteur en scène veut construire une ville qui ressemblerait à une grande fête foraine. L’idée générale est claire et sera maintenue, néanmoins, la forme que doit prendre l’amphithéâtre reste à déterminer. Ainsi, les premières questions qui se posent sont les suivantes : est-ce qu’on utilise une autre salle ? Est-ce que le public déambule d’un endroit à l’autre ?
Comment s’arranger avec les questions de sécurité ? etc. Ensuite, afin de donner vraiment l’illusion au public qu’il entre dans un endroit étrange et nouveau, le metteur en scène voulait que l’amphithéâtre soit recouvert d’une bâche, que les brigands de Mahagonny pourraient ouvrir, et faire entrer le public dans une salle vide, avec de la musique. A cela s’ajoute le problème de l’attente du public, qui en janvier peut difficilement se faire à l’extérieur sans solution de repli. Cependant, même si tout n’est pas réglé, dès le deuxième jour de répétion, les comédiens peuvent commencer à utiliser le plateau les après-midi. En plus de la barque à frites, installée par les Ateliers Marianne, environ six techniciens s’occupent de démonter tous les fauteuils,poser l’avancée de scène supplémentaire, monter le metro, etc. Toutes ces tranformations donnent la sensation que les possibilités sont illimitées et donnent à l’espace une dimension magique, notamment avec l’agencement des détails (de nombreux pendrillons sont posés pour embellir les décors, et en particulier un immense velours rouge pour le fond de scène, qui n’est pas occupé par des décors. Ce qui est également intéressant, c’est de voir que certains arrangements sont des propositions des régisseurs, ce qui montre un grande confiance entre les membres de l’équipe. Un autre problème rencontré a été celui du piano : en effet, il a fallu d’une part déterminer où il se trouverait (en prenant en compte la vision du public, de l’esthétique et de la vision du pianiste), et d’autre part le faire accorder, et même le changer en cours de répétition.

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Table des matières
Introduction : Construction d’un spectacle à l’architecture complexe 
I-La ligne directrice d’une création-éclair : l’histoire de la fondation de Mahagonny, la ville piège
1-Le choix des textes et de leur agencement
a-Comparaison du déroulé du spectacle et de la dramaturgie de Grandeur et décadence de la ville de Mahagonny
b-Question des coupes et respect du texte original
2-Le travail de réécriture et d’écriture
a-Valeur de la traduction
b-La place de l’écriture
c-La prise de position
3-« Energie du sauvetage » : changements de déroulé jusqu’au dernier moment
a-Fonctionnement de cette méthode de travail
b-Les manques
c-La prise de risque et Brecht
Conclusion
II-L’espace scénique comme nouveau lieu ou la transformation du théâtre en dangereuse fête foraine
1-organisation de l’espace
a-installation
b-organisation finale de l’espace
2-La recherche de jeu dans l’espace : de la lecture au plateau
a-La distribution
b-Symbolique et représentation
c-Prise de possession et transformation
3-L’immersion dans un monde nouveau
a-La musique qui enveloppe : atmosphère expressioniste
b-Effet de surprise
c-La place du spectateur : consolider une complicité
Conclusion
III-Un spectacle qui dessine en creux le portrait d’un homme et d’un auteur, et qui montre son impact sur son époque et sur la notre
1-L’attrait pour le biographique: vie de Brecht racontée
a-Pédagogie
b-Approche historique et politique
c-question de moeurs
2-Les valeurs : le cabaret comme hommage ?
a-Le divertissement est une valeur en soi
b-Qu’est-ce que la distanciation ?
3-Que nous dit une nuit Brecht ?
a-La signification d’une nuit
b-Analyse de « La Croix blanche »
c- Brecht, artiste exilé et ambigüité politique
Conclusion 
Conclusion : Un portrait del’insaisissable Brecht
Bibliographie
Annexes

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