Introduction générale au traitement d’image
Théoriquement, le traitement d’image numérique est un ensemble d’approches, de méthodes, de techniques et d’outils dont l’ambition est de résoudre la majorité des problèmes qui peuvent se présenter lorsqu’il est nécessaire d’extraire et d’analyser de façon automatique les informations présentes dans une image. Différentes approches ont alors été empruntées ou développées pour traiter ces images. La liste qui suit donne un aperçu de leur diversité :
– la morphologie mathématique (filtrages morphologiques, squelettisation, ligne de partage des eaux, . . .),
– l’approche variationnelle (EDP non linéaires, théorie d’échelle, équation eikonale, flot de courbure moyenne, contours actifs, . . .),
– l’approche statistique (modèles Bayesien, Markovien, Evidentiel, théorie de l’information, . . .),
– les approches géométriques (géométrie projective, géométrie intégrale, calibration, synthèse d’image, . . .),
– l’analyse fonctionnelle (décomposition atomique, ondelettes, analyse multi-échelle, fractales, . . .),
– la théorie des graphes (appariement de graphes, graphes minimaux, . . .),
– les problèmes inverses (régularisations quadratique et semi-quadratique, maximum d’entropie, . . .),
– la reconnaissance des formes et des déformations (théorie des groupes, courbures, . . .),
– les théories psycho-visuelles et psychophysiques (Gestalt, computational theory, . . .). Les cloisons entre ces différentes approches sont perméables et des liens nombreux ont été établis entre, par exemple, la morphologie mathématique et les approches EDP, la théorie des problèmes inverses et les approches variationnelles et statistiques, donnant parfois des schémas numériques très semblables.
Si les philosophes et les scientifiques des siècles précédents s’intéressaient à la relation entre les mathématiques et la physique, l’informatique a introduit un nouvel outil qui se situe à la frontière entre la théorie et la pratique. Il a été créé par l’homme dans un but pratique : celui de faire des tâches systématiques plus rapidement que l’homme et à la place de celui-ci. Le traitement d’image désigne donc en informatique un ensemble d’algorithmes permettant, à partir d’images numérisées, de produire d’autres images numériques ou d’en extraire de l’information.
En pratique, le traiteur d’image dispose d’images numériques, donc échantillonnées, acquises par des caméras vidéo, appareils photos numériques, imageurs IRM (imagerie à résonance magnétique), TEP (tomographie à émission de positons), scanner X, échographie, scintigraphie, EEG (électroencéphalographie), MEG (magnéto-encéphalographie), . . . Le mode et les conditions d’acquisition et de numérisation des images conditionnent largement les opérations qu’il faudra réaliser pour extraire de l’information. En effet, de nombreux paramètres entrent en compte, les principaux étant :
– la résolution d’acquisition et le mode de codage utilisé lors de la numérisation, qui déterminent le degré de précision des éventuelles mesures de dimensions,
– la mise au point, qui détermine la netteté de l’image,
– les conditions d’éclairage, qui déterminent une partie de la variabilité des images traitées,
– le bruit de la chaîne de transmission d’image.
Dans le contexte de la vision artificielle, le traitement d’image se place après les étapes d’acquisition et de numérisation, assurant les transformations d’images et la partie de calcul permettant d’aller vers une interprétation des images traitées. Cette phase d’interprétation est d’ailleurs de plus en plus intégrée dans le traitement d’image, en faisant appel notamment à l’intelligence artificielle pour manipuler des connaissances, principalement sur les informations dont on dispose à propos de ce que représentent les images traitées (connaissance du domaine). Cependant, une constatation assez courante est la difficulté de remplacer l’analyse experte de l’oeil humain par celle d’un programme informatique, comme le traduit cette phrase souvent citée de David Marr :
The common almost despairing feeeling of the early investigators (. . .) was that pratically anything could happen in an image and furthermore that pratically everything did. [Marr, 1982] .
Une meilleure connaissance des mécanismes de perception visuelle humaine est encore nécessaire et devrait avoir un impact sur la conception d’algorithmes de vision artificielle. La télédétection ayant franchi un pas important en permettant d’avoir des images à très haute résolution (inférieure à 10 m pour les images satellites et inférieure à 1 m pour les images aériennes), a nécessité de nouvelles techniques de traitement d’image dans un but de compression et d’extraction d’information. De très nombreuses applications découlent de ces images satellites, dans des domaines variés : météorologie, climatologie, gestion de ressources environnementales, agriculture, suivi de catastrophes naturelles, . . .
