La tuberculose est une maladie infectieuse, contagieuse, endémo épidémique à transmission essentiellement interhumaine, causée par des mycobactéries du complexe Mycobacterium tuberculosis que sont Mycobacterium tuberculosis ou bacille de Koch, Mycobacterium bovis et Mycobacterium africanum. Elle pose encore un problème de santé publique dans le monde touchant particulièrement les pays en voie de développement en raison des mauvaises conditions de vie. Il a été établi depuis des années que c’est la maladie des couches sociales défavorisées, vivants dans des conditions d’hygiène précaire, comme dans beaucoup de pays en voie de développement. En effet, selon l’OMS, deux millions de personnes sont exposées à cette maladie dont 30 % en Asie du Sud Est et 18 % en Afrique avec environ 8 à 10 millions de nouveaux cas par an. L’avènement du sida à partir des années 80 a entraîné un bouleversement de l’épidémiologie de la maladie dans le monde. Dans les pays développés, cette recrudescence de la tuberculose est liée au vieillissement de la population et de la pandémie VIH. L’association tuberculose VIH représente un véritable problème de santé publique en Afrique sud saharienne. Au Sénégal, la tuberculose sévit de manière endémique et constitue l’une des plus fréquentes infections opportunistes diagnostiquées au cours de l’infection à VIH. Malgré un traitement efficace et gratuit sur l’ensemble du territoire, une augmentation régulière du nombre de cas a été enregistrée par le programme national de lutte contre la tuberculose avec 6789 cas en 1981 contre 10120 cas en 2005 [65,71]. Les femmes en général et en particulier les femmes en âge de procréer, sont une population vulnérable sur le plan socio-économique en Afrique, mais aussi à l’égard de l’infection à VIH dont elle constitue le réservoir de virus. Sur le plan physiologique, il a été noté chez la femme des périodes de vulnérabilité particulière à la tuberculose telle que la grossesse et le post-partum.
GENERALITES
Historique
La tuberculose est une maladie ancienne qui existe vraisemblablement depuis les temps préhistoriques. Elle est décrite par les médecins égyptiens, grecs, chinois et indiens. La maladie est documentée chez l’homme depuis 4000 ans. Des restes de squelettes humains issus de ces temps reculés ont montrés des traces de la pathologie. Des délabrements tissulaires tuberculeux ont été identifiés dans les os des momies égyptiennes qui datent de 3000 à 2400 ans avant Jésus Christ. De même en Inde et en Amérique latine, on trouve des signes de présence de la tuberculose vers 2000 ans avant Jésus Christ. En 460 avant Jésus Christ, Hippocrate avait décrit des tubercules dans des ulcérations et des pleurésies ainsi que les premiers « traitements ». Il désigna la tuberculose sous le terme grec «phtysis» qui veut dire l’affaiblissement et le dépérissement progressifs des malades qui en était atteint. Il la décrit comme la maladie la plus répondue de tous les temps, qui conduit presque toujours à la mort. Elle est reconnue comme une maladie infectieuse due à un microorganisme par Girolamo Fracastor (1478-1553) à la période de la renaissance. Au XVIIIème siècle des idées nouvelles et des travaux commencèrent à se développer malgré la persistance de la confusion nosologique, mais on connaissait déjà l’intérêt d’éloigner les malades de la tuberculose des villes vers les campagnes. Entre 1774 et 1816 Gaspard Laurent Bayle décrit le granulome de la miliaire et les aspects anatomiques de la phtisie. Dès 1802, B. Morgani et Laennec décrivent les formes ulcéreuses de la tuberculose. En 1819, Laennec démontra que la tuberculose peut atteindre d’autres organes que le poumon en faisant une description anatomo-clinique.
En 1839, le médecin allemand Schonlein a réuni en une description unifiée les différentes manifestations de la tuberculose. En 1854, Rillet et Barhez publient 27 cas des fistules bronchiques liées à la maladie. C’est en 1865 que le médecin J.A.Villemin, après avoir prouvé par méthode expérimentale la transmission de la tuberculose, a pu affirmer que cette maladie était du à un microbe invisible avec les moyens techniques de l’époque. Il a conclut qu’on pouvait s’en protéger par des mesures visant à éviter la contagion. En 1882 un médecin allemand du nom de Robert Koch (1843-1910) découvre à la suite des travaux de Pasteur le bacille tuberculeux qui porte son nom. En ce moment la tuberculose était la cause d’un décès sur sept en Europe. La même année Ehrlich met en évidence son acido alcoolo-résistance qui est révélée dés 1883 par la méthode de coloration de Ziehl et Neelsen. En 1887, Nocard et Roux montrent que l’addition de la glycérine stimule la croissance du bacille. En 1889-1890, les travaux de Rivolta et Maffuci conduisent à différencier le bacille tuberculeux humain des autres Mycobactéries. Theobald et Smith réussissent à différencier le bacille tuberculeux humain du bacille bovin. En Italie, dès 1896, Forlanini réalise les premières radiographies thoraciques en application des rayons X, découvert par Roentgen en 1895 en Allemagne. Landouzy (1845-1917) affirme l’atteinte des séreuses par des descriptions cliniques de la tuberculose. Von Pirquet (1907) et Mantoux (1909) développent les premières applications de l’allergie tuberculeuse, par l’usage des tests cutanés tuberculiniques. En 1912 Forlanini entraine des modifications circulatoires et ventilatoires du poumon afin d’asphyxier les bacilles tuberculeux en appliquant la collapsothérapie.
