Un contexte social favorable à la différence : l’ascension des PNL au rang de symbole sous-culturel

Des rappeurs différents à l’origine de la sous-culture « PNLienne »

La première partie de ce mémoire a pour objectif de découvrir plus amplement les deux rappeurs PNL. Ces deux artistes prônent une différence par rapport au milieu dans lequel ils exercent leur art et sont également identifiés comme tels par les acteurs du monde musical et le grand public. Nous allons chercher à comprendre sur quoi repose cette altérité. Que signifie être différent selon les rappeurs PNL ? Pourquoi le revendiquer ? Nous allons tenter de théoriser cette caractéristique identitaire des deux frères qui leur permet de se démarquer sur le secteur du rap.
Pour cela, nous investirons le concept de sous-culture de Dick Hebdige évoquée en introduction et qui constituera le fil conducteur de notre réflexion.
Un des aspects majeurs du concept de Dick Hebdige est la rupture qu’opèrent les individus appartenant à une sous-culture vis-à-vis des normes de la culture dominante. En d’autres termes, il y aurait une culture dominante imposant des codes tacites parlant au plus grand nombre et des individus qui les rejettent. Pour se rendre compte de la différence des rappeurs PNL et voir si ces derniers forment une sous culture, il est donc tout d’abord nécessaire de s’intéresser à l’environnement dans lequel ils évoluent soit le secteur du rap et en dégager ses principales normes.

Évoluer dans un milieu ultra normé et hyper-concurrentiel

Le rap, tout comme le break-dance et le graffiti, est une des composantes de la culture dite hip-hop. Comme toute culture, le hip-hop renvoie à un regroupement d’individus autour de règles sociales, de manières d’être, de codes vestimentaires et de communication bien particuliers que nous allons tâcher d’expliquer . Les travaux de Sébastien Barrio , Karim Hammou ou encore Delancy Bennett nous ont grandement éclairé sur les règles en vigueur dans la culture hip-hop. Nos analyses des textes et des pochettes d’albums des PNL ainsi que nos humbles connaissances du secteur nous ont permis d’enrichir et vérifier nos recherches théoriques.

