Le rayonnement X
Les rayons X sont un rayonnement électromagnétique au même titre que les ondes radio, les infra-rouge, ou la lumière visible par nos yeux. Cependant les photons X sont plus de 1000 fois plus énergétiques que les photons de la lumière visible. Ce rayonnement est alors caractérisé par l’énergie correspondant au photon détecté plutôt que par sa longueur d’onde comme le sont les photons de la lumière visible ou des ondes radio (cf. Figure 1.1). L’unité utilisée est l’électronvolt (eV), soit l’énergie d’un électron accéléré par un potentiel de 1 volt. Sur le spectre électromagnétique les rayons X sont situés entre les rayons ultra-violet et les rayons gamma. Cependant la limite entre rayons X et gamma est mal définie. On parle généralement de photons X lorsque leur énergie se situe entre plusieurs électron-volts et quelques centaines de kilo électron-volts (keV). On partage alors cette région en deux sous-domaines : les X mous en dessous d’une dizaine de keV et les X durs au delà.
Les photon X sont émis par des phénomènes mettant en jeu des particules de très haute énergie (où les températures sont de l’ordre de plusieurs millions de degrés) pouvant être produites par des effondrements gravitationnels, par l’accrétion de matière par des objets massifs, par des ondes de chocs… Ils peuvent être émis par rayonnement de corps noir, processus inverse Compton, fluorescence, Bremsstrahlung ou encore synchrotron. Un corps noir est composé de particules en vibration qui émettent un rayonnement électromagnétique. Si la température du corps noir est suffisamment élevée, il émet dans la gamme X. Le processus inverse Compton désigne l’augmentation d’énergie d’un photon par interaction avec un électron. Si cet électron possède une énergie suffisante, il peut engendrer un photon X. Le photon X de fluorescence est émis lors de la recombinaison d’un atome dont un électron des couches internes a été arraché. Le processus Bremsstrahlung (i.e. rayonnement de freinage en Allemand) produit un photon X lorsqu’un électron de haute énergie est dévié dans le champ électrique d’un atome. Quant au processus synchrotron, il produit un photon X lorsqu’un électron de haute énergie est dévié par un champ magnétique intense. Les rayons X furent découverts en 1895 par le physicien allemand Wilhelm Röentgen. A cette époque, une évolution du tube de Geissler appelée tube de Crookes est utilisée par plusieurs physiciens et permet la découverte des électrons (cf. Figure 1.2). Ceux-ci sont accélérés dans un tube de verre sous vide partiel (10⁻⁷ atm) par une forte tension appliquée entre deux électrodes de métal et provoquent la fluorescence du verre situé derrière l’anode (habituellement dans la gamme jaune-vert). Wilhelm Röentgen découvre lors d’une expérience où il avait recouvert un tube de Crookes par un carton noir qu’un écran fluorescent situé à proximité scintillait faiblement. Il compris alors que des rayons invisibles à l’oeil était émis par le tube et traversait le carton. Il les nomma ainsi rayons « X » à cause de leur mystérieuse nature et reçu pour cette découverte le premier prix Nobel de physique en 1901.
Un peu d’histoire sur l’astronomie X
L’astronomie X est une science relativement récente car les rayons X ne traversent pas l’atmosphère terrestre, contrairement à la lumière visible (cf. Figure 1.3). Il suffit de quelques millimètres d’os ou de quelques mètres d’air pour absorber un photon X. Après la découverte des rayons X avec l’expérience de Röentgen, E.O. Hulburt eut l’idée d’équiper une fusée avec un simple détecteur (type compteur Geiger) pour explorer le rayonnement X de la haute atmosphère. En 1949, après plusieurs essais, une fusée détecte des photons X en provenance du Soleil. Bien que sa température de surface soit relativement froide (5800K), le Soleil est entouré d’une couronne d’environ 5 millions de degrés Kelvin qui émet dans la gamme X. A partir de l’émission X du Soleil, il en a été déduit qu’il ne devrait pas y avoir d’autres étoiles détectables en X. Mais en 1962, une fusée lancée afin d’essayer de détecter des rayons X réfléchis par la Lune détecta une source X très intense en provenance du centre de la Galaxie. Cette source, plus brillante que le Soleil, fut nommée Sco X-1 (source X numéro 1 de la constellation du Scorpion). A partir de ce résultat, il fut plutôt facile d’obtenir le financement de fusées, puis de détecter d’autres sources de rayonnement X. L’Astronomie des rayons X était née. Suite à cette découverte, Riccardo Giacconi reçut le prix Nobel de physique en 2002 pour ses contributions au développement de l’astronomie X. Au cours des années 60, la course vers l’espace offre de nouveaux horizons. Alors que les observations à partir de fusées ont un temps d’observation et un angle de vue limités, les satellites permettent de longues observations sur l’ensemble du ciel. Le premier satellite dédié au rayonnement X, Uhuru, est lancé dans les années 70. Equipé d’un simple détecteur de type compteur Geiger surmonté d’un collimateur pour localiser la source, il détecte la présence de trous noirs et d’étoiles à neutrons ainsi que d’un gaz très chaud dans les amas de galaxies. Le premier télescope X utilisant des miroirs est l’observatoire Einstein lancé en 1978. Ses miroirs permettent de concentrer le flux et d’imager les sources. Il a ainsi pu détecter précisément plus de 7000 sources X et permit l’étude de la matière noire grâce à ses observations de galaxies. Actuellement trois satellites majeurs d’astronomie X sont en opération, l’observatoire XMMNewton de l’Agence Spatiale Européenne (ESA), l’observatoire Chandra de la National Aeronautics and Space Administration (NASA) et Astro-E2 (Suzaku) de la Japan Aerospace Exploration Agency (JAXA).