Entre 1908 -1920 A.Calmette (1863-1933) et C.Guerin (1870-1960) mettent au point un vaccin qui porte leur nom (Bacille de Calmette et Guérin ou BCG), et dont l’emploi la première fois à révolutionner la prise en charge de la tuberculose en matière de lutte préventive. En 1968 Bois Vert et al découvrent une variété africaine de bacille tuberculeux élevé rapidement à titre d’espèce sous le nom de Mycobacterium africanum .D’abords séparés en espèces différents : Mycobacterium tuberculosis, Mycobacterium bovis et Mycobacterium africanum ; sont maintenant regroupés sous le nom du complexe tuberculosis en raison de plus de 95 % de similarité génomique. Puis successivement ont été découverts des médicaments dont l’association constitue aujourd’hui le traitement le plus efficace de la maladie tuberculeuse :
– Acide para-amino-salicylique (PAS) en 1949.
– Pyrazinamide en 1952 par Kushner abandonné à cause de ses effets secondaires, puis réutilisée à faible dose à partir de 1960.
– Streptomycine en 1944 par Waksman (prix Nobel de médecine en 1952)
– Isoniazide en 1952.
– Ethionamide et la prothionamide en 1956.
– Rifampicine en 1966 par Sensei.
– Ethambutol en 1970 : son introduction dans le traitement de courte durée en association à partir de 1972 par Fox et Mitchison fut le tournant décisif qui apporta une guérison en même temps que la rupture rapide de la chaine de transmission.
– Entre 1986-1987, l’union internationale de lutte contre la tuberculose démontre que l’application correcte du traitement de tuberculose au sein d’un système précis de diagnostic, d’enregistrement des cas et d’encadrement de traitement, permettait d’obtenir des taux de guérison à l’échelle nationale de 75 à 80 % quelle qu’en soient les circonstances extérieures (pauvreté, nomadisme, guerre, etc.) .
Depuis le début du XXème siècle on a constaté une réduction progressive de l’importance de la maladie. L’amélioration des conditions de vie et la découverte des médicaments anti tuberculeux ont été à l’origine de cette évolution favorable [11]. L’avènement de la pandémie du VIH/SIDA dans les années 80, va bouleverser toute l’épidémiologie de la tuberculose dans le monde notamment en Afrique.
Epidémiologie de la tuberculose
Elle se définit comme étant l’étude de la distribution des malades dans la population humaine, ainsi que des influences qui déterminent cette distribution, plus spécifiquement, l’étude de la tuberculose s’intéresse à la situation actuelle dans le monde avec des indicateurs de morbidité et mortalité et des éléments qui peuvent influencer ces indicateurs.
Ampleur
La tuberculose représente encore aujourd’hui à l’échelle mondiale un problème majeur de santé publique. Le dernier rapport de l’Organisation Mondiale de la Santé sur la tuberculose paru en 2007 estime qu’elle touche 8 millions et tue 2 millions. Les pays les plus pauvres sont les plus touchés avec 95 % de cas et 98 % de décès, principalement représentés par les jeunes [46]. D’après l’OMS, on estime à environ 9,7 millions de nouveaux cas de tuberculose toutes formes confondues, dont près de 4 millions de cas de tuberculose pulmonaire hautement contagieuse. La répartition de la tuberculose dans le monde est inégale. La majorité des cas a été enregistrée en Asie (55 %), et en Afrique (31 %), une petite proportion dans la région méditerranéenne, 6 % en Europe. Malgré l’existence de mesures spécifiques efficaces (chimiothérapie et vaccination), la tuberculose ne cesse de progresser dans le monde et plus spécifiquement en Afrique et en Asie. D’après le rapport 2012 de l’OMS sur la lutte contre la tuberculose, le nombre de nouveaux cas toutes formes confondues à 8,7millions en 2011, ce qui représente une diminution par rapport au 9,27 millions de cas en 2007 ; 9,24 millions de cas en 2006 et 9 millions de cas en 2005 ; 8,8 millions en 2002 et 6,6 millions de cas en 1990. Cette régression faible de la tuberculose est liée à la pauvreté, à la croissance démographique, aggravé par les phénomènes migratoires et à l’augmentation importante de cas de tuberculose dans les zones d’endémie VIH spécialement en Afrique subsaharienne. Ces trois facteurs sont aggravés par la paupérisation des systèmes de santé liée au programme d’ajustement structurel et par la négligence des autorités sanitaires nationales qui n’ont pas accordé à la lutte antituberculeuse le rang de priorité pendant de longues années. Dans nos régions la majorité des cas se situe dans la tranche d’âge active (80 % des cas entre 15 et 49 ans) ce qui entraîne une baisse de la créativité avec un impact important sur le développement socio-économique de ces pays. Plus spécifiquement au Sénégal la tuberculose sévit de manière endémique et constitue l’affection opportuniste la plus fréquente au cours de l’infection à VIH.
