Les villes accueillent aujourd’hui de plus en plus d’habitants. D’ici 2050, 66% de la population mondiale va vivre dans les ville . Les problèmes de pollution, la fragmentation des espaces, l’étalement urbain et le manque de nature en ville sont donc des questions plus en plus abordées dans les projets urbanistiques. Les habitants des villes souhaitent de plus en plus disposer d’espaces ouverts et verts dans leur cadre de vie. En Europe, plus de la moitié des personnes interrogées par l’Ipsos en 2013 répondait que le contact quotidien avec le végétal était très important ou important. Le besoin de renouer avec la nature se fait de plus en plus ressentir dans les villes. Saint-Nazaire est une commune qui dispose d’un patrimoine naturel riche et diversifié. Le littoral, les marais et l’estuaire sont des espaces naturels dont il est nécessaire de protéger. Dans son PLU (élaboré en 2009), la collectivité mettait déjà l’accent sur la conception d’une trame verte et bleue. Aujourd’hui, avec la révision du PLU (engagé en 2014) et la mise en place en 2019 du PLUi à l’échelle de l’intercommunalité, la ville souhaite préserver et valoriser au maximum son héritage environnemental. La trame verte globale de Saint-Nazaire est constituée de 4 composantes majeures. Dans le cadre de ce projet, nous nous intéresserons uniquement sur la trame verte urbaine. Les composantes agricoles et les secteurs à valeurs écologiques et paysagères ne seront donc pas traités.
Trame verte et bleue dans la ville de Saint-Nazaire
La trame verte : qu’est-ce que c’est ?
Une définition qui présente plusieurs aspects
Il existe de nombreuses définitions des trames vertes. La définition la plus officielle est celle qui nous vient de l’Article L. 371-1 créé par la loi n°2010-788 du 12 juillet 2010 portant Engagement National Environnement dite « Grenelle II » et qui dit : « La trame verte et la trame bleue ont pour objectif d’enrayer la perte de biodiversité en participant à la préservation, à la gestion et à la remise en bon état des milieux nécessaires aux continuités écologiques, tout en prenant en compte les activités humaines, et notamment agricoles, en milieu rural. » . Avant d’obtenir cette définition, de nombreuses réflexions ont été menées. Cette définition est l’aboutissement de travaux réalisés par des acteurs provenant de spécialités différentes. C’est pourquoi la notion de trame verte présente une multitude de fonctions et d’objectifs. Ces objectifs varient en fonctions des approches choisies et des acteurs. Voici les différents enjeux qui peuvent se superposer :
– Ecologique : maintenir la biodiversité en favorisant les flux d’espèces vivantes, protéger les espaces naturels menacés à cause de la pollution et du manque de ressources naturelles ;
– Récréatif : créer des lieux de promenades et de détente ;
– Paysager : limiter l’étalement urbain dans les campagnes ;
– Economique : revaloriser les activités sur les espaces verts (agriculture, tourisme verte, base de loisir…) ;
– Socio-culturel : favoriser les échanges entre les habitants et avec la nature.
Dans la loi Engagement National Environnement (ENE), seul l’aspect écologique est mis en avant alors que nous venons de voir que la trame verte et bleue englobe plus d’enjeux. Lors de la mise en place d’une trame verte au sein du milieu urbain, il est impératif de prendre en considération le besoin des habitants. En effet, ce sont les habitants qui sont directement impactés par les aménagements réalisés sur leur territoire. Leurs opinions et leurs besoins sont donc des critères non négligeables dans la mise en place de projet tel que les trames vertes et bleues. Les citadins doivent participer au projet à tous ses niveaux afin que celui-ci soit le mieux adapté.
Dans les textes de lois, les définitions restent très théoriques. La définition proposée par la loi dite « Grenelle II » ne présente pas tous les aspects que possèdent les trames vertes et bleues. Nous allons voir de quelles manières elles se composent. Une trame verte et bleue est un réseau constitué de continuités écologiques elles mêmes constituées de réservoirs de biodiversité et de corridors .
