Typologie des accidents corporels de cyclistes âgés de 10 ans et plus

Qu’est-ce qu’un cycle, un vélo, une bicyclette ? Qui est le cycliste ?

     Le cycle est un « véhicule ayant au moins deux roues et propulsé exclusivement par l’énergie musculaire des personnes se trouvant sur ce véhicule, notamment à l’aide de pédales ou de manivelles » . Il existe aussi un type de « cycle à pédalage assisté [qui est] équipé d’un moteur auxiliaire électrique d’une puissance nominale continue maximale de 0,25 kilowatt, dont l’alimentation est réduite progressivement et finalement interrompue lorsque le véhicule atteint une vitesse de 25 km/h, ou plus tôt si le cycliste arrête de pédaler. » ; on les appelle généralement les Vélos à Assistance Electrique (VAE). Ces derniers ne sont pas spécifiquement étudiés dans cette thèse ; étant en 2014 encore peu nombreux sur les routes, ils sont rarement identifiables dans les bases de données. En somme, « On entend par bicyclette tout produit comportant deux roues et une selle, et propulsé principalement par l’énergie musculaire de la personne montée sur ce véhicule, en particulier au moyen de pédales ». La bicyclette est un véhicule qui se définit aussi comme un modèle particulier de vélocipède ou de cycle possédant deux roues de même taille et une transmission par chaine. Dans le langage courant, le terme cycle est peu usité et l’on dira que les cyclistes circulent plus souvent à vélo ou à bicyclette. Leur fabrication est règlementée par décret; les normes prennent en compte les différentes pratiques et distinguent les vélos en fonction de ces pratiques. Les bicyclettes ne sont pas soumises à l’immatriculation et les cyclistes ne sont pas restreints par leur âge ou par l’obtention d’un permis pour pouvoir circuler. Il suffit donc d’avoir appris à faire du vélo pour se retrouver à circuler à bicyclette. Pourtant, les cyclistes doivent respecter les mêmes règles de circulation que les autres conducteurs : le code de la route. En théorie, les cyclistes sont également passibles des mêmes sanctions que les automobilistes lorsqu’ils ne respectent pas certaines règles telle qu’être muni d’un feu de position lorsque la visibilité est insuffisante. Ils sont ainsi passibles d’emprisonnement ou d’amende pour ne pas être équipés de dispositifs de freinage efficaces. Théoriquement, ils peuvent aussi faire l’objet d’une suspension du permis de conduire, pourtant obtenu pour un autre moyen de transport. Les cyclistes doivent respecter la signalisation et laisser passer les piétons (R412/30). Le cycliste doit lui aussi serrer sur la gauche et se placer au milieu du carrefour sans dépasser l’axe médian, pour tourner à gauche (tourne-à gauche indirect). Il doit alors laisser le passage aux usagers venant en sens inverse, aux cycles venant des pistes cyclables et aux piétons (R415/4). Ainsi le cycliste, considéré comme usager vulnérable, peut se retrouver au centre du carrefour entouré par des usagers motorisés en mouvement. On peut supposer que les usagers les plus conscients de cette fragilité liée au différentiel de gabarit (et de vitesse) entre un vélo et un autre véhicule, choisissent alors de serrer à droite voire d’utiliser le passage piéton pour tourner à gauche plutôt que de se retrouver au milieu du flot de véhicules puis de ne disposer que de quelques secondes pour traverser avant que le feu tricolore n’autorise les conducteurs à s’engager sur l’intersection. Le code de la route a d’ailleurs été aménagé en ce sens en 2003 pour autoriser les cyclistes hors agglomération à traverser une fois que la voie est libre des deux côtés. En ville, les cyclistes sont autorisés dans les aires piétonnes à condition de rouler au pas (R431/9). Par contre, seuls les cyclistes de moins de 8 ans et roulant au pas sont autorisés à circuler sur les trottoirs (R412/34), sauf disposition exceptionnelle. Les premiers aménagements cyclables remontent au début du 20eme siècle [169]. Depuis quelques années, le vélo connaît un regain de popularité et bénéficie à nouveau de la construction d’espaces qui lui sont dédiés ; ceux-ci apportent une solution avantageuse aux cyclistes qui les plébiscitent généralement lorsqu’ils existent ; particulièrement quand ils ont été conçus pour faciliter la circulation à vélo, c’est-à-dire qu’ils combinent optimisation des trajectoires et utilisation de l’énergie musculaire (en évitant de poser le pied à terre). En résumé, le cycliste doit se comporter sur la chaussée comme une automobile et sur le trottoir comme un piéton. Ce sont les aménagements cyclables correctement pensés qui lui autorisent un comportement de conduite cycliste lui permettant un déplacement fluide et rapide durant lequel peu d‘énergie est utilisée pour rester en équilibre, car les relances y sont moins nombreuses. A l’inverse, lorsque l’itinéraire présente beaucoup de zones de circulation mixte, le comportement du cycliste nécessite un ajustement permanent de sa vitesse à la circulation motorisée et piétonne, notamment à cause de l’infrastructure peu adaptée à son véhicule (exemple : zones pavées, ralentisseurs, pistes cyclables sur trottoirs, certains giratoires, etc). Le cycliste est alors souvent contraint à des adaptations pour rester en équilibre, qu’il n’obtient que lorsqu’il roule.

