Un pré-adolescent malmené et bousculé par ses sens

La présentation de l’EMP

   L’Externat Médico-Pédagogique (EMP) est répertorié comme un établissement médico-social. Il a reçu son agrément d’ouverture en 2001 et il est l’un des multiples établissements gérés par l’association EntrAide Universitaire. Il prend place dans une grande maison bourgeoise rénovée. Derrière le bâtiment, se trouve une grande cour de récréation. L’EMP est destiné à accueillir, selon son agrément, quarante enfants et adolescents, âgés de quatre à quatorze ans, présentant des troubles autistiques et autres troubles envahissants du développement sévères. Les enfants sont adressés à l’EMP par la Maison Départementale des Personnes Handicapées (MDPH), par le biais d’une notification de la Commission des Droits et de l’Autonomie des Personnes Handicapées (CDAPH). Ces enfants ne peuvent pas débuter une scolarité ordinaire ou la poursuivre sans aide. Lorsqu’ils sont scolarisés, des aménagements du temps scolaire sont mis en place avec la présence d’une Auxiliaire de Vie Scolaire (AVS). Le personnel se compose d’un directeur, d’une cheffe de service, d’une secrétaire de direction, d’une comptable, d’éducateurs, de moniteurs éducateurs, d’une psychiatre, de psychologues, de psychomotriciennes, d’enseignantes, d’une assistante sociale d’un professionnel en mimothérapie et d’une équipe s’occupant des services généraux (un chauffeur, des agents d’entretien, des cuisinières, un agent technique…). L’EMP accueille les enfants tous les lundis, mardis, jeudis et vendredis de 9 à 16 heures et, les mercredis et un samedi par mois de 9 heures à 12h15. Un circuit de ramassage, par minibus, est organisé par une société de transports. Concernant les repas du midi, ils sont encadrés par le personnel éducatif et par les psychomotriciennes. Il s’agit d’un temps à la fois éducatif et thérapeutique. Les enfants et adolescents de l’EMP sont répartis sur trois groupes éducatifs hétérogènes (groupe 1, groupe 2 et groupe des grands) et chaque groupe se divise en sous-groupes qui possèdent chacun leurs propres spécificités. Ces groupes sont encadrés par quatre éducateurs et bénéficient d’une enseignante, d’une psychologue ainsi que d’une psychomotricienne référente.L’EMP tente de répondre aux besoins des jeunes dans l’objectif de favoriser leur développement psychomoteur et leur autonomie afin qu’ils puissent au mieux agir sur leur milieu et interagir avec autrui. Voilà pourquoi, ils nécessitent un accompagnement individualisé et des approches et interventions éducatives, thérapeutiques, pédagogiques, et sociales. Chaque jeune possède alors un emploi du temps qui découle du Projet Individualisé d’Accompagnement (PIA). Toutes les activités auxquelles il participe, de manière individuelle ou collective, y sont inscrites. En plus des entretiens, un cahier de transmission d’informations est mis en œuvre entre la famille et les référents de l’enfant afin d’échanger et d’ajuster l’accompagnement en fonction du parcours de l’enfant tout au long du suivi.

