Depuis la création du premier radio-goniomètre au début du vingtième siècle, les techniques de localisation de sources n’ont cessé de s’améliorer. Pendant une longue période, ces techniques sont réalisées avec une antenne simple, et utilisées uniquement pour la navigation militaire. En 1948, les réseaux d’antennes ont été, pour la première fois, utilisés à la localisation de sources en se basant sur la technique de formation de voies [40]. Cette technique est la première application des méthodes de l’analyse spectrale au domaine du traitement d’antennes. Elle est basée sur l’utilisation de la transformée de Fourier pour analyser le spectre spatial. Cette application a stimulé le développement des techniques de localisation de sources. Aujourd’hui, grâce aux avancées technologiques réalisées dans les domaines de l’électromagnétisme, de l’informatique et des composants électroniques, la localisation de sources, à l’aide d’un réseau de capteurs, est couramment utilisée au quotidien. Par exemple, les opérateurs de télécommunications mobiles américains sont capables d’assurer la localisation de tout terminal appelant les services d’urgence à partir des signaux reçus par des stations de base .
Fondamentalement, les techniques récentes de localisation de sources utilisent les signaux reçus par un réseau de capteurs pour estimer les coordonnées géographiques des sources. Les trois principales grandeurs physiques du signal reçu d’un capteur sont le retard, l’amplitude et le déphasage. Dans cette thèse, nous cherchons à exploiter les propriétés du déphasage pour la localisation de sources.
La plupart des travaux dans la littérature se basent sur l’hypothèse des sources en champ lointain. Dans ce cas, le front d’onde des signaux reçus est supposé plan. Les positions des sources sont, par conséquent, caractérisées simplement par leur direction d’arrivée. Cependant, dans de nombreuses applications comme l’océanographie (radar, sonar), la robotique, le domaine biomédical, etc., les distances sourcescapteurs ne sont pas suffisamment grandes par rapport à la longueur d’onde du signal. Dans cette condition, l’hypothèse de champ lointain n’est plus valable. La considération des ondes sphériques (hypothèse de champ proche) est nécessaire.
Traitement d’Antennes dans le Contexte de Champ Proche
Le traitement d’antennes est une technique qui exploite les propriétés des signaux reçus par un réseau de capteurs. Il peut être appliqué dans de nombreux domaines tels que le radar, le sonar, les télécommunications, etc., et utilisé pour :
– Améliorer le rapport signal sur interférences et bruit par rapport aux techniques classiques où une seule antenne est utilisée pour la réception du signal ;
– Déterminer le nombre de sources d’émission, les positions des sources, les formes d’onde, et d’autres paramètres du signal ;
– Surveiller les sources mobiles ;
– Séparer les sources se situant à des positions spatialement différentes.
– …
Champ proche
Rayonnement électromagnétique
En physique, le rayonnement électromagnétique est décrit sous la forme d’une onde électromagnétique qui correspond à la propagation d’un champ magnétique et d’un champ électrique (l’un étant perpendiculaire à l’autre) en ligne droite, et à partir d’une source constituée par un mouvement alternatif de charges électriques [37]. Ce phénomène physique peut être décrit à l’aide des équations de Maxwell. Supposons qu’une source électromagnétique harmonique existe dans un milieu homogène, linéaire et isotrope ayant une distribution de courant électrique J (r) et une distribution de charge électrique ρ (r), nous avons les équations (équations de Maxwell) suivantes :
∇ × H (r) = −jω∈E (r) + J (r) (1.1)
∇ × E (r) = jωµH (r) (1.2)
∇ · E (r) = ρ(r) / ∈(1.3)
∇ · B (r) = 0 (1.4)
avec les notations :
– E (r) : vecteur champ électrique ;
– H (r) : vecteur champ magnétique ;
– J (r) : vecteur densité de courant ;
– ρ (r) : densité volumique de charge électrique ;
Définition
Les termes champ proche et champ lointain sont souvent utilisés pour les mesures d’antennes. Les régions de champ proche et de champ lointain d’une source de rayonnement électromagnétique sont les régions autour de la source où les champs électromagnétiques sont d’intensité plus et moins importante . Balanis rapporte trois zones autour d’une source [2]. Les frontières entre ces zones sont définies selon la longueur d’onde λ, la dimension caractéristique de l’observateur D et la distance entre l’observateur et l’élément rayonnant r .
