Un levier d’action majeur pour réduire l’impact environnemental des intrants phytosanitaires

La France, malgré sa petite surface, est l’un des plus importants pays agricoles au monde et se classe à la huitième place de la production agricole en valeur. C’est la forte industrialisation de ses cultures, depuis la révolution verte dans les années 1960 qui lui a permis de devenir une puissance agricole majeure. Cette intensification agricole est possible grâce à l’utilisation de variétés sélectionnées à haut rendement, à la multiplication des intrants, ainsi qu’à une importante mécanisation. Un des exemples de cette intensification est la viticulture, qui est une des cultures qui consomme le plus d’intrants phytosanitaires avec l’arboriculture et les cultures maraichères. En effet malgré une surface représentant 3,3% de la SAU, elle consomme 14,4 % des pesticides en valeur (Campagne 2006) (Ministère de l’agriculture, 2014).

Aujourd’hui la viticulture est un des secteurs essentiels pour la balance commerciale française, puisqu’il occupait en 2019 la 2nd place derrière le secteur de l’aéronautique et comptabilise un solde positif de 13 Milliard d’euros (Donnée CNIV). Le vignoble français est l’un des plus grand au monde avec ses 750 000 ha de vigne et une production annuelle de 4,8 milliards de Litre. De plus, l’agriculture est ancrée tant dans les paysages français que dans son histoire, lui conférant une valeur patrimoniale forte.

Cependant la politique d’agriculture intensive menée par la France ainsi que par l’Union Européen à partir des années 1960, a eu des répercussions dramatiques sur les écosystèmes et plus généralement sur l’environnement. La prise de conscience du désastre écologique de ces pratiques n’est arrivée que plus tardivement, avec un évènement majeur au niveau politique : le Grenelle de l’environnement en 2007. Suite à ce débat des objectifs ont été définis, notamment dans le cadre des plans Ecophyto, Ecophyto II et Ecophyto II+, sur la réduction des intrants phytosanitaires.

Afin de réussir au mieux cette transition écologique, un grand nombre d’organismes de la filière ont été impliqués dans la recherche de nouvelles pratiques. Par exemple l’Institut français de la vigne et du vin (IFV) et les chambres d’agriculture. A également été mis en place un réseau d’expérimentation agricole afin de permettre des essais à grand échelle et la diffusion rapide des pratiques : le réseau Dephy.

La maison Lavau-maucoil, en charge de la production de 200 ha de vigne dans le Vaucluse, souhaite s’inscrire dans cette transition. Ce mémoire a pour but de faire un état des lieux des pratiques viticoles de l’exploitation et d’évaluer leur impact environnemental. Il est le point de départ pour les évolutions à venir dans l’objectif de progresser vers une agriculture plus durable. En outre ce rapport portera sur le bilan des essais Optidose menés sur le vignoble depuis 3 ans.

En premier lieu c’est la durabilité globale de l’exploitation qui sera évaluée, puis notre intérêt se portera au cas spécifique de l’utilisation des produits phytosanitaires et des nouvelles perspectives qu’apportent le programme Optidose pour atteindre les objectifs du plan Ecophyto-II.

« Les produits phytopharmaceutiques sont des préparations destinées à protéger les végétaux et les produits de culture. Ils font partie des pesticides, qui regroupent également les biocides et les antiparasitaires à usage humain et vétérinaire. » (ANSES) .

Suite à la première guerre mondiale l’agriculture s’est progressivement intensifié (Bourgeois L. 2000) avec notamment l’utilisation croissante de produits phytosanitaires. Les premiers d’entre eux sont les herbicides, qui ont permis de limiter la concurrence des adventices, puis ensuite il y a eu les insecticides et les fongicides de synthèses, assurant respectivement une protection contre les ravageurs et les maladies. Leur facilité d’utilisation, leur prix dérisoires et leur efficacité sur de très grandes surfaces les a rapidement démocratisés à toute l’agriculture. Leur utilisation a permis de stabiliser les rendements au plus haut potentiel d’une année sur l’autre, assurant l’alimentation du marché (Abertot J.N 2005).

La France a connu une consommation croissante des pesticides jusqu’aux années 90, avec un pic d’achat de pesticides en 1999 correspondant à la mise en place d’une taxe phytosanitaire. Le tonnage diminue alors jusqu’en 2013, mais il n’est pas forcement signe d’un ralentissement de la consommation. En effet, il faut distinguer d’une part la substance active que sont les molécules donnant une propriété fongicide, herbicide ou insecticide, et, d’autre part, le produit phytosanitaire qui est une formulation à différente concentration d’une ou plusieurs substances actives et d’adjuvants. Ainsi avec une masse de produits phytosanitaires différente, on peut avoir la même quantité de substance active appliquée. Pour avoir des résultats sur les matières actives l’état a créé les NODU : « Nombre de dose unités » qui donnent une quantité de substance active étendue à l’hectare. (Methodologie de calcul du NODUagriculture.gouv). L’évolution des NODU montre que la consommation en substance active est plutôt stable voire en légère hausse sur la période 2009-2016.

Dès 1962 l’utilisation des produits phytosanitaires fait polémique. Le biologiste américain, Rachel Carson alerte sur les dégâts engendrés par l’utilisation à outrance des pesticides. Son livre intitulé « Silence Spring », déclare qu’une utilisation non contrôlée des pesticides entraine la mort d’animaux, et notamment des oiseaux, d’où le titre : « le printemps silencieux ». C’est à partir de cet ouvrage que des chercheurs se penchent sur les effets environnementaux et les effets sur la santé des produits phytosanitaires. Une étude de 1995 estime que moins de 0,3 % des pesticides entrent en contact avec l’organisme cible, donc 99,7 % des pesticides sont dispersés dans l’environnement (Pimentel, 1995).

Une partie de la substance active contenue dans les pesticides se dégrade, le reste contamine l’eau, l’atmosphère et le sol, avec des effets irréversibles (Hayo M.G., 1997).

La dangerosité des pesticides pour l’environnement est due premièrement à la faible spécificité des produits, par exemple les insecticides ont un effet sur la faune aquatique et provoquent la mort des poissons (linder et al,1994), et secondement à la persistance qui permet leur bioaccumulation. Il s’agit de l’accumulation croissante de concentration en produit toxique dans les organismes mais aussi dans la chaîne trophique (biomagnification cooper,1991). Ainsi les organismes en haut de la chaîne trophique, tels que les oiseaux se nourrissant d’insecte, accumulent des doses plus importantes de pesticides ; une trop forte concentration de pesticide peut provoquer la mort de ces animaux.

Les effets sur la santé sont eux aussi importants. En effet en plus de la toxicité directe (Toxicité aiguë), les pesticides agissent sur le long terme avec des effets cancérigènes, immunodépresseurs, mutagènes, neurotoxiques et tératogènes (Toxicité chronique). La toxicité chronique est quant à elle beaucoup plus difficile à prévoir, et demande des études épidémiologiques a postériori. L’étude de Baldi et al (1998) en est une, elle a permis de mettre en évidence des effets neurologiques, cancérigènes et des troubles de la reproduction.

Toutes ces études, ainsi que les actions des mouvements écologistes ont poussé les autorités à mettre en place une réglementation autour de l’utilisation des pesticides, notamment par le contrôle de mise en marché, le contrôle des ventes, et le contrôle sur l’épandage, avec obligation de posséder le certi-phyto depuis 2012. En plus de ces contrôles les substances actives les plus controversées ont été retirées du marché. Suite au Grenelle de l’environnement en 2007, de grandes directives sont prises pour l’agriculture française. Trois des Quatre COMOP (Comité Opérationnel) concernent de près ou de loin l’utilisation des  pesticides (Comité Opérationnel du grenelle de l’environnement) :
– Développer plus fortement l’agriculture biologique
– Mettre en place une certification des exploitation (HVE)
– Ainsi que la mise en place plan Ecophyto.

Le plan « EcoPhyto 2018 » est initié par le Ministère de l’agriculture, de l’Agroalimentaire et des forêts en 2008, suite aux directives du Grenelle de l’environnement. Il sera ensuite intégré en 2009 au Second Plan National Santé Environnement (PNSE2). « La France se doit donc de maintenir un niveau de production agricole élevé, mais aussi de produire mieux, en respectant les équilibres écologiques dans un contexte de changement climatique et de concurrence pour la ressource en eau, et en prenant en compte la demande des consommateurs pour des produits sains. Ceci signifie notamment rendre les exploitations agricoles moins dépendantes des pesticides. » (Rapport final du président du comité opérationnel Ecophyto2018). L’objectif donné par le président de la république Nicolas Sarkozy est de réduire de 50 % l’utilisation des pesticides par rapport à l’année de référence qui  est 2006. Cet objectif est fixé pour l’horizon 2018, soit 10 ans après l’instauration du plan. Ainsi dans le rapport final du président du comité opérationnel « Ecophyto 2018 » se sont  9 grands axes qui sont définis et 110 actions. Un important effort de communication et de formation est mis en place, et les différents moyens de réduction d’intrants sont promus à grand échelle dans la filière. En outre de nouveaux indicateurs chiffrés et détaillés sur les ventes de produits sont établis permettant de suivre l’évolution de la situation.

