Traitement des pathologies oro-faciales par les courants de haute fréquence

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Début de siècle

Au début du XXème siècle apparait un dérivé de la darsonvalisation : les « rayons violets » ou « Violet Wand ». Les appareils se présentent sous la forme de valisettes ou de boîtes en bois, contenant le matériel d’électrisation ainsi qu’un manuel permettant l’automédication, et dont les indications de doses se veulent aussi précises qu’une prescription médicamenteuse. Un exemple parlant de ce phénomène se trouve dans le Catalogue de la Manufacture française d’armes et cycles de Saint-Etienne où l’on trouve un grand nombre de ces appareils proposés à la vente par correspondance parmi les vélos, les fusils de chasse et autres produits commercialisés par l’entreprise Manufrance. (16)
Ces appareils sont constitués de tubes en verre remplis d’un gaz raréfié. Le passage d’un courant de haute fréquence à travers ces tubes entraine l’illumination de ces tubes en violet. Au contact de la peau, les tubes produisent des effluves d’étincelles et des picotements. Il existe une grande variété de formes différentes pour s’adapter à toutes les parties et orifices du corps humain. Publicité de Renulife pour le rayons violets, publiée en juillet 1920 (17)
Les premiers utilisateurs de ces appareils sont les médecins en milieu hospitalier, puis dans les cabinets de ville. Avec la généralisation de l’électricité dans les habitations, ces appareils sont ensuite commercialisés sous forme de valisettes portables contenant l’appareil branché sur secteur, destiné à l’usage du grand public. Ces dispositifs sont reconnus par un grand nombre de médecins et produits par de multiples fabricants. Ils sont destinés à traiter une foule de pathologies dans des domaines d’action extrêmement variés : rhumatismes, dermatoses, pathologies dentaires, … Ils restent en vogue jusqu’à la seconde Guerre Mondiale avant d’être jugés inutiles (bien que sans danger) puis prohibés par la Food and Drug Administration.
Aujourd’hui ils sont encore utilisés comme détecteurs de fuites dans les conduites sous vide, dans les salons de beauté et dans certaines pratiques sexuelles. (18)
En France, les plus grandes sommités soutiennent l’électricité médicale, et contribuent ainsi à sa diffusion et à sa reconnaissance collective. Différentes techniques découlant de la darsonvalisation sont rendues possibles grâce au développement du réseau électrique de distribution : la radiologie, la télégraphie sans fil, la haute fréquence médicale, ainsi que la production d’ozone (usage médical et purification des eaux).
Il se met en place un véritable échange entre constructeurs et praticiens. D’une part les fabricants produisent facilement toutes sortes d’appareils : ceux-ci recourent aux mêmes technologies (transformateurs, bouteilles de Leyde, bobines) en ajoutant de petites variations. De leur côté les médecins font aux constructeurs des suggestions de nouveaux instruments et accessoires d’après leur expérience clinique.
Dans les années 1900, les appareils à haute tension s’appliquent à la production de rayons X. Les services d’électrothérapie deviennent au fur et à mesure des services mixtes d’électroradiologie jusqu’aux années 1930. Au fil des ans, la radiologie occupe une place de plus en plus importante. La découverte d’un moyen diagnostique à l’efficacité certaine séduit en effet davantage qu’une électrothérapie basée sur des recherches empiriques sans preuve scientifique.
Bien que de nombreuses techniques d’électrothérapie aient été intégrées dans d’autres disciplines (neurologie, chirurgie, dentisterie, kinésithérapie…), l’électricité médicale ne constitue plus une discipline médicale à part entière au moment de l’Entre-deux-guerres.

