Traitement du syndrome nephrotique idiopathique

Le syndrome néphrotique idiopathique est une maladie que l’on sait de mécanisme immunologique mais encore mal élucidée. Il réalise une perméabilité anormale du glomérule responsable d’une fuite de protéines, d’où une hypoprotidémie et une hypoalbuminémie à la base de ses manifestations cliniques et complications. Parallèlement, l’évolution de l’atteinte rénale en elle-même peut se faire vers l’insuffisance rénale chronique. Le problème qui se pose devant un syndrome néphrotique idiopathique à Madagascar est la non disponibilité des différents immunosuppresseurs, qui sont des moyens thérapeutiques indispensables après les corticoïdes. Seul le cyclophosphamide est accessible avec une tolérance thérapeutique moins bonne et un risque d’effet secondaire grave. La justification de ce travail est qu’aucune étude concernant le traitement du syndrome néphrotique idiopathique de l’adulte dans ce contexte n’a jamais encore été faite. L’examen anatomopatologique est devenu disponible à Madagascar à partir de 2002, les SNI pouvaient avoir donc une identification des lésions. Notre étude s’est fixé comme objectif de décrire l’aspect épidémiologique, clinique, anatomopathologique du SNI et surtout d’évaluer les résultats obtenus avec les traitements entrepris sur ces SNI identifiés comme découlant d’une LGM ou d’une HSF chez l’adulte, afin d’améliorer la prise en charge de la pathologie.

RAPPELS THEORIQUES 

DEFINITION

Le syndrome néphrotique se définit biologiquement par une protéinurie supérieure à 3g/24h, associant une hypoprotidémie inférieure à 60 g/l et une hypoalbuminémie inférieure à 30 g/l (1). Les lésions initiales en sont des modifications du comportement du filtre glomérulaire vis-à-vis des molécules de protéines de haut poids moléculaire, et ce, secondairement à des modifications physiques ou électriques, elles-mêmes ayant des causes spécifiques identifiées ou non. Dans la littérature anglo-saxonne, il est plus simplement défini par une protéinurie supérieure à 3,5 g/24 h/1.73m2 de surface corporelle. La symptomatologie clinique est dominée par le syndrome œdémateux (2)(3). Le syndrome néphrotique est dit idiopathique quand aucune maladie associée ou étiologie n’est retrouvée, et que l’examen anatomo-pathologique retrouve une lésion glomérulaire minime (LGM) ou une hyalinose segmentaire et focale (HSF). En effet, l’entité pathologique qui regroupe ces deux aspects anatomo-pathologique de syndrome néphrotique semble avoir un même mécanisme, non entièrement expliqué encore, avec des évolutions comparables (4). Par ailleurs, la HSF peut constituer une forme évolutive du syndrome néphrotique à lésion glomérulaire minime (SNLGM). Le syndrome néphrotique idiopathique chez l’enfant est aussi appelé néphrose lipoïdique. Il diffère de celui de l’adulte par une évolution généralement favorable avec une sensibilité aux corticoïdes pour plus de 90% des cas au bout de 4 semaines de traitement, contre 60% chez l’adulte dans les mêmes délais de traitement (5). Cette différence  est toutefois suffisante pour justifier des prises en charge diagnostiques et thérapeutiques particulières pour chacun de ces deux groupes d’âge.

EPIDEMIOLOGIE 

Les néphropathies glomérulaires sont cinq à six fois plus fréquentes en Afrique qu’en Europe. Elles sont responsables de près de la moitié des insuffisances rénales chroniques observées aussi bien aux Etats-Unis, qu’en Europe ou en Afrique noire (6). Le syndrome néphrotique est une complication des maladies rénales. Sa fréquence varie selon l’âge, la race et les régions (7).