Applications
La technique du traitement d’antennes pour la localisation de sources est appliquée dans de nombreux domaines comme le radar, les télécommunications, etc. Dans la plupart de ces applications, les sources se situent loins du réseau de capteurs. Par conséquent, les techniques développées sous l’hypothèse de champ lointain sont utilisées. Cependant, dans certaines situations, il est nécessaire de prendre en compte la sphéricité du front d’onde due à la propagation en champ proche. Dans ce paragraphe, nous présentons deux domaines importants d’applications de la technique de localisation de sources, et plus particulièrement ceux pour lesquels la situation de champ proche est envisagée.
Télécommunications mobiles
Les technologies de télécommunications mobiles se sont largement développées depuis le milieu des années 1990. En 2008, le nombre mondial d’abonnés aux services de téléphonie mobile a excédé 4 milliards. Aujourd’hui, un téléphone mobile est non seulement un terminal de communications à distance, mais aussi une infrastructure de nombreux services et fonctions. Les opérateurs s’intéressent de plus en plus au développement de nouveaux services comme la géolocalisation. En France, la géolocalisation pour les téléphones mobiles est disponible depuis l’année 2003. Cette fonction permet de fournir de nouveaux services attachés comme la tarification par zone, et la recherche de services proches (hôtels, restaurants), etc.
La première approche concerne les méthodes basées sur l’estimation de la distance entre le mobile et la station de base, obtenue soit à partir des mesures de puissances, soit à partir des temps d’arrivée (TOA) des signaux reçus. Ces méthodes peuvent aussi bien être envisagées en liaison montante qu’en liaison descendante. Trois mesures impliquant des stations de base (BS) différentes sont au minimum nécessaires pour déterminer la position du mobile par la méthode de triangulation. La seconde approche concerne les méthodes basées sur l’estimation des directions d’arrivée (DOA). Chaque DOA estimée définit une demi droite, de sommet la station de base concernée, sur laquelle se trouve le mobile. Deux mesures de DOAs sont donc nécessaires pour localiser le mobile. La troisième approche concerne les méthodes dites conjointes qui utilisent simultanément l’estimation des angles et des retards. La localisation de mobile ne nécessite alors que l’écoute d’une seule BS.
Dans le cadre de cette étude, nous nous intéressons à la deuxième famille de méthodes pour les raisons de la précision et de la résolution d’estimation. Bien que l’hypothèse de champ lointain semble plus adaptée pour les télécommunications mobiles, il existe toutefois certaines situations de localisation pouvant nécessiter de considérer l’hypothèse de champ proche. Par exemple, le projet RNRT « LUTECE » s’est intéressé au développement d’un système de localisation par téléphone cellulaire dédié aux personnes prises sous une avalanche. Le but du système était de porter assistance à des skieurs, surfeurs ensevelis sous la neige grâce à une antenne héliportée. La situation de champ proche est envisagée dans le cas où l’hélicoptère est proche de la zone accidentée.
D’un point de vue général, le problème de la localisation de sources devient plus complexe dans la situation de champ proche. La sphéricité du front d’onde n’est plus négligeable, ce qui limite le développement des techniques rapides de localisation de sources. Principalement, les problématiques de la localisation de sources au domaine des télécommunications proviennent de deux aspects. Premièrement, l’application en temps réel de ces techniques nécessite une haute efficacité de calcul pour estimer les coordonnées géographiques des émetteurs. Deuxièmement, la bande du signal des télécommunications modernes a tendance à l’élargissement . Les techniques doivent donc être capables de traiter les signaux à large bande. Nous cherchons à répondre à ces deux problèmes dans cette thèse.