Des valeurs tout d’abord originelles…

Apparu dans les années 70 dans le Bronx New Yorkais, le mouvement hip-hop est né dans la rue en réaction aux violences causées par les affrontements de gangs hispanos et afro-américains.
Face à ce climat hostile, le musicien Afrika Bambaatta a mis en oeuvre l’Universal Zulu Nation, une organisation prônant certaines normes tacites et qui a engendré un mouvement d’une plus grande envergure, la culture hip hop. Le secteur rap, aux États-Unis et en France, repose encore aujourd’hui sur certains de ces codes originels :
Tout d’abord, nous pouvons citer l’authenticitéparmi les valeurs majeures de la culture hip-hop.
Celle-ci apparaît comme une éthique à suivre. Elle impose deux règles spécifiques aux artistes. La première est l’adéquation entre leurs pensées, leur discours et leurs actes. S’il est découvert qu’un artiste ment dans ses textes, notamment sur son vécu, le message se verra décrédibilisé par les acteurs du secteur. La deuxième est la nécessité d’une continuité entre la personne qu’ils étaient avant leur succès et celle qui a réussi. Ceux-ci doivent montrer qu’ils gardent les pieds sur terre, qu’ils restent fidèles à eux-mêmes et que l’appât du gain ne constitue pas la raison principale qui les a poussé à rapper.
En effet, Karim Hammou, dans son ouvrage Une Histoire de rap en France nous informe d’une autre norme en vigueur, celle de ne pas chercher à s’enrichir par le biais du rap. Suite à de nombreux entretiens avec des rappeurs, le sociologue explique qu’il est très mal vu qu’un artiste soit motivé par des raisons financières. Cela est d’autant plus vrai que le rap, né dans les ghettos américains, s’inscrit dans un mouvement qui s’adressait à son origine aux plus démunis, mettant en avant la créativité et la gratuité de la pratique. Pratiquer pour s’enrichir déformerait alors le propos initial de la Zulu Nation. Les rappeurs doivent principalement se satisfaire de pouvoir faire passer leur message au plus grand nombre.
La force du message livré dans les textes est effectivement l’une des règles régissant le monde du rap. Au début de la discipline, les rappeurs avaient un rôle quasi militant. Ils représentaient les quartiers et se devaient de raconter, dénoncer leurs conditions de vie, dire haut et fort ce que beaucoup pensaient tout bas. Cette norme puise dans une des traditions ancestrales de la discipline, celle de la pratique du chant scandé des griots dans les tribus africaines. Ces derniers avaient pour rôle de décrire la vie quotidienne par l’intermédiaire de textes rimés et improvisés. A l’instar d’un griot et ainsi d’un chroniqueur social, le rappeur relate les événements qui le touche dans son quotidien au quartier ou encore vis-à-vis de la politique en vigueur. Sans être forcément engagé politiquement au sens propre du terme, les rappeurs d’aujourd’hui doivent livrer un message qui a du sens, qui éveille un tant soit peu les consciences. En 2010, Karim Hammou a d’ailleurs évoqué dans un article que le rap se construit de concert avec un franc-parler. Celui-ci le relie avec la notion grecque « Parrhêsia » (le dire vrai).Un rappeur, comme un « Parrhêsiaste », est animé par un souci de franchise dans le but de dévoiler une vérité qui échappe au grand nombre et de rappeler le présent et ses conditions.
A ces normes s’ajoute également la rue comme lieu d’appartenance à revendiquer. Bien que celle-ci soit souvent la raison de revendications, de dénonciations de disparités fortes par rapport à d’autre partie du territoire, les rappeurs se doivent d’être fiers et dignes d’en venir. La rue apparaît comme un lieu d’échanges culturels, une source d’inspiration, un chez soi que l’on aime malgré tout. Les rappeurs sont fortement attachés à leur milieu, ils l’évoquent presque comme des origines à part entière.
Nous pouvons également évoquer la notion de compétition qui anime les rappeurs entre eux.
Le hip-hop a pour ambition de pousser ses membres à se dépasser continuellement, se perfectionner sans relâche. Les battles sont d’ailleurs des rites de passages obligatoires permettant d’être identifié dans la communauté hip-hop lorsqu’on en remporte une. Cet aspect compétitif n’a pas disparu avec le temps. Nombreux sont les rappeurs en France qui se mesurent durant les célèbres Rap Contenders . Nous pouvons même aller jusqu’à évoquer une culture du clash dans le monde du rap aujourd’hui. Ce sont des façons de se mesurer les uns aux autres et de faire parler de soi. Les éternels conflits entre les rappeurs Booba et Kaaris en sont le parfait exemple.