Le syndrome néphrotique peut survenir à tout âge sans discrimination de genre. Son incidence en Angleterre, a été estimée à 9cas/an/million d’habitants avec 33% de néphrose (8). Au Sénégal, en 1964, on avait trouvé que 82 cas de syndrome néphrotique ont été recensés en 12 ans (janvier 1952-décembre 1963), son incidence était de 0,37% (9). Une étude faite à l’Hôpital Nationale Point G au Mali, dans le service de Néphrologie dans les années 80 nous renseigne que 44% des malades hospitalisés pour atteinte rénale présentaient un syndrome néphrotique (10). Une autre étude faite dans le même service, de 1990 à 1991, a recensé 96 cas de néphropathies chez les malades hospitalisés dont 32 cas de syndrome néphrotique soit une fréquence de 33,33% (11). Il est à noter que la néphrose lipoïdique constitue 90% des causes de syndrome néphrotique chez l’enfant et 10% chez l’adulte.

PHYSIOPATHOLOGIE 

MECANISMES COMMUNS AUX SYNDROMES NEPHROTIQUES 

Syndrome d’hyperperméabilité glomérulaire
Il est caractérisé par une protéinurie importante liée à un trouble de la perméabilité des capillaires glomérulaires (2). Elle est responsable d’une perte d’albumine supérieure aux capacités de synthèse hépatique, provoquant ainsi une hypoalbuminémie. Selon l’aspect qualitatif de la protéinurie on peut distinguer 2 types d’altérations de la membrane basale glomérulaire :

• Altération biochimique du filtre glomérulaire avec une perte des charges anioniques de la membrane basale glomérulaire sans anomalie morphologique observée en microscopie optique; la protéinurie est alors constituée essentiellement d’albumine à l’électrophorèse des protéines urinaires (on dit que la protéinurie est sélective)
• Lésions du filtre glomérulaire observées en microscopie optique; il existe alors, en plus de l’albumine, des protéines de haut poids moléculaire (la protéinurie est dite non sélective) .

Dans la pratique courante la protéinurie sélective se définit par une quantité d’albumine supérieure à 85% des protéines excrétées ou si le rapport clairance des IgG /clairance de la transferrine est inférieur à 0,1.

L’hyperlipidémie
Elle résulte d’une part de l’augmentation de la production des lipoprotéines au niveau du foie comme VLDL (very low density Lipoprotein) et LDL (low density lipoprotein) et à une diminution de leur catabolisme. Elle résulte aussi de la perte urinaire de certaines substances régulatrice du métabolisme lipidique, comme la glycoprotéine acide alpha 1 retrouvée dans l’urine des patients et qui corrige les altérations de la lipolyse (17). Elle est directement reliée à l’importance de la protéinurie et plus exactement à l’augmentation de la clairance de l’albumine.

Anomalies de la coagulation
Il s’agit d’une hypercoagulabilité responsable d’un accroissement de la fréquence des thromboses vasculaires veineuses périphériques chez les patients néphrotiques avec un risque d’embolie pulmonaire. Les accidents thromboemboliques compliquent environ 10 à 15% des syndromes néphrotiques (18)(19). Il résulte de la perte urinaire de certains facteurs de coagulation mais qui sont largement compensées par une augmentation de la synthèse hépatique des protéines de la coagulation. La fuite urinaire de l’antithrombine III (anticoagulant naturel) est constante, mais il y a aussi une élévation des facteurs de coagulation comme la fibrinogène qui est la conséquence reflexe de l’hypoalbuminémie augmentant ainsi la synthèse hépatique de protéine (20). L’incidence d’une thrombose des veines rénales est particulièrement élevée en cas de glomérulonephrite extra membraneuse ou de glomérulonephrite membrano proliférative (18)(21).

Réponse immunitaire et risques infectieux
La réponse immunitaire est diminuée, donc élévation du risque infectieux au cours du syndrome néphrotique. Elle résulte d’une fuite urinaire d’immunoglobulines G et A avec modification de l’immunité cellulaire. La conséquence directe chez les patients néphrotiques est le risque d’infection surtout par les bactéries encapsulées (pneumocoque, Hæmophilus, Klebsiella…).