Radio-identification
La radio-identification, plus souvent désignée par le sigle RFID (de l’anglais Radio Frequency IDentification) est une méthode pour mémoriser et récupérer des données à distance en utilisant des marqueurs appelés radio-étiquettes. Les radio-étiquettes sont de petits objets, tels que des étiquettes auto-adhésives, qui peuvent être collées ou incorporées dans des objets et même implantées dans des organismes vivants (animaux, corps humain). Les radio-étiquettes comprennent une antenne associée à une puce électronique qui leur permet de recevoir et de répondre aux requêtes radio émises depuis l’émetteur-récepteur.
Une application de la technologie RFID est la géolocalisation. Par exemple, un système de localisation basé sur la technologie RFID est proposé dans [38]. Pour ce faire, une série de lecteurs RFID équipés de différents types d’antennes sont positionnés de façon à couvrir l’ensemble de la zone souhaitée . Lorsqu’une personne équipée d’un tag RFID actif entre dans cette zone, le système est capable d’estimer sa position.
Néanmoins, ce système présente une précision très approximative en localisation. Il est, pour l’instant, capable de déterminer uniquement la pièce ou le couloir dans lequel se trouve la personne à localiser. Principalement, les difficultés technologiques de cette application proviennent de la complexité de l’environnement réel. De plus, la fréquence utilisée nécessite d’envisager la situation de champ proche. La localisation devient alors très complexe dans ce système. Les manières pour améliorer la précision de localisation dans un contexte réel sont particulièrement intéressantes pour cette application.
Une autre problématique de la localisation de sources de RFID réside dans le fait que la plupart d’étiquettes de RFID sont passives. Par exemple, les étiquettes passives de RFID sont utilisées pour surveiller et gérer les bagages à l’aéroport de Hong Kong [15]. De ce fait, les techniques de localisation de sources doivent être aussi capables d’estimer les positions de sources passives. Ces problématiques sont également étudiées dans cette thèse.
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Table des matières
Introduction Générale
1 Traitement d’Antennes dans le Contexte de Champ Proche
1.1 Introduction
1.2 Champ proche
1.2.1 Rayonnement électromagnétique
1.2.2 Définition
1.3 Applications
1.3.1 Télécommunications mobiles
1.3.2 Radio-identification
1.4 Conclusion
2 Méthodes de Localisation de Sources
2.1 Introduction
2.2 Modèle des observations
2.2.1 Hypothèses de travail
2.2.2 Modèle général
2.2.3 Modèle de champ lointain
2.2.4 Matrice de covariance
2.3 Méthodes de champ lointain
2.3.1 Méthodes conventionnelles
2.3.1.1 Formation de voies
2.3.1.2 Améliorations de la formation de voies
2.3.2 Méthodes paramétriques
2.3.2.1 Prédiction linéaire
2.3.2.2 Maximum de vraisemblance
2.3.3 Méthodes à sous-espaces
2.3.3.1 MUSIC (MUtiple SIgnal Classification)
2.3.3.2 Root-MUSIC
2.3.3.3 ESPRIT (Estimation of Signal Parameters via Rotational Invariance Techniques)
2.3.4 Conclusion
2.4 Méthodes de champ proche
2.4.1 Extension des méthodes conventionnelles
2.4.2 Extension des méthodes du maximum de vraisemblance
2.4.3 Extension de la méthode MUSIC
2.5 Conclusion
3 Réseaux Symétriques
3.1 Introduction
3.2 Généralités
3.2.1 Modèle approché
3.2.2 Réseau de configuration symétrique
3.3 Techniques cumulant-ESPRIT
3.3.1 Définition
3.3.2 Estimation des paramètres
3.4 Techniques symétrique-ESPRIT
3.4.1 Analyse du modèle
3.4.2 Estimation des directions d’arrivée
3.4.2.1 Symétrique-ESPRIT spectrale
3.4.2.2 Symétrique-ESPRIT polynomiale
3.4.2.3 Symétrique-ESPRIT de degré réduit
3.4.3 Estimation des distances
3.4.4 Résultats de simulation
3.4.4.1 Probabilité d’échec
3.4.4.2 Précision
3.5 Conclusion
4 Technique de Focalisation
Conclusion Générale