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La dimension paysagère
Avant de s’attarder sur les projets d’aménagement à l’échelle de la vallée du Bouregreg, il nous semble opportun de présenter dans un premier temps un état des lieux actuel de la vallée d’un point de vue paysager. Cette entrée permet de saisir le contexte paysager avec ses composantes visibles et lisibles, marqué par la présence d’un tissus historique d’une valeur patrimoniale universelle.
Une fois le contexte paysager est saisi, il sera analysé dans un deuxième temps, à la lumière des métamorphoses engendrées par le nouveau projet d’aménagement, destiné à la mise en valeur de ce territoire. D’ailleurs, « analyse » dérive de « analusis », un mot grec qui désigne la « décomposition ». Ce qui signifie que pour analyser les mutations du paysage d’une vallée d’environ 6000 ha, il faut la décomposer en ensembles paysagers cohérents, afin de parvenir à expliquer, comprendre et de mesurer l’ampleur des transformations de chaque ensemble. Toutefois, notre objectif ne consistait ni à effectuer un inventaire exhaustif, ni à entreprendre une analyse systématique de toutes les transformations qui affectent le paysage du Bouregreg. L’objectif reste de soulever les enjeux relatifs au contexte paysager et patrimonial de la vallée, dans un contexte d’aménagement.
La dimension historique et l’analyse diachronique
L’évolution du paysage de la vallée du Bouregreg fait figure d’un processus de transformation spatio-temporelle à rythme contrasté, marqué par des périodes de changements rapides voire profonds et d’autres moins. Afin de mettre en lumière ce constat, l’observation directe du paysage actuel ne permet pas de mesurer l’ampleur des mutations de ce territoire dans le temps. De ce fait, nous procéderons via une lecture historique et une analyse diachronique des projets d’aménagement planifiés sur la vallée pendant le XXe S, entre 1912-1956 et 1956-1999, pour appréhender comment le paysage a-t-il évolué.
Le choix de ces deux temporalités s’explique par un évènement majeur dans l’histoire du Maroc au XXe siècle, il s’agit de la signature de traité du protectorat français en 1912. L’arrivée des acteurs institutionnels français sur le territoire de la vallée du Bouregreg sera marquée par l’apparition de projets d’aménagement pour la première fois. Quant à la deuxième phase, elle représente l’indépendance du royaume en 1956 et l’implication des acteurs marocains, relevant de divers ministères, dans l’aménagement du territoire de la vallée.
Par la suite, la lecture historique et l’analyse diachronique des projets d’aménagement à l’échelle de la vallée du Bouregreg seront poursuites par une présentation du nouveau projet d’aménagement et de mise en valeur de la vallée, initié en 2001, porté par la monarchie marocaine, d’où le poids politique du projet sur le plan national.
L’entrée par les perceptions et les pratiques
Dans toute analyse du paysage se référant aux projets d’aménagement du territoire, l’interrogation des perceptions et des pratiques des acteurs locaux est une entrée indispensable. L’intérêt d’une telle entrée est de saisir les éléments invisibles par l’observation directe du paysage, notamment, la sensibilité paysagère dans la culture locale, les formes ou les logiques d’appropriation de l’espace et les rapports de forces socioéconomiques entre les acteurs locaux. Ces éléments restent insaisissables par l’observation directe et objective. Il s’agit ici d’interroger la subjectivité du paysage dans sa dimension immatérielle, pour compléter le diagnostic des paysages actuels.
Méthodologie de l’enquête
La méthode de l’enquête choisie s’est orientée vers des entretiens semi-directs afin de faire exprimer librement les interviewés. Dans la mesure où cette technique d’entretien repose sur une approche qualitative, le but n’est plus de faire exprimer un maximum de personnes, mais plutôt choisir les « Acteurs clés » ayant une liaison et/ou un impact directe sur l’aménagement de la vallée.
