Le terme « lithiase urinaire » désigne l’affection caractérisée par la formation de calculs dans les reins ou dans les voies urinaires. C’est une affection fréquente puisqu’elle touche 5 à 10 % de la population dans les pays industrialisés. De plus, elle peut récidiver dans 50% des cas en 5 ans, en l’absence de traitement préventif. La localisation urétérale représente 7,1 à 10,8% de toutes les lithiases urinaires,avec un taux de récidive de 25,8 % [41,57]. Les caractéristiques épidémiologiques de la lithiase urinaire ont beaucoup évolué ces dernières années. Ceci constitue la conséquence logique aux modifications des habitudes nutritionnelles, des conditions sanitaires, des facteurs environnementaux ou de la prévalence des affections qui prédisposent au risque de la lithiase (obésité, diabète, syndrome métabolique) [19]. L’expression clinique de la lithiase urétérale est variable. Elle peut être frustre ou symptomatique, donnant un tableau typique de crises aiguës de colique néphrétique. L’imagerie est d’un grand apport dans la démarche diagnostique et les modalités de la prise en charge thérapeutique. Cette localisation est caractérisée par une grande mobilité du calcul qui a tendance à progresser vers la vessