Un état des recherches sur les relations entre prosodie et discours

Un état des recherches sur les relations entre prosodie et discours

Il est assez récent que les prosodistes s’intéressent à ce qui se passe au-delà de la phrase alors que les analystes du discours ont montré un intérêt précoce pour les phénomènes prosodiques. Cette section voudrait rendre compte de l’essentiel des approches qui ont abordé l’articulation de la prosodie et du discours à partir des principales thématiques qui ont permis l’émergence de cette interface. Il ne s’agit pas d’en faire l’inventaire exhaustif, ce qui serait aussi fastidieux qu’inutile, mais de citer et de décrire les travaux les plus représentatifs et les plus intéressants pour notre propre recherche. Lorsque nous avons donné une définition préliminaire de la prosodie (section 1.1.1), nous avons évoqué les grandes fonctions qu’elle assume. Trois d’entre elles fédèrent les études consacrées à l’interface prosodie/discours : la fonction de structuration, la fonction interactionnelle et l’expression des émotions. La fonction de structuration concerne le plus grand nombre de travaux, aussi bien de la part de spécialistes de la prosodie que d’analystes du discours ; la fonction interactionnelle intéresse plus particulièrement les chercheurs provenant de l’analyse conversationnelle tandis que l’étude de l’expression des émotions mobilise des auteurs venus d’horizons très divers. C’est dans cet ordre que nous les explorerons.

Prosodie et structure discursive

La fonction de structuration est la plus évidente des fonctions remplies par la prosodie, c’est également la plus aisément accessible à l’observation, ce qui explique que le plus grand nombre d’études concernant les relations de la prosodie et du discours traitent cette question. Au cours de cette section, nous verrons comment, s’intéressant aux corpus attestés, les analystes du discours les premiers ont observé l’importance de certaines informations prosodiques pour l’organisation du texte audelà de la phrase. Nous verrons ensuite comment les prosodistes, sans doute à cause d’une longue tradition de travaux de laboratoire, ont d’abord exploré les relations de la prosodie avec la syntaxe, observables sur des exemples construits, avant d’élargir les recherches au discours.

Le point de vue de l’analyse de discours 

Les analystes du discours se sont intéressés très tôt au rôle joué par la prosodie dans deux aspects différents de la structuration discursive : la délimitation de macro-unités discursives comparables aux paragraphes de l’écrit d’une part, le marquage de la structure informationnelle d’autre part.

Paraton, période et organisation périodique

Brown donne le nom de paraton (paratone) au paragraphe oral (Brown, 1977). On trouve une définition précise et complète de ce concept dans le manuel qu’il publie plus tard avec Yule (Brown & Yule, 1983) et où l’intention du locuteur guide le découpage en paratons. Le paraton est donc l’unité orale qui transmet un topique, défini comme une unité de sens cohérente. La spécificité du paraton est que ses frontières sont signalées essentiellement par des marques prosodiques : une proéminence intonative au début, un accent bas, une perte d’amplitude, une pause longue à la fin. La notion voisine de période proposée par Berrendonner (1993) conçoit les intonèmes (morphèmes intonatifs à fonction continuative ou conclusive définis par Rossi, 1981) comme :

« (…) des opérateurs d’actualisation s’appliquant à des clauses pour produire des actes d’énonciation. » (Berrendonner, 1993).

Ainsi la prosodie actualise l’énoncé, c’est-à-dire le rend effectif et transmissible en fonction d’une intention communicative (voir aussi Hazaël-Massieux, 1983). Ces travaux et de très nombreux autres concernant cette question ont conduit les concepteurs du modèle genevois (Roulet et al., 2001, ch. 8) à proposer ce qu’ils nomment l’organisation périodique dont l’objectif est de décrire la ponctuation du discours à partir de l’observation de corpus attestés. La ponctuation prosodique y est envisagée dans ses rapports avec différents niveaux discursifs :
• avec la syntaxe et dans sa participation à la signalisation des bribes et des hésitations ;
• avec les différents niveaux de la structure discursive pour former des actes périodiques (continuatifs) et des mouvements périodiques (conclusifs) ;
• avec l’interaction lorsqu’elle intervient dans la gestion des tours de parole ;
• avec la dimension référentielle lorsqu’elle marque un changement d’orientation de l’activité du locuteur.

La problématique de cette thèse nous conduira à aborder la question de la fonction conclusive ou non de l’intonation d’implication ainsi que la question de son éventuelle intervention dans la gestion de certains tours de parole.