Des tenues vestimentaires propres à eux

Tout comme les Punks ont pu le faire avec leurs vêtements déchirés et leurs épingles à nourrice, les PNL ont instauré leur propre style vestimentaire grâce à la création de leur marque de vêtements, la marque Que la Famille. En analysant les photos sur le site Internet officiel de la marque et sur la page Instagram @quelafamilleoff , plusieurs caractéristiques spécifiques sont à 59 relever sur les habits proposés. Le style général qui se dégage au premier coup d’oeil n’est pas complètement streetwear. Certes, certains joggings sont disponibles à la vente. De manière générale cependant, ce sont globalement des vêtements classiques voire des pièces premium comme des polos et des chemises. Loin des survêtements et jeans baggys longtemps portés par les rappeurs à l’origine, les coupes proposées ne sont pas spécifiquement larges comme pouvaient l’être les tenues des break-danseurs et graffeurs. Plus ajusté, le style vestimentaire Que la Famillede PNL se différencie. Certains motifs figurant sur leurs vêtements sont révélateurs de leur identité. En effet, nous pouvons trouver sur le site de la marque des joggings et maillots de bain aux motifs de la jungle (avec des feuillages verts exotiques) mais également des chemises et débardeurs arborant des décors paradisiaques isolés (avec des plages vides, des palmiers).
D’autres vêtements, comme des ensembles de survêtements font écho à l’univers de l’espace avec une coupe très près du corps (telle une combinaison spatiale) et possédant des motifs futuristes. Ces trois thématiques géographiques -la jungle, l’île déserte et l’espace- sont récurrentes chez PNL. Nous pouvons en effet retrouver l’imaginaire de l’espace sur l’album Deux Frères, dès la pochette de l’album , celui des endroits paradisiaques lointains dans le clip La vie est Belletournée en Namibie. Enfin, la jungle est un des décors phares de PNL, ces derniers ayant créé un story-telling complet autour de la thématique de la jungle et des animaux. Ceci est une manière d’imager comment ils se sentent dans leur banlieue par rapport au reste du monde.
Afficher ces lieux isolés sur leurs tenues permet d’affirmer une fois de plus la distanciation qu’ils souhaitent mettre en place. Enfin, dans la même lignée, des signes distinctifs forts sont présents sur chaque tenue, permettant de marquer et de revendiquer une appartenance à la communauté QLFrien qu’en les portant. Que ce soit le logo QLFen forme de coeur ou la mention « Que la Famille », toutes les pièces arborent forcément l’un des deux. Les significations de ces deux éléments sont fortes. « Que la Famille », en plus d’être le nom de la marque, est également le nom de la communauté des PNL comme nous l’avons dit précédemment. C’est également leur devise qu’ils clament continuellement. Cette dernière renvoie à leur groupe d’individus fortement exclusif. La préposition « que »renforce d’ailleurs ce sentiment de barrière à l’entrée du groupe.
Uniquement les personnes proches de PNL et leurs fervents fans y sont acceptés. Le coeur, lui, est apparu initialement sur l’un des premiers albums de PNL, l’album Que la Familleen 2015 . Nous pouvons y voit un cœur qui bat, dont la partie inférieure est composée de billets de 500 euros, et dont le centre laisse deviner un blason où s’inscrivent une photo de famille et l’inscription QLF.
Cette métaphore appuie et rappelle le propos des PNL selon lequel ils rappent et amassent de l’argent dans l’objectif de nourrir leurs proches. Le coeur a été spécialement redesigné pour la marque de vêtements Que la Famille dans des codes plus premium, avec des traits fins géométriques et une couleur gris métallisé pouvant aller avec tous types de couleurs. Ainsi, porter un vêtement PNL renvoie à porter sur soi l’un de ces deux signes distinctifs et donc, revendiquer son adhésion aux modes de penser et de se comporter des PNL. Ces nouveaux codes vestimentaires propres aux PNL marquent la rupture avec ceux traditionnellement repérés dans le milieu du rap.

Une production musicale distinctive

Selon Hebdige, un regroupement d’individus peut former une sous-culture s’ils écoutent un genre musical distinctif. Les Punks, qui forment le mouvement sous-culturel par excellence selon Hebdige, se démarquaient en écoutant notamment le courant Glam Rock et l’artiste décadent David Bowie. Les PNL sont allés plus loin que la simple consommation d’un genre musical distinctif puisqu’ils ont apporté en France un tout nouveau genre, le cloud rap. Celui-ci se caractérise par des instrumentales dites « planantes », aériennes, avec des sonorités douces et relaxantes, loin des sons rapides et entêtants que nous pouvons retrouver chez d’autres rappeurs.
Ce qui fait la particularité du cloud rap de PNL est la juxtaposition de paroles très crues, portant sur leur quotidien et leur manière de voir la vie, sur ces sons relativement doux. Cette ambivalence dans les textes et les sonorités est devenue une signature de PNL. Prenons par exemple la chanson La Misère est si belle : celle-ci offre une instrumentale acoustique à la guitare rappelant fortement des ballades espagnoles légères. S’y superpose un texte mélancolique présentant deux rappeurs lasses du succès, écoeurés par les travers de la réussite.
La rue et les conditions de vie associées apparaissent comme une échappatoire, une belle misère à retrouver. Ils préfèrent retourner de là où ils viennent, se complaisant dans leur misère, plutôt que de continuer à vivre leur vie après le succès actuel. La mélancolie est fortement présente dans les textes des PNL. Certains journalistes vont même jusqu’à évoquer le Spleen PNLien .