Le bilan psychomoteur

a) Aspect comportemental : D’après mes observations psychomotrices, j’ai pu constater qu’Henry était très sonore. Il crie la plupart du temps et je relève la présence de stéréotypies visuelles. Lors de la séance d’observation, il me parait plus agité que d’habitude. Je me demande si son instabilité est liée au fait que ce soit moi qui dirige la séance ou aux activités qui le contraignent d’être plus longtemps assis à une table.
b) Sphère relationnelle : Au niveau relationnel, il peut entrer facilement en contact avec autrui et se montrer souriant. Il participe aux jeux proposés et sait me solliciter quand il veut rejouer avec moi. Il est capable de me regarder dans les yeux en soutenant mon regard, je ne remarque pas d’évitement de contact visuel. Il cherche souvent le regard de l’adulte lorsqu’il exécute une activité. L’attention conjointe4 est seulement possible quand il porte un intérêt à l’activité qui se déroule.
c) Motricité globale et fine : Concernant ses capacités motrices, il est plutôt à l’aise dans les activités mettant en jeu la motricité globale. Par contre, lorsqu’il escalade l‘espalier, il n’alterne pas ses pieds, c’est-à-dire qu’il monte et descend les barreaux toujours avec son pied gauche, qui est ici, son « pied explorateur » pendant que son pied droit est « porteur » (Bullinger, 2017b, p.34). Cela ne se produit pas dans les escaliers où ses pieds sont alternativement explorateurs et porteurs. Les barreaux de l’espalier offrent moins de points d’appui que les marches, ce manque d’information sensorielle au niveau plantaire peut expliquer ce défaut d’alternance. Au niveau de la motricité fine, cela s’avère plus difficile. Je constate que ses coordinations oculo-manuelles et que ses coopérations bi-manuelles sont présentes durant l’exécution d’une tâche. Cependant, ses coordinations bi-manuelles ne sont pas encore spontanément mises en place. De plus, il n’adapte pas toujours son geste et persiste avec la manière dont il a procédé la fois précédente. Il coordonne ses deux mains exclusivement lorsque cela lui est indispensable pour réaliser une activité.
d) Tonus : Ensuite, il est possible d’observer chez Henry un trouble de la régulation tonicoémotionnelle. Effectivement, il a tendance à être hypertonique. Lorsqu’il est en position d’équilibre, ses jambes se tonifient entrainant son buste vers l’avant jusqu’à le déséquilibrer. Il peut tenir seulement quelques secondes. Sur une planche ou en montant les marches d’un escalier, il se met parfois sur la pointe des pieds. Cela peut être mis en lien avec sa recherche de sensations proprioceptives et/ou vestibulaires qui expliquerait son besoin d’être constamment en mouvement. Lorsqu’il s’allonge sur un tapis ou sur une physioball et qu’il se sent suffisamment en confiance avec la personne qui l’entoure, il peut relâcher ses tensions et abaisser son tonus. Ses émotions ne sont pas toujours contrôlées et comprises ce qui tend à le désorganiser.
e) Fonctions exécutives : Il montre des difficultés à se poser sur une activité à table, celle-ci est souvent vite expédiée. Lorsque je lui propose un puzzle, il le reconstitue mécaniquement, sans aucune réflexion. Il est très rapide. Il se réfère à la forme globale des pièces sans prêter attention aux détails.
f) Graphisme : Ses productions graphiques sont très pauvres par rapport à son âge chronologique. Il est au premier stade, celui des gribouillis. Ses traits n’ont pas de limite. Par ailleurs, sur imitation, il est capable de reproduire un rond fermé malgré sa difformité. Il parvient également à faire des traits verticaux et horizontaux. Par contre, il ne peut dessiner d’autres éléments. Il est à préciser qu’il a une mauvaise tenue du crayon, il est en prise palmaire haute.
g) Représentation corporelle : Malgré ses onze ans, il n’a donc pas encore accès à la représentation du bonhomme par dessin. Sans guidage, il peut montrer ou dire où se trouve sa tête, le nez, les bras, les mains et les pieds. Mais, pour le reste, il est difficile de savoir s’il les connait ou si cela est dû au hasard. Lorsqu’il ne répond pas, j’ai des difficultés à déceler si cela est parce qu’il ne veut pas, ne comprend pas ou parce qu’il ne sait pas. Henry reste beaucoup dans l’imitation.
h) Langage : Pour terminer, ses moyens de communication demeurent pauvres. Pour s’exprimer oralement, il n’emploie que quelques mots simples. Il répond parfois par écholalie et répète des interjections qu’il apprécie. Autrement, il a tendance à jargonner. Cela est incompréhensible, mais bien articulé.

