Traitement de lithiase vésiculaire chez le drépanocytaire

L’équilibre acido-basique péri-opératoire

In vitro, l’acidification plasmatique favorise la déformation des hématies.Cependant aucun argument clinique ne démontre le rôle d’une acidose dans le déclenchement des complications de la drépanocytose. Dans le contexte de la cholécystectomie par cœlioscopie, l’élévation de la capnie secondaire { l’insufflation de la cavité abdominale doit être rigoureusement contrôlée par une augmentation de la ventilation.
L’alcalinisation systématique semble inadaptée.

L’anesthésie

Il s’agit d’une anesthésie générale avec intubation orotrachéale. La surveillance peropératoire repose sur le monitorage habituel utilisant : cardioscope, oxymétrie de pouls, capnographe, brassard à tension automatique, sonde thermique. L’antibioprophylaxie systématique peut être débutée en préopératoire. Tous les agents d’induction peuvent être utilisés, ce d’autant qu’ils sont vasodilatateurs et peu inotropes négatifs, ceci afin d’éviter une baisse prolongée du débit sanguin périphérique. Pour les agents d’entretien, le sevoflurance est préféré { l’halothane du fait de l’absence d’hépatotoxicité et d’une meilleure tolérance hémodynamique. Le monitorage de la curarisation est fortement conseillé, ainsi que la décurarisation en fin d’intervention. L’extubation doit être réalisée chez un enfant parfaitement réveillé, normotherme, normovolémique.

Indications 

Lithiase vésiculaire non compliquée

La lithiase vésiculaire asymptomatique n’est pas habituellement une indication { l’intervention; si la découverte est fortuite par l’imagerie, aucun traitement n’est justifié[59]. Néanmoins cette recommandation ne tient pas compte de la spécificitédu terrain drépanocytaire.
En cas de lithiase vésiculaire symptomatique non compliquée, la cholécystectomie permet la disparition définitive des troubles chez 85% des patients.
Les indications de la chirurgie classique sont désormais fonction des limites de la cœlioscopie.
 Formes compliquées[59]
 La cholécystite aiguë lithiasique
Elle relève de la cholécystectomie dans les heures qui suivent le diagnostic, associée à une antibiothérapie de principe. La cholécystostomie est réservée aux patients non opérables en urgence.
 L’iléus biliaire
La chirurgie permet le traitement de l’occlusion par ablation du calcul obstructif par entérotomie qui est ensuite suturée par des points séparés ou parun surjet.
 L’angiocholiteaigüe
La sphinctérotomie endoscopique permet un drainage rapide du cholédoque et l’extraction des calculs.
 Les fistules cholécysto-digestives ou cholécysto- cholédociennes
Elles relèvent aussi de la cholécystectomie, associée à la suture du viscère fistulisé.

Résultats et pronostic 

Accidents peropératoires 

Rupture peropératoire de la vésicule biliaire

Elle survient dans 8 à 30% des cas et est favorisée par la fragilisation inflammatoire de la paroi vésiculaire. Le passage intrapéritonéal de bile et de calculs n’entraîne pas de conséquence sérieuse si le péritoine est lavéabondamment, et sitous les calculs sont retirés.

Plaie de la voie biliaire principale

Elle est favorisée par les variations anatomiques de la jonction cysticohépatique pouvant conduire à une confusion entre la voie biliaire principale et le canal cystique.La prévention de ces plaies et leur reconnaissance immédiate s’appuie sur la réalisation de principe de la cholangiographie peropératoire.La réparation extemporanée de la plaie a un pronostic favorable, mais si la voie biliaire principale est fine, le risque de sténosesecondaire est accru.

Plaies vasculaires

Elles sont le plus souvent la conséquence de la non-identification des variations anatomiques de l’artère hépatique. Sa branche droite, qui est le plus souvent intéressée, peut être lésée lors de la dissection du canal cystique ou lors de difficultés d’hémostase de l’artère cystique.
Lors de la chirurgie laparoscopique, un saignement intense gênant la vision constitue parfois une cause de conversion en laparotomie.

Plaies viscérales

Elles concernent le duodénum et le côlon droit. Elles surviennent lorsque la vésicule adhère à ces viscères, ou en cas de fistule cholécysto-digestive.
Lorsque la plaie est reconnue, elle doit être suturée extemporanément. Des plaies du grêle ont été décrites au cours de l’introduction des trocarts, en particulier lorsqu’il existedes antécédents de laparotomie.