La recherche médicale est devenue elle aussi un très gros demandeur en traitement d’image pour améliorer les diagnostics effectués à partir des nombreuses techniques d’imagerie (analyse d’image HMPAO-SPECT du cerveau pour le diagnostic de la maladie d’Alzheimer, détection de tumeurs dans des images MIBI-TEMP, détection de lésions évolutives de sclérose en plaques dans l’imagerie IRM, . . .). Ces diagnostics assistés par ordinateur basés sur l’image peuvent réduire la charge de travail en situation clinique tout en améliorant les performances. En vision industrielle, l’exploitation de savoir-faire en algorithmie et traitement d’image, issue de développements de plusieurs années par de nombreux spécialistes, a permis d’atteindre des performances de traitement automatique (précision et cadence) très difficilement envisageables autrement, rendant ainsi certaines applications viables, ou améliorant la valeur de celles existantes (tri, contrôle qualité, réglage, . . .).
Accompagnant le développement des moyens de calcul, les applications du traitement d’image sont de plus en plus nombreuses dans des secteurs clefs de l’activité économique : imageries aéroportée et spatiale, imagerie médicale, robotique, senseurs civils et militaires, systèmes de sécurité et d’identification, échange et commerce de données fixes ou animées sur internet. Cette liste non exhaustive souligne simplement la place de l’image dans nos sociétés et l’utilité culturelle et socioéconomique du développement d’outils puissants et rapides pour son traitement.
Voisinages adaptatifs généraux (VAG)
Suivant l’approche évoquée dans la sous-section précédente et répondant à la problématique, des fenêtres d’analyse originales, nommées Voisinages Adaptatifs Généraux (VAG), sont mathématiquement définies et étudiées. A chaque point de l’image est associée une famille croissante de VAG permettant une analyse multi échelle des différentes caractéristiques de l’image. Ces VAG sont adaptatifs dans le sens où chaque voisinage coïncide spatialement avec la structure locale du point considéré, suivant les informations radiométriques, morphologiques, géométriques, ou texturales étudiées. De plus, les VAG sont physiquement cohérents puisque leur modélisation dépend de la nature physique et/ou psychophysique de l’image à analyser. Par conséquent, les VAG sont adaptés aux images ou systèmes d’imagerie linéaires, mais aussi non linéaires et/ou bornés, tels que les images acquises en lumière transmise, en lumière réfléchie (modèle multiplicatif) ou le système humain de perception visuelle. Ces VAG sont au coeur de ce travail de thèse. En effet, toutes les transformations définies après l’introduction de ces VAG sont basées sur ces nouvelles fenêtres d’analyse.
Transformations à VAG
Les transformations résultantes (c’est à dire à VAG) permettent une analyse multi échelle spatialement plus significative et pertinente par rapport aux propriétés physiques et psychophysiques de l’image à étudier. Divers opérateurs ou opérations ont été définis et étudiés :
• opérateurs morphologiques à VAG,
• filtres de Choquet à VAG,
• égalisation d’histogramme à VAG,
• critères d’analyse à VAG.
Applications
Ces transformations ont été appliquées pour la résolution de divers problèmes rencontrés en traitement d’image, tant sur des images types (’Lena’, . . .) que sur des images issues de problèmes applicatifs concrets :
• restauration d’image,
• rehaussement d’image,
• décomposition d’image multi-échelle,
• segmentation d’image,
• représentation locale d’information.
Publications
Au cours de cette thèse, l’approche TIVAG a conduit aux publications suivantes :
• J. Debayle and J.-C. Pinoli. Adaptive Neighborhood Mathematical Morphology and its Applications to Image Filtering and Segmentation. Proceedings of the 9th European Congress on Stereology and Image Analysis. Vol. II, pp. 123-130. Zakopane, Poland. May 10-13, 2005. [Debayle and Pinoli, 2005a]
• J. Debayle and J.-C. Pinoli. Multiscale Image Filtering and Segmentation by means of Adaptive Neighborhood Mathematical Morphology. Proceedings of the IEEE International Conference on Image Processing. Vol. III, pp. 537-540. Genova, Italy. September 11-14, 2005. [Debayle and Pinoli, 2005d]
• J. Debayle and J.-C. Pinoli. Spatially Adaptive Morphological Image Filtering using Intrinsic Structuring Elements. Image Analysis and Stereology. Vol. 24, No. 3, pp. 145-158, 2005. [Debayle and Pinoli, 2005e]
• J. Debayle and J.-C. Pinoli. General Adaptive Neighborhood Image Processing. Part I : Introduction and Theoretical Aspects. Journal of Mathematical Imaging and Vision. Article under second revision. [Debayle and Pinoli, 2005b]
• J. Debayle and J.-C. Pinoli. General Adaptive Neighborhood Image Processing. Part II : Practical Application Examples. Journal of Mathematical Imaging and Vision. Article under second revision. [Debayle and Pinoli, 2005c] .
