Types d’élèves (autorégulé / hétéronome / anomique)

Types d’élèves (autorégulé / hétéronome / anomique)

L’objectif de tout enseignant, au-delà de la réussite des élèves, est de parvenir à impliquer sa classe dans l’activité qu’il a planifiée. Au cours de leur formation, les futurs enseignants sont ainsi amenés à réfléchir et à maîtriser différentes compétences pour concevoir et finalement transmettre au mieux le contenu d’enseignement. Toutefois, en pratique, il n’est pas rare de constater de larges variations dans l’engagement des élèves dans une situation scolaire. En effet, l’enseignement à l’école suppose l’action de différents acteurs dans un même contexte. Mais comme l’a relevé Postic (1979), « la classe est composée d’individus qui n’ont pas choisi d’être ensemble et où la plupart des règles qui régissent leurs actions préexistent à leur rassemblement ». Au cours d’une leçon, l’enseignant doit alors réussir à maintenir les élèves au travail, malgré leurs différences inter-individuelles et leurs variations d’engagement intra-individuelles. Cela signifie qu’il doit réussir à gérer un ensemble de paramètres complexes et co-déterminés, sur lesquels il peut avoir une action partielle. (Durand, 2001 ; Gaël- Petitfaux et Durand, 2001).

L’éducation physique et sportive (EPS) est à ce titre une discipline particulière, car elle fait appel, plus qu’une autre, aux émotions et à la gestion d’un groupe en mouvement, dans un grand espace avec des risques et des dangers. L’engagement de l’élève n’est alors pas seulement un investissement personnel de ses ressources dans une tâche, mais il suppose une mobilisation de ses capacités corporelles, motrices, perceptives, décisionnelles, et émotionnelles. L’absence de traces écrites et l’engagement particulier qu’elle réclame rendent la compréhension de l’action des élèves d’autant plus complexes.

Problématique

Analyse du contexte

En Suisse, l’administration du pays se divise en 3 niveaux : fédéral, cantonal et communal. La Confédération suisse et les cantons se répartissent ainsi les compétences dans le domaine de l’enseignement avec des responsabilités différentes en fonction du niveau de formation. Le système éducatif suisse comprend les degrés de formation suivants :
• Le degré primaire (école enfantine inclus). L’école primaire compte huit années scolaires réservées aux enfants de 4 à 12 ans.
• Le degré secondaire I : Pour les élèves de 12 à 15 ans, ce degré correspond à la dernière phase de l’école obligatoire.
• Le degré secondaire II : formation professionnelle et écoles dispensant une formation générale approfondie (écoles de maturité gymnasiale, écoles de culture générale).
• Le degré tertiaire : formation professionnelle supérieure (examens professionnels fédéraux, examens professionnels fédéraux supérieurs, écoles supérieures) et hautes écoles (hautes écoles universitaires, hautes écoles spécialisées, hautes écoles pédagogiques).
• Les formations continues.

Dans le canton de Vaud, l’école obligatoire se déroule sur onze années d’études réparties en deux degrés : le degré primaire et le degré secondaire I. Au degré secondaire I, les élèves sont répartis dans des cours à niveaux pour toutes les matières enseignées ou pour une partie d’entre elles (Voie Pré gymnasiale – Voie Générale). Actuellement, 90% des jeunes Suisses obtiennent un certificat de formation au degré secondaire I. Après la scolarité obligatoire, les jeunes suisses ont la possibilité de suivre deux voies : une formation professionnelle, qui combine cours et pratique et qui aboutit à l’apprentissage d’un métier ; et une formation scolaire (école de culture générale ou gymnase) qui prépare l’entrée dans une Haute École. Selon les statistiques, deux tiers des jeunes choisissent alors la formation professionnelle, tandis qu’un tiers se destine à une formation scolaire. Toutefois, l’intérêt du système Suisse réside dans la possibilité, à tout moment de son parcours, de changer d’orientation ou de se former grâce aux nombreuses passerelles existantes, entre les différentes voies de formation .