Mortalité 

Elle est exceptionnellement en rapport avec une complication chirurgicale, elle est surtout liée aux pathologies associées.

Morbidité opératoire 

Après laparotomie, le taux global de morbidité varie de 12 % à 14,7 %.Des complications surviennent au niveau du foyer opératoire dans 5,4 % des cas ; il s’agit de fistules biliaires et d’abcès.
La prévalence des complications générales est de l’ordre de 7,7 %, il s’agit des accidents cardiaques, des pneumopathies et des infections urinaires.
Après laparoscopie, la morbidité est moins importante : 4,9 à 7,6 %.

Les fistules biliaires

Elles sont en rapport avec une plaie de la voie biliaire principale, un lâchage de la ligature du canal cystique, ou une plaie d’un canalicule biliaire du lit vésiculaire.Sa prévalence varie de 0,02 % à 0,7%[32].

Les abcès sous-phréniques

Ils sont la conséquence d’une fuite biliaire ou d’un hématome infecté du foyer opératoire.Ils peuvent être traités par drainage percutané. Des calculs oubliés dans la cavité péritonéale, après cholécystectomie laparoscopique, peuvent provoquer des abcès sous-phréniques, sous-hépatiques, intraabdominaux ou pelviens.

Les complications pariétales 

Les infections pariétales sont corrélées { la présence d’une infection biliaire. Leur prévalence après laparotomie varie de 0,1 % à 4,6 %.Depuis l’introduction de la laparoscopie, leur prévalence est comprise entre 0,5 % et 1 %. Les abcès au niveau des orifices de trocarts peuvent être la conséquence de fragments calculeux oubliés dans la paroi lors de l’extraction de la vésicule biliaire.
Les éventrations n’ont pas complètement disparu. Leur prévention repose sur la fermeture aponévrotique des orifices de trocart de diamètre supérieur ou égal à 10 mm.

Les complications générales 

Les complications pulmonaires ou cardiaques, constituent les principales causes de morbidité après cholécystectomie par laparotomie.Leur prévalence se situe entre 0,7 % et 3,4 %.Elle a diminué depuis l’apparition de la laparoscopie et ne dépasse pas 0,05 %.

Résultats à long terme 

Dix ans après la cholécystectomie, 81 à 85 % des patients sont asymptomatiques.Ces résultats sont globalement meilleurs chez les patients qui présentaient en préopératoire des signes typiques de pathologie biliaire, que chez ceux qui présentaient des signes atypiques tels que dyspepsie, pesanteurs postprandiales, douleurs abdominales non systématisées. Dix-huit pour cent des opérés se plaignent de douleurs ou d’une gêne résiduelle post-cholécystectomie, dont 4,6 % peuvent être rattachés à une pathologie de la voie biliaire principale, et 1,2 % à des séquelles pariétales en cas de laparotomie.Les 12 % restants n’ont pas d’étiologie précise.Ces troubles ont été regroupés sous le nom de syndrome post-cholécystectomie.Ainsi la diarrhée qui survient chez 9 % des opérés a été attribuée à la malabsorption des acides biliaires. Le reflux gastro-œsophagien pourrait aussi être favorisé par la cholécystectomie qui entraînerait une diminution de la compétence sphinctérienne du basœsophage et une aggravation des symptômes chez les patients déjà porteurs d’un reflux.
La survenue postopératoire d’un ictère rétentionnel doit faire évoquer un calcul résiduel ou récidivé de la voie biliaire principale, une sténose cicatricielle après plaie de la voie biliaire principale, ou la migration intracanalaire d’un clip placé { proximité de la voie biliaire principale.Le diagnostic repose sur la cholangio-IRM qui montre l’aspect de l’obstacle.
Le traitement est préférentiellement endoscopique, par désobstruction de la voie biliaire principale en cas de calculs.En cas de sténose, compte tenu du bon pronostic, la confection d’une hépatico-jéjunostomie sur anse en Y paraît préférable { la mise en place d’une endoprothèse lorsque l’état du patient le permet.

Type et cadre d’étude

Type d’étude

Ce travail est fait { partir d’une étude prospective continue menée au Service de Chirurgie Générale du CHU Aristide le Dantec de Dakar sur une période de 7ans, allant de janvier 2004 à décembre 2010.

