Les tumeurs stromales gastro-intestinales (Gastrointestinal-Stromal-Tumor : GIST) sont les tumeurs mรฉsenchymateuses les plus frรฉquentes du tube digestif. Elles reprรฉsentent 1 aฬ 3 % des tumeurs malignes du tube digestif [9] et 80 % des sarcomes gastro-intestinales [56]. Les GIST sont dรฉfinies comme des tumeurs mรฉsenchymateuses du tube digestif, รฉventuellement du mรฉsentรจre, prรฉsentant des caractรฉristiques histologiques รฉvocatrices (prolifรฉration de cellules le plus souvent fusiformes, parfois รฉpithรฉlioรฏdes, rarement plรฉiomorphes) et exprimant habituellement, mais non constamment, la protรฉine KIT, ร un niveau suffisant pour permettre sa dรฉtection par une technique immuno-histochimique. [15] Comme on le voit, la dรฉfinition des GIST repose sur des arguments histologiques et immunohistochimiques (expression de la protรฉine KIT). Bien que leur description initiale date de 1983, les GIST ne sont rรฉellement individualisรฉes que depuis la dรฉcouverte de lโexpression frรฉquente du CD34 et de celle quasi constante de la protรฉine C-KIT ou CD 117. En pratique, ce nโest que depuis le dรฉbut du millรฉnaire que les GIST sont diagnostiquรฉes en routine, et distinguรฉes des autres tumeurs mรฉsenchymateuses digestives telles que les lรฉiomyomes, les lรฉiomyosarcomes ou les schwannomes . La localisation des GIST aฬ la musculeuse, tout le long du tractus digestif, et leur expression quasi-constante de la protรฉine C-KIT suggรจrent fortement que ces tumeurs se dรฉveloppent ร partir des cellules interstitielles de Cajal. Ces cellules, dรฉcouvertes pour la premiรจre fois par Cajal en 1906, sont responsables du pรฉristaltisme digestif et expriment KIT aฬ lโรฉtat normal . Ce dรฉveloppement peut se faire aฬ partir de tous les segments du tube digestif, de lโลsophage aฬ lโanus, et exceptionnellement du mรฉsentรจre et du pรฉritoine. Elles siรจgent le plus souvent au niveau de lโestomac (50-70%) et de lโintestin grรชle (20-30%) . Lโรขge mรฉdian au diagnostic est de 60 ans. La frรฉquence est identique dans les deux sexes et est actuellement รฉvaluรฉe ร 10 ร 20 nouveaux cas par million dโhabitants par an . Elles peuvent rester longtemps asymptomatiques, donner des symptรดmes peu spรฉcifiques, ou encore se traduire par des complications mettant parfois en jeu le pronostic vital du patient. Leur caractรจre bรฉnin ou malin est difficile aฬ dรฉfinir et sโรฉvalue en termes de risque sur des critรจres cliniques et anatomo-pathologiques [59.] .
La rรฉsection chirurgicale complรจte en monobloc de la tumeur (rรฉsection R0) est le seul traitement potentiellement curatif. Il est essentiel dโรฉviter une rupture tumorale peropรฉratoire qui entraรฎne une dissรฉmination pรฉritonรฉale et une survie similaire ร celle des patients ayant eu une exรฉrรจse incomplรจte dans certaines รฉtudes. Le risque de rรฉcidive ou de mรฉtastase est actuellement รฉvaluรฉ grรขce aฬ la localisation initiale, la taille tumorale et lโactivitรฉ mitotique. Des mรฉtastases se dรฉveloppent chez 30 ร 50 % des patients atteints de GIST. Elles sont totalement rรฉsistantes aux chimiothรฉrapies conventionnelles, mais lโutilisation des thรฉrapies ciblรฉs avec des inhibiteurs de la tyrosine kinase tel que lโimatinib constitue lโun des progrรจs thรฉrapeutiques majeurs de la cancรฉrologie des dix derniรจres annรฉes [31].