Une mise en scène de la différence pour dissimuler une marque, la marque PNL

Tout l’enjeu de notre deuxième partie de mémoire de recherche consiste donc à répondre à ces interrogations, à vérifier si la sous-culture des PNL repose ou non sur une mise en scène. Pour cela, nous analyserons tout d’abord de plus près le discours des PNL. Nous chercherons à voir s’il repose sur des mécaniques spécifiques et si oui, dans quel objectif. Puis, nous nous intéresserons à la question de la conformité des pratiques des PNL vis-à-vis du secteur rap et de l’industrie musicale en général. Enfin, nous analyserons de manière approfondie le processus de production des PNL afin de vérifier l’authenticité de leur indépendance.

La construction d’un discours différenciant persuasif

Afin de comprendre pourquoi les artistes PNL s’appliquent à réaffirmer fréquemment leur altérité, nous avons décidé d’analyser de plus près leur discours. Pour cela, nous nous sommes intéressé davantage aux pratiques discursives relatives à l’art de persuader. Nous voulions vérifier si les PNL utilisaient certains procédés visant à prouver leur différence, remettant alors en cause sa véracité et niant, in fine, la sous-culture PNLienne théorisée précédemment.
La rhétorique, comme l’évoque Emmanuelle Danblon, dans son article La construction de l’autorité en rhétorique, renvoie à « tout discours qui cherche à être efficace dans la mesure où il prétend agir sur les états mentaux d’un auditoire ». Apparue à l’époque de l’Antiquité, l’un des auteurs fondamentaux de cette discipline n’est autre qu’Aristote qui en a fait une véritable psychologie de la communication. Celui-ci explique que via des procédés discursifs, un locuteur cherche à faire impression sur un auditoire, lui faire comprendre certaines choses. C’est un instrument d’action sur les esprits. Cette discipline a d’ailleurs longtemps été apparentée à de la manipulation, notamment en Grèce Antique comme nous l’explique la chercheuse en sciences du langage Jessica Anunciacao dans sa thèse sur le discours persuasif. En Grèce, des hommes éloquents, soucieux de bien parler, s’adressaient à leur public s’en prêter attention à la vérité de leur propos. Leur unique préoccupation était de trouver des moyens de rendre leur discours le plus convaincant possible et de persuader les individus qui les écoutaient. La rhétorique renvoyait alors à « une utilisation exagérée des figures du langage, à la fausseté de la manipulation et ainsi à une argumentation peu naturelle » .
L’existence de telles pratiques discursives nous a donc questionné sur le sujet de notre recherche.
Est-ce que les PNL useraient de procédés issus de la rhétorique, relevant du même objectif, pour influencer, convaincre leur auditoire de leur différence, sans que leur personnalité morale ne le soit réellement ? Ceci remettant alors en cause le mouvement sous-culturel que nous avons pu identifier ?
Après avoir regardé plus en détails les discours des deux artistes, nous avons pu relever plusieurs procédés allant dans le sens de la persuasion :

Se comparer à des personnages différents

Les textes des PNL regorgent de références à des personnages pop-culturels. Ces artistes mentionnent des personnages sombres, réputés pour leur mode de vie quasiment marginal, car reposant sur de nombreuses activités illicites. Dans le texte Au DD, nous pouvons lire « La rue, j’la dévale à toute allure avec du Gucci comme Mitch », en référence au film Paid in Full dans lequel nous pouvons suivre l’ascension de Mitch et Ace, deux dealers de crack de New-York. Autre exemple, dans le texte Le Monde ou rien, N.O.S dit dans un couplet « Et rien n’change comme le bruit du gyro’, j’suis plus Savastano que Ciro », en référence à la série Gomorra sur la mafia italienne. Savastano étant le nom de famille d’une des deux mafias les plus puissantes et Ciro un homme de main qui va la trahir.
A travers ces références, les deux rappeurs PNL cherchent à se comparer et à s’assimiler à ces personnages. En intégrant des procédés analogiques dans leurs textes, ils veulent s’élever à leur niveau et ainsi bénéficier du même statut pour se conférer une certaine autorité. Le tout leur permettant d’être davantage persuasifs lors de l’affirmation de leur différence.

