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Tuberculose verruqueuse
Elle résulte de la réinoculation du Mycobacterium tuberculosis chez un sujet antérieurement sensibilisé et siège habituellement aux extrémités. Elle se traduit par un ou plusieurs placards papillomateux, kératosiques, indolores, entourée d’une auréole inflammatoire, d’extension progressive et parfois serpigineuse. L’évolution se fait vers une atrophie centrale.
Histologiquement, elle se caractérise par une importante hyperplasie épidermique avec hyperkératose orthokératosique, papillomatose et acanthose.
L’infiltrat inflammatoire dermique comporte des granulomes tuberculoïdes et nécrose caséeuse.
Tuberculose ulcéreuse orificielle
Elle provient de l’auto inoculation. Elle comporte des ulcérations péri-orificielles subaiguës : cavité buccale, narines, anus, urètre). La localisation de prédilection est la langue. Cet ulcère est douloureux et empêche l’alimentation. Spontanément, elle n’a aucune tendance à la cicatrisation. Les formes anale et génitale ont une tendance végétante ou verruqueuse.
L’histologie initiale ressemble à celle du chancre d’inoculation et une hyperplasie épidermique pesudoépithéliomateuse se développe par la suite. Les culture sont positives.
Lupus tuberculeux
Par définition, il serait la réactivation d’une tuberculose quiescente.
C’est une forme prédominante dans les pays industrialisés. Deux fois sur trois, il touche la femme. Il se localise au visage et se comporte comme des micronodules assez mous(lupome), brun jaunâtre, coalescent sous forme d’un placard papuleux qui évolue vers un affaissement central, des micro-ulcérations, des croûtelles dont la périphérie est érythématoviolacée.
Le granulome tuberculoïde est toujours présent et comporte cellules épithélioïdes, cellules géantes de Langhans et une couronne périphérique de lymphocytes.
De nombreux aspects anatomocliniques (lupus plan, lupus annulaire, lupus psoriasiforme, lupus serpigineux, lupus scléreux…) peuvent également se voir.
Érythème induré de Bazin
Il survient préférentiellement chez la femme. Ce sont des nodules inflammatoires de 1 à 2 cm de diamètre. Ils sont fermes, mal circonscrits, parfois confluents en placards indurés, sensibles ou douloureux à la palpation. Ils prédominent aux membres inférieurs, de façon bilatérale, non symétrique. L’épiderme est érythématoviolacé ou parfois normal. Des signes généraux à type de fièvre et d’asthénie précède l’érythème de Bazin et l’évolution se fait vers l’ulcération.
Histologiquement, il y a une infiltration multifocale. Tardivement, vont apparaître comportant parfois une nécrose caséeuse.
La bactériologie des nodules est souvent négative et une hyperréactivité à la tuberculine est toujours observée.
Tuberculides papulonécrotiques
Ce sont des papules d’aspect bigarré correspondant aux différents stades évolutifs de l’éruption. Ils siègent préférentiellement de façon bilatérale et symétrique aux faces d’extension des membres, aux faces dorsales des doigts et des orteils, aux fesses, aux lombes. Les divers éléments sont : des papules pourpres dures et infiltrées, papulopustules recouvertes de croûtelles, des lésions nécrotiques laissant une cicatrice déprimée.
L’histologie comporte des cellules géantes, des lymphocytes, des histiocytes et la composante nécrotique avec caséification centrale.
Lichen scrofulosorum
Elle survient chez l’enfant ou l’adulte jeune et prédomine au tronc, aux membres et rarement la face. Elle est presque souvent associée à une tuberculose ancienne ou évolutive ganglionnaire ou osseuse. L’éruption résulte de la coalescence en placards granités de micropapules folliculaires, rosées recouvertes parfois de micropustules, de squames filiformes, ou d’épines kératosiques avec des papules non folliculaires jaunâtres d’aspect lichenoïde. L’histologie retrouve un granulome tuberculoïde avec un infiltrat longeant le follicule pileux dont l’orifice est rempli de lamelles de cornées parakératosiques (6).
OBSERVATION
Contexte épidémiologique
Antécédents familiaux
Cette observation concerne F., un petit garçon de 5 mois et demi, cadet d’une fratrie de deux. Il a une grande sœur de 3 ans et vit au rez-de-chaussée d’une maison à un étage avec ses parents et sa sœur.
Au premier étage vivent un grand-oncle, une tante, un oncle et deux cousines de 4 ans et de 7 ans. Tous les enfants sont vaccinés contre la tuberculose.
Le grand-oncle est connu comme asthmatique, tousseur chronique depuis plusieurs mois et présentant des toux productives.