Prosodie et organisation informationnelle

Le rôle de l’intonation dans la structuration de l’information selon la dichotomie donné/nouveau est déjà présent dans les travaux des linguistes de Prague, mais c’est Halliday (1967) qui popularise ces notions. Pour lui, chaque proéminence accentuelle définit un tone group (nom donné à l’unité d’information) à l’intérieur duquel elle marque l’information que le locuteur choisit de présenter comme nouvelle, autrement nommée le focus. Selon Brown & Yule (1983), la plupart des auteurs ont abandonné l’idée d’une unité d’information contenant un seul focus réalisé par un seul accent intonatif. Mais innombrables sont les travaux qui se sont penchés sur la question du rôle de la prosodie dans le processus de focalisation, au point qu’elle est devenue la problématique principale et emblématique de l’interface prosodie/discours, y compris pour les spécialistes de la prosodie. Nous ne citerons que deux exemples de travaux : Ceux de Chafe (1987) examinent en détail les caractéristiques de l’unité informationnelle (prosodiquement délimitée), les contraintes cognitives dont elle est la marque et le rôle qu’elle joue dans la progression linéaire du flux informationnel. Le modèle computationnel du discours proposé par Grosz et Sidner (1986), repose sur trois composants fondamentaux parmi lesquels l’état attentionnel concrètement représenté en discours par le marquage, souvent prosodique, du focus attentionnel. Nous évoquerons à nouveau ce modèle à propos des recherches de J. Hischberg présentées dans la section suivante au cours de laquelle nous allons examiner comment les spécialistes de la prosodie ont traité l’interface prosodie/discours.

Le point de vue des spécialistes en prosodie 

Malgré l’intérêt évident de l’approche pragmatique pour définir les fonctions des objets prosodiques qui n’ont pas véritablement de contenu sémantique (si ce n’est, à la rigueur, dans l’expression des modalités), les spécialistes de la prosodie ont tardé à s’intéresser au discours. Pour Wichmann (Wichmann, 2000, ch. 6), il faut en chercher l’explication dans l’inspiration générative des recherches les plus influentes sur l’intonation, qui fait de la syntaxe le centre théorique de la linguistique, ainsi que dans l’importance accordée aux applications possibles à la synthèse de la parole qui implémente généralement l’information prosodique à partir de l’analyse syntaxique des textes à synthétiser. La tradition expérimentale de la recherche phonétique joue aussi un rôle dans la tendance des approches prosodiques à négliger l’interaction. Swerts & Hirschberg en donnent l’explication suivante :

« Experimental phoneticians and phonologists, while perhaps better equipped to represent intonational features as a part of their analyses, have on the whole paid little attention to conversation, particularly outside laboratory experiments. In this tradition of research, the study of conversation was often felt to be too complex, due to lack of experimental control and sparsity of data, and was generally postponed until sentence level phenomena had been thoroughly explored. As a result, the research in phenomena above the sentence level was in general limited to “constructed” speech materials, like isolated or short sequences of read sentences. »

« Les phonéticiens et les phonologues expérimentaux, peut-être parce qu’ils sont mieux équipés pour représenter les traits intonatifs comme une partie de leurs analyses, ont dans l’ensemble accordé peu d’attention à la conversation, en particulier en dehors de expérimentation de laboratoire. Dans cette tradition de recherche, l’étude de la conversation était souvent perçue comme trop complexe, à cause du manque de contrôle expérimental et de la dispersion des données et était généralement remise jusqu’à ce que les phénomènes du niveau de la phrase aient été intégralement explorés. » (Swerts & Hirschberg, 1998 ; notre traduction)

Cependant, certains travaux ont vu le jour à la fin des années quatre-vingt et dans les années quatre-vingt dix qui cherchent à concilier une description rigoureuse et avertie des phénomènes prosodiques avec une prise en compte véritable de la mise en situation discursive. Pour eux comme pour les analystes du discours, la question de la structuration discursive reste centrale pour l’exploration de l’interface prosodie/discours. Nous évoquerons ici les travaux des trois auteurs que nous venons de citer : d’abord ceux de Julia Hirschberg, centrés sur les applications aux technologies de la parole, puis ceux de Mark Swerts dont la préoccupation principale est d’adapter les méthodes expérimentales à la parole spontanée, enfin, ceux de Anne Wichmann qui prennent en considération aussi bien les apports de l’analyse de discours que ceux de l’analyse conversationnelle et les confrontent à l’analyse auditive aussi bien qu’instrumentale des faits prosodiques.