Les premières explications de l’autisme

   Tout d’abord, le terme autisme vient du mot grec autos qui signifie « soi-même» (« Autisme », s. d.). Le terme d’autisme est inventé en 1911 par le psychiatre suisse, Bleuler. Il désigne l’une des manifestations secondaires à la schizophrénie chez le jeune adulte, c’est-àdire la perte du contact avec la réalité extérieure qui rend difficile, voire impossible pour le patient toute communication avec autrui. Ensuite, c’est en 1943 que le pédopsychiatre Kanner décrit pour la première fois l’autisme dans son étude, Les perturbations autistiques des contacts affectifs. L’autisme infantile est pour lui une forme de psychose, distincte de la schizophrénie infantile et adulte. L’autisme de Kanner se caractérise, selon les termes de la classification internationale des maladies de l’OMS CIM-10, F84.0, par «un développement, anormal ou déficient, qui se manifeste avant l’âge de trois ans, avec une perturbation caractéristique du fonctionnement dans chacun des trois domaines suivants: interactions sociales, communication, comportement (au caractère très restreint et répétitif)» (OMS, 2001, p.13). Il met en avant deux causes de l’autisme. D’un côté, les origines génétiques ou neuro-développementales du fait de lasurvenue précoce de ces troubles et de l’autre, la carence affective du milieu familial où il décrit souvent une distance et une froideur affective des parents. Bettelheim (1969), psychologue américain d’origine autrichienne, reprend la théorie de Kanner dans son ouvrage La forteresse vide. Il tente de prouver que l’autisme est causé par une blessure narcissique provenant d’un déni de l’existence de l’enfant par ses parents, et plus particulièrement par sa mère. A la suite de la diffusion de cette idéologie, des enfants ont été arrachés à leur famille dans le but de les soigner pardes méthodes éducatives, reconnues aujourd’hui comme étant maltraitantes. Cette théorie a donc été réfutée à la survenue d’hypothèses scientifiques. En 1944, Asperger, pédopsychiatre autrichien, décrivit des troubles du comportement chez plusieurs enfants ayant un développement de l’intelligence et du langage normal. Cependant, ils présentaient une déficience marquée dans leurs interactions sociales et dans leur manière de communiquer. C’est ce qu’il nomma la « psychopathie autistique » (Schulz & Sartorius, 2016, p. 101). Dans les années 1950, plusieurs théories psychogénétiques apparaissent, notamment celle de Bender en 1959. Pour cette neuropsychiatre américaine spécialisée dans les enfants, l’autisme est la conséquence d’un mécanisme de défense psychique qui découle d’une lésion innée du système nerveux central (Bettelheim, 1969). Dans les années 1970, à l’issue des progrès en neurosciences, il est pensé que l’autisme est un problème neurologique et physiologique. De plus, des études chez les jumeaux confirment que la génétique contribue grandement aux troubles du spectre autistique. Une concordance a été repérée à 92% chez les vrais jumeaux et 10% chez les faux jumeaux pour ce trouble (Institut Pasteur, 2016). Entre 2005 et 2009, ces chiffres ont été réactualisés et ils étaient respectivement de 77 à 95% et de 31% (Ibid, 2016).