Les autres membres de la famille sont en bonne santé apparente.
Antécédents personnels
La grossesse maternelle se déroulait normalement. L’enfant est né à terme avec un poids de naissance à 3200g.
Il n’a eu ni au cours de la naissance ni au cours des premiers mois de vie aucun problème particulier. F. a eu son BCG à la face antéro-externe de l’avant-bras gauche à l’âge de 1 mois et demi. Le point d’injection du vaccin a mis 1 mois et demi pour cicatriser. Il est également vacciné contre la diphtérie, le tétanos, la coqueluche, la poliomyélite.
Son développement psychomoteur et staturo-pondéral est correct.
Il est allaité uniquement au sein et ne prend pas encore d’autres aliments.
Tableau clinique
Signes généraux
Lors de son admission à l’Hôpital des Enfants de Tsaralalàna, F. pesait 7 kg.
L’état général était conservé. F. gardait son appétit et était serein. Il présentait une fébricule à 38°C qui durait 4 jours. Il n’y avait pas de sueurs nocturnes.
Signes fonctionnels
De rares toux sèches moniliformes ayant commencé depuis 5 jours ont été constatées.
L’enfant ne semblait pas gêné par la tuméfaction sous claviculaire gauche.
Signes physiques
L’appareil respiratoire ne montrait pas de déformation, ni asymétrie, ni distension. Les vibrations vocales étaient transmises de façon égale des deux côtés. La sonorité des 2 champs pulmonaires était bien transmise et égale.
L’auscultation pulmonaire laissait entendre des murmures vésiculaires égaux et il n’y avait ni râle ni souffle.
Il présentait une tuméfaction sous-claviculaire gauche à 1,5 cm du sternum, de 2 cm de grand diamètre, indolore, ferme, non inflammatoire, mobile par rapport au plan profond. La mère a vu cette tuméfaction 15 jours avant l’hospitalisation de F. Depuis, elle n’a pas augmenté de volume.
Une adénopathie sous axillaire gauche de 1 cm de grand diamètre ayant les mêmes caractéristiques que la tuméfaction sous-claviculaire était constatée au cours de l’hospitalisation. Les autres aires ganglionnaires étaient libres.
Il n’y avait ni hépatomégalie ni splénomégalie. On ne notait pas d’anomalie sur les autres appareils.
C.Investigations complémentaires :
Intradermoréaction
Une intradermoréaction à la tuberculine a été réalisée chez F. Elle a provoqué une induration érythémateuse de 15 mm de grand diamètre au bout de 72 heures. Tous les membres de la famille en ont bénéficié sauf le grand-oncle.
La mère a eu un test phlycténulaire.
La tante a eu une induration inflammatoire de 15 mm.
Les 3 enfants ont eu une induration inflammatoire de 4 mm à 7 mm.
Chez le père et l’oncle, il n’y avait pas d’induration.
Bilan radiologique
Radiographie standard
La radiographie thoracique ne montrait pas de foyer parenchymateux mais un syndrome interstitiel diffus sur tout le champs pulmonaire gauche (figure1).
Il n’y avait pas d’adénopathie médiastinale mais un élargissement paratrachéal vers la droite correspondant probablement au thymus.
La clavicule gauche ne contient pas de foyer d’ostéite(figure2).
Echographie des parties molles
L’échographie centrée sur la tuméfaction sous-claviculaire gauche objectivait une masse hypoéchogène, circonscrite non vascularisée mesurant 41x33mm, superficielle (8mm de profondeur) non adhérente à la paroi profonde.
Bilan biologique
Numération formule sanguine
Elle montrait une hyperleucocytose à 14 400/mm3 à prédominance lymphocytaire (8800/mm3), des globules rouges à 4 960 000/mm3 avec un taux d’hémoglobine à 11g/dl et des plaquettes à 305 000/mm3.
VSH
La vitesse de sédimentation des hématies n’était pas très élevée : 28mm à la première heure.
Histologie
L’examen anatomo-cyto-pathologique montrait un infiltrat inflammatoire diffus, de type lympho-plasmocytaire et histiocytaire associé à de nombreux vaisseaux sanguins congestifs et un œdème.
De nombreux nodules épithélioïdes et de rares cellules géantes de type LANGHANS parsèment cet ensemble.
Des cellules adipeuses étaient retrouvées dans la pièce de biopsie. Il n’y avait pas de structure ganglionnaire reconnaissable.