Dans la perspective computationnelle : J. Hirschberg

Julia Hirschberg travaille pour le laboratoire de recherche de la compagnie de télécommunication AT&T. Naturellement, ses recherches sont orientées vers les applications technologiques, c’est-à-dire la synthèse et la reconnaissance de la parole en vue du dialogue homme-machine. Dans ce but, elle a réalisé de nombreux travaux concernant l’identification des variations prosodiques responsables de la structuration discursive en utilisant le modèle computationnel du discours proposé par Grosz & Sidner (1986) (voir Hirschberg & Grosz, 1992). J. Hirschberg s’est également intéressée à la prosodie des connecteurs et des particules discursives, participant elles aussi à la structuration du discours (Hirschberg & Litman, 1993). De très nombreux articles sont bien sûr consacrés à l’application automatique de ces recherches (Wang & Hirschberg, 1992 ; Litman, Hirscherg & Swerts, 2000). L’ampleur de ces recherches et de leurs applications prouve l’intérêt de l’exploration des relations entre prosodie et discours pour les technologies de la parole. L’une des modestes ambitions de cette thèse est de montrer l’intérêt que présente la description des nuances discursives attestées que déploient des locuteurs dans l’usage qu’il font d’un contour intonatif (l’intonation d’implication) présent dans les inventaires phonologiques du français. La description que nous tenterons de la variabilité de production de ce contour, et des nuances de sens auxquelles elle donne lieu, nous semble susceptible d’apporter sa contribution à l’amélioration du naturel et de la souplesse de la synthèse de la parole. La description acoustique comparée que nous proposons de l’intonation d’implication en regard de l’intonation continuative peut quant à elle être exploitée par la reconnaissance automatique de la parole.

Concilier expérimentation et discours : M. Swerts

Membre de l’institut pour la recherche en perception (IPO) de Eindhoven au PaysBas, Swerts consacre ses recherches d’une part à adapter les méthodes expérimentales héritées de la tradition phonético-phonologique à du matériel prosodique issu de données spontanées, et d’autre part à décrire et à expliquer le fonctionnement des marqueurs prosodiques aux frontières discursives (voir Swerts, 1994 et 1997). Bien entendu, l’évaluation perceptive de ces marqueurs fait aussi partie de ses préoccupations prioritaires. Seul le premier aspect de ces recherches fait ici l’objet d’un développement. Swerts part du constat que les recherches prosodiques à visée expérimentale élaborées à partir de corpus attestés souffrent de deux difficultés méthodologiques : le risque de circularité qui peut conduire le chercheur à définir ses observables à partir de ce qu’il cherche (à déterminer des frontières discursives en fonction de l’information prosodique par exemple) ; le besoin d’obtenir des fragments de discours comparables syntaxiquement et lexicalement et en nombre suffisant pour permettre des observations significatives. Pour remédier à ces difficultés, Swerts propose différentes méthodes d’élicitation de la parole spontanée qui consistent le plus souvent à contrôler à la fois le contenu et la structure de la parole produite par un sujet aux moyens d’instructions concernant les thèmes abordés et le déroulement temporel de leur enchaînement. Dans un de ses articles (Swerts, 1992) par exemple, il s’agit pour le locuteur de décrire un réseau de figures géométriques dont les alignements présentent un ordre contraignant et dont les éléments sont parfois répétés en des lieux qui diffèrent en fonction de leur place dans la structure discursive attendue (voir aussi le recours à la description de tableau dans Swerts, 1998). Dans notre travail de thèse, bien que nous ayons opté pour la description de données attestées dont la production n’est pas contrôlée par le linguiste, les caractéristiques du corpus présentent certains des avantages propres aux données élicitées. En particulier, le thème imposé aux participants d’un débat radiophonique favorise la répétition multiple de certains termes clés en des points différents de la structure discursive : le thème du débat que nous étudions étant la construction européenne, les adjectifs européen et européenne par exemple abondent en toute position dans les propos de chacun des interlocuteurs. De plus, et comme nous le verrons en détail (chapitre 6, section 6.1.3.2), l’organisation extrêmement contrainte des tours de parole, contrôlée par les modérateurs du débat, leur donne aussi une structure en partie prédictible, propice à la description systématique. Comme le montrent certains de nos travaux (Portes, 2002 ; Portes & Di Cristo, 2003 ; Auran, Portes, Rami & Rigaud, 2001) et la tâche d’identification menée dans le cadre de cette thèse, nous partageons également avec Swerts le souci de l’évaluation perceptive des objets prosodiques que nous étudions. L’intérêt pour l’interaction implique en effet nécessairement que l’interlocuteur, celui qui doit interpréter le discours proféré, soit pris en compte à travers les différents aspects de la réception.