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Table des matières
INTRODUCTION
PREMIERE PARTIE : RAPPELS
I.GENERALITES
I.1. Historique
I.2. Epidémiologie de la tuberculose
I.2.1. Ampleur
I.2.2. Mortalité et morbidité
I.2.2.1.Morbidité
I.2.2.1.1. Incidence
I.2.2.1.2.Prévalence
I.2.2.2. Mortalité
I.3.Bactériologie
I.3.1. Agents pathogènes
I.3.1.1. Taxonomie
I.3.1.2. Caractères bactériologiques
I.3.2. Source et transmission
I.3.3. Facteurs favorisants
I.3.4. Pathogénie
I.4. Signes
I.4.1. Type de description : tuberculose pulmonaire commune chez la femme
I.4.1.1. Phase de début : primo-infection tuberculeuse
I.4.1.1.1. Circonstances de découverte
I.4.1.1.2. Tests tuberculiniques
I.4.1.1.3. Imagerie médicale
I.4.1.2. Phase d’état : phase de tuberculose- maladie
I.4.1.2.1. Signes généraux
I.4.1.2.2. Signes fonctionnels
I.4.1.2.3. Signes physiques
I.4.1.2.4. Paraclinique
I.4.1.3. Evolution
I.4.2. Formes cliniques
I.4.2.1. Formes symptomatiques
I.4.2.2. Formes extra pulmonaires
I.4.2.2.1. Tuberculose des séreuses
I.4.2.2.2. Tuberculose hépatique, splénique et hématopoïétique
I.4.2.2.3. Tuberculose intestinale
I.4.2.2.4. Tuberculose rénale
I.4.2.2.5. Tuberculose génitale
I.4.2.2.6. Tuberculose ostéo-articulaire
I.5. Particularités de la tuberculose chez la femme
I.6. Particularités de la tuberculose au cours de l’infection à VIH
I.6.1. Epidémiologie de la co-infection
I.6.2. Particularités cliniques
I.6.3. Particularités para cliniques
I.6.4. Particularités thérapeutiques
I.7. Diagnostic
I.7.1. Diagnostic positif
I.7.2. Diagnostic différentiel
I.7.3. Diagnostique étiologique
I.7.3.1. Germe
I.7.3.2. Porte d’entrée
I.7.3.3. Terrain
I.8. Traitement
I.8.1. Traitement curatif
I.8.1.1. Principe
I.8.1.2. Buts
I.8.1.3. Moyens thérapeutiques
I.8.1.3.1. Mesures hygiéno-diététiques
I.8.1.3.2. Les antituberculeux couramment utilisés
I.8.1.3.3. Les associations à dose fixe d’antituberculeux (ADF)
I.8.1.3.4. Autres antituberculeux
I.8.1.3.5. Moyens adjuvants
I.8.1.3.6. La chirurgie
I.8.1.4. Conduite du traitement
I.8.1.5. Indications
I.8.1.6. Surveillance de la chimiothérapie
I.8.2. Traitement préventif
I.8.2.1. Amélioration du niveau de vie et l’éducation sanitaire
I.8.2.2. Dépistage et traitement des cas
I.8.2.3. La vaccination par le BCG
I.8.2.4. La chimio prophylaxie antituberculeuse
DEUXIEME PARTIE : TRAVAIL PERSONNEL
I. CADRE DE L’ETUDE
I.1. Description des lieux
I.2. Personnel
I.2.1. Personnel médical
I.2.2. Personnel paramédical
II. MATERIELS ET METHODES
II.1. Méthode
II.1.1. Type d’étude et collecte de données
II.2. Malades
II.2.1. Critères d’inclusion
II.2.2. Critères de non inclusion
II.3. Saisie et analyse des données
II.4. Contraintes
III. RESULTATS
III.1. Etude descriptive
III.1.1 Données épidémiologiques
III.1.2 Données cliniques
III.1.3 Données paracliniques
III.2 ETUDE ANALYTIQUE ASSOCIES AU DECES
III.2.1 Analyse des facteurs épidémiologiques associés au décès
III.2.2 Analyses des facteurs cliniques associés au décès
III.2.3 Analyses des facteurs paracliniques associés au décès
DISCUSSION
I. Aspects épidémiologiques
I.1 Répartition selon l’âge
I-2 Les facteurs favorisants
I-3 La séroprévalence rétrovirale
II. Sur le plan clinique
II.1. Signes cliniques
II.1.1Les signes fonctionnelles
II.1.2Les signes généraux
II.2 Atteinte extra pulmonaire
III. Sur le plan paracliniques
III.1 Les données immunologiques
III.2 Les données radiologiques
IV. Sur le plan évolutif
IV.1 Les facteurs épidémiologiques
IV.2 Les facteurs cliniques
IV.3 Les facteurs paracliniques
CONCLUSION