Le plan Ecophyto II établi en 2015 suite à une consultation de la filière, prévoit un étalement des objectifs. Malgré des méthodes de réduction efficace des produits phytosanitaires, celles-ci sont encore trop peu rependues pour inverser la tendance. En effet le NODU a augmenté de 12% sur les années 2013 2014 2015, par rapport aux années 2010 2011 et 2012. Ainsi le plan prévoit dans un premier temps de promouvoir des méthodes pouvant être appliquées rapidement pour atteindre l’objectif de diminution de -25% en 2020. Ensuite, c’est une transformation profonde du système de production agricole qui est envisagée, pour atteindre dès 2025 l’objectif initial de -50%. Le plan Ecophyto II réaffirme les ambitions de la France en termes de réduction des produits phytosanitaires.

Plus largement c’est la notion de durabilité des systèmes de production qui est sousjacent aux plans Ecophyto. Gro Harlem Brundtland définit la notion de développement durable en 1987 par : « un développement qui répond aux besoins du présent sans compromettre la capacité des générations futures à répondre à leurs propres besoins ». Le concept est traduit dans l’agriculture française sous forme de 4 grands axes : écologique, économique, sociétal et intergénérationnel (Landais E.1998). Sur l’exploitation agricole, ces axes sont indiscernables les uns des autres, et tous interdépendants. Il est donc nécessaire d’avoir une approche systémique pour comprendre toute la complexité des mécanismes mis en œuvre. Les intrants sont un des nombreux volets de réflexion que compte l’agriculture durable. Ils soulèvent des questions à la fois économiques, environnementales et sociales.

Le Réseau Dephy est créé en 2010 pour apporter des solutions techniques dans le cadre des plans Ecophyto successifs. Son but et de permettre la transition de l’agriculture française vers une agriculture plus durable, qui passe notamment par un objectif de diminution des intrants phytosanitaires. Cela se traduit par la recherche de pratiques durables, mais aussi par leurs diffusions rapides dans le monde agricole. Pour remplir ce double objectifs le réseau Dephy se déploie sous plusieurs formes (Pillet E, 2014) :
– Le réseau EXPE, qui réunit 41 porteurs de projets, et qui a pour objectif de tester et d’évaluer les différents systèmes de culture dans l’optique principal de réduire l’utilisation des produits phytosanitaires
– Le réseau FERME, qui rassemble plus de 1900 exploitations agricoles implantés sur l’ensemble du territoire national et couvrant toutes les filières. Elles sont toutes engagées dans une démarche de réduction de l’usage des pesticides, et servent de relais pour la diffusion des pratiques dans le monde agricole.

Le réseau est fondé sur la collaboration des agriculteurs entre eux, via la formation de groupes de discussion d’une dizaine de personnes. Ces groupes sont accompagnés par des « ingénieursréseaux » afin d’aider les agriculteurs à analyser leurssystèmes de culture, élaborer un projet d’amélioration, accompagner la mise en œuvre et enfin évaluer les performances et la durabilité de ce qui a été mis en place. Le réseau est également encadré par les instituts techniques tel que l’IFV, les instituts de recherches tel que l’INRA, et les chambres d’agriculture. L’objectif est d’étudier l’ensemble de la production agricole, sur différents pédoclimats, afin d’avoir une réponse la plus locale et la plus adaptée possible (Pillet E, 2014).

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Table des matières

Introduction
I – Etat de l’art, problématiques et objectifs
1- La réduction des intrants phytosanitaires : un défi pour la viticulture
A- La réduction des intrants phytosanitaires, de la prise de conscience à la volonté politique
B- La mise en place d’un réseau de test : le réseau Dephy
C- Développement de repères pour discerner les différents systèmes de cultures
2- Les principaux outils retenus pour la réduction des intrants phytosanitaires
A- Les prototypes IPM et Innobio
B- Le Choix du matériel de pulvérisation et condition météorologique de traitement
C- Arbre de décision sur le positionnement des traitements
D- Arbre de décision sur les quantités : Optidose
3- La maison Lavau Maucoil : particularités et spécificités
A- Histoire et composition du vignoble
B- Les Objectifs de production viticole
C- Organisation de l’entreprise
D- Stratégie phytosanitaire
Problématiques
II- Matériel et méthodes
1- L’analyse multicritère : DEXI PM viti
A- Définition des systèmes de culture
B- Les critères de base
2- Contrôle de la qualité de pulvérisation
A- L’audit prestataire
B- Test avec papier hydrosensible
3- Mise en place et suivi Optidose
A- Rappel des modalités
B- Choix des parcelles est mise en place des placettes
C- Calculs des doses
D- Réalisation des comptages
E- Exploitation des résultats
III – Résultats et discussions
1- Contrôle de qualité de pulvérisation
A- Audit Gérard Bouche
B- Contrôle qualité de pulvérisation
C- Discussion
2- Résultats du programme Optidose
A- Analyse des IFT
C- Discussions
3- Analyse du module DEXI PM viti
4- Analyse budgétaire et perspectives d’évolution
A- Analyse budgétaire
B- Les autres produits phytosanitaires
C- Proposition d’une gestion de l’enherbement
Conclusion

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