La première Guerre Mondiale

Il se produit une extension très importante des services d’électrothérapie dans les hôpitaux sur tout le territoire français. Il règne une véritable volonté de soigner les pathologies liées au conflit. L’électricité médicale intervient dans différents domaines :
 Electrophysiologie :
o Paralysie musculaire.
o « Pied de tranchée ».
o Arthrite chronique.
o Névrose post-traumatique.
o Cicatrisation des blessures.
 Localisation des projectiles : l’électrovibreur de Bergonié est un électroaimant permettant de détecter, localiser et extraire les projectiles magnétiques (éclats d’obus et balles).
 Traitement des atteintes nerveuses :
o Rôle diagnostique de l’électrothérapie : elle permet l’exploration du trouble nerveux et la détermination de sa nature (compression, section du nerf, …)
o Rôle thérapeutique
 Prise en charge des névroses de guerre (19)

L’entre-deux-guerres

De 1933 à 1936, Manfred Sakel, psychiatre autrichien, propose un nouveau traitement des psychoses. Il provoque par des injections d’insuline des comas hypoglycémiques profonds. Le patient est ensuite resucré progressivement. (20)
L’hypoglycémie sévère a comme effets immédiats de l’agitation, des sueurs, des convulsions. Chez les patients traités chroniquement, les effets secondaires au long terme sont l’obésité sévère, des lésions cérébrales voire la mort.
Petit à petit, la cure de Sakel est abandonnée au profit de nouvelles techniques telles que l’électrochoc et l’usage de sédatifs.

La Seconde Guerre Mondiale

En 1938 à Rome, le psychiatre Ugo Cerletti délivre le premier électrochoc à un patient schizophrène, ce qui déclenche chez lui une crise d’épilepsie. Un mois plus tard, il constate une amélioration de l’état psychique de son patient.
Les traitements par électrochoc se diffusent rapidement à la Suisse, à l’Allemagne et aux Etats-Unis. En France, le contexte est différent : la guerre et l’occupation allemande limitent les échanges scientifiques. En 1940, le premier électrochoc en France est réalisé par les Allemands dans le service de neuropsychiatrie de l’Hôpital Saint-Anne à destination de leurs propres soldats. Mais l’introduction de l’électrochoc en France est ralentie par la difficulté à se procurer un sismothère, l’appareil permettant de délivrer les chocs. Les premiers appareils n’arrivent qu’en 1942. A partir de là, l’électrochoc se répand dans les hôpitaux psychiatriques français avec une extrême rapidité. L’engouement des praticiens peut s’expliquer par la volonté de rompre avec l’abstention thérapeutique qui jusqu’alors faisait référence en psychiatrie. L’enfermement des malades dans des asiles était considéré comme une thérapeutique. La seconde raison de cet engouement est indéniablement liée au contexte des années noires : du fait de l’occupation allemande, la France n’est plus approvisionnée en insuline ce qui limite strictement son utilisation au traitement du diabète. Les psychiatres ne pouvant plus recourir à la cure de Sakel, ils se tournent immédiatement vers l’électrochoc. La famine est le troisième élément à prendre en compte. Durant la seconde Guerre Mondiale, 45000 malades internés meurent à cause de problèmes d’approvisionnement. L’enjeu de l’électrochoc est de soigner efficacement les aliénés pour permettre leur sortie des hôpitaux, leur réinsertion sociale et professionnelle, apportant ainsi leur contribution à la société. (19)

Electrothérapie et sphère oro-faciale

Appareils utilisés

Bien évidemment, l’électricité a apporté à la dentisterie de nouveaux outils : les moteurs à instruments rotatifs, la lumière au fauteuil, etc… Mais les appareils d’électrothérapie ne sont utilisés vraiment qu’à partir de 1850 dans les cabinets. L’enthousiasme pour cette technique est lié au côté « magique » de l’électricité, l’attrait pour la nouveauté, des récits de guérisons miraculeuses, le tout soutenu par une action psychosomatique.
Toute la profession participe donc activement à la révolution de la « Fée Electricité »