Origine d’un concept multidisciplinaire
En France, le terme de trame verte a été officiellement introduit dans les textes en 2009 avec la loi Engagement National Environnement résultant des débats du Grenelle de l’environnement. Mais ce concept est beaucoup plus ancien que cela .
En effet, c’est au XIXème siècle, aux Etats-Unis, dans la ville de Boston que Frederick Law Olmsted crée un concept innovant d’aménagement urbain. Cet architecte-paysagiste décide d’associer les espaces verts publics, privés et mixtes afin de créer un maillage vert dans la ville de Boston. Il crée ainsi un demi-cercle vert géant appelé « route paysagère » par les commissaires du parc en 1877. Cette « route paysagère » est également constituée de réservoir d’eau ayant différentes fonctions (restauration de la qualité des eaux de pluie et rétention des eaux pluviales). Cette idée est reprise en France par l’architecte paysagiste Jean-Claude Nicolas Forestier. Il insiste sur l’importance de développer un système de parcs en milieu urbain pour constituer de « larges réserves et paysages protégés » et des « terrains de loisir ». En Europe, c’est pendant la période de reconstruction qui a suivi la Seconde Guerre mondiale que la réflexion commence à prendre forme. Le besoin de logements et la volonté de favoriser les nouveaux moyens de transports se font au détriment des zones rurales. Ainsi, dans les années 1960, la menace de l’étalement urbain va accélérer la création de grandes ceintures vertes autours des villes. Ces nouvelles réflexions poussent les urbanistes-paysagistes à repenser la nature dans les villes. Mais la nature est réduite à une simple couleur de zonage au sein d’un urbanisme fonctionnel pendant les années 1970. C’est pourtant pendant ces années que les questions environnementales font leur apparition ainsi que la remise en cause des effets de l’urbanisation et des activités industrielles sur les espaces naturels. De nouvelles problématiques paysagères se développent mais celles-ci ne touchent pas le domaine de l’aménagement des villes. En parallèle, aux Etats-Unis, la notion de greenway (continuité écologique) s’impose. Cette notion s’affirme notamment grâce aux travaux de Julius G. Fabos et P. Lewis. C’est l’ouvrage de Little qui, en 1990, fini de popularisé le terme de greenway et qui propose une définition de continuité écologique en quatre points :
– « 1. Un espace libre linéaire établi le long, soit d’un couloir naturel, comme un front de rivière, un cours d’eau, une vallée ou ridgeline, soit sur terre le long d’une voie de chemin de fer convertie aux loisirs, un canal, une route pittoresque, ou autre parcours.
– 2. N’importe quelle voie naturelle ou paysagère pour piéton ou passage de bicyclette.
– 3. Une connexion d’espace libre liant parcs, réserves naturelles, éléments cultures, ou sites historiques les uns avec les autres et avec les aires peuplées
– 4. Localement des bandes ou parcs linéaires désignés comme des routes paysagères ou greenbelt. »
On peut voir qu’aujourd’hui ces quatre points correspondent encore très bien à la définition que l’on peut se faire de continuité écologique. Chaque description concorde avec les espaces que les collectivités veulent protéger et mettre en valeur.
En France, en 1996, la stratégie paneuropéenne pour la protection de la diversité biologique et paysagère avec comme objectif la mise en place du Réseau Ecologique Paneuropéen (REP) permet de placer la préservation de corridors écologiques comme un enjeu des politiques environnementales. Mais malgré la loi sur l’aménagement et le développement durable du territoire de 1999, ce n’est qu’en 2009 que le terme de trame verte est introduit dans la législation française.