Méthode

Afin de mettre en lumière les transactions qui se jouent en classe d’EPS à propos des consignes et des règles énoncées, j’ai décidé d’effectuer une étude qualitative. En effet, l’observation et l’analyse d’un seul enseignant et de sa classe me semblaient plus pertinentes pour obtenir des résultats objectifs, plutôt qu’un recueil plus important mais également moins précis de données par questionnaires. Pour effectuer ce travail, j’ai alors fait appel à l’une des mes amies enseignante en éducation physique à l’école secondaire de Morges-Beausobres. Diplômée depuis trois ans pour l’enseignement au niveau secondaire I, ce poste représente son premier emploi à durée indéterminée depuis sa formation. Athlète professionnelle dans la discipline du 200m en athlétisme, elle travaille à temps réduit (70%) grâce au soutien du Directeur de l’établissement.

Contexte et participants

Avant toute chose, une demande d’autorisation au directeur de l’établissement a été adressée afin d’obtenir le droit de venir observer une classe durant des leçons d’éducation physique. Après son accord, un premier entretien a été effectué avec l’enseignante en question afin de lui exposer le sujet de l’étude et le recueil de données qui allaient être effectués. Il lui a été également demandé de choisir une classe avec laquelle elle rencontrait plus de difficultés ou avec laquelle il lui semblait intéressant de mener une étude. C’est donc une classe de 10VG qui a été choisie car elle représentait un challenge important en terme d’autorité pour l’enseignante en question. Cette classe est composée de 10 filles et 9 garçons âgés de 13 à 15 ans. Certains d’entre eux rencontraient des difficultés en terme d’application, de concentration et de respect des règles. Leurs comportements inadéquats ont déjà été l’objet de discussions importantes entre les enseignants lors de réguliers conseils de classe.

Recueil des données

Afin d’observer les transactions entre enseignants et élèves durant une période d’EPS, trois leçons de 45 minutes ont été observées (et enregistrées vocalement) dans une même classe. Ces trois leçons concernaient des thèmes volontairement différents : le handball (le jeu) – le saut en longueur (travail technique de la phase d’appel) et le sprint (technique de sprint et placement). Lors de ces observations, tous les moments de rupture du rythme ont été répertoriés dans un tableau permettant leur codification. Ces moments de rupture correspondaient, au niveau des actions de l’enseignante, à des rappels à l’ordre, des avertissements, des mesures particulières entreprises, ou à des changements dans le déroulement de la leçon. Au niveau des actions d’élèves, cela comprenait toutes les actions de négociation des règles, de non implication, de refus de participation ou de participation minimale, d’activités annexes, ou toutes autres actions qui n’entraient pas dans les consignes de l’enseignante.

À la suite de ces observations, un entretien était immédiatement effectué avec l’enseignante afin de discuter des différents événements marquants de la leçon. Cette discussion « à chaud » permettait alors de questionner l’enseignante sur ses différentes actions, sur ses préoccupations et ses attentes ou sur les objectifs désirés lors de l’une ou l’autre de ses interventions. Ce processus de questionnement avait ainsi pour but d’étoffer les observations avec l’interprétation de l’enseignante. Il permettait de rendre conscients et de formuler certains modes de transaction qui ont été repérés durant la leçon et de les discuter avec l’enseignante pour répondre ainsi aux questions de recherche.

Traitement des données

Dans le but d’observer les transactions entre enseignant et élèves, j’ai repéré dans chaque leçon les moments de ruptures qui intervenaient lors d’une action de l’enseignante ou de l’élève. Chaque moment de rupture a été codifié en identifiant les actions de chacun selon le modèle théorique de Méard et Bertone présenté plus haut. A la suite de cette codification, j’ai repéré dans chaque leçon, au sujet de quelles règles survenaient les transactions et quels étaient les enchaînements d’actions reconnaissables. J’ai ensuite analysé les résultats plus en profondeur afin d’observer, quels types de transactions étaient le plus récurrents pour chaque type de règle. J’ai ensuite rassemblé les observations des trois leçons afin d’obtenir une vision globale des interventions de l’enseignante et des élèves dans les différentes situations. Finalement, j’ai croisé mes résultats avec les entretiens effectués après chaque leçon. Ceci m’a permis alors non seulement de m’assurer de la pertinence de mes observations, mais également de mieux comprendre les circonstances d’apparition et les préoccupations de l’enseignante. J’ai également tenté d’analyser les interventions de l’enseignante en fonction de différents groupes d’élèves que j’ai différenciés au sein de la classe. L’ensemble de ces démarches a permis, somme toute, de répondre aux différentes questions de recherche que j’ai mentionnées plus haut et qui ont guidé l’élaboration de ce travail.