Appareil à haute fréquence de Gem et appareil de Fischer

Les premiers appareils apparaissent avant que les cabinets n’aient accès à l’électricité de ville. Ils étaient alimentés au début par des piles, des batteries ou des dynamos. Apparaissent ensuite des appareils à brancher sur secteur. Ils comprennent un transformateur Tesla et sont alimentés par un courant alternatif ou continu. Le courant est transmis à la bouche du patient grâce à des électrodes (des tubes de verre sous vide) qui lorsqu’elles entrent en contact avec les tissus produisent une légère chaleur. Si on éloigne l’électrode de quelques millimètres, on obtient alors de petites gerbes d’étincelles. C’est le cas notamment de l’appareil à haute fréquence de Victor Gem, possédant une panoplie d’électrodes aux formes et dimensions variées pour s’adapter à la cavité buccale. Appareil à haute fréquence de Gem (21)
Bien souvent, les appareils étaient destinés à soigner tout le corps et pas seulement la cavité orale. C’est le cas du Fischer type « F » (appareil à haute fréquence et générateur de rayons violets). Appareil à haute fréquence de Fischer et générateur de rayons violets (21)
Il est contenu dans un coffret de transport qui contient différentes électrodes (cutanée, rectale, vaginale, nasale, orale). L’intensité des décharges peut être choisie grâce à un interrupteur, allant d’un simple picotement à une lumière violette puissante accompagnée d’étincelles.

Le Rénovateur : étude détaillée

L’appareil qui sera ici notre objet d’étude se nomme « Le Rénovateur », un appareil à rayons violets ou « violet wand ». On peut estimer la date de sa production aux alentours de 1900. Ce modèle-ci a été trouvé de manière fortuite chez un particulier, c’est un appareil qui était destiné à l’usage à domicile.
 La mallette.
Elle permet de contenir et protéger l’ensemble des éléments et de les transporter de manière aisée grâce à ses faibles dimensions.
 Le générateur.
Il fonctionne sur secteur en se branchant par une prise électrique classique (un potentiomètre permet de sélectionner 80-130 V ou 150-250 V). Le générateur transmet le courant haute fréquence qu’il produit à la pièce à main via un câble.
 Les électrodes.
Il existe différents types d’électrodes utilisées avec les appareils à haute fréquence. Elles sont en quartz ou en verre, et dans chacune d’elle, l’air a été retiré et remplacé par un gaz rare ou un élément métallique.
Le coffret du Rénovateur est commercialisé avec les électrodes suivantes :
Electrode intra-auriculaire et/ou intra-nasale. Sert à la radiation du nez et du conduit auditif (catarrhe, otorrhée, bourdonements).
Electrode pour le traitement externe du cou et de la nuque (goître, névralgie, neurasthénie, maux de gorge, etc… Aussi utilisée dans les soins de beauté ainsi que sur la glande thyroïde).
Electrode peigne. Utilisée pour la radiation du cuir chevelu : calvitie, pellicules, démangeaisons, maux de tête, … Décrite dans le manuel comme ranimant les cellules capillaires. Elle peut aussi être utilisée en complément dans le traitement des névralgies et des migraines.
Electrode à surface plane. C’est la plus communément utilisée. Elle s’utilise en effectuant de petits mouvements circulaires à la surface de la peau. Elle est utilisée pour faire circuler le sang, régénérer les muscles, traiter les névralgies, les douleurs faciales, etc…
Les électrodes contenant du néon auront des effets apaisants, décongestionnant. Celles qui contiennent de la vapeur de mercure auront des effets assainissant, purifiant, bactéricide.
Il existe enfin des électrodes en verre coloré, chaque couleur ayant ses propres effets (rouge contre l’anémie, bleu contre la douleur, jaune pour les muscles, etc…).