Nombre de victimes d’accidents corporels : les tués et les blessés

      Dans la plupart des pays, il existe principalement deux sources pour dénombrer les tués et les blessés de la route : les données policières et les données médicales. Les enregistrements de la police permettent les comparaisons en accidentologie et en accidentalité entre pays bien que la qualité des données pâtisse d’un sous enregistrement chronique des cyclistes. Les données d’origine hospitalière sont d’une plus grande représentativité si elles incluent des données sur les simples passages aux urgences, mais elles sont rarement disponibles sur un territoire national, les pays de petite surface tels que la Belgique ou les Pays-Bas font figure d’exception. Par ailleurs, il est parfois difficile de repérer les blessés en fonction de leur mode de déplacement dans ces données d’origine hospitalière, les causes externes de morbidité étant souvent mal renseignées. Les données policières contiennent une plus grande proportion de collisions que les sources médicales car les forces de l’ordre sont généralement contactées pour les accidents les plus graves, nécessitant notamment un procès-verbal pour les procédures judiciaires ou d’assurances. Cette pratique a des effets conséquents sur la connaissance des accidents cyclistes dont le sous-enregistrement par les forces de l’ordre est retrouvé dans de nombreuses études [133, 224, 239], en particulier sur le territoire de notre étude, le département du Rhône [8]. Avant d’aborder des estimations précises sur le territoire rhodanien, nous exposons les données mondiales et nationales d’accidentalité cycliste pour mieux contextualiser notre recherche.

Collisions avec un antagoniste motorisé et aménagement cyclable

     Calculer le gain en sécurité obtenu grâce aux aménagements cyclables est périlleux puisque relatif à la diversité des populations de cyclistes (d’inexpérimenté à expert), des infrastructures cyclables (bande cyclable, piste sur trottoir, aménagement sur voie de bus) et à la faible prise en compte de l’exposition des cyclistes au risque d’accident. La discussion s’articule souvent autour des avantages et des inconvénients à construire des pistes cyclables en séparant physiquement les cyclistes du flot des autres usagers de la route ou des piétons par des bandes continues, pointillées ou des ilots. Le sujet a déjà fait polémique [77, 181] et revient régulièrement perturber les débats sur la sécurité à vélo en évinçant d’autres aspects tel que le comportement des usagers. La sécurité des aménagements revêt deux aspects : la sécurité en intersection et en section courante (entre deux intersections). Une étude canadienne regroupant des articles sur le risque d’accident mis en lien avec les différentes façons d’élaborer les infrastructures cyclables montre qu’il est dissemblablement influencé en intersection et hors intersection [190]. C’est pourquoi nous nous attardons d’abord sur les accidents en intersection puis sur ceux hors intersection.