Analyse des ruptures par leçon et par règle

Après avoir recensé les différents moments de rupture, je vais dès à présent analyser comment les différentes transactions apparaissent pour chaque type de règle.

Lors de la leçon de handball, j’ai pu remarquer que la totalité des transactions à propos des règles institutionnelles décrivaient des actions anomiques des élèves qui engendraient une action argumentée de l’enseignante, ou dans de plus rares cas une action imposée (anomie – argumentation / imposition). De ce fait, lorsqu’un élève adoptait un comportement déviant ou s’écartant des consignes énoncées, l’enseignante le reprenait en justifiant la plupart du temps son intervention, comme on peut le voir avec l’exemple suivant : « Oh, tu te calmes (à Denis), arrête de toujours te coucher par terre, c’est pénible, est ce que moi je donne mes cours couchée par terre ? « . Les règles groupales étaient quant à elles, sources de deux types de transactions reconnaissables. Soit l’enseignante entrait en négociation avec les élèves pour la formation d’équipe et ceux-ci assumaient ensuite leurs rôles sociaux attribués (négociation – autorégulation). Soit, l’enseignante intervenait en argumentant son choix lorsqu’un élève était réfractaire (anomie – argumentation) : « Chuuut Denis….Denis si on est 6 chez les jaunes et 5 chez les blancs, il va se passer quoi ?… « . Les règles d’apprentissage étaient également communiquées selon deux manières : soit l’enseignante profitait d’un arrêt de jeu, pour apporter des conseils techniques au niveau du placement des joueurs en négociant ou en argumentant ses propos, soit elle intervenait pendant le jeu, souvent sous forme d’imposition, lorsqu’elle remarquait des problèmes au niveau de la défense, du déplacement ou des tirs des joueurs. Finalement, concernant les règles des jeux sportifs, elles étaient en grande majorité sources d’actions de négociation de l’enseignante, ce qui entraînait des actions autonomes ou autorégulées chez les élèves : « Tamaney, tu arbitres. Tu siffles quand tu penses que le contact est trop fort d’accord, je te laisse gérer ». À de nombreuses reprises, les élèves ont négocié eux-mêmes des règles et se sont mis d’accord lors d’une faute. L’enseignante intervenait ainsi uniquement lors de doutes ou de questions des élèves (autonomie – négociation): « Madame j’ai une question… si la balle rebondit sur le pied ? Ça fait comme hier tu siffles et tu stoppes le jeu ». Toutefois, lorsqu’un élève adoptait une attitude déplacée dans le jeu, l’enseignante le rappelait à l’ordre (anomie – argumentation) :  » Vous faites quoi? (Yannick se roule par terre avec la balle) ».

Le point de vue l’enseignante (préoccupations, dilemmes)

Il nous semble maintenant intéressant de croiser les éléments factuels évoqués précédemment avec le point de vue de l’enseignante. En effet, comme mentionné plus haut, après chaque leçon, je me suis entretenue avec l’enseignante : comment avait-elle perçu les différents événements de la leçon ? Comment avait-elle réagi ? Pourquoi avait elle réagi ainsi, selon quels principes ou selon quels antécédents ? Et finalement, est-ce qu’elle réagissait toujours de cette manière.