De manière à répondre à nos questionnements, un guide d’entretien a été réalisé, formé de quatre grilles, chacune a été dédiée à une catégorie d’acteurs. Il faut noter que les grilles d’entretien ne sont qu’une trame constituée de questions ouvertes, autour de quatre axes thématiques : le volet managérial du projet, le paysage, le patrimoine et le volet social. Chaque axe a été détaillé en plusieurs questions, certaines ont été préparées à l’avance, d’autre sont apparues au fil des entretiens, ou à contrario sont passés sous silence (des exemplaires de grilles d’entretien sont consultables en annexes 13).
L’enquête et ses objectifs
Les entretiens semi-directs ont été guidés par la volonté de saisir comment le paysage est appréhendé par les acteurs marocains, quels soient des institutionnels ou de la société civile. La question de la sensibilité paysagère dans la culture marocaine a été mise en avant en interrogeant les perceptions des individus de la société civile, principalement les usagers de la vallée du Bouregreg, vis-à-vis de ce territoire. Quant aux acteurs institutionnels, nous avons interrogé principalement les responsables de l’Agence pour l’Aménagement de la vallée du Bouregreg (AAVB), comme étant la maîtrise d’ouvrage chargée du nouveau projet d’aménagement, dans le but de mettre en lumière quelle prise en compte des spécificités paysagères de la vallée dans le nouveau projet ?
L’intérêt de cette démarche d’enquête semi-directif se trouve principalement dans le contenu des énonciations et non pas dans l’exhaustivité des individus interviewés.
Identification et catégorisation des acteurs à interviewer
Avant de procéder aux entretiens, les acteurs concernés par l’aménagement de la vallée du Bouregreg ont été classés au préalable en deux grandes catégories et cinq sous-catégories, selon le statut, la relation et/ou la pratique entretenue avec le territoire de la vallée. L’organigramme suivant récapitule les catégories d’acteurs que nous avons identifiés.
Déroulement et mise en œuvre des entretiens semi-directifs
Afin de répondre aux contraintes de la mobilité entre la France et le Maroc, dans le cadre de la cotutelle de thèse, il a été décidé de mener les entretiens en deux périodes. La première a été programmée entre les mois de Juillet et Septembre 2018 ; quant à la deuxième, elle a été planifiée entre Décembre 2018 et Janvier 2019.
Dans le cas des entretiens semi-directifs, le choix qualitatif des « personnes ressources » à interviewer est une étape délicate. Comme il a été évoqué antérieurement, cette technique d’entretien est d’ordre qualitatif, le but n’est pas de faire exprimer un nombre exhaustif d’acteurs, mais plutôt identifier ceux qui sont les plus représentatifs et qui pourront apporter le plus d’information.
Une série d’entretiens a été menée avec les acteurs gravitant autour du projet de la vallée du Bouregreg. Nous avons interviewé au total douze personnes, de catégories différentes dont, des directeurs de pôles à l’AAVB, le propriétaire d’un bureau d’études privé, des acteurs professionnels locaux (pêcheurs et barcassiers), un responsable à la Direction du patrimoine du Ministère de la culture, et des membres des associations de la société civile (Voir le tableau récapitulatif des acteurs interviewés en annexe 14).
Tous nos interlocuteurs ont accepté notre demande d’entretien dès la première tentative, nous n’avions eu aucun refus. Les entretiens ont duré entre 20 minutes et une heure, ils n’ont pas été enregistrés dans l’ensemble, puisque certains interlocuteurs ont préféré que leurs propos ne soient pas enregistrés. Par ailleurs, toutes les entrevues réalisées ont été intégralement transcrites manuellement, soit à partir des enregistrements, ou de la retranscription libre1 à partir des réponses notées directement au moments de l’entretien (quelques transcriptions sont consultables en annexes). Les six interviews réalisées en dialecte arabe marocain ont été traduites en français, puis retranscrites, ce qui a rendu cette étape longue et fastidieuse, dont nous n’avions eu aucun recours aux logiciels de transcription.
L’urbanisation de la vallée du Bouregreg : un phénomène ancien
La position à l’embouchure du fleuve Bouregreg a donné naissance à une urbanisation précoce dans la vallée, marquée par le la naissance de deux premiers noyaux urbains de part et d’autre de l’embouchure du fleuve Bouregreg, en l’occurrence, la Médina de Salé en premier, puis la Kasbah des Oudayas et la Médina de Rabat par la suite (Figures 2 & 3).