Cadre d’étude

Le Service de Chirurgie Générale comporte 2 pavillons d’hospitalisation, d’un total de 57 lits (Assali: 31 lits, Fontan : 26 lits); 2 salles d’interventions chirurgicales programmés ; une unité de consultations externes. Il comporte en outre, une unité des urgences chirurgicales qui regroupe une salle de consultation pour les urgences en chirurgie générale, 6 lits d’observation et une salle d’intervention chirurgicale. L’unité des urgences travaille en étroite collaboration avec le Service de Réanimation.
Toutes les pathologies chirurgicales digestives, gynécologiques, endocriniennes et pariétales sont traitées au Service de Chirurgie Générale qui compte 6 chirurgiens viscéralistes dont 4 enseignants de rang magistral, des internes et étudiants du Diplôme d’Etudes Spéciales (DES) de Chirurgie Générale, un personnel paramédical, et un personnel administratif.
La laparoscopie est régulièrementmenée au Service de Chirurgie Générale du CHU Aristide le Dantec de Dakar depuis 1996 et la cholécystectomie laparoscopique y représente la première activité de chirurgie laparoscopique. Depuis quelques années, le Service de Chirurgie Générale est le lieu de prise en charge des enfants drépanocytaires présentant une lithiase vésiculaire devant bénéficier d’une cholécystectomie par voie laparoscopique.

Patients et méthodes

Cette étude porte sur les enfants drépanocytaires porteurs d’une lithiase vésiculaire régulièrement suivis { l’hôpital d’enfants Albert Royer de Dakar et dont la lithiase vésiculaire est diagnostiquée par une échographie et présumée non compliquée.

Patients

Critères d’inclusion

Nous avons retenu pour notre étude, les enfants drépanocytaire, qui présentaient une lithiase vésiculaire confirmé { l’échographie, durant la période d’étude et qui ont présenté des épisodes de crises abdominales vaso-occlusives et qui ont été opérés par voie laparoscopique.

Critères d’exclusion

Nous n’avons pas retenu dans notre étude :
– les patients présentant une cholécystite diagnostiquée en préopératoire ;
– les patients non opérés dans le service ;
– les patients drépanocytaires hétérozygotes ;
– les patients dont les dossiers sont incomplets non exploitables ;
– les patients présentant une lithiase du cholédoque associée à la lithiase vésiculaire ;
– les patients dont l’âge est supérieur { 16ans.
En définitive nous avons retenus pour ce travail 30 enfants drépanocytaires homozygotes SS qui présentaient une lithiase vésiculaire présumée asymptomatique, diagnostiquée { l’échographie { l’occasion de crises vasoocclusives abdominales.

Méthodes

Hypothèse de travail

Notre hypothèse de travail était de savoir s’il existait des signes de cholécystites frustres, masqués par les crises vaso-occlusives abdominales et non diagnostiqués { l’échographie abdominale. Pour cela, les résultats de l’examen anatomopathologique de la pièce de cholécystectomie étaient analysés.

La cholécystectomie laparoscopique

La prise en charge péri-opératoire

Tous nos patients ont bénéficié d’une exploration biologique des fonctions hépatique et rénale, d’une numération formule sanguine, d’un groupage sanguin,d’un bilan de la crase sanguine, d’une échographie abdominale, d’un test d’Emmel et d’une électrophorèse de l’hémoglobine.
Le préalable { l’intervention était d’avoir un taux d’hémoglobine supérieur ou égal à 10g/dl et un TP supérieur ou égal à 75%.

Notre technique de cholécystectomie laparoscopique

Anesthésie

Tous les patients ont bénéficié d’une consultation et d’un bilan préanesthésique. Ils étaient tous hospitalisés la veille de l’intervention. Les patients qui avaient un taux d’Hb inférieur à 10 g/dl étaient transfusés la veille et le jour de l’intervention. Chez tous les patients une anesthésie générale avec intubation orotrachéale était réalisée.
Le monitorage peropératoire a comportéau moins un enregistrement continu des paramètres suivants :
-le tracé électrocardiographique ;
-la saturation périphérique en oxygène ;
-la pression artérielle non invasive avec un brassard automatique de prise de la pression artérielle.
L’indication d’une antibioprophylaxie { base d’amoxicilline-acide clavulanique était systématique chez tous nos patients.

