Dans un contexte planétaire de réchauffement climatique, d’épuisement des ressources en énergies fossiles et d’augmentation globale du coût de l’énergie, le secteur du bâtiment se positionne comme un secteur clé pour répondre à nos engagements nationaux en termes de réduction de gaz à effet de serre (GES) et de consommations énergétiques. En effet, le Plan Bâtiment Grenelle prévoit respectivement 50 % de réduction d’émission des GES et au moins 38 % de diminution de la consommation énergétique d’ici 2020 dans le parc de bâtiments existants (Grenelle 1, 2009). Cela se traduit par la généralisation de la construction de bâtiments à basse consommation (BBC) depuis 2012, à énergie passive (BEPAS) à l’horizon 2020 et à énergie positive (BEPOS) à l’horizon 2050, mais aussi par un programme de rénovation thermique ambitieux. Promulguée le 12 juillet 2010, la loi Grenelle 2 (Grenelle 2, 2010) portant sur « l’engagement national pour l’environnement » marque l’entrée du processus dans la phase d’application et de territorialisation des 268 objectifs entérinés par le premier volet législatif du Grenelle Environnement.
Etat de l’art de la qualité de l’air dans l’habitat
Les effets de la pollution de l’air se manifestent à tous les niveaux : à l’échelle planétaire, avec l’effet de serre, à l’échelle locale des environnements urbains ou industriels, et à l’échelle de l’environnement de l’individu, avec la pollution de l’air intérieur. En effet, dans les pays industrialisés les individus passent en moyenne 80 % de leur temps dans des espaces clos ou semi-clos (logements, lieux de travail, écoles…). Les polluants présents dans l’air respiré peuvent avoir des effets sur le confort et la santé, d’une simple gêne (odeur, irritation des yeux et de la peau) au développement de pathologies telles que des allergies respiratoires pour les personnes sensibles (Prat, 2012).
Afin de satisfaire les exigences d’occupation, différents aspects de l’environnement intérieur des locaux sont pris en compte selon deux notions : le confort (thermique, acoustique, visuel) et la qualité de l’air (aspect sanitaire et confort olfactif). Ainsi, des centrales de traitement d’air (CTA) peuvent être mises en place dans les systèmes de ventilation pour répondre à ces exigences, qui sont différentes selon le type de local, son utilisation, son niveau de confort et ses objectifs de qualité de l’air (Bailly et al., 2001a). Dans la suite de ce chapitre, la notion de confort n’est pas étudiée. Afin d’étudier la qualité de l’air intérieur (QAI), il est important de définir les polluants présents dans l’air nécessitant d’être traités, les systèmes de ventilation possibles et les procédés de traitement pouvant être mis en œuvre. Ces trois points clés de la QAI correspondent ainsi aux trois grandes parties de cet état de l’art de la qualité de l’air dans l’habitat.
Pollution et air intérieur
Polluants de l’air intérieur
Plusieurs éléments chimiques, physiques ou biologiques sont responsables de la dégradation de la qualité de l’air intérieur et susceptibles d’engendrer des problèmes sanitaires.
Gaz Radioactif
Le principal gaz radioactif est le radon, c’est un gaz dit « noble », inodore et incolore, chimiquement inerte, provenant de la désintégration de l’uranium et du radium (Bailly et al., 2001a). L’appellation « gaz radon » se réfère à l’isotope le plus stable : le radon-222 (222Rn), dont le temps de demi-vie est de 3,826 jours (WHO, 2010).
Sources : cet élément naturel est issu du sol, des roches et de l’eau (Bailly et al., 2001a). Il est également présent dans certains matériaux de construction.
Effet du polluant : les particules alpha issues de sa désintégration sont particulièrement nocives pour les tissus vivants. Il peut être à l’origine de plusieurs maladies dont le cancer du poumon (WHO, 2010).