Les troubles envahissants du développement : DSM-IV et CIM-10

   Durant cette même période, Wing (1992), chercheuse anglaise, a prouvé à travers une étude clinique et statistique que trois catégories de symptômes, appartenant aux troubles envahissants du développement (TED), constituaient un syndrome. Cela donna naissance à la triade de Wing qui sera reprise dans la CIM-10, en 1993. Cette dimension catégorielle a été longtemps reconnue comme la classification de référence par la Haute Autorité Sanitaire (HAS, 2018). Elle définit l’autisme comme étant un TED (code F84), c’est-à-dire un « groupe de troubles caractérisés par des altérations qualitatives des interactions sociales réciproques et des modalités de communication, ainsi que par un répertoire d’intérêts et d’activités restreint, stéréotypé et répétitif» (HAS, 2012, p.18). La CIM-10 distingue huit formes de TED, l’autisme infantile, l’autisme atypique, le syndrome de Rett, autre trouble désintégratif de l’enfance, l’hyperactivité associée à un retard mental et à des mouvements stéréotypés, le syndrome d’Asperger, autres troubles envahissants du développement et le trouble du développement sans précision supplémentaire. Le DSM-IV, publié un an après la CIM-10, regroupe en cinq catégories les TED. Il y a l’autisme qui se réfère à l’autisme infantile de la CIM-10, le syndrome de Rett, le trouble désintégratif de l’enfance, le syndrome d’Asperger, le trouble envahissant du développement non spécifié incluant l’autisme atypique de la CIM-10. Désormais, l’autisme est de plus en plus regroupé sous l’appellation générique des troubles du spectre de l’autisme. Il demeure un trouble envahissant du comportement dont les causes sont encore très mal définies. Il existe encore plusieurs controverses concernant la classification et le diagnostic de l’autisme qui sont constamment remaniés. En attendant l’application de la CIM-11, je prends le parti de suivre les recommandations de l’HAS de 2018 qui consistent à prendre en compte la classification du DSM-5, étant la forme la plus actualisée. Il est à préciser que les caractéristiques de l’autisme, couvrant un large spectre, varient considérablement d’une personne à l’autre.

Les troubles du langage

 Les troubles du langage sont très fréquents dans l’autisme. Dans la revue Sur le spectre, Gagnon (2019) précise que le langage oral ne s’acquiert pas aisément et qu’il implique un long processus d’apprentissage. « La bouche est un carrefour où se croisent la respiration, l’alimentation, la voix, la parole et l’articulation » (Barral, Ben Youssef, Lheureux-Davidse, & Varro, 2010, p. 540). Il est alors nécessaire que les expériences sensori-motrices de la zone orale soient au préalable inscrites et qu’elles puissent être de nouveau recrutées par la suite. C’est souvent ce qui s’avère complexe pour les enfants autistes non-verbaux. Leur sphère ORL doit être ressentie comme un lieu d’interaction pour assurer le développement du langage relationnel. (Barral et al., 2010, p. 513). Ce n’est qu’aux alentours des quatre ans, généralement, qu’un enfant maitrise sa langue maternelle. Il semblerait que l’environnement et les relations sociales joueraient un rôle essentiel dans cette acquisition (Gagnon, 2019). Des études ont démontré que dès leur naissance, les enfants typiques étaient exposés à plusieurs sortes de langage verbal et que celui entendu lors d’une relation sociale aurait une plus grande influence sur le développement que celui provenant d’un support multimédia (Ibid, 2019). Voilà pourquoi, il est communément pensé que le retard de langage d’un enfant autiste découle de ses difficultés d’interaction et de communication. Toutefois, en prenant l’exemple de la langue Arabe, l’article prouve qu’en réalité les autistes emprunteraient seulement une autre voie d’apprentissage. Pour rappel, l’Arabe comprend deux formes. La forme dialectale est celle qui est utilisée pour parler et qui est transmise aux enfants. Quant à la forme formelle, bien qu’elle soit plutôt dédiée à la rédaction ou aux discours officiels, elle est aussi employée dans le discours de certains personnages de dessins animés. Après avoir comparé les discours des enfants typiques et neurotypiques, âgés entre cinq et dix ans, les experts ont constaté que les enfants autistes utilisaient majoritairement l’Arabe formel alors que les enfants typiques ne parlaient qu’avec la forme dialectale parlée par leur entourage. L’intérêt pour le langage oral ne se situe donc pas au même niveau (Ibid, 2019). « Il est important de distinguer chez l’enfant autiste qui s’est démutisé la possibilité de parler, d’émettre des mots et des phrases, de la capacité à se saisir de l’utilisation sociale conventionnelle du langage » (2019, p. 522). Parler est un fait mais mettre du sens sur ses propos et appliquer le langage de façon adéquate tout en respectant les codes sociaux en est un autre. Maitriser cette combinaison est très compliqué pour les enfants autistes.