Le matériel

Il était composé d’une colonne de laparoscopie avec un insufflateur à régulation automatique et une vidéo à camera miniaturisée, d’un endoscope à vision directe, d’une source de lumière, d’un bistouri électrique.
Les instruments étaient composés d’un jeu de quatre trocarts et d’une instrumentation comportant, outre une petite boite de chirurgie courante, un crochet coagulateur, une pince porte-clips, deux pinces à préhension atraumatiques, une paire de ciseaux laparoscopique, un porte-aiguille, un aspirateur-laveur, et une pince d’extraction de la vésicule biliaire.

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Table des matières
Introduction
Première partie : Généralités
1. Historique
2. Rappels
2.1. Anatomie des voies biliaires extrahépatiques
2.1.1. Anatomie descriptive
2.1.1.1. Voie biliaire principale
2.1.1.2. Voie biliaire accessoire
2.1.2. Rapports
2.1.2.1. Rapports péritonéaux
2.1.2.1. Rapports avec les organes
2.1.3. Vascularisation
2.1.4. Innervation
2.2. La drépanocytose
2.2.1. Définition et historique
2.2.2. Epidémiologie
2.2.3. Génétique
2.2.4. Physiopathologie de la drépanocytose
2.2.5. Diagnostic clinique
2.2.6. Diagnostic biologique
2.2.7. Histoire naturelle de la lithiase vésiculaire chez l’enfant drépanocytaire
2.3. Diagnostic de la lithiase vésiculaire chez l’enfant drépanocytaire
2.3.1. Circonstances de découvertes
2.3.2. Examen physique
2.3.3. Examens complémentaires
2.3.4. Evolution
2.4. Traitement de lithiase vésiculaire chez le drépanocytaire
2.4.1. Buts
2.4.2. Moyens et méthodes
2.4.2.1. Moyens médicaux
2.4.2.2. Moyens chirurgicaux
2.4.2.3. La prise en charge anesthésique
2.4.3. Indications
2.4.4. Résultats et pronostic
Deuxième partie : Notre étude
1. Type et cadre d’étude
1.1. Type d’étude
1.2. Cadre d’étude
2. Patients et méthodes
2.1. Patients
2.1.1. Critères d’inclusion
2.1.2. Critères d’exclusion
2.2. Méthodes
2.2.1. Hypothèse de travail
2.2.2. La cholécystectomie laparoscopique
2.2.2.1. La prise en charge péri-opératoire
2.2.2.2. Notre technique de cholécystectomie laparoscopique
2.2.3. Recueil et analyse des donnés
3. Résultats
3.1. Aspects épidémiologiques
3.1.1. Age
3.1.2. Sexe
3.1.3. Antécédents
3.1.4. Fréquence hospitaliers
3.2. Aspects diagnostiques
3.2.1. Signes cliniques
3.2.2. Examens complémentaires
3.2.2.1. Biologie
3.2.2.2. Imagerie médicale
3.3. Aspects thérapeutiques
3.3.1. Les indications opératoires
3.3.2. L’exploration chirurgicale
3.3.3. Les types de cholécystectomies effectuées
3.3.4. Les incidents peropératoires
3.3.5. La durée d’intervention
3.3.6. La conversion en laparotomie
3.3.7. Les suites opératoires
3.3.7.1. Délai de l’alimentation orale
3.3.7.2. Suites simples
3.3.7.3. Morbidité
3.3.7.4. Mortalité
3.3.8.Durée d’hospitalisation
3.3.9. Résultats anatomopathologiques
3.3.10. Résultats { distance
Troisième partie : Discussion
1. Aspects épidémiologiques
1.1. Age
1.2. Sexe
1.3. Antécédent
1.4. Fréquence
2. Aspects diagnostiques
2.1. Clinique
2.2. Examens complémentaires
2.2.1. Les données biologiques
2.2.2. Les données de l’imagerie médicale
3. aspects thérapeutiques
3.1. La prise en charge péri-opératoire
3.2. La technique de la cholécystectomie
3.3. La conversion
3.4. La morbidité
3.5. La mortalité
3.6. Les incidents peropératoires
3.7. La durée d’hospitalisation
3.8. Les résultats anatomopathologiques
3.9. Les résultats esthétiques
Conclusion
Références
Annexes

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