Des pratiques conformistes motivées par des objectifs de rentabilité

Depuis toujours, un mythe existe autour de la figure de l’artiste. Celui-ci est considéré comme un être sacré dans l’inconscient collectif. En effet, la société lui confère une certaine singularité reliée au génie qui sommeillerait en lui. Talentueux, inventif, impossible à imiter par des individus plus « ordinaires », celui-ci jouirait d’un pouvoir qui le distancerait de la sociétécommune et lui procurerait une aura spécifique.
Comme nous avons pu l’expliquer brièvement dans notre introduction, le rap rencontre un grand succès et est devenu un genre musical de masse au coeur de l’industrie musicale. Alors directement relié aux nombreuses critiques dont cette industrie peut être la cible, le rap a fini par être considéré comme un secteur réputé pour formater les individus de manière à en faire les artistes montés de toute pièce que le public réclame. Le genre rap aurait perdu de son aura jusqu’ici préservée. L’article du média Yard (magazine en ligne spécialisé dans la culture urbaine) évoque en effet un genre musical « en fin de cycle » . Loin du courant novateur et sous-culturel de ses débuts, l’auteure dresse le portrait d’un rap aux artistes uniformisés, répondant aux besoin accrus des consommateurs par des productions « réchauffées », pauvre en qualité. Face à ce déclin, les PNL se sont imposés comme des artistes à part entière, fidèles à l’imaginaire collectif de l’artiste, grâce à leur posture différenciante aux codes sous-culturels sous-jacents.
Cependant, après avoir confronté les pratiques courantes des PNL ainsi que leurs codes sociaux, nous avons pu nous rendre compte de procédés conformes à d’autres artistes de l’industrie qu’ils rejettent et à des marques commerciales.

Des procédés conformes à d’autres artistes

Nous nous sommes en effet rendu compte que les PNL usent de techniques fortement courantes dans le secteur du rap Outre-Atlantique. Concentrons nous par exemple sur leur dernier titre phare en date, Au DD sorti en 2019. Comme nous avons pu l’évoquer précédemment, cette chanson traite du rapport au succès des deux frères. Affirmant leur position de leader dans le texte, ces derniers ont illustré leur propos en se mettant en scène, dans leur clip et sur leur pochette d’album, en haut de la Tour Eiffel. Les PNL ont choisi ce lieu de prestige aussi énigmatique, métaphore évoquant le sommet et donc la réussite ultime, afin de se distancer du reste du rap et d’affirmer une position dominante et différenciante. Par ailleurs, cette technique a déjà été utilisée par le rappeur Drake en 2016 pour la sortie de son album Views. L’artiste canadien s’est en effet mis en scène assis, tout comme les PNL sur la Tour Eiffel, au sommet de la plus haute tour de Toronto. Dans une démarche d’affirmation de sa supériorité vis-à-vis du secteur du rap canadien et US, Drake en avait également fait le visuel de sa pochette d’album .

Le recours à un processus de production classique faisant intervenir une multitude d’acteurs