x Intersections : les carrefours giratoires : A partir des années 1990, l’Europe a connu une recrudescence du nombre de carrefours transformés en giratoires. Des chercheurs ont alors eu la volonté d’établir le gain en sécurité par type d’usagers. Les conclusions se corroborent : si ce type de carrefours améliore la sécurité des déplacements en intersection en général et pour tous les usagers, les cyclistes sont ceux qui en bénéficient le moins [49, 100]. Certains ronds-points augmentent même le risque d’accident pour notre catégorie d’usagers d’intérêt. Selon des études menées en Belgique par exemple, on peut s’attendre à environ un tiers d’accidents de plus après l’installation de giratoire (+27%) et plus précisément à une hausse des accidents mortels ou avec blessures graves d’au moins 40% [51]. Ces résultats diffèrent selon le type de zones de circulation (urbaines vs. non-urbaines) et ne permettent pas de rejeter l’hypothèse nulle (« pas d’effet des rondspoints sur la sécurité des cyclistes ») par manque de puissance à cause de la faiblesse de l’échantillon. Néanmoins, ils ont été confirmés depuis par d’autres études qui suggèrent la dangerosité des ronds-points hors ville [48, 50]. Les aménageurs l’ont d’ailleurs traduit en normes de construction : en Suède par exemple, l’îlot central doit faire plus de 10m de rayon pour diminuer le risque d’accident hors agglomération [31]. La présence d’aménagements cyclables diminuerait le risque d’accident sur les ronds-points d’autant plus que l’infrastructure a été spécifiquement conçue pour traverser en tout sécurité, c’est-à-dire lorsque les trajectoires des usagers vulnérables et des véhicules motorisés sont physiquement séparées. Des études comparant la sécurité avant et après [48, 118, 202] l’installation de ce type de giratoires permettent de le confirmer. Elles montrent que toutes gravités confondues, les ronds-points avec une piste cyclable (peinte) offrent moins de sécurité face au risque d’accident que ceux où le trafic est mixte ou que ceux avec un aménagement cyclable tout ou partie physiquement séparé. Malheureusement ce type d’étude ne prend pas en compte l’évolution du nombre de cyclistes utilisant le carrefour avant et après l’installation, ce qui influe directement sur le risque d’accident. La fréquentation peut avoir diminuée ou augmentée justement à cause du nouvel aménagement. Par ailleurs, les giratoires ne dérogent pas à certaines tendances de la sécurité à vélo et nous retrouvons sur cette thématique des notions que nous explicitons dans la suite de cet état de l’art telles que la sécurité par le nombre, la proportion d’accidents seuls qui s’élève aussi à 70% dans les giratoires, une plus grande vulnérabilité des personnes âgées face aux blessures graves, la gravité des accidents nocturnes en dehors des zones urbaines [48].
x Autres types d’intersections : feux tricolores, panneaux stop et cédez-le-passage : Les autres types d’intersection ont également été l’objet d’un certain nombre de publications, notamment afin de déterminer si les aménagements cyclables y sont souhaitables. La problématique est de savoir si ces aménagements améliorent la sécurité des cyclistes et, si oui, comment mesurer ce bénéfice. En effet, tous les protocoles d’enquêtes ne sont pas adaptés à l’étude de ce risque. Ainsi, une étude suédoise a montré l’insuffisance des données pour calculer l’accroissement ou la diminution du risque d’accident en intersection à partir d’études transversales [83]. Quelques années plus tard, cette équipe a publié sur les résultats d’une enquête avant/après à partir de 44 intersections [82] afin de mesurer le gain en sécurité des passages surélevés de pistes cyclables. Les auteurs ont mis en évidence que ces aménagements attirent en moyenne plus de cyclistes et qu’ils créent un gain en sécurité de 10 à 50%. Néanmoins, l’étude se fonde sur la période 1988 à 1996 alors que les travaux d’aménagement datent de 1993, la période après installation de l’aménagement est donc plus courte de 2 ans par rapport à la précédente mais il y aurait plus de circulation dans la période post aménagement (+50%) que celle le précédant. Un autre type d’aménagement cyclable en intersection sont les bandes de couleur peintes au sol. Un article de synthèse [117] met en lumière leur apport sur la diminution du risque d’accident. Il semble toutefois que les surfaces peintes favorisent les chutes par une perte d’adhérence sur la surface peinte alors que les collisions diminuent de 10% les voitures laissant dans l’ensemble davantage la priorité. Paradoxalement, les auteurs y exposent aussi une baisse de la recherche visuelle des automobilistes par les cyclistes ainsi qu’une baisse de la signalisation des changements de direction par les automobilistes qui, malgré tout contrôlent davantage leur vitesse. Cette étude montre que le gain en termes de gravité des blessures est plus important que celui sur le risque d’accident. En effet, la diminution des vitesses des automobilistes implique que lorsqu’il y a une collision les conséquences pour le cycliste sont moins graves. Parallèlement, lorsque le nombre de lignes peintes au sol augmente, le risque d’accident fait de même à cause de la diminution de la lisibilité du