TEACCH : Treatment and Education of Autistic and Related Communication Handicapped Children

   Cette méthode est issue d’une approche cognitivo-comportementale qui s’ajuste au fonctionnement cognitif particulier des enfants autistes (Rogé, In Tardif, 2010, pp.23-58). Elle implique une collaboration entre les parents, les professionnels de santé et les enseignants. En structurant l’environnement, valorisant les habilités fonctionnelles et la gestion des comportements-problèmes, elle permet à certains autistes d’avoir une meilleure grille de lecture sur leur environnement. Elle offre alors, aux psychomotriciens, la possibilité d’avoir une approche globale et des objectifs limpides et adaptés (Perrin & Maffre, 2013).

Les particularités sensorielles d’Henry

   Les hypersensibilités créent de fortes intolérances sensorielles chez les personnes autistes. Par exemple, elles peuvent se déshabiller lorsque le contact d’un vêtement sur leur peau leur fait mal. Les hypersensibilités donnent lieu à des comportements qualifiés de déviants (Grandin, 2000). C’est ce que j’ai pu observer chez Henry à plusieurs reprises. Je tiens à préciser qu’un Profil sensoriel de Dunn (2010) a été entamé pour Henry mais qu’en raison de la crise sanitaire, l’analyse des résultats et leurs interprétations n’ont pas pu être achevées avant la fermeture temporaire de l’EMP. Je vais donc m’appuyer sur mes hypothèses qui ont découlé de mes observations. Au niveau tactile, Henry parait hyposensible. Il ne semble pas percevoir la douleur lorsqu’il enfonce mes ongles ou sa fourchette dans la peau, ni les températures fraiches. Il recherche toujours les surfaces dures et froides. Il n’est pas hypersensible au contact léger. Il n’exprime aucune gêne lorsque l’on effleure sa peau et n’est pas réticent aux chatouilles. Sur les aspects olfactif et gustatif, je n’ai rien remarqué de particulier lors du temps de repas ou des séances de psychomotricité mais cela ne signifie pas pour autant que ses seuils de sensibilités soient normaux. Sur le plan auditif, Henry me semble à la fois hyper- et hyposensible. D’un côté, il possède une sensibilité exacerbée envers certains bruits ou fréquences ce qui entraine une hyper-réactivité et de l’autre, il ne semble pas réagir suffisamment aux sons des voix humaines qui l’entourent, ce qui correspondrait à une hyporéactivité (Perrin & Maffre, 2013). Lorsque que les bruits lui sont intolérables, il cherche à se protéger en mettant un casque sur ses oreilles, il s’agite et devient bruyant. Une personne neurotypique, quant à elle, considérerait ces bruits comme étant insignifiants. Grandin (2019) explique que c’est comme avoir un amplificateur sur soiavec le son réglé au maximum. C’est peut-être l’effet qui est produit chez Henry et que c’est la raison pour laquelle il préfère que l’on chuchote pour s’adresser à lui. Lors de ses séances, avec la psychomotricienne qui le suit, nous nous apercevons que les murmures