Traitement des pathologies oro-faciales par les courants de haute fréquence

Carie et algie dentaire

Dans la Nouvelle Encyclopédie pratique de médecine et d’hygiène de 1922, on peut lire : « La carie dentaire est une affection caractérisée par le ramollissement et la destruction progressive des tissus de la dent […]. Aussitôt l’émail détruit, les microbes de la bouche viennent à l’attaque de l’ivoire. L’ivoire est une substance poreuse striée de fins canalicules (canalicules de Tomes), les microbes s’infiltrent dans ces conduits. » (22)
La physiopathologie de la carie dentaire est alors bien connue, même si les termes diffèrent de ceux utilisés aujourd’hui (on parle à cette époque d’ivoire pour la dentine, de carie sèche pour la carie arrêtée).
En outre, on peut s’amuser de la perception de la carie et de son épidémiologie lorsqu’on lit dans une encyclopédie médicale : « La carie des dents commence fréquemment de 15 à 25 ans et atteint les femmes plus que les hommes. Certaines personnes y sont prédisposées par leur tempérament faible. On doit toujours conseiller à un jeune homme qui veut se marier pour avoir de beaux enfants de choisir une jeune fille ayant des dents saines et belles. Elles sont l’indice d’une belle santé et d’une bonne hérédité ». (23)
Le traitement étiologique de la carie est l’éviction carieuse (à l’aide de fraises en acier et d’un tour à pied, ou à l’aide d’un excavateur manuel) et l’obturation à l’amalgame.
Quant à la gestion de la douleur, il n’y a aucun consensus.
L’une des méthodes est de nature pharmacologique. Il est préconisé pour calmer la rage de dents de recourir à une obturation temporaire après débridement. Placer dans la cavité un coton imbibé de liquide de Bonain (menthol, cocaïne, acide phénique) recouvert d’un bouchon de gutta percha, ou poudrer la cavité avec un mélange de cocaïne et de sous nitrate de bismuth. (24)
Une autre méthode est le recours à l’électricité médicale. Le but recherché avec la haute fréquence est de diminuer une douleur dentaire existante et même de prévenir la douleur avant qu’elle ne s’installe. « Ceci peut-il être réalisé ? Aisément. Et sans toucher la dent et sans demander au patient d’ouvrir la bouche. ». D’après les manuels d’électrothérapie, il suffit de placer l’électrode au contact de la dent causale et d’appliquer un courant jusqu’à la disparition de la douleur. Le praticien peut alors commencer son soin dans de bonnes conditions.
D’après les défenseurs de l’électrophysiologie, des douleurs dues à des caries « aussi grosses que la dent » auraient été maitrisées pendant des mois. Les praticiens ne prétendent pas substituer le traitement électrique au soin étiologique, mais proposent plutôt de les associer. (25)

Névralgie faciale

« Le terme névralgie correspond à une affection douloureuse, soit du trajet du nerf, soit de ses aires de distribution. C’est un état douloureux, qui dans les premiers stades peut se manifester par de simples flashes de douleur répondant à un stimulus afférent dû à un irritant à distance, mais peut aboutir à une douleur plus persistante et sévère en conséquence d’une irritation continue des nerfs responsables de l’action réflexe. » (26)
Le traitement par des électrodes est valable pour les névralgies de nature « non chirurgicale », ce qui exclut par exemple les névralgies dues à une compression tumorale du nerf. Il est recommandé de promener l’électrode sur chaque point douloureux jusqu’à apaisement, puis de terminer par l’émergence crânienne du nerf.
Le manuel du Rénovateur distingue deux cas : lorsqu’il y a afflux sanguin, réaliser une légère effluvation avec l’électrode n°0 à courant doux pendant 3 minutes. Dans le cas contraire, opérer par étincelage avec l’électrode n°2.
Pour déterminer l’origine de la névralgie, les praticiens évoquent en premier lieu la cause dentaire. « Il faut toujours penser à une dent cariée lorsqu’on souffre de névralgies, de migraines, même si les dents ne paraissent avoir aucun rapport avec la douleur. Bien que les points douloureux soient uniquement situés par exemple, au-dessus de l’oeil, ou dans l’oreille, il faut toujours en premier lieu incriminer une dent et la plupart du temps on aura raison. » (23)
D’après le manuel Dental electrotherapeutics, les névralgies faciales sont souvent causées par des maladies parodontales et par leurs effets indirects : les collets sont exposés aux stimuli externes qui sont transmis par les tubuli dentinaires aux terminaisons périphériques du nerf trijumeau. Il convient donc de supprimer ces sensibilités pour lutter contre la névralgie.
Afin de traiter ces sensibilités rapidement et de manière permanente, il est recommandé d’utiliser une solution électrolytique de nitrate d’argent. Selon l’auteur, les ions argent passent au travers de la structure organique de la dentine et du cément par conduction, et pénètrent à l’intérieur des cellules, où ils sont plus efficaces que si la substance était simplement appliquée à la surface. L’application du courant à la solution permet la dissociation des molécules inactives en ions actifs. (27)