carrefour et de l’accroissement de la superficie sur laquelle le cycliste peut manquer d’adhérence [11, 117]. La modélisation des facteurs de risque d’accident est notamment proposée dans une étude sur des intersections de Tokyo qui s’intéresse à 585 accidents de cyclistes en collision avec un véhicule motorisé [233]. L’étude arrive à la conclusion que les facteurs d’exposition importants sont, quelle que soit la direction du cycliste : la vitesse, la densité de trafic et le nombre moyen de manœuvres par jour pour tous les véhicules. Trois types d’accident sont modélisés, selon la direction prise par le véhicule antagoniste (tout droit, à gauche ou à droite). Les résultats mettent en avant des facteurs liés à l’exposition et laissent aussi supposer que l’interaction dans un univers complexe augmente la probabilité d’accident puisque la présence ou l’absence de passage piéton sur la voie de sortie du carrefour que traverse le véhicule motorisé influence la probabilité d’accident. Cette idée de complexité et lisibilité de l’intersection se retrouve dans d’autres études : par exemple, l’une d’entre elles montre à partir de calculs de risques relatifs (RR) que l’accroissement du risque d’accident en collision est en majorité dû à la circulation du cycliste à contre sens du trafic (RR=1.9) comparée à celle dans le même sens (RR=0.9) [228]. Une équipe finlandaise s’est par ailleurs concentrée sur la recherche visuelle des cyclistes par des automobilistes en intersection afin d’expliquer pourquoi un nombre important de collisions ont lieu alors que le cycliste vient de la droite de l’automobiliste qui souhaite lui-même tourner à droite [177]. D’après cette étude, dont les résultats ont été confirmés depuis [210], c’est la focalisation de l’attention sur le risque le plus probable (une voiture venant de gauche) qui explique ce phénomène. Les conducteurs limiteraient le balayage visuel sur les dangers les plus importants et fréquents, mais négligeraient les informations visuelles d’éléments moins probables tel qu’un cycliste sur la droite [187, 210]. Cette théorie s’approche du concept de « look-but-failed-to-see-error » utilisé en accidentalité des deux-roues motorisées et qui consiste à repérer les collisions lors desquelles un conducteur a regardé mais n’a pas vu, c’est-à-dire n’a pas intégré l’information de la présence de la moto [46]. On peut alors avancer l’idée que dans une intersection plus complexe, l’automobiliste, bien que régulant sa vitesse, ne peut prendre en compte tous les dangers avec le même niveau d’attention, augmentant ainsi la probabilité de collision avec un cycliste. Cette probabilité d’accident augmenterait d’autant plus que le cycliste n’est pas exactement là où on l’attend, par exemple sur une piste cyclable peinte au sol [117] ou bien lorsqu’il y a un masque à la visibilité [65]. En 2011, une étude a questionné l’hypothèse fondamentale de travail sur la recherche du lien entre environnement et risque. L’équipe norvégienne a montré que le niveau d’interaction entre usagers (densité du trafic) est indépendant du niveau de conflit et donc de la probabilité d’accident [177]. Cette étude replace au centre du débat le rôle de l’usager qui interagit avec l’environnement à un instant donné quelle que soit la forme de celui-ci. La capacité d’apprentissage des conducteurs, qui s’adaptent au cours du temps aux situations qu’ils considèrent comme dangereuses, c’est-à-dire l’expérience, est alors mise en exergue. L’étude d’une intersection (un stop en T) pendant une dizaine d’années à trois dates anniversaires (0/4/10 ans) permet d’observer une augmentation de la part des personnes cédant immédiatement la priorité et une baisse de la proportion de conflits tandis que la répartition entre type d’usagers sur les comportements de priorité reste la même, donc que les fréquences par type d’interaction restent comparables. Dans 20% des cas, les cyclistes laissent la priorité à l’autre usager en arrivant à l’intersection, contre 60% pour les automobilistes et 15% pour les deux en même temps (dans 5%, la situation est confuse). Une typologie en 8 classes organise les situations possibles d’interaction en listant les manœuvres les précédant: au total trois classes montrent un changement statistiquement significatif du comportement des automobilistes et une seule des cyclistes [93]. Ceci explique que des études menées à partir d’intersections filmées pendant quelques heures ne peuvent conclure à un gain de sécurité puisque les capacités d’apprentissage des conducteurs ne sont pas prises en compte. Qui plus est, ces protocoles ne s’intéressent généralement qu’à une spécificité de l’aménagement du carrefour (par exemple, aux sas à vélo) et prennent ainsi en compte qu’une partie des situations d’interaction possibles, donc qu’une partie du risque en intersection. Ce type d’étude permet tout de même de mesurer une augmentation du sentiment de sécurité chez 77% des cyclistes interrogés ou de repérer les caractéristiques des cyclistes ne respectant pas les règles de circulation [63, 120, 121]. Si les niveaux d’interaction et de conflits ne sont pas directement liés dans les intersections, il nous faut vérifier ce qu’il en est pour la section entre deux carrefours.