GENERALITEย
HISTORIQUEย
Jusque dans les annรฉes 1980, les tumeurs mรฉsenchymateuses du tube digestif รฉtaient classรฉes selon des critรจres morphologiques en deux groupes : les tumeurs des cellules musculaires lisses (comprenant les lรฉiomyomes et les lรฉiomyosarcomes) et les tumeurs nerveuses (schwannomes) [10]. L’arrivรฉe de la microscopie รฉlectronique dans les annรฉes 1970 a permis de constater qu’au final trรจs peu de ces tumeurs dรฉrivaient des cellules musculaires lisses ou nerveuses. C’est dans ce contexte que Mazur et Clark introduisirent en 1983 le terme de ยซ tumeur stromale ยป pour designer ces tumeurs conjonctives indiffรฉrenciรฉes, morphologiquement proches des lรฉiomyomes ou des schwannomes [40], mais nโexprimant aucun marqueur de lignรฉe musculaire lisse ou nerveuse. Dans les annรฉes 1990, deux nouveaux marqueurs immunohistochimiques participant aฬ la reconnaissance du terme de ยซ tumeur stromale gastro-intestinale ยป sont identifiรฉs : le CD34 dรฉcouvert en 1994 [50] et la protรฉine KIT ou CD117 dรฉcouverte en 1998 [57]. L’expression du CD34 est prรฉsente dans seulement 60 aฬ 70 % des GIST et peut รชtre retrouvรฉe dans d’autres tumeurs mรฉsenchymateuses tel que les lรฉiomyosarcomes [58]. Ce qui en fait un marqueur peu sensible et peu spรฉcifique. La protรฉine KIT ou CD117 se rรฉvรจle quant aฬ elle รชtre un meilleur marqueur diagnostique รฉtant retrouvรฉe dans la majoritรฉฬ (95 %) des GIST [32].
RAPPELS EPIDEMIOLOGIQUESย
Leur incidence exacte a รฉtรฉ pendant longtemps sous-รฉvaluรฉe, du fait que ces tumeurs nโรฉtaient au dรฉpart pas clairement identifiรฉes comme une entitรฉ nosologique. De plus, les formes asymptomatiques sont frรฉquentes et donc non diagnostiquรฉes et la plupart des รฉtudes sont rรฉtrospectives [58]. Lโรฉtude prospective PROGIST rรฉalisรฉe en France a ainsi permis de recenser 535 nouveaux cas au cours de lโannรฉe 2005 [44]. Actuellement, on estime lโincidence en France aฬ environ 12 aฬ 15 cas par millions dโhabitants .
En Afrique, le dรฉnombrement hospitalier est de 54 cas aฬ Pretoria, 85 cas au Maroc et 96 au Nigeria. Au Mali, 25 cas de GIST ont รฉtรฉ recensรฉs sur une pรฉriode de 10 ans entre 2006 -2015 [22,26,49,65]. Au Sรฉnรฉgal la documentation sur les tumeurs stromales est rare. Cependant un mรฉmoire de chirurgie aฬ lโhรดpital Aristide Le Dantec de 2011 du Dr Yassine nous rapporte 5 cas de tumeurs stromales [68]. Leur incidence selon lโรขge est unimodale avec un pic de frรฉquence diffรจrent selon les sรฉries, variant de 46 ans au Nigeria aฬ 66,6 ans en Chine [67]. Globalement, lโรขge moyen de survenue est de 50 ans [52]. Elles sont rarement observรฉes dans la population pรฉdiatrique avec seulement 140 cas rapportรฉs dans la littรฉrature, sans prรฉdominance de sexe [56]. Le siรจge des GIST est prรฉfรฉrentiellement lโestomac (60 aฬ 70 % des cas), suivi de lโintestin grรชle (20 aฬ 30 % des cas). Moins frรฉquemment (5% des cas), elles sont rectales, coliques, ลsophagiennes, mรฉsentรฉriques ou omentales [56]. Les mรฉtastases concomitantes se voient dans 25 aฬ 30 % des cas, surtout au niveau du foie et sont souvent associรฉes aฬ un mauvais pronostic [56].