Traitement des dents nécrosées

Une nécrose du tissu pulpaire peut survenir à la suite d’une carie, un traumatisme, etc. En cas de canal long, étroit ou tortueux, le traitement endodontique est parfois difficile et l’accès à l’apex impossible (il faut se remettre dans le contexte des années 1900 : il n’existe pas d’instrument endodontiques rotatifs, d’aides optiques, etc..). Il est fréquent qu’aucun instrument n’accède à l’apex, ceci étant particulièrement problématique en cas de parodontite apicale suppurée.
Les praticiens de l’époque recommandent alors la méthode suivante :
Le canal ne doit pas être élargi, et le tissu pulpaire et/ou le pus doivent être retirés au mieux. Il faut ensuite remplir le canal avec une solution électrolytique (chlorure de zinc à 5% le plus souvent). Une fine électrode de platine ou d’acier est introduite au plus près de l’apex sans le dépasser. Un courant est appliqué progressivement (de 3 à 5 mA) durant 5 minutes. Ceci imprègne les parois canalaires d’ions antiseptiques avec un effet rémanent. Les ions vont aussi dépasser le foramen et agir dans le péri-apex.
Radiographie montrant les électrodes intra-canalaires (28)

Lésion parodontale d’origine endodontique

C’est une manifestation de la pathologie pulpaire sur le parodonte. Après avoir subi de multiples agressions, le tissu pulpaire se nécrose. Les bactéries et leurs toxines diffusent via les voies de communication entre l’endodonte et le parodonte, provoquant une réaction inflammatoire des structures parodontales profondes. Ceci peut survenir lorsque l’endodonte de la dent nécrosée n’est pas ou insuffisamment traitée.
D’après les manuels d’électrothérapie, l’ionisation du canal par des ions antiseptiques est un bon moyen de palier ce défaut d’asepsie. Tout d’abord, irriguer le canal avec une solution antiseptique pour éliminer le maximum de matière organique. Enrouler ensuite une électrode dans une compresse et saturer celle-ci avec une solution de chlorure de zinc à 5%. Introduire l’électrode dans le canal aussi loin que possible et appliquer un courant de5 mA pendant 8 minutes.
En plus du traitement intra-canalaire, il est recommandé d’agir aussi au niveau muqueux. Appliquer une compresse imbibée de teinture d’iode sur la muqueuse en regard de la lésion. Plaquer la compresse contre la zone avec une électrode de platine plate et appliquer un courant de 3 à 4 mA pendant 5 minutes. « Ce traitement viendra souvent à bout d’un abcès en moins de temps qu’avec la méthode osmotique ordinaire consistant à sceller des antiseptiques dans le canal ». (29)
Une autre possibilité est l’utilisation d’une solution de nitrate d’argent. Mais compte tenu des propriétés colorantes des ions argent, son utilisation doit se restreindre aux secteurs postérieurs. Les situations les plus favorables sont les dents avec des canaux larges et rectilignes permettant aux électrodes d’atteindre l’extrémité du canal.

Perforation canalaire

En cas de perforation lors de la mise en forme des canaux, la conservation de la dent est rendue plus difficile. Les praticiens électriciens de l’époque recommandent d’introduire une électrode le plus loin possible dans le canal (si possible dépasser légèrement l’apex) et d’appliquer un courant de 3 ou 4 mA à une solution de chlorure de zinc à 3% ou de sulfate de cuivre à 2%. La perforation doit ensuite être comblée à l’aide d’un matériau condensable comme les amalgames de cuivre, basés sur la composition définie par Black en 1896 (65 % en poids d’argent, 29% d’étain, moins de 6% de cuivre). (30)

Anesthésie dentaire et gingivale

Certains auteurs décrivent un effet anesthésiant des courants à haute fréquence. En 1896, Dr M.J. Morton propose d’appliquer par cataphorèse les molécules ionisées de cocaïne (utilisée des années 1880 jusqu’au début du XXème siècle) sur la surface dentaire sensible. (31)
Pour anesthésier une cavité dentinaire, il préconise d’y placer un coton imbibé d’une solution aqueuse de cocaïne. Il faut ensuite appliquer un courant d’intensité progressive jusqu’à obtention d’un effet anesthésiant. Le courant favoriserait la progression en profondeur de la cocaïne, majorant ainsi son effet.
L’électricité pourrait même remplacer l’hydrochlorate de cocaïne pour des gestes mineurs (avulsion de racine, traitements parodontaux, …) évitant ainsi les effets secondaires (notamment la tachycardie).