x Section courante : pistes et bandes cyclable, voies vertes, boulevards cyclables, contresens cyclables, voies mixtes, … Le réseau routier est traditionnellement découpé aux Etats-Unis en 3 types de routes : les axes principaux, secondaires et ceux dédiées aux cyclistes. Dès les premières enquêtes, les auteurs s’intéressent à la différence de risque d’accident selon ce critère [122]. Ainsi pour 1 million de miles parcourus aux Etats-Unis les membres de la ligue américaine de cyclisme vont être 34,8 fois hospitalisés, contre 54 fois sur les routes secondaires et 11,2 fois lorsqu’ils circulent sur un aménagement cyclable. Il y a là un effet protecteur des aménagements cyclables en section courante qui a été confirmé par une étude transversale menée l’année suivante [139]. Les chercheurs y montrent que le taux d’accident est influencé par la présence d’une piste cyclable délimitée par de la peinture au sol dans 51% des collisions et 29% des accidents vélovoiture (n=145). Le risque de collision diminuerait de moitié (53%) en présence d’un aménagement cyclable [139]. A contrario, avec un protocole qui comptabilise les accidents avant et après l’installation d’une piste cyclable, des chercheurs concluent à une augmentation du taux d’incidence dans la période qui suit [206]. Néanmoins, comme nous l’avons auparavant évoqué, cette étude n’ajuste pas sur la fréquentation de l’infrastructure qui peut être davantage convoitée par les cyclistes une fois l’aménagement cyclable construit. Ceci peut engendrer un accroissement du nombre d’accidents car les cyclistes sont plus nombreux à être soumis au risque. L’exposition au risque d’accident est en effet rarement calculée, faute de données. Et lorsqu’elle l’est, le calcul prend très exceptionnellement en compte les caractéristiques du cycliste. Or, certaines études soulignent que les infrastructures cyclables sont davantage utilisées par les cyclistes occasionnels et peu expérimentés que par les cyclistes quotidiens qui les fréquenteraient moins souvent mais y parcourent de plus longues distances. En outre, le type de trajet effectué influence le fait de préférer circuler sur une piste cyclable, sur la route ou sur le trottoir. Ainsi, les pratiques utilitaires se font davantage sur pistes cyclables que les pratiques loisirs. Notons que toutes pratiques confondues, les cyclistes utilisent moins les trottoirs que la chaussée et les aménagements cyclables, même lorsqu’ils sont autorisés à rouler sur l’espace piéton par le code de la route [95]. Une étude canadienne met en doute l’effet sur la sécurité des cyclistes des aménagements cyclables sur les trottoirs. Une des conclusions de ce travail suggère d’investir sur la formation des cyclistes pour éviter les chutes seules et sur celle des conducteurs pour diminuer les collisions plutôt que de dépenser des sommes importantes dans l’aménagement des routes pour y intégrer les cyclistes [13, 64]. Pour la plupart des auteurs, il ne fait aucun doute que circuler à vélo sur des aménagements cyclables diminue le taux d’accident [155-157, 193]. Pour quelques-uns, les résultats semblent plus contradictoires lorsque l’on prend en compte l’exposition au risque par nombre de kilomètres parcourus sur un type de route cyclable [13] ou si l’on considère les manœuvres [109]. Parfois des études concluent même, au contraire, à une augmentation du risque [14] et certains de ces articles ont d’ailleurs été vivement critiqués jusqu’à faire polémique [181]. Des chercheurs assurent que le risque d’accident est inférieur sur un aménagement cyclable les pistes cyclables et les rues qui servent de référence ne contiennent pas exactement le même nombre d’intersections. Ainsi, la majorité de ces aménagements en section courante n’a pas une efficacité prouvée, car le risque d’accident de cycliste seul y a très peu souvent été calculé (faute de données). La démonstration que les infrastructures cyclables protègent les utilisateurs du vélo se fonde essentiellement sur l’expérience des pays dans lesquels la part modale est importante [183]. La contribution des infrastructures cyclables à