Les observatoires spatiaux
Le rayonnement X n’étant pas observable depuis le sol, les satellites artificiels sont pour l’instant le support le mieux adapté aux observatoires de cette gamme d’énergie. Ces satellites artificiels peuvent porter plusieurs instruments couvrant parfois des objectifs différents. Cependant leurs dimensions et leur masse sont limitées par la capacité du lanceur qui dépend de l’orbite visée. La masse limite d’un satellite dépend également du dimensionnement de ses réserves d’ergols et donc de sa durée de vie. Un télescope porté par un satellite artificiel est isolé pendant toute sa durée de vie, il doit donc être complètement indépendant énergétiquement. Le Soleil étant une source importante et continue d’énergie, les satellites sont équipés de panneaux photovoltaïques (panneaux solaires) pour capter l’énergie nécessaire à leur fonctionnement. La consommation d’énergie de l’instrument est elle aussi limitée. Hormis ces principales contraintes n’importe quel instrument peut être satellisé. Pour observer le rayonnement X, comme pour tout rayonnement y compris visible, il faut enregistrer les signes de sa présence. C’est le rôle des détecteurs, il sont constitués d’un matériau sensible au rayonnement, à travers lequel on fait parcourir un courant. Une électronique adaptée va alors mesurer les variations du courant, les interpréter et les enregistrer. Selon les détecteurs on peut obtenir la position, le temps et l’énergie liés à l’interaction. Cependant il est difficile de déterminer si ces interactions sont dues au rayonnement de l’objet observé ou des innombrables autres sources de rayonnement dans l’espace. Afin de rendre le signal plus important devant le « bruit », il faut soit augmenter le signal soit diminuer le bruit. Le signal peut être augmenté en concentrant le rayonnement de la source grâce à une optique focalisatrice. Le bruit peut être réduit de manière passive ou active, passive en protégeant au mieux le détecteur des rayonnements parasites et active en entourant le détecteur d’un second permettant la détection des particules ne provenant pas de l’ouverture du télescope. Mais enregistrer ce rayonnement n’est pas suffisant pour étudier les objets astrophysiques, il faut déterminer sa provenance, afin d’attribuer ses propriétés à une zone du ciel observée. Pour différencier l’origine de chaque photon, il faut associer au détecteur un système imageur.
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Table des matières
Introduction
1 L’astronomie X
1.1 Le rayonnement X
1.2 Un peu d’histoire sur l’astronomie X
1.3 Les observatoires spatiaux
1.3.1 Les systèmes imageurs
1.3.2 Les détecteurs
1.4 L’avenir de l’astronomie X
2 Les télescopes Wolter-I grande focale
2.1 Les Miroirs Wolter-I
2.1.1 Géométrie
2.1.2 Revêtements
2.2 Les Détecteurs à semi-conducteurs
2.2.1 Interactions photons/matière
2.2.2 Efficacité de détection
2.2.3 Transport et collection des charges
2.3 Le banc optique
2.3.1 La métrologie
3 L’outil de simulation DynamiX
3.1 Présentation générale
3.2 La géométrie du télescope
3.2.1 L’ensemble miroirs Wolter-I
3.2.2 Le plan de détection
3.2.3 La structure du télescope
3.2.4 La métrologie
3.3 Trajectoire et interactions du photon
3.3.1 Le trajet du photon
3.3.2 La réflexion
3.3.3 La détection
4 Application à la mission Simbol-X
4.1 Présentation de la mission
4.2 Le télescope Simbol-X
4.3 Performances du télescop
4.3.1 Surface efficace
4.3.2 Résolution angulaire
4.3.3 Efficacité de détection
4.4 Vol en formation et performances
4.4.1 Instabilité d’attitude des miroirs
4.4.2 Instabilité d’attitude des détecteurs
4.4.3 Instabilité de position entre les miroirs et les détecteurs
4.4.4 Correction de l’image
4.4.5 Spécification du contrôle d’attitude des satellites et de la métrologie
4.5 Exemple d’observation de Simbol-X
4.6 Développement d’un simulateur end-to-end avec VEGA
5 Optimisation et design d’un télescope X-dur
5.1 Le télescope parfait
5.1.1 Optimisation de l’optique
5.1.2 Optimisation du détecteur
5.2 Vers une nouvelle mission : PheniX
5.2.1 Concept instrumental
5.2.2 Design optique
5.2.3 Design détecteur
5.2.4 Contraintes de pointage et de stabilité
5.2.5 Performances attendues
Conclusion