Pyorrhée alvéolaire (ancien abcès parodontal)

« C’est une infection externe qui débute au collet de la dent, descend de proche en proche, attaque le ligament alvéolo-dentaire […] On voit les dents déchaussées, s’allonger en apparence, elles branlent dans les alvéoles, la gencive saigne très facilement. La chaleur et le froid sont douloureux. » (32)
Au début de la maladie, l’infection est bien présente mais sans suppuration. On observe du tartre et un saignement gingival au contact. On utilisera en première intention une électrode de zinc placée dans le sulcus à laquelle on applique un courant de 3 mA. Si un autre traitement est nécessaire, on utilisera en plus une solution de teinture d’iode. Cette condition de la gencive est trop souvent considérée comme un simple état inflammatoire, et devrait être considérée comme la première étape menant à la pyorrhée alvéolaire.
Si une hygiène stricte et un traitement antiseptique ne sont pas mis en place rapidement, l’infection peut aboutir à une suppuration. A ce stade, l’os alvéolaire est impliqué et se résorbe, formant des espaces autour des alvéoles où le pus et les bactéries stagnent et prolifèrent.
Lorsqu’apparait une suppuration, le drainage chirurgical peut être complété en insérant une électrode de cuivre ou de zinc dans le sulcus voire si possible dans l’abcès après drainage. L’électrode doit être maintenue dans une position fixe. Il faut ensuite appliquer des compresses imbibées d’une solution de chlorure de zinc à 3 ou 4 %, en faisant pénétrer la solution au maximum. On applique un courant de 5mA, sauf dans les espaces interdentaires des molaires où on peut parfois monter à 10 ou 15 mA. « Au plus le courant est élevé, au plus les ions pénètreront profondément, et au plus l’effet de stérilisation sera parfait. » (33)
L’électrode est laissée dans sa position 2 minutes puis est déplacée sur les sites voisins jusqu’à avoir traité toutes les zones concernées. Il est aussi possible de rester sur la même zone pendant 5 minutes si la lésion est assez localisée (peu d’inconfort pour le patient).
L’électrode utilisée doit être la plus large possible, avec une forme incurvée pour épouser les formes des collets. Elle doit autant que possible atteindre le fond des poches parodontales. (34)

Nécrose des maxillaires

Une infection dentaire qui se chronicise peut aboutir en dernier lieu à une nécrose osseuse, dans un premier temps limitée à l’alvéole. Dans ce cas, il convient d’éliminer le séquestre osseux s’il est séparé de l’alvéole, ou de fraiser la surface nécrosée de l’os. Puis, une électrode de platine est introduite dans l’alvéole ainsi qu’une solution de teinture d’iode. On applique alors un courant de 5 mA. (35)

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Table des matières

I. MEDECINE ET ELECTRICITE : APPROCHE HISTORIQUE CHRONOLOGIQUE
I.1. Les prémices
I.2. Le XVIIIème siècle
I.3. Le XIXème siècle
I.4. Le XXème siècle
I.4.1. Début de siècle
I.4.2. La première Guerre Mondiale
I.4.3. L’entre-deux-guerres
I.4.4. La Seconde Guerre Mondiale
II. ELECTROTHERAPIE ET SPHERE ORO-FACIALE
II.1. Appareils utilisés
II.1.1. Appareil à haute fréquence de Gem et appareil de Fischer
II.1.2. Le Rénovateur : étude détaillée
II.2. Traitement des pathologies oro-faciales par les courants de haute fréquence
II.2.1. Carie et algie dentaire
II.2.2. Névralgie faciale
II.2.3. Traitement des dents nécrosées
II.2.4. Lésion parodontale d’origine endodontique
II.2.5. Perforation canalaire
II.2.6. Anesthésie dentaire et gingivale
II.2.7. Pyorrhée alvéolaire (ancien abcès parodontal)
II.2.8. Nécrose des maxillaires
II.2.9. Gingivite marginale
II.2.10. Eclaircissement dentaire
CONCLUSION
BIBLIOGRAPHIE

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