la sécurité des cyclistes est tenue pour évidente, les recherches s’orientent récemment davantage vers la sécurité des itinéraires cyclables afin de déterminer si les rues à sens uniques, les artères les plus larges ou encore les moins fréquentées par les camions, présentent plus de risque d’accident ou au contraire protègent les cyclistes du danger [2]. Mais ces études souffrent presque toujours de la même faiblesse : l’utilisation des fichiers des forces de l’ordre qui enregistrent, pour les cyclistes, essentiellement les collisions avec un antagoniste motorisé. Par conséquent, lorsque les chercheurs utilisent cette source de données pour améliorer les connaissances sur la sécurité des cyclistes et sur le gain en sûreté des aménagements cyclables ; ils sont contraints par la nature des données à ne proposer des améliorations d’infrastructures que pour les accidents les plus graves et les moins fréquents. En découle la nécessité de s’orienter en direction des recherches utilisant des données médicales prenant en compte les accidents de cycliste seul au même titre que les collisions ou bien les études qui calculent des risques relatifs en prenant en compte l’exposition au risque. Soulignons que des chercheurs supposent un report du risque d’accident entre intersection sur aménagement cyclable, sur l’intersection hors aménagement cyclable. Il apparait alors que les études souhaitant mesurer l’efficacité des infrastructures pour la sécurité des déplacements à vélo, bien qu’elles utilisent des données médicales et un ajustement sur l’exposition au risque, peuvent être elle aussi suffisamment fragiles pour ne pas permettre de conclure à une protection des aménagements cyclables. Quoi qu’il en soit, d’autres facteurs contribuent aussi au risque d’accident : les conditions climatiques (pluie, vent, nuit-éclairage-conspicuité) ou l’entretien des voies (débris sur les voies, trous dans la chaussée, graviers) ont une importance qui est encore trop rarement considérée bien que ces facteurs jouent un rôle dans un grand nombre d’accidents [125]. La saisonnalité pourrait constituer également un facteur important puisqu’elle influence les conditions météorologiques et les flux journaliers de cyclistes tout comme la densité de trafic motorisé [21, 207].

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Table des matières

PARTIE I Revue de la littérature : accidentalité cycliste, typologie d’accidents et profils des usagers
1 Préambule
1.1 Qu’est-ce qu’un cycle, un vélo, une bicyclette ? Qui est le cycliste ?
2 État des connaissances sur la circulation et l’insécurité à vélo
2.1 Données générales et circulation
2.2Nombre de victimes d’accidents corporels : les tués et les blessés
2.2.1 Estimations mondiales
2.2.2 Estimations françaises
2.2.3 Estimations rhodaniennes
2.3Etat des connaissances sur les facteurs de risque d’accident
2.3.1 L’impact de l’infrastructure sur le risque d’accident
2.3.1.1 Collisions avec un antagoniste motorisé et aménagement cyclable
2.3.1.2 Accidents seuls : accidents de cycliste seul ou un seul cycliste impliqué
2.3.2 Sécurité par le nombre
2.3.3 Âge, expérience, comportement du cycliste et prise de risque
2.3.4 Équipement du cycliste et du vélo : conspicuité et éclairage
2.4Etat des connaissances sur les facteurs de risque de blessure
2.4.1 Casque et blessure à la tête
2.4.2 Casque et blessure à la tête
2.5 Synthèse du chapitre d’analyse de la littérature sur la sécurité des cyclistes
3 État de l’art sur les typologies d’accidents cyclistes
4 Apport des typologies d’usagers cyclistes à la thématique de la sécurité
PARTIE II Typologie Des Accidents Cyclistes
1 Données disponibles en France pour l’étude des accidents à vélo
1.1Les Études Détaillées d’Accident
1.2Données policières
1.2.1 Les Procès-Verbaux
1.2.2 Les fichiers BAAC
1.3Les enquêtes transversales en population
1.4Le Registre des victimes de la circulation du Rhône
2 Objectifs de la thèse
2.1Objectif principal
2.2Objectifs secondaires
2.3Hypothèses de travail
3 Matériel et méthodes
3.1Etapes préparatoires à la mise en place de l’enquête TAC