Gaz inorganique
Les gaz inorganiques sont des composés ne contenant pas de chaînes carbonées et sont principalement issus de minéraux. Cette catégorie comprend entre autres : le dioxyde de carbone (CO2), le monoxyde de carbone (CO), le méthane (CH4), les oxydes d’azote (NOX), les oxydes de soufre (SOX), l’ozone (O3), l’ammoniac (NH3), les hydrofluorocarbures (HFC), les perfluorocarbures (PFC) et l’hexafluorure de soufre (SF6) (CITEPA, 2013).
Sources : ils proviennent aussi bien des milieux naturels (volcans, feux de forêt, orage, certaines activités microbiennes, etc.), que des activités anthropiques (procédés de combustion, transports, agriculture, industries, etc.).
Effets des polluants : certains polluants (CO2, CH4, etc.) agissent sur le réchauffement climatique en appauvrissant la couche d’ozone et en participant à l’effet de serre. Ils peuvent aussi avoir des effets sur la santé provoquant entre autres des malaises, des asphyxies en remplaçant l’oxygène à forte concentration, certains peuvent également avoir des effets cancérigènes notamment les PFC. D’autres de ces composés sont bien connus pour leurs effets sur la santé humaine, la plupart étant irritants ou toxiques. Certains peuvent être mortels (CO, NH3, etc.) lors d’expositions prolongées. Sur l’environnement, les principaux effets sont l’eutrophisation (NH3 et NOX) et l’acidification de l’environnement (SOX, etc.). De manière plus spécifique, l’Annexe 1 : gaz inorganiques présente pour chaque polluant ses sources et ses effets.
Gaz organique
A l’inverse des composés inorganiques, les gaz organiques sont issus de matières organiques et par conséquent ils comportent la plupart du temps des chaînes carbonées. Ils peuvent être divisés en deux groupes : les composés organiques volatils (COV) et les composés organiques semi-volatils (COSV).
Les composés organiques volatils (COV)
Les COV se trouvent à l’état de vapeur dans l’atmosphère à cause de leur pression de vapeur saturante, supérieure à 10 Pa. Ils sont répartis en trois grandes familles chimiques : les aliphatiques (formaldéhyde, etc.), les aromatiques (benzène, toluène, etc.) et les halogènes (trichloroéthylène, etc.).
Sources : dans la nature ils sont principalement issus des forêts et du métabolisme des êtres vivants. Les sources anthropiques majeures de COV sont les transports (40 %) et l’industrie (20 %), qui font intervenir notamment les opérations de combustion (carburants), d’évaporation de solvants (peintures, encres, colles, etc.), et certaines réactions biologiques.
Effets des polluants : chez l’Homme, ils peuvent provoquer différents troubles soit par inhalation, notamment pour les aromatiques et les oléfines, soit par contact avec la peau par exemple pour les aldéhydes. Ils peuvent provoquer des troubles cardiaques, digestifs, rénaux et nerveux. Certains COV, comme le benzène, peuvent aussi être cancérogènes, tératogènes ou mutagènes. Dans l’environnement, ils peuvent réagir avec les oxydes d’azote, sous l’effet du rayonnement solaire, pour former de l’ozone troposphérique (pollution photochimique). Par conséquent, les COV sont aussi des gaz à effet de serre indirect (Le Cloirec, 2008) ; (CITEPA, 2013).
Les composés organiques semi-volatils (COSV)
Les COSV sont assimilés aux polluants organiques persistants (POP) qui ont pour particularité d’être peu dégradables et d’avoir un temps de vie relativement long dans l’environnement. Ils sont composés des dioxines et furanes, de l’hexachlorobenzène (HCB), des polychlorobiphényles (PCB), et des hydrocarbures aromatiques polycycliques (HAP).
Sources : les sources sont principalement anthropiques lors de combustions incomplètes et dans certaines industries, notamment dans les aciéries. Les sources naturelles sont les feux de forêt et les éruptions volcaniques.
Effets des polluants : les POP ont des effets sur l’environnement et la santé par leur caractère persistant. La plupart des COVS sont cancérigènes et/ou perturbateurs endocriniens. Le détail de ces polluants est spécifié dans l’Annexe 2: polluants organiques persistants.