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Table des matières
INTRODUCTION
I CONTEXTE
1 Problématique et contributions
1.1 Présentation du problème
1.2 Contributions
1.2.1 Etat de l’art
1.2.2 Solution à la problématique
1.2.3 Voisinages adaptatifs généraux (VAG)
1.2.4 Transformations à VAG
1.2.5 Applications
1.2.6 Publications
2 Images tests
2.1 Divers
2.2 Matériaux
2.3 Bio-médical
3 Etude bibliographique
3.1 Approches multi-échelles
3.1.1 Pyramides
3.1.2 Ondelettes
3.1.3 Scale-spaces
3.2 Transformations spatialement adaptatives
3.2.1 Filtrage à voisinages variables
3.2.2 Filtrage à voisinages adaptatifs
3.2.3 Filtrage géodésique
3.3 Structures d’images adaptées aux intensités
3.3.1 Modèles vectoriels GLIP
3.3.2 Modèles vectoriels plus spécifiques
3.4 Synthèse bibliographique
II CONCEPTS NECESSAIRES
4 Modèles vectoriels généralisés
4.1 Espaces vectoriels ordonnés GLIP
4.2 Les modèles CLIP, MHIP, LRIP et LIP
4.2.1 Motivation initiale
4.2.2 Structure vectorielle
4.2.3 Importance d’une relation d’ordre
4.2.4 Tableau récapitulatif des modèles
4.2.5 Comparaisons théoriques et intérêts pratiques
4.2.6 Exemple d’application en rehaussement d’image
5 Morphologie mathématique
5.1 Représentation des images
5.2 Morphologie binaire
5.2.1 Opérations ensemblistes de Minkowski
5.2.2 Opérateurs binaires élémentaires
5.3 Morphologie plate
5.3.1 Représentation d’une image par sections binaires
5.3.2 Opérateurs plats élémentaires
5.4 Morphologie à tons de gris
5.4.1 Opérations numériques de Minkowski
5.4.2 Opérateurs à tons de gris élémentaires
III DEVELOPPEMENT
6 Voisinages adaptatifs généraux (VAG)
6.1 Structures GLIP
6.2 Première définition des VAG
6.3 Seconde définition des VAG
6.4 Propriétés
6.5 Discussion
7 Morphologique mathématique à VAG
7.1 Eléments structurants adaptatifs (ESA)
7.2 Morphologie mathématique adaptative plate
7.2.1 Dilatation morphologique adaptative plate
7.2.2 Erosion morphologique adaptative plate
7.2.3 Fermeture, ouverture morphologique adaptative plate
7.2.4 Propriétés des opérateurs morphologiques adaptatifs plats
7.2.5 Illustrations de traitements morphologiques adaptatifs plats
7.3 Morphologie mathématique adaptative à tons de gris
7.3.1 Dilatation morphologique adaptative à tons de gris
7.3.2 Erosion morphologique adaptative à tons de gris
7.3.3 Fermeture, ouverture morphologique adaptative à tons de gris
7.3.4 Propriétés des opérateurs morphologiques adaptatifs à tons de gris
7.4 Filtrage morphologiques adaptatif plat
7.4.1 Filtres morphologiques adaptatifs alternés plats
7.4.2 Filtres morphologiques adaptatifs séquentiels plats
7.4.3 Filtres morphologiques adaptatifs alternés séquentiels plats
7.5 Catégorie des opérateurs morphologiques adaptatifs plats
8 Filtrage de Choquet à VAG
8.1 Rappels sur le filtrage de Choquet
8.1.1 Intégrale floue de Choquet
8.1.2 Filtres de Choquet
8.1.3 Filtres de convolution de Choquet
8.2 Filtres de Choquet adaptatifs
8.2.1 Filtres adaptatifs et mesures floues cardinales
8.2.2 Illustrations de filtres de Choquet adaptatifs
9 Critères d’analyse à VAG
9.1 Catégories des critères d’analyse à VAG
9.2 Critères d’orientation
9.2.1 Prise en compte de la structure spatiale du VAG
9.2.2 Prise en compte de la position du point à l’intérieur de son VAG
9.2.3 Aspect multi-échelle
9.2.4 Conclusions et perspectives
9.3 Critère d’épaisseur
9.3.1 Prise en compte de la structure spatiale du VAG
9.3.2 Prise en compte de la position du point à l’intérieur de son VAG
9.3.3 Conclusions et perspectives
9.4 Autres critères d’analyse à VAG
CONCLUSION
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