D’un point de vue morphologique, les deux rives de l’embouchure du Bouregreg sont contrastées (Figure 2). La rive droite est une côte basse, où l’ensablement naturel a écarté davantage l’eau du fleuve et des marées de la Médina de Salé. Tandis que la rive gauche est plus élevée, elle domine l’océan atlantique depuis un promontoire rocheux d’environ une trentaine de mètre de haut, sur lequel s’est implanté le premier noyau urbain de la ville de Rabat, il s’agit de la Kasbah des Oudayas.
Depuis leur fondation aux alentours de l’embouchure du Bouregreg, les deux noyaux historiques formés par la cité de Salé et celle de Rabat, se sont implantés sur les zones les plus protégées des crues du fleuve. L’étalement urbain des deux cités a été pratiquement confiné, pendant une longue période, au sein des enceintes de leurs Médinas, donnant naissance à une morphologie urbaine spécifique que partage toutes les Médinas du Maroc.
L’évolution de l’urbanisation à l’échelle de la vallée du Bouregreg au XXe siècle : une évolution rapide et contrastée
Sous le protectorat français (1912-1956), la zone urbaine intramuros des deux cités a été appelée à une expansion extramuros significative (croissance démographique, exode rurale, nouveaux arrivants…). Du côté de Rabat, au début des années 1950, parallèlement aux développements urbains planifiés de la ville, (nouveaux quartiers : Agdal, Mabella, Takaddoum, etc.), des quartiers informels ou précaires vont se former dans diverses parties de la capitale, notamment aux rebords la vallée du Bouregreg (d’après l’Agence urbaine de Rabat-Salé).
L’expansion urbaine s’est énormément accélérée au cours de la deuxième moitié du XXe siècle. Rabat s’est progressivement avancé de 10 kilomètres le long de la route des Zaërs (AAVB, PAG partie II, 2003, p.23), le plateau étant occupé par les quartiers aisés, et les versants du Bouregreg par des quartiers populaires, des bidonvilles et des quartiers non réglementaires (Takaddoum, Douar Hajja, Douar Doum, Quariat Ouled Moussa -appelé communément Elquaria-, Douar Ounq Jmel…) (Figure 4).
Sur la rive droite qu’occupe la ville de Salé, celle-ci a connu une urbanisation importante, plus dense, en devenant au fil des années le réceptacle des populations rurales environnantes, à la recherche de travail à Rabat. La ville de Salé s’est vue progressivement remplir le rôle de la « cité-dortoir », pour une population dont les moyens économiques sont limités. Les occupations clandestines et non réglementaires se sont étalées en direction de Shoul, le plateau qui surplombe la plaine alluviale l’Oulja. La construction de la ville nouvelle Sala Al Jadida (Figure 4) a mis provisoirement fin à ce phénomène de développement de quartiers dortoirs à Salé.
La vallée du Bouregreg, malgré sa position centrale, est restée marginalisée. L’absence d’une urbanisation planifiée le long de ses deux rives5, dans une orientation du nord-ouest au sud-est, a cédé la place à l’extension progressive des bandes d’habitat non réglementaire constituant des quartiers spontanés. Ces fronts urbains d’habitat informel, soulignaient la lisière des plateaux qui surplombent la vallée du Bouregreg, en amont de Rabat et de Salé. Les conséquences de cet étalement urbain incontrôlé sur le paysage de la vallée du Bouregreg fera l’objet de diagnostic dans la 2ème partie (chapitre 5) et la 3ème partie (chapitre7).
La vallée du Bouregreg : une discontinuité paysagère et un lieu de passage incontournable entre Rabat et Salé
La vallée du Bouregreg est un passage obligé pour qui veut rejoindre Rabat de Salé ou vice-versa. Les échanges entre les deux rives ne cessent de croitre, entre Salé, dont la fonction résidentielle est la plus dominante, et Rabat, principale fournisseur d’emplois. Les échanges entre les deux rives se font en transport en commun, ferré ou routier. Ce passage incontournable se traduit concrètement sur l’image du territoire de la vallée, par une maille d’infrastructure de liaison, marquée par les rocades urbaines et les ponts mis en place pour faciliter la mobilité entre les deux rives de la vallée du Bouregreg (Figure 5).