Bactériologie
Du pus blanchâtre a fait issue lors de la biopsie de la tuméfaction. Il a été envoyé en bactériologie pour culture. Il n’y avait pas de structure ganglionnaire. La poche de pus ne communiquait pas aux structures profondes et ne contenait pas de fragment osseux. L’examen direct ne retrouvait pas de germe et l’enfant était sous antibiotiques.
La culture sur milieu de Löwenstein-Jensen au bout de 1 mois ne trouve pas de mycobactéries.
La sérologie VIH n’a pu être réalisée.
Diagnostic
Le diagnostic positif est une tuberculose cutanée ramollie et repose sur :
La notion de contage et le contexte épidémiologique,
Le nodule sous-cutané contenant un infiltrat inflammatoire avec des cellules de type LANGHANS, malgré l’absence de mycobactéries lors de la culture du pus,
La bonne évolution sous traitement anti-tuberculeux.
Evolution
L ‘enfant a été mis sous polychimiothérapie anti-tuberculeuse selon le régime de 8 mois :
2ERHZ/6HT.
Il prend ainsi tous les jours pendant 2 mois :
Ethambutol : 20mg/kg/jour
Rifampicine :10mg/kg/jour
Isoniazide : 5mg/kg/jour
Pyrazinamide: 30mg/kg/jour
A la fin du 2ème mois, il prendra pendant 6 mois:
Isoniazide : 5mg/kg/jour
Thiacétazone : 2,5mg/kg/jour
Après un recul de 2 mois, il reste apyrétique. La croissance n’est pas altérée. La cicatrice de la biopsie est régulière non hypertrophique, non rétractile.
L’adénopathie sous axillaire gauche a diminué de volume à 0,5cm de grand diamètre.
DISCUSSION
Contexte épidémiologique :
La source du contage n’est pas encore confirmée actuellement mais la notion d’IDR positives chez plusieurs membres de la famille ainsi que la présence d’un grand-oncle tousseur chronique sont en faveur d’une forte présomption. F. a été traité de façon curative du fait de cette exposition fort probable à la source de contamination.
Le problème de la chimioprophylaxie pour les enfants de moins de 6 ans se pose également car les adultes à IDR positives ne toussent pas et ne montrent pas d’image pathologique à la radiographie thoracique, les examens de crachat se révèlent négatifs et la personne supposée source des infections est perdue de vue.
Contexte clinique :
abcès à germe banal mais une biantibiothérapie par pénicilline du groupe M et céphalosporine de 3ème génération n’a pas amélioré l’état de l’enfant ;
lipome, le fébricule et l’examen anatomopathologique ont éliminé cette hypothèse ;
parasitose mais cet enfant est encore allaité exclusivement au sein et la mère préconise les règles d’hygiène élémentaires ;
pilomatrixome qui est une tumeur annexielle bénigne de la matrice du poil, la localisation sous claviculaire n’est pas en faveur de cette hypothèse ainsi que l’anatomopathologie .
Le fébricule de 38°C évoquait effectivement un processus infectieux mais l’aspect de la tuméfaction n’évoquait aucun signe d’inflammation ni d’infection.
D’ailleurs la forme de tuberculose extrapulmonaire la plus fréquente est la tuberculose ganglionnaire que ce soit dans les pays occidentaux que ce soit à Madagascar(7,8).
Viennent ensuite les formes abdominales, urogénitales, ostéoarticulaires, neuroméningées, médullaires et enfin rarement les formes cutanées, ORL, cardiaques, pleurales.
Forme anatomoclinique :
La variété anatomoclinique du nodule de cet enfant ne correspondait à aucune entité particulière de tuberculose cutanée.
Vue la cicatrisation lente du point d’injection vaccinale et l’état général conservé une bécégite pourrait être envisagée. Pourtant, l’on ne parle vraiment de retard de cicatrisation qu’au-delà de 12 semaines.
Les formes cutanées rencontrées chez les nourrissons sont : les chancres d’inoculation mais ici l’épiderme est intact.
Le lichen scrofulosorum se rencontre chez l’enfant et l’adulte jeune. Il siège souvent au tronc mais l’aspect clinique de cette affection est tout à fait différente.
Une gomme tuberculeuse débutante peut se présenter sous forme de nodule dermohypodermique mais se localise volontiers aux membres inférieurs et survient surtout chez les immunodéprimés. Cette forme épidémiologiquement se rencontre très rarement chez l’enfant.
Le nodule de F. aurait pu correspondre à un scrofuloderme débutant.