Augmentation de la fraction libre plasmatique des médicaments lies a l’albumine
La baisse du taux d’albumine sérique entraine une élévation de la fraction libre des médicaments liés a l’albumine (antivitamines K, anti-inflammatoires non stéroïdiens…). Le risque de surdosage et d’effet toxique est augmenté. D’autres anomalies métaboliques sont observées chez les patients néphrotiques au long cours.

LES BASES IMMUNOLOGIQUES COMMUNES DES SYNDROMES NEPHROTIQUES IDIOPATHIQUES 

Stimuli immunogènes
Plusieurs études ont mis en évidence l’existence d’un stimulus immunogène au déclenchement des poussées de SNI, tel qu’une infection virale, une vaccination, ou un facteur allergène (22).

Reins cibles
Dès les années 90, ALI et al. ont démontré que la transplantation de rein provenant de sujet atteint de néphrose sur des sujets n’ayant pas la maladie entraîne une disparition de la protéinurie sur ce rein (23). Ils ont ainsi prouvé que le rein subi les conséquences d’un processus immunitaire de l’organisme sans être l’acteur principal de la genèse des perturbations.

Facteurs immuns circulants
L’expérience de LAGRUE (24), déclenchant une protéinurie chez les rats par injection de surnageant de culture de lymphocytes de patients atteints de néphrose dès les années 70 faisait suspecter l’existence d’un facteur augmentant la perméabilité capillaire glomérulaire. L’hypothèse de l’existence de facteur immun est aussi appuyée par SAVIN et al. (25), précisant les modifications à type d’altération du cytosquelette et de désorganisation de l’architecture des protéines du diaphragme de fente des podocytes, à la base du dysfonctionnement de la barrière de filtration glomérulaire.

Entité immunopathologique unique
Les perturbations immunes communes au SNLGM et à la HSF à rechute, ainsi que le fait que la HSF peut être la forme évolutive d’un SNLGM plaident en faveur du concept d’entité immunopathologique unique derrière ces deux formes anatomopathologiques de SNI (4). L’observation de LGM comme forme de début de récidive de HSF sur un greffon n’a fait que renforcer cette hypothèse, et inversement, les HSF ont été observées comme étant des podocytopathies primitives associées à  une dédifférenciation multifactorielle des podocytes (26).

DIAGNOSTICS 

DIAGNOSTIC POSITIF

Examens cliniques
Le tableau clinique est dominé surtout par les œdèmes, symptomatologie le plus évocateur. Ces œdèmes sont typiquement blancs, mous, prenant le godet, indolores. Ils sont de topographie déclive, prédominant le matin au niveau des paupières, du dos, des mains et des lombes, siégeant le soir au niveau des membres inférieurs. Ils s’accompagnent d’une prise de poids de 2 à 3kg précédant leur apparition (28). La pression artérielle est normale dans les phases de début, en dehors d’une pathologie hypertensive associée. L’apparition d’une hypertension artérielle évoquera une association à une insuffisance rénale organique, si la maladie est évolutive. Enfin chez les patients suivant un régime sans sel, traités par diurétiques au préalable, l’absence de syndrome œdémateux n’écarte pas le diagnostic de syndrome néphrotique (29).

Examens biologiques 

Dans les urines
➤ La Bandelette urinaire (albustix®, multistix®) est un examen de dépistage. Elle détecte la protéinurie à l’usage au lit du malade. Cette protéinurie est confirmée au laboratoire comme étant permanente et abondante, supérieure à 3 g/24h.
➤ L’électrophorèse des protéines urinaires est un examen qualitatif des protéines excrétées. Cet examen permet d’apprécier la sélectivité de la protéinurie.
➤ L’analyse du sédiment urinaire permet de rechercher l’association à une hématurie microscopique (29).
➤ L’examen du culot urinaire est à la recherche des cylindres hématiques, qui signent l’origine glomérulaire de l’hématurie.
➤ L’ionogramme urinaire montre une diminution de la natriurèse, manifestation de l’hyperaldostéronisme secondaire.