Pour répondre aux besoins croissant de la mobilité entre les deux rives de la vallée, un nouveau moyen de transport a été mise en place, en 2001, le Tramway de Rabat-Salé, pour relier les centres villes de Rabat et de Salé, ainsi que les principaux pôles d’activité : centres administratifs, universités, hôpitaux, gares ferroviaires et routières. Entre 2014 et 2018, trois nouveaux ponts ont été mis en service, dont un est un pont à hauban, situé en amont de la vallée, à vol d’oiseau du Barrage SMBA. En Juillet 2018, une nouvelle rocade urbaine (Rocade N°2) a été inaugurée. D’après l’AAVB, cette nouvelle infrastructure routière, permettra de résorber de 28 à 30% du trafic total transitant entre Rabat et Salé.
Le patrimoine « naturel » de la basse vallée du Bouregreg : composantes et caractéristiques
Etant dominé par un fort caractère urbain à l’échelle du secteur aval (l’embouchure) en lien avec l’agglomération de Rabat-Salé, le secteur centre et la partie amont de la basse vallée du Bouregreg sont marqués par un caractère plutôt « naturel ». Ce patrimoine « naturel » est lié à des composantes paysagères de la vallée, que nous avons défini en s’appuyant sur la présence de l’eau et de la végétation, ainsi que la configuration topographique du terrain (Tableau 1). Ces composantes sont les zones humides du fond de vallée, les versants à végétation naturelle ou boisée, et la plaine alluviale agricole (Figure 6).
Les zones humides estuariennes : la composante paysagère majeure de la basse vallée du Bouregreg
La vallée est traversée par l’oued Bouregreg dans son cours inférieur, où il est soumis aux effets de la marée montante de l’océan atlantique. De ce fait, le fond de vallée est plutôt un estuaire. Les zones humides estuariennes soumises au balancement des marées présentent un fort potentiel de biodiversité. Le mélange des eaux douces fluviales et des eaux salines apportées par la marée montante de l’océan crée les deux richesses naturelles évidentes : la végétation et l’avifaune (IAURIF, 1998, p.49).
La flore halophile est la plus dominante des végétations estuariennes, son développement a été favorisé par la construction du barrage SMBA en amont de la vallée. Cette végétation continue à progresser davantage vers l’amont, sous l’effet de la diminution de l’apport d’eau douce dans l’estuaire (effet du barrage), au profit des intrusions salines (L’impact du barrage sur la biodiversité du fleuve Bouregreg sera diagnostiqué dans la 2ème et la 3ème partie). Les formations végétales halophiles de l’estuaire du Bouregreg varient de l’aval vers l’amont, suivant un gradient de salinité décroissant :
Près de l’embouchure (Figure 6), où le taux de salinité est élevé, la Salicorne vivace (Salicornia perennis) et la Spartine raide (Spartina maritima) dominent la flore de la sansouire de la rive droite classée SIBE (INGEMA, 2002, p.38) ;
Dans le cours intermédiaire, au milieu de l’estuaire, la végétation se diversifie mais reste dominée par les chénopodiacées (Salicornia arabica et Sudea fructicosa) et les plombaginacées (Limonastrum) (INGEMA, 2002, p.38). C’est notamment le cas de la plus grande zone humide de la basse vallée, située au contrebat du Chellah.
En amont, les joncs et les roseaux d’eau douce ou peu salée dominent la végétation des berges de l’oued Bouregreg et de son affluent Akrech, ainsi que les deux îlots de la Héronnière (HCEF, PDAP, 2013, p.3).