captent son attention et l’apaisent. Paradoxalement, il apprécie certaines intonations qu’il prend plaisir à répéter et qu’importent leurs fréquences. D’un point de vue psychanalytique, il est possible de parler d’un clivage entre les sonorités dures et celles qui sont douces, autrement dit, d’un clivage entre le bruit des syllabes perçu avec dureté et le son mélodieux de la voix (Tustin, 1986). Au niveau visuel, il est possible qu’il soit hyposensible. En plus de présenter des stéréotypies visuelles, il reste parfois fasciné par certains objets stimulants la vue. Il ne les quitte pas des yeux. Il me parait davantage attiré par le mouvement induit par l’objet plutôt que par les sources lumineuses. Il aime particulièrement regarder et toucher les balles anti-stress à pustules. Elles produisent alternativement des bulles d’air en fonction de la pression exercée sur ces balles. Ce type d’expériences visuelles lui sont plaisantes et lui procurent calme et sérénité. De plus, il lui arrive souvent de me fixer du regard ou mes lèvres qui bougent quand je parle. D’après l’interprétation de l’item « Regarde intensément les objets ou les personnes » du Profil Sensoriel et Perceptif de Bogdashina (2012, pp.254-268), cela correspondrait à une hyposensibilité visuelle.Concernant sa proprioception, il est difficile de savoir la manière dont il éprouve son propre corps mais certaines de ses attitudes peuvent nous en donner une idée. Habituellement, il est sur un versant hypertonique. La contraction et l’étirement de ses muscles, articulations et tendons lui procurent des sensations internes, qui peuvent lui être indispensables pour se sentir maintenu et exister (Bullinger, 2017a). Il marche ponctuellement sur la pointe des pieds ce qui entraine une contraction des muscles du mollet. Ceci peut aussi témoigner d’un besoin de ressentir ses membres inférieurs (D’Ignazio, 2019). Il cherche constamment à toucher son corps en profondeur. D’après ces observations, il semblerait hyposensible au niveau proprioceptif. Il parait aussi présenter une hyposensibilité vestibulaire. Cela peut s’expliquer par sa recherche permanente du mouvement. Henry montre des difficultés pour se poser et se relâcher. Il aime sauter, surtout en descendant les marches des escaliers. Il participe volontiers à la danse de Dansons la capucine pour se déplacer en cercle et sauter à la fin du chant. Il apprécie grandement les balades extérieures et les parcours moteurs où les niveaux varient. Il grimpe souvent en salle de psychomotricité sur les planches à bascule, le trampoline, les espaliers,  le banc, par exemple. Il sollicite aussi son éducateur référent pour qu’il le porte et le fasse tourner. Ses parents rapportent aussi qu’en saison hivernale, il est plus compliqué pour Henry de se dépenser à l’extérieur à cause de la météo. Il en résulte qu’il saute sur le canapé de la maison, probablement, pour compenser cette privation de stimulation vestibulaire.