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Table des matières

Introduction
PARTIE 1 : FONDEMENTS THEORIQUES
1 Chapitre 1 : Prosodie et discours, un état de la question
1.1 Définitions préliminaires
1.1.1 Qu’entendons-nous par prosodie
1.1.2 Qu’entendons-nous par discours
1.1.3 Conclusion à partir des définitions préliminaires
1.2 Un état des recherches sur les relations entre prosodie et discours
1.2.1 Prosodie et structure discursive
1.2.2 Prosodie et interaction
1.2.3 Prosodie et émotions
1.3 Conclusion du chapitre 1 : première problématique
2 Chapitre 2 : L’intonation d’implication : quel type d’objet prosodique et comment nous l’aborderons
2.1 L’intonation d’implication: un objet intonatif
2.1.1 Comment concevons-nous l’intonation
2.1.2 Qu’est-ce qu’un contour intonatif ?
2.2 L’intonation d’implication dans la littérature
2.2.1 L’intonation d’implication dans les travaux pionniers de Pierre Delattre
2.2.2 L’intonation d’implication dans les approches holistiques
2.2.3 L’intonation d’implication dans les approches autosegmentales
2.3 Conclusion du chapitre 2 et deuxième problématique
3 Chapitre 3 : A l’appui d’une mise en perspective pragmatique de l’intonation d’implication : le modèle d’analyse du discours de Roulet et collègues
3.1 Deux modèles concurrents
3.1.1 Le modèle computationnel de Grosz et Sidner
3.1.2 La théorie de la structure rhétorique (RST) de Mann et Thompson
3.2 « Un modèle et un instrument d’analyse de l’organisation du discours » (Roulet et al. 2001)
3.2.1 Présentation générale du modèle et les raisons de notre choix
3.2.2 Aperçu des différents aspects du modèle genevois
3.3 Conclusion sur le modèle genevois et troisième problématique
PARTIES 2 : DESCRIPTIONS EMPIRIQUES
4 Chapitre 4 : Le corpus : un débat radiophonique
4.1 Le choix d’un corpus de parole attestée
4.1.1 Description de l’émission
4.1.2 Qualités et limites du corpus
4.2 La procédure d’indentification de l’intonation d’implication dans le corpus
4.2.1 Quelle solution et pourquoi
4.2.2 Description de la procédure d’identification
4.3 Le traitement préalable des données
4.3.1 Traitement préalable des données textuelles : la transcription orthographique
4.3.2 Traitement préalable des données acoustiques
4.4 Conclusion sur le choix du corpus et sur le recueil et le traitement des données
5 Chapitre 5 : Analyse phonétique de l’intonation d’implication dans un corpus de parole attestée
5.1 Analyse qualitative
5.1.1 Occurrences prototypiques de l’intonation d’implication
5.1.2 Occurrences atypiques de l’intonation d’implication
5.1.3 Répartitions des contours consensuels et ambigus entre ces catégories
5.2 Analyse quantitative
5.2.1 Le modèle linéaire mixte
5.2.2 Analyse sur l’ensemble des données
5.2.3 Analyse de la forme relative des différents types de contours sur un sous-ensemble des données
5.3 Conclusion concernant l’analyse phonétique de l’intonation d’implication
6 Chapitre 6 : Analyse discursive de l’intonation d’implication dans un corpus de parole attestée
6.1 Analyse fondée sur le modèle de Genève
6.1.1 Résultats de l’analyse hiérarchique
6.1.2 Résultats de l’analyse relationnelle et son interprétation compositionnelle
6.1.3 Résultats de l’analyse des dimensions référentielle et interactionnelle
6.1.4 Conclusion concernant les analyses fondées sur le modèle de Genève
6.2 Autres analyses discursives
6.2.1 L’intonation d’implication comme guide à l’interprétation
6.2.2 L’intonation d’implication émerge dans les épisodes polémiques
6.3 Stratégies individuelles dans l’usage de l’intonation d’implication
6.4 Quelle analyse pour le 2syl ?
6.4.1 Parenté du 2syl avec le pi
6.4.2 Parenté du contour 2syl avec l’intonation de finalité t
6.5 Conclusion concernant l’analyse discursive
PARTIE 3 : DISCUSSION ET INTERPRETATION
7 Chapitre 7 : Un contour interactif et argumentatif au fonctionnement pragmatique compositionnel
7.1 Formellement : un contour émergent dans un continuum d’alignement
7.2 Fonctionnellement : un contour interactionnel et argumentatif
7.3 Un contour au fonctionnement pragmatique compositionnel?
7.3.1 Synthèse de nos observations
7.3.2 Une conception compositionnelle du sens de l’intonation : Pierrehumb ert et Hirschberg (1990)
7.3.3 Arguments en faveur de la composition du sens de l’intonation d’implication en français
7.3.4 Obstacles à l’hypothèse de la composition en français
7.3.5 Proposition compositionnelle pour pi et 2syl
7.4 Une proposition alternative : Marandin et al, 2004
7.4.1 La sémantique des contours finals du français selon Marandin et al. (1994)
7.4.2 Réfutation partielle de la proposition de Marandin et collègues
7.4.3 Conclusion concernant le modèle de Marandin et collègues
CONCLUSIONS

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