Dans le sang
➤ Les examens biologiques sanguins retrouvent une hypoprotidémie à 60 g/l, associée à une hypoalbuminémie < 30 g/l.
➤ L’électrophorèse des protéines sanguines montre une modification de la répartition des globulines avec élévation des alpha-2-globulines, des bétaglobulines et du fibrinogène, une diminution des gammaglobulines.
➤ L’hyperlipidémie est fréquente avec une élévation des taux de cholestérol et de triglycérides.
➤ L’hypoprotidémie est associée à une augmentation de la vitesse de sédimentation, et à une hypocalcémie (par diminution de la fraction du calcium liée aux protéines).
➤ La créatininémie plasmatique varie en fonction de la cause du syndrome néphrotique et de l’association à une insuffisance rénale organique ou fonctionnelle.

DIAGNOSTIC DIFFERENTIEL

Le principal signe d’appel qu’est le syndrome œdémateux doit faire éliminer les autres étiologies d’œdèmes généralisés que sont :
➤ l’insuffisance cardiaque, les cirrhoses et les péricardites constrictives qui peuvent également s’accompagner d’une protéinurie
➤ l’hypoprotidémie de dénutrition ou de malabsorption.

ANATOMIE PATHOLOGIE 

SYNDROME NEPHROTIQUE A LESION GLOMERULAIRE MINIME

Le syndrome néphrotique à lésion glomérulaire minime se caractérise par l’apparence normale des glomérules à l’examen anatomopathologique au microscope optique (Figure 1). L’examen en immunofluorescence ne retrouve pas non plus de dépôts immuns significatifs. L’examen au microscope électronique, montre un effacement diffus des pieds de podocytes (fusion des pédicelles).

HYALINOSE SEGMENTAIRE ET FOCALE

La lésion est caractérisée en microscopie optique par une sclérose et une hyalinisation de certains glomérules seulement (d’où le terme focal). Pour les glomérules touchés, une partie seulement du floculus glomérulaire est anormale (d’où le terme de segmentaire). Au début les lésions prédominent sur les glomérules du cortex profond (Figure 2). L’examen en immunofluorescence retrouve des dépôts granulaires et nodulaires d’IgM et de C3. L’examen au microscope électronique, montre de façon focale, un amincissement et une dénudation de la membrane basale sur son versant épithélial. Tous les glomérules sont le siège d’une fusion diffuse des pédicelles des cellules épithéliales.

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Table des matières

INTRODUCTION
PREMIERE PARTIE : RAPPELS THEORIQUES
1. DEFINITION
2. EPIDEMIOLOGIE
3. PHYSIOPATHOLOGIE
4. DIAGNOSTICS
5. ANATOMIE PATHOLOGIE
6. TRAITEMENTS
7. EVOLUTION ET SURVEILLANCE
8. COMPLICATIONS
DEUXIEME PARTIE : NOTRE TRAVAIL
1. MATERIELS ET METHODES
1.1. Matériels
1.1.1. Description de l’étude
1.1.2. Cadre de l’étude
1.1.3. Matériels utilisés
1.2. Méthodes
1.2.1. Critères d’inclusion
1.2.2. Critères d’exclusion
1.2.3. Paramètres étudiés
1.2.4. Analyse des donnés
2. RESULTATS
2.1. Caractères épidémiologiques généraux de la population
2.1.1. L’âge
2.1.2. Le genre
2.1.3. Les manifestations cliniques
2.1.4. La pression artérielle
2.1.5. Les valeurs biologiques
2.1.6. L’hématurie
2.1.7. La fonction rénale
2.1.8. Les types histologiques
2.2. Caractères épidémiologiques selon le diagnostic anatomopathologique
2.2.1. Lésion glomérulaire minime
2.2.2. Hyalinose segmentaire et focale
TROISIEME PARTIE : DISCUSSION-SUGGESTIONS
1. DISCUSSION
2. SUGGESTIONS
CONCLUSION
BIBLIOGRAPHIE

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