Le scrofuloderme dans une étude effectuée par Kumar B et al. était la plupart du temps localisé au cou. Le test à la tuberculine est positif chez 92% des enfants ayant eu une forme localisée (>10mm). Seule la moitié des enfants présentant un scrofuloderme ont eu un examen histopathologique typique de tuberculose. La vaccination n’empêche pas l’apparition des tuberculoses cutanées . La localisation des scrofulodermes est avant tout en regard d’un ganglion, le plus souvent cervical, inguinal, sous-mandibulaire, axillaire ou ostéo-articulaire(6,12). L’enfant de notre étude a eu une IDR à 15mm, a été vacciné par le BCG, a eu un examen histopathologique montrant des cellules de LANGHANS mais la localisation parasternale de la tuméfaction dans cette observation ne coïncide pas avec un ganglion et il n’y a pas d’autre atteinte profonde. La cicatrice de la biopsie n’est d’ailleurs ni chéloïde ni rétractile. Deux cas similaires au nôtre ont été rapportés au Sénégal. Les 2 personnes étaient des adultes non infectés par le VIH et avaient des adénopathies cervicales associées. Il n’y avait pas d’atteinte osseuse ni pulmonaire et la localisation est pré-sternale. Pour l’un, l’examen direct a mis en évidence le bacille de koch , pour l’autre c’est la culture qui a fait le diagnostic(13).
Un autre cas d’abcès froid parasternal a été rapporté en Tunisie chez une jeune fille de 18 ans. L’échographie a mis en évidence une formation hypoéchogène et l’examen tomodensitométrique une formation liquidienne. La scintigraphie ne montrait ni ostéolyse ni hyperfixation(14).
L’abcès froid parasternal se distingue des autres manifestations par son origine hématogène, par l’absence de ce fait de lésion profonde et par la moindre tendance à la fistulisation. La fréquence de cette forme clinique est estimée à 0,1% de toutes les formes confondues.
Identification du germe :
Même après culture, les bacilles acido-alcoolo-résistants ne sont visibles que dans 5% des cas d’abcès froid para ou pré-sternal (13).
L’identification par la PCR trouve sa place dans ce cas supposé paucibacillaire.
Certaines études ont montré l’intérêt de la PCR dans l’identification in vitro des bacilles de Koch mais d’autres expériences sont venues contredire par la suite cette hypothèse (15,16,17). Elle manque de sensibilité mais possède une bonne spécificité. Pour notre étude, elle n’a pu pas être réalisée .
Thérapeutique :
La prise en charge thérapeutique n’est pas uniformisée.
Pour Hovette et al., malgré une guérison spontanée possible, le traitement repose sur une quadruple antibiothérapie de six mois.
Pour Bouslama K. et al., le patient est mis sous quadruple antibiothérapie (streptomycine, isoniazide, rifampicine, pyrazinamide) pendant deux mois puis sous rifampicine et isoniazide pendant six mois. Quant à notre patient, le régime national de traitement anti-tuberculeux de 8 mois lui a été administré. Un traitement adjuvant par la vitamine B6 lui a été également administré afin de prévenir des neuropathies périphériques (névrite optique, convulsions), effets secondaires de l’isoniazide. Une surveillance clinique en hospitalisation a été préconisée pendant 10 jours, suivie d’une visite hebdomadaire afin de dépister des signes d’intolérance cutanés, un ictère ou des troubles digestifs.
Une surveillance hebdomadaire à la recherche de sels et pigments biliaires dans les urines a été institué pour dépister une atteinte hépatique probable, secondaires à la rifampicine, à l’isoniazide et à la pyrazinamide.
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Table des matières
Introduction
I.Rappel sur la tuberculose cutanée
A.Critères de diagnostic
1.Anamnèse
2.Intra-dermoréaction
3. Mise en évidence du bacille de Koch
4.Histiologie
B.Formes anatomocliniques
1.Chancre d’inoculation
2.Scrofuloderme
3.Gommes tuberculeuses ..
4.Miliaire cutanée
5.Tuberculose verruqueuse
6.Tuberculose ulcéreuse orificielle
7.Lupus tuberculeux
8.Érythème induré de Bazin
9.Tuberculides papulonécrotiques
10.Lichen scrofulosorum
II.Observation
A.Contexte épidémiologique
1.Antécédents familiaux
2.Antécédents personnels
B.Tableau clinique
1. Signes généraux
2. Signes fonctionnels
3. Signes physiques
C.Investigations complémentaires
1.Intra-Dermoréaction
2.Bilan radiologique
a)Radiographie standard
b)Echographie des parties molles
3.Bilan biologique
a)Numération Formule sanguine
b)Vitesse de sédimentation des hématies
4.Histologie
5.Bactériologie
D.Diagnostic
E.Évolution
III.Discussion
Conclusion
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