Concernant la première leçon de handball, l’enseignante m’a confié qu’elle intervenait volontairement très peu dans cette leçon de jeu. En effet, après avoir contrôlé les présences et réglé quelques problèmes de comportements, elle a négocié avec les élèves pour la formation des équipes, puis s’est volontairement mise en retrait pour laisser les élèves jouer. Toutefois, dans chaque conflit d’arbitrage ou questions d’élèves, elle intervenait pour amener des conseils ou également, lorsqu’elle jugeait qu’un élève adoptait un comportement déplacé : « Stooooooop… s’il y a un coup de sifflet quel qu’il soit-on s’arrête. Même si au fond il n’y a pas de faute, on regarde après mais s’il y a une erreur et qu’on continue après il y a une 2e erreur et on sait plus ». Lorsque je lui ai demandé pourquoi elle agissait ainsi, elle m’a alors communiqué qu’elle profitait de ses leçons de jeux, qui nécessitaient moins de cadrage, pour rendre les élèves plus autonomes. Effectivement en début d’année scolaire, elle a beaucoup insisté sur le respect des règles, sur la participation et sur l’attitude attendue en salle de gym. Elle m’a confié avoir dû, à plusieurs reprises, sacrifier des leçons entières pour avoir une discussion avec les élèves sur les valeurs qu’elle jugeait importantes, non seulement à l’école, mais dans la vie de tous les jours. Nous pouvons constater ici que l’enseignante souhaite non seulement que les élèves respectent les consignes et lui obéissent, mais également qu’ils comprennent plus profondément pourquoi ils doivent agir ainsi. Son objectif ultime serait alors de pouvoir quitter la salle et retrouver à son retour ses élèves toujours en action. Toutefois elle mentionne que ceci prend du temps. Elle pense qu’actuellement une grande partie des élèves de la classe soient autonomes, mais qu’il reste encore certains élèves avec qui elle doit sans cesse contrôler, pour qu’ils agissent de manière adaptée.

Types d’élèves (autorégulé / hétéronome / anomique)

L’analyse de ces différentes transactions en situation permet de remarquer qu’il y a des groupes distincts d’élèves avec qui l’enseignante va développer un certain type de transaction, que je vais tenter d’analyser ici. Pour ce faire, j’ai décidé de différencier les actions des élèves de la classe en trois groupes :
• Les élèves adoptant des actions anomiques
• Le groupe d’élèves autorégulés et/ou autonomes
• Les élèves plutôt hétéronomes

Conclusion

Arrivant au terme de ce travail, nous pouvons conclure que chaque élève suit un rythme différent dans le processus d’apprentissage et d’appropriation des règles scolaires. Ce processus n’est pas linéaire et peut changer en fonction des situations d’enseignement proposé. De la même manière, nous avons remarqué que le mode de présentation des règles par l’enseignant est inclus dans des transactions, qui sont corrélées aux actions d’élèves. L’enseignant ainsi que les autres acteurs du système scolaire devraient alors essayer de favoriser l’accès à l’autonomie des élèves en EPS. Pour ce faire, il est alors important d’établir des transactions permettant à l’élève d’être acteur dans son apprentissage. Ces démarches sont cependant coûteuses en temps et exigeantes en terme de gestion et d’organisation, comme le souligne la citation suivante : « « Donner la solution d’un problème aux élèves » versus « Laisser les élèves chercher la solution du problème ». D’un côté, l’enseignant gagne du temps en donnant la solution aux élèves, mais peut douter de l’intérêt et de l’effet du travail sur les élèves ; de l’autre, les élèves s’investissent dans la recherche de la solution mais prennent du temps au détriment de la présentation d’autres exercices prévus pour la leçon » (Ria et coll., 2001).

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Table des matières

1. Introduction
2. Problématique
2.1 Analyse du contexte
2.2 Cadre théorique
3. Questions de recherche
4. Méthode
4.1 Contexte et participants
4.2 Recueil des données
4.3 Traitement des données
5. Résultats
5.1 Recensement des moments de ruptures
5.3 Le point de vue l’enseignante (préoccupations, dilemmes)
5.4 Types d’élèves (autorégulé / hétéronome / anomique)
6. Discussion
6.1 Réponse aux questions de recherche
7. Conclusion

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