Cas particulier des molécules odorantes : ces polluants font partis d’un sous-ensemble des COV et des composés inorganiques volatils. Ils peuvent être classés en trois grandes catégories : les composés soufrés (H2S, mercaptans, sulfures, etc.), les composés azotés (NH3, amines, etc.) et les composés oxygénés (acides gras volatils, esters, etc.).
Sources : dans la nature ils sont surtout issus des volcans, et de la fermentation de molécules organiques (protéines, cellulose, etc.) en anaérobiose. Ils sont également produits de manière anthropique par l’agriculture, l’industrie ou de source domestique.
Effets des polluants : en raison des faibles concentrations rencontrées, il n’y aurait pas d’effets directs des odeurs sur la santé humaine. Cependant, il convient alors de parler de nuisances olfactives dont les riverains de l’émission s’habituent difficilement, engendrant alors de nombreuses plaintes. (Le Cloirec, 2008) .
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Table des matières
Introduction générale
Chapitre 1 Etat de l’art de la qualité de l’air dans l’habitat
I. Introduction
II. Pollution et air intérieur
II.1. Polluants de l’air intérieur
II.2. Sources de pollution
II.3. Qualité de l’air intérieur (QAI)
II.4. Rôle de la ventilation
III. Le renouvellement de l’air dans les bâtiments
III.1. Systèmes de renouvellement d’air
III.2. Contrôle et réglementation de la ventilation
III.3. Critères d’évaluation de l’efficacité de ventilation
IV. Systèmes de traitement de l’air
IV.1. Notion de « traitement » de l’air
IV.2. Procédés conventionnels
IV.3. Procédés émergents
V. Conclusion
Chapitre 2 Etablissement de la méthodologie générale de l’étude
I. Introduction
II. Polluants atmosphériques cibles de l’étude
II.1. Identification des polluants et représentation au laboratoire
II.2. Niveaux de concentrations des polluants atmosphériques dans l’air urbain
III. Procédés de traitement de l’air multi-polluants étudiés
III.1. Sélection des procédés de traitement
III.2. Matériaux filtrants et adsorbants testés
III.3. Taux d’abattements « guide »
III.4. Verrous scientifiques
IV. Mise en œuvre du procédé de traitement multi-polluants dans une maison individuelle
IV.1. Système de renouvellement de l’air
IV.2. Implantation du procédé dans le système de ventilation
V. Méthodologie générale
VI. Conclusion
Chapitre 3 Caractérisation et sélection des procédés de traitement
I. Introduction
II. Développement du pilote de laboratoire
II.1. Estimation du débit nominal de traitement du pilote de laboratoire
II.2. Conception du pilote de laboratoire
II.3. Génération et mesure des polluants modèles
III. Caractérisation des matériaux
III.1. Propriétés de structure poreuse
III.2. Efficacité théorique initiale de filtration
III.3. Perméabilité à l’air
III.4. Performances de filtration
III.5. Comportement des filtres vis-à-vis des micro-organismes
III.6. Propriétés d’adsorption
IV. Sélection de la combinaison de traitement optimale
IV.1. Définition des critères de comparaison
IV.2. Méthode de comparaison quantitative pour le choix de la combinaison de traitement la plus favorable
V. Conclusion
Chapitre 4 Performances de traitement multi-polluants du procédé combiné en conditions contrôlées
I. Introduction
II. Optimisation des conditions opératoires du traitement thermique
II.1. Etude de la désorption du toluène
II.2. Effet du traitement thermique sur la population de P. chrysogenum
III. Matériel et méthode
III.1. Prototype de filtre F7-combiné plissé
III.2. Conditions de génération et de mesure des polluants
III.3. Planning expérimental
IV. Essais multi-polluants en conditions contrôlées
IV.1. Evolution des conditions de température et d’humidité de l’air
IV.2. Performance de filtration en conditions contrôlées d’un filtre F7-combiné plissé
IV.3. Performances d’adsorption du filtre F7-combiné
IV.4. Survie fongique
V. Conclusion
Conclusion générale