ONCOGENESEย
Les rรฉcepteurs qui interviennent le plus souvent dans le phรฉnomรจne de tumorogenรจse des GIST sont le C Kit et le PDGFRA (platelet-derived growth factor receptor). Ce sont des rรฉcepteurs de la famille des tyrosine kinases, formรฉs de trois parties : extra-membranaire, trans-membranaire et intra-membranaire. Une fois activรฉs, ces rรฉcepteurs entraรฎnent deux types dโeffets : au niveau tissulaire, ils induisent entre autres des mรฉcanismes comme une hรฉpatogenรจse, une gamรฉtogenรจse et une mรฉlanogenรจse, et au niveau cellulaire ils provoquent une prolifรฉration, une diffรฉrenciation, une apoptose et une adhรฉsion [56]. La mutation de ces rรฉcepteurs joue un rรดle majeur dans lโoncogenรจse. Il sโagit de mutation hรฉtรฉrozygote type ยซ gain de fonction ยป, qui touche le gรจne c-Kit dans 80 aฬ 86 % des cas et le gรจne PDGFR dans 10 aฬ 15 % des cas. Spontanรฉment activรฉes, indรฉpendamment de la liaison avec leur ligand spรฉcifique le stem cell factor (SCF), les mutations de c-Kit assurent une phosphorylation active dโautres protรฉines que le SCF et par consรฉquent la croissance et la survie cellulaire des GIST [56]. Ces mutations sont trรจs diffรฉrentes dans leurs types (dรฉlรฉtion, insertion, substitution) et dans leurs localisations. Elles se localisent prรฉfรฉrentiellement au niveau des exons 11 et 9 du gรจne Kit et de lโexon 18 du PDGFR [20,56].
Certaines mutations sont plus souvent rencontrรฉes dans certaines localisations, comme les mutations des exons 18, 14 et 12 du PDGFR prรฉsentes au niveau des GIST de lโestomac, et la mutation de lโexon 9 du Kit frรฉquente au niveau des GIST de lโintestin grรชle [63]. Il reste une entitรฉฬ aฬ part de GIST sans mutation de Kit ni de PDGFR, observรฉe dans 5 % des cas [11]. Quelques cas sont en rapport avec des prรฉdispositions familiales comme la neurofibromatose de type I, le syndrome de Strakakis-Carney (tumeurs stromales gastriques multiples, de malignitรฉฬ faible, chondrome pulmonaire et paragangliome extra-surrรฉnalien fonctionnel) et de rarissimes mutations familiales de Kit et de PDGFR [11,56].
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Table des matiรจres
INTRODUCTION
1รจre PARTIE : RAPPEL
I. GENERALITES
I.1. HISTORIQUE
I.2. RAPPELS EPIDEMIOLOGIQUES
I.3. ONCOGENESE
I.4. RAPPELS ANATOMO-PATHOLOGIQUES
I.4.1. Macroscopie
I.4.2. Histologie
I.4.3. Immunohistochimie
I.4.4. Biologie molรฉculaire
II. DIAGNOSTIC
II.1. DIAGNOSTIC POSITIF
II.2. DIAGNOSTIC DIFFERENTIEL
II.3. DIAGNOSTIC TOPOGRAPHIQUE
II.4. DIAGNOSTIC DโEXTENSION
II.5. FACTEURS PRONOSTIQUES
III. TRAITEMENT
III.1. BUT
III.2. MOYENS ET METHODES
III.3. INDICATIONS
III.4. RESULTATS
III.5. SURVEILLANCE
2e PARTIE : TRAVAIL PERSONNEL
I. OBJECTIF
II. PATIENTS
III. METHODOLOGIE
IV. RESULTATS
V. DISCUSSION
V.1. ASPECTS EPIDEMIOLOGIQUES
V.2. ASPECTS DIAGNOSTIQUES
V.3. ASPECTS THERAPEUTIQUES
CONCLUSION
BIBLIOGRAPHIE