Une application à toutes les échelles
Les trames vertes sont des outils d’aménagement qui peuvent être utilisés aux différentes échelles du territoire. Nous détaillerons de façon générale leurs applications suivant différents niveaux puis nous nous attarderons sur le cas de la ville de Saint-Nazaire dans une autre partie. Au niveau européen, la stratégie paneuropéenne (comme vu ci-dessus) est une initiative regroupant 54 Etats (dont la France) qui favorise le dialogue et la concertation pour mettre en œuvre des actions transfrontalières relatives à la protection de la diversité biologique et paysagère. La Commission européenne, le 6 mai 2013, a publié un communiqué visant à encourager le recours à l’infrastructure verte. Ce concept rejoint celui de Trame verte et bleue en France puisqu’il insiste sur la valorisation des services rendus par les écosystèmes. Au niveau national, on trouve les document cadres des grandes orientations de l’Etat. Ces documents font un état des lieux des enjeux nationaux et frontaliers afin de maintenir et restaurer si nécessaire les continuités écologiques. Jusqu’en 2010, le Comité opérationnel (COMOP) Trame verte et bleue était chargé de définir es moyens et les conditions de la mise en place de la Trame verte et bleue. Ce comité a rendu 3 documents qui ont contribués à l’élaboration de la loi « Grenelle II ». Au niveau régional, le document de référence est la Schéma Régional de Cohérence Ecologique (SRCE). C’est durant les réflexions du Grenelle de l’environnement que ce document est mis en place. Le SRCE réalise d’abord un état des lieux en cartographiant l’emplacement de tous les réservoirs de biodiversité et les corridors qui existent sur son territoire. Ainsi la trame verte et bleue régionale peut être identifiée. Ce document constitue également un plan d’action stratégique afin de répondre aux enjeux relatifs à la préservation et la restauration des continuités écologiques. Au niveau intercommunal, c’est le SCoT qui est pris en compte. Ce document doit être conforme avec les actions qui ont été établies dans le SRCE. Au niveau communal, c’est le PLU qui est le document de référence. Il doit également être conforme avec le SCoT et donc avec le SRCE.
Tous ces plans peuvent parfois créer des problèmes de transposition. En effet parfois les définitions et les délimitations des réservoirs de biodiversités et des corridors produits à une échelle (régionale par exemple) sont difficilement applicables à d’autres échelles (intercommunale et locale par exemple). Certains territoires ne sont pas équipés de SCoT ou PLU. La transposition d’un SRCE n’est pas toujours évidente pour les communes uniquement couvertes par une carte communale. Se crée alors des inégalités entre les territoires qui ne peuvent pas répondre de la même manière aux enjeux des trames vertes et bleues.
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Table des matières
Introduction
I. Trame verte et bleue dans la ville de Saint-Nazaire
A) La trame verte : qu’est-ce que c’est ?
1) Une définition qui présente plusieurs aspects
2) Origine d’un concept multidisciplinaire
3) Une application à toutes les échelles
4) Pourquoi des trames vertes dans la ville ?
B) La trame verte et bleue de Saint-Nazaire
1) La ville de Saint-Nazaire
1. Localisation
2. Population
3. Une ville en reconstruction
2) Une trame verte et bleue diversifiée à Saint-Nazaire
1. La trame verte et bleue vue dans son ensemble
2. Zoom sur la trame verte urbaine
a) L’étang du Bois-Joalland
b) Le bois d’Avalix
c) Le parc Paysager et le front de mer
3. Protection et mise en valeurs des espaces
C) Le site du Moulin du Pé
1) Un ancien centre hospitalier
2) Un espace reconverti en nouveau quartier d’habitat
D) Une trame verte et bleue urbaine coupée
II. Le projet de reconnexion de la trame verte urbaine
A) Les différentes liaisons possibles
1) Le site du Moulin du Pé : une réelle opportunité
2) Les différentes liaisons dans le tissu urbain
1. Itinéraire via la rue Arsène d’Arsonval
2. Itinéraire nord via le boulevard de l’Hôpital
3. Itinéraire sud via la rue Gabriel Fauré
4. Critique des trois itinéraires par comparaison
B) Une trame verte reconnectée
1) Un corridor écologique au sein d’un nouveau quartier d’habitat
2) Un nouveau trajet repensé
1. Réorganisation du boulevard du Docteur René Laennec
2. Réorganisation de la rue Marcellin Berthelot
3. Réorganisation de la rue Arsène d’Arsonval
4. Réorganisation de la rue Gaspard Monge
III. La trame verte urbaine de Saint-Nazaire comme projet urbain
A) Comment ce projet peut être mis en place ?
B) Un projet qui peut évoluer
Conclusion
Bibliographie
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