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Table des matières

Les précautions de lecture
INTRODUCTION
I- Contexte institutionnel et description du patient
A. La présentation de l’EMP
B. La présentation du patient
C. Son anamnèse
D. Son entrée à l’EMP
a) Le suivi éducatif
b) Le suivi psychologique
c) Le suivi en psychomotricité
E. Le bilan psychomoteur
a) Aspect comportemental
b) Sphère relationnelle
c) Motricité globale et fine
d) Tonus
e) Fonctions exécutives
f) Graphisme
g) Représentation corporelle
h) Langage
F. La sémiologie psychomotrice
G. Les objectifs et axes thérapeutiques d’Henry
a) L’objectif thérapeutique
b) Les axes thérapeutiques
II- Qu’est-ce que l’autisme ?
A. Les premières explications de l’autisme
B. Les définitions et classifications
a) Les troubles envahissants du développement : DSM-IV et CIM-10
b) Les troubles du spectre de l’autisme : DSM-5
C. Les signes cliniques associés à l’autisme
a) Les mouvements répétitifs : les stéréotypies
b) Les troubles du sommeil
c) Les troubles anxieux
d) Les troubles gastro-intestinaux
e) Les troubles de la modulation sensorielle
f) Les troubles de l’alimentation
D. Les comorbidités
a) Les troubles du langage
E. L’épidémiologie
F. L’étiologie
G. Le diagnostic
H. Les méthodes de prises en soins
a) ABA : Applied Behaviour Analysis
b) TEACCH : Treatment and Education of Autistic and Related Communication Handicapped Children
c) Denver
d) TED
e) PECS
f) Makaton
g) LSF
III- La sensorialité et les perceptions
A. La perception
B. La perception d’un point de vue autistique
C. Les troubles de l’intégration sensorielle
D. Les troubles de la modulation du traitement de l’information
E. Les méthodes d’intégration sensorielle
IV- Les particularités sensorielles dans l’autisme
A. Hypersensibilité et hyposensibilité
B. Les particularités sensorielles d’Henry
C. La désensibilisation
D. L’équilibre sensori-tonique de Bullinger
V- Le développement sensori-moteur et l’impact des particularités sensorielles sur le développement psychomoteur
A. Le développement sensori-moteur
a) Espace utérin
b) Espace de pesanteur
c) Espace oral
d) Espace du buste
e) Espace du torse
f) Espace du corps
VI- La prise en soins d’Henry en psychomotricité
A. Les séances Snoezelen
a) A la découverte de la médiation Snoezelen
b) Le déroulement type d’une séance Snoezelen avec Henry : ses sens mis en éveil
c) Une séance interrompue par des maux de ventre
B. Les séances d’exploration sensori-motrice
a) En quête de sensations vestibulaires
b) Un travail d’accordage
c) Une séance rythmée
C. Son évolution au cours de l’année
VII- Sur quels fondements la psychomotricité repose-t-elle ? Quels bénéfices pour Henry ?
A. La spécificité du psychomotricien
B. Le dialogue tonico-émotionnel au cœur de la relation thérapeutique
C. L’instauration d’un cadre thérapeutique sécurisant et contenant
a) Le cadre thérapeutique
b) La fonction de contenance corporelle et psychique
D. De la sensation à la construction d’une unité corporelle
a) Niveau tonique
b) Niveau sensoriel
c) Niveau affectif
d) Niveau représentatif
E. La représentation du corps : construction du schéma corporel et de l’image du corps
a) Schéma corporel
b) Image du corps
c) La création des enveloppes en psychomotricité
d) Les limites du corps : dedans/dehors
e) Investissement et surinvestissement du corps
f) Le stade du miroir et l’image spéculaire
F. La mise en place du langage : Pourquoi Henry n’investit pas le langage ?
VIII- En séance, comment un psychomotricien favorise-t-il l’élaboration de l’unité corporelle ? Quelles médiations ?
A. Le toucher thérapeutique
a) L’importance d’être touché sur le plan psychique
b) Toucher et être touché physiquement
B. La médiation Snoezelen : quels bienfaits physiques et psychiques ?
a) Etymologie et origine du concept Snoezelen
b) Principes du concept Snoezelen
c) Indications et contre-indications
d) Aménagement de l’espace
e) Matériels
f) Ses bienfaits
IX- Quels outils sont mis en place quotidiennement à l’EMP pour structurer le temps et l’espace ? Quels autres outils pourraient aider à améliorer la qualité de vie d’Henry ?
A. Les stratégies mises en place par l’EMP pour structurer l’espace et le temps 
a) L’espace
b) Le temps
B. Les pistes de réflexion concernant le rythme des apprentissages et les espaces partagés
a) Une fréquence des prises en soins adaptée ?
b) Favoriser les temps en groupe ou individuels ?
X- Comment adapte-t-on le projet de soin à l’environnement familial ?
A. Le rôle du psychomotricien auprès des familles ayant un enfant autiste
B. Aménagement du temps : emploi du temps et respect du rythme d’Henry
a) Une semaine rythmée
b) Le temps du week-end
C. Aménagement de l’espace au domicile en fonction des besoins d’Henry
a) Structurer l’espace : gagner en prévisibilité et en autonomie
b) Epurer l’environnement, c’est diminuer la surcharge sensorielle
c) Le jardin et ses bienfaits
d) Aménagements : à quel prix ?
CONCLUSION
Bibliographie
ANNEXES

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