Le 25 mars 2019, Les PNL postent sur leur page Instagram @pnlmusic une photo issue de leur clip Au DDen haut de la Tour Eiffel avec pour légende « On pensait pas un jour monter si haut…en totale indépendance ». Mais que signifie réellement être un artiste indépendant ? Selon la définition du CNRTL, un individu indépendant « jouit d’une entière autonomie vis-à-vis de quelqu’un ou de quelque chose », il est « en mesure de subvenir entièrement à ses besoins ». Si les PNL sont réellement indépendants, à en croire leurs dires, cela signifierait donc qu’ils ne sont tributaires de personnes. Ils s’occuperaient eux-mêmes de l’entièreté du processus de production de leurs oeuvres, soit la création, la distribution et la communication. Dans son ouvrage Le Monde de l’Art, Howard Becker nous informe cependant que « Tout travail artistique, de même que toute activité humaine, fait intervenir les activités conjuguées d’un certain nombre et souvent, d’un grand nombre de personnes. L’oeuvre d’art que nous voyons ou que nous entendons au bout du compte commence et continue à exister grâce à leur coopération » . Ces nombreuses personnes assurant la réussite des artistes par le fruit de leur travail quotidien, Becker les nomme « le monde de l’art ». Ce dernier venant contredire les affirmations d’indépendance des PNL, nous avons décidé de remonter le processus de production créatif des deux rappeurs pour voir plus en détails ce qu’il en était. Nos différentes analyses des productions des PNL ainsi que la lecture du mémoire celsien Industrie Musicale et fabrique des idoles de Marie-Anne Chrétien nous ont grandement éclairé.

CONCLUSION

« J’crois bien qu’ils sont pas humains, ou c’est peut-être moi qui suis pas humain. » (Humain – Dans la Légende – PNL, 2016) Tout au long de ce mémoire de recherche, nous avons tenté de répondre à la question suivante : Dans quelle mesure les PNL forment-ils une sous-culture dans l’industrie musicale actuelle ?
Nos différentes analyses menées sur notre corpus et nos recherches théoriques nous ont alors permis d’élaborer trois hypothèses venant répondre à cette interrogation. Voici les éléments de réponses que nous pouvons alors apporter :
Notre première hypothèse stipulait que les rappeurs PNL étaient des artistes singuliers dans le secteur du rap. Une singularité les plaçant à l’origine d’un mouvement sous-culturel propre à eux.
En nous attachant à la définition de la sous-culture de Dick Hebdige, nous avons alors cherché à vérifier si les PNL remplissaient bien tous les critères pour être qualifiés comme tel. Il nous a alors fallu regarder si les deux artistes, à l’instar des Punks, évoluent dans une culture hégémonique qu’ils rejettent, à laquelle ils opposent de nouveaux codes sociaux, tout en se laissant voir et entendre dans le discours dominant afin d’être identifiés par celui-ci. Nous nous sommes alors rendu compte que les PNL vivent dans un secteur rap très normé et hyper-compétitif s’inscrivant dans une industrie musicale. Un rejet qu’ils accentuent en ayant mis en oeuvre des manières différentes de penser (l’entre soi QLF, l’appât du gain, etc), de communiquer et parler (un silence communicationnel intense, un vocabulaire inventé et peu accessible) et de s’habiller (leur propre marque de vêtements Que La Famille). Le tout renforcé par l’écoute d’un genre musical distinctif, le Cloud Rap. Les deux frères s’appliquent par ailleurs à se conformer à certaines normes du secteur du rap afin de paraître légitimes aux premiers abords, d’être identifiés par celui-ci et ainsi mieux se différencier (attachement à la rue, affirmation d’une crédibilité de rue, usage de l’argot et du verlan, etc). Ainsi, la première hypothèse de notre mémoire a été validée par les recherches et analyses menées. Les rappeurs Ademo et N.O.S apparaissent bel et bien comme des rappeurs différents, à l’origine d’une sous-culture vis-à-vis de la culture hip-hop en vigueur sur le secteur du rap.