Sur le plan faunistique, les zones humides estuariennes du Bouregreg est un important site d’hivernage pour les oiseaux, ce sont de véritables refuges pour certaines espèces d’oiseaux, où ils trouvent les conditions idéales d’habitats et de nourriture, notamment les hérons et les cigognes (IAURIF, 1998, p.52-55). D’autres espèces animales étroitement lié au milieu aquatique, comme les poissons, les mollusques, des amphibiens, les reptiles, et les mammifères, sont très répandues dans les milieux aquatiques du Bouregreg (INGEMA, 2002, p.3).
En raison des atouts et des potentialités écologiques de l’écosystème estuarien du Bouregreg, deux de ses zones humides sont classées par le plan directeur des aires protégées (PDAP) au Maroc, des sites d’intérêt biologique et écologique (SIBE) du domaine littoral (AAVB_CID_Pôle AEE, 2007). La première est une sansouire située en amont du pont ferroviaire (pont ONCF), en contrebas du Chellah (Figure 6). La deuxième est localisée en amont de la vallée, sous formes de deux petits ilots isolés de la Héronnière (HCEF, PDAP, SIBE littoraux/Vol.3, p.75). Ces deux zones humides forment des écosystèmes riches en espèces autochtones, ils sont constitués d’une association rare, de colonie mixte d’échassiers, le Héron et la Cigogne, devenue rare au Maroc (IAURIF, 1998, p.108).
Les espaces à végétation naturelle ou boisée
Les espaces « naturels » périphériques, en amont de Rabat et de Salé, marquent de grands paysages par des formations végétales spontanées, dominées par les arbustes et les plantes herbacées, sur les versants, les collines et même les plateaux (Figure 6). Ces masses de vert foncé, irrégulières, sont dominées par une espèce autochtone, le palmier nain, appelé localement Doum, à laquelle s’associent une sorte de garrigue, des plantes bulbeuses indigènes (le colchique et le grand asphodèle), des plantes grasses (les agaves et les cactus) et des espèces annuelles, souvent des adventices des cultures (lié en particulier à la céréaliculture) (IAURIF, 1998, p.51). La ponctuation des masses de garrigue dominée par le palmier nain, sur un fond herbacé, est le caractère marquant du paysage des versants. Or, une part de cette formation végétale naturelle spontanée a été décapée par les carrières d’extractions des matériaux de construction (argile, calcaire, graviers et gravettes) (AAVB, PAG partie IV, 2003, p.130) ; alors que d’autres zones sont plutôt soumises à une activité pastorale extensive, dominée par l’élevage ovin, bovin et des caprins (IAURIF, 1998, p.51).
La région de Rabat-Salé-Kénitra est marquée par la présence d’importants massifs forestiers, il s’agit de la subéraie de la Maâmora et la forêt de Temara (AAVB,PAG partie IV, 2003, p.128). Or, dans la vallée du Bouregreg, ce n’est pas le cas, les espaces à végétation arborée spontanée sont beaucoup moins répandues, en termes d’espèces et de superficie. La plus vaste forêt est celle de « Ain Lehouala », une forêt de thuya domine le complexe artisanal de Salé, située entre les quartiers de Bettana et de Hay Moulay Ismail, sur la rive droite de la vallée (Figure 6), elle s’étend sur une superficie d’environ 128 ha (L’Economiste, 2009)6. D’autres espaces arborés de moindre taille sont localisés le long de la voie ferroviaire (Photo 5).
La vallée du Bouregreg comprend peu d’espaces reboisés, les espèces végétales les plus utilisées dans les opérations de reboisement, souvent pour fixer les versants contre l’érosion (AAVB, PAG partie IV, 2003, p.128) sont les Eucalyptus, Thuya, Pistachier et les acacia (Figure 6). La majorité de ces plantations sont dans un état de dégradation.
Les espaces agricoles dans la plaine alluviale inondable : une composante paysagère en constante régression
Les champs agricoles verts clairs ou jaunes (selon les saisons), tapissent la majeure partie du fond de la vallée du Bouregreg. Sur ce fond pratiquement plat, au même niveau de la mer, s’étend la plaine agricole de l’Oulja. Cette vaste plaine alluviale marécageuse (sous l’effet des eaux des marées, des pluies et des lâchés du barrage SMBA), contribue au caractère du grand paysage du fond de vallée (IAURIF, 1998, p.36), très ouvert, ponctué par quelques bâtiments (maisons de campagne, bâtiments d’élevage intensif de volaille…) dispersées de part et d’autre (Dugué et Bekkar, 2016, p.14).