3.1.1 De la perception du risque à la configuration type d’accident
3.1.1.1 Les vélos-écoles du réseau FUBicy et leurs moniteurs
3.1.1.2 Présentation du guide d’entretien
3.1.1.3 Enseignements issus des entretiens
3.1.2 Exploration des accidents à partir du Registre
3.1.3 Étude pilote
3.1.3.1 Population d’étude
3.1.3.2 Questionnaire de l’étude pilote
3.1.3.3 Évaluation du taux de réponse et des biais
3.1.3.4 Modifications du questionnaire et amélioration du protocole
3.2L’enquête TAC : Méthodologie
3.2.1 Population étudiée
3.2.2 Collecte et saisie des données
3.3Variables utilisées : présentation du questionnaire
3.4Méthodes statistiques utilisées
3.4.1 Analyses univariées et bivariées, description des cyclistes
3.4.2 Construction de la typologie
3.4.3 Construction des Analyses des Correspondances Multiples
4 Résultats
4.1Comparaison des répondants et non-répondants
4.1.1 Âge et sexe
4.1.2 Lieu de pratique du vélo et type d’accident
4.1.3 Gravité des blessures et casque
4.2Description de la population des blessés cyclistes en 2009-2011
4.3Présentation de la typologie d’accidents cyclistes
4.3.1 Les variables utilisées dans la typologie
4.3.2 Détermination du nombre de classes : indications statistiques et décision sur expertise
4.3.2.1 Indications statistiques
4.3.2.2 Décision sur expertise
4.3.3 Description de la typologie : les configurations types d’accidents cyclistes
4.3.3.1 Configurations d’accidents sur trajet utilitaire (DT – DE et hors DT – DE)
4.3.3.2 Synthèse sur les accidents sur trajet utilitaire
4.3.3.3 Configurations d’accidents en pratique loisir et sportive
4.3.3.4 Synthèse sur les accidents en pratique loisir et sportive
4.3.4 Gravité des blessures et conséquences de l’accident
4.3.5 Validation de la typologie par l’analyse des correspondances multiples
4.3.6 Analyse du comportement des cyclistes par analyse des correspondances multiples
5 Discussion sur les configurations d’accidents cyclistes
5.1 Entretien mécanique, conspicuité et conception des vélos
5.2Environnement cyclable, visibilité et lisibilité des aménagements
5.3L’usager cycliste, la pratique et le comportement
6 Conclusion partielle
PARTIE III Accidents Cyclistes Et Genre
1 Rappel du contexte et des enjeux autour du vélo et du genre
2 Description de l’échantillon selon le sexe
2.1Description des accidents sur trajet utilitaire selon le sexe
2.2Description des conséquences de l’accident sur trajet utilitaire selon le sexe
3 Facteurs d’accident cyclistes et prise de risque à l’aune des statistiques : y a-t-il des accidents de femme ?
3.1Matériel : 444 accidents sur trajet utilitaire issus de l’enquête TAC
3.1.1 Définition du modèle logistique
3.1.2 Sélection des variables et interprétation
3.2Résultats
3.2.1 Approche automatique : du modèle complet à 23 variables à un modèle à 9 variables
3.2.2 Approche experte et choix du modèle final.
4 Analyse des résultats par l’analyse de données textuelles : les récits d’accidents
4.1Méthodes statistiques pour l’ADT
4.2Présentation du corpus et des objectifs
4.3Analyse comparative des accidents racontés par les hommes et les femmes
4.3.1 Description des champs lexicaux à travers les formes actives
4.3.2 Classification des thématiques selon la méthode Reinert
Etape 1 : validation de la pertinence de la construction d’une typologie d’accidents à partir des récits
Etape 2 : Analyse de typologies d’accidents à partir des récits d’hommes et de femmes
5 Synthèse des résultats
6 Discussion sur le genre : de l’accident à la pratique, une question d’expérience ?
7 Conclusion de la partie III
DISCUSSION
1 Synthèse générale des résultats
2 Points forts et limites de la thèse
3 Applications possibles en prévention
3.1 Toujours plus de (ré)aménagements ?
3.2 Lisibilité et visibilité des obstacles fixes ou en mouvement
3.3 Efficacité et praticité des équipements pour vélos et cyclistes
3.4 Le rôle clé du comportement pour une utilisation intelligente des innovations
3.5 Les moniteurs de vélo-école, des acteurs ressources pour la diffusion des messages de prévention
Conclusion et perspectives
RÉFÉRENCES

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