Notre deuxième hypothèse consistait à dire que cette différence et ainsi cette sous-culture des PNL n’étaient que mises en scène pour mieux se démarquer et ainsi réussir sur le secteur de l’industrie musicale. En effet, le fait que les PNL répètent sans cesse leur différence nous a semblé douteux. La différence, si réelle elle est, n’a pas besoin d’être réaffirmée sans cesse. Nous avons alors regardé de manière approfondie les discours et pratiques des deux rappeurs. Nos analyses nous ont révélé la mise en oeuvre d’un discours reposant sur des procédés persuasifs proches de la rhétorique. Preuve que leur différence n’est pas naturelle. Ce discours dissimule alors des pratiques identiques à d’autres artistes et également à des marques commerciales de la grande consommation et du luxe. Ainsi, les PNL semblent s’inscrire, au même titre que les artistes qu’ils dénoncent, au coeur de l’industrie. Fins stratèges, ils usent de techniques marketing leur permettant de répondre parfaitement aux logiques marchandes du secteur pour s’assurer une rentabilité maximale. Les PNL semblent parfois se rapprocher d’une marque à part entière. Ils remplissent en effet tous les critères d’une minimum viable brand, soit : la mise en oeuvre de valeurs spécifiques, l’identification de concurrents, la définition d’une mission, à laquelle ils répondent avec des armes ou autrement appelées des reasons to believe, ainsi que le recours à une tonalité et à un style particulier. Le tout leur permet la mise en place d’un positionnement clair et d’une cohérence dans leurs prises de paroles, à l’instar d’une véritable marque. De plus, en remontant le processus de production des deux frères, nous avons pu constater que celui-ci est des plus classiques, remettant en cause leur supposée indépendance pourtant au coeur de la différence qu’ils prônent. Ainsi, la deuxième hypothèse de notre mémoire se confirme mais vient également nuancer la première.Les PNL ne sont pas à l’origine d’un mouvement sous culturel. Ils mettent en scène un positionnement particulier en se ré-appropriant les caractéristiques d’une sous-culture. Loin de vouloir remettre en cause le système en place dans le secteur du rap, c’est une façon stratégique de se différencier dans un milieu hyper-compétitif où chaque artiste a recours à des procédés plus recherchés les uns que les autres.
Enfin, notre troisième hypothèse de recherche visait à démontrer que les PNL, bien qu’étant à l’origine d’une mise en scène complète de leur singularité, ont réussi à s’ériger au rang de symbole sous-culturel. Cela s’explique par les contextes sociaux dans lesquels ils évoluent. Des contextes en proie aux doutes vis-à-vis de leur modèle dominant. La différence et sous-culturalité des PNL apparaissent alors comme une figure de réponse. Les PNL évoluent en effet dans un secteur rap nostalgique de son passé sous-culturel en raison de son inscription dans l’industrie musicale aujourd’hui. Les artistes de cette même industrie de manière générale admirent les artistes autonomes se différenciant. Ils leur apparaissent en effet comme un idéal de carrière qu’ils ne peuvent complément atteindre en raison des impératifs de rentabilité auxquels ils doivent répondre, comme des modèles à suivre. Enfin, le contexte social national fait la connaissance d’un mouvement contestataire fort, le mouvement Nuit Debout. Ce dernier remet en cause le système en vigueur et cherche à trouver un modèle politique et institutionnel alternatif. Ainsi, face à ce climat de questionnements et de bouleversements intenses, les PNL et leurs supposés codes sous-culturels apparaissent comme les symboles de ce qu’une partie de la société souhaiterait incarner. Notre troisième hypothèse vient donc se confirmer : les deux rappeurs sont érigés au rang de symbole sous-culturel grâce à leur apparition dans un contexte social en proie à l’acceptation de leur discours, en quête de nouveaux modèles à travers lesquels s’identifier.

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Table des matières
REMERCIEMENTS 
SOMMAIRE 
INTRODUCTION 
PARTIE 1 – Des rappeurs différents à l’origine de la sous-culture « PNLienne »
a) Évoluer dans un milieu ultra normé et hyper-concurrentiel
b) Imposer ses propres codes sociaux
c) S’inscrire dans le discours dominant pour être identifié
PARTIE 2 – Une mise en scène de la différence pour dissimuler une marque, la marque PNL
a) La construction d’un discours différenciant persuasif
b) Des pratiques conformistes motivées par des objectifs de rentabilité
c) Le recours à un processus de production classique faisant intervenir une multitude d’acteurs
PARTIE 3 – Un contexte social favorable à la différence : l’ascension des PNL au rang de symbole sous-culturel
a) Le culte de la différence chez les artistes du secteur industriel musical
b) Évoluer dans une société bousculée par un mouvement contestataire national
CONCLUSION 
BIBLIOGRAPHIE 
ANNEXES 
RÉSUMÉ 

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