Les espaces agricoles exploitent la majeure partie de la plaine alluviale l’Oulja, son potentiel agronomique (fertilité des terres, disponibilité de l’eau) agrémente le paysage par une mosaïque de champs, de vergers et de parcelles.
Les principales cultures qui marquent le paysage agricole de ce fond de vallée (Dugué &
Bekkar, 2016, p.15) sont :
La céréaliculture : blé, orge et maïs ;
Les cultures protéagineuses : Fève, lentilles et pois-chiche ;
Les cultures fourragères : la luzerne ;
Les cultures maraîchères : piment, courge, artichaut, tomate… ;
L’arboriculture fruitière : oranger, citronnier, olivier.
Au-delà du potentiel paysager des espaces agricoles dans la vallée du Bouregreg, l’agriculture contribue directement dans la gestion d’un espace soumis à des risques d’inondation (c’est une plaine inondable) et de procurer un intérêt socio-économique.
L’ensemble des composantes paysagères « naturelles » que nous venons de présenter montre que la basse vallée du Bouregreg recèle un potentiel paysager où se conjugue la valeur biologique, écologique et bucolique.
Le patrimoine monumental de Rabat-Salé : une composante du paysage de la vallée du Bouregreg, d’une valeur universelle
Au-delà de sa position géographique centrale par rapport à l’agglomération Rabat-Salé, il apparaît que l’identité patrimoniale de la vallée du Bouregreg demeure importante. La profondeur historique de la vallée du Bouregreg est souvent associée à la grande ancienneté de l’implantation humaine dans la zone estuarienne, depuis la préhistoire, jusqu’aux époques contemporaines.
La vallée du Bouregreg regorge de monuments et de sites historiques dont la valeur est indéniable, elle est l’une des rares vallées au Maroc, densément chargées de sites et de monuments historiques majeures. Le paysage de la partie aval de la vallée, aux alentours de l’embouchure, est caractérisé par une juxtaposition de monuments issues d’époques diverses, témoins de chaque période de son histoire, formant un ensemble patrimonial riche et exceptionnel. D’après l’AAVB, la vallée compte plus de dix-huit sites historiques et archéologiques sur ces deux rives (annexe 1), dont les principaux qui ont le plus d’impact d’un point de vue paysager sont représentés sur la figue 7.
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Table des matières
Introduction générale
Partie I. Approche méthodologique et terrain d’étude
Chapitre 1. L’approche méthodologique Le paysage de la basse vallée de l’oued Bouregreg appréhendé par les projets d’aménagement
Chapitre 2. Le contexte paysager de la vallée du Bouregreg : une mosaïque de composantes « variées » et « contrastées »
Chapitre 3. Les usages et les pratiques liés à la vallée du Bouregreg
Partie II. Un siècle d’aménagement de la basse vallée du Bouregreg Trajectoire de transformation du paysage entre 1912 et 2001
Chapitre 4. La vallée du Bouregreg durant la période du protectorat français : entre les prémices d’aménagement et la sauvegarde patrimoniale !
Chapitre 5. L’évolution du paysage de la vallée du Bouregreg durant la 2ème moitié du XXe Siècle Phénomène d’urbanisation contraignant et Projets d’aménagement avortés
Chapitre 6. Pour une agglomération internationale et moderne, la vallée du Bouregreg se métamorphose au rythme d’un projet d’envergure initié en 2001
Partie III. La basse vallée du Bouregreg : un support pour le développement urbain de l’agglomération Rabat-Salé
Chapitre 7. La vallée du Bouregreg : un nouvel espace à urbaniser Lecture et analyse des mutations paysagères
Chapitre 8 : Les enjeux paysagers et patrimoniaux du projet d’aménagement de la vallée du Bouregreg
Discussion et Essai d’évaluation des mutations de la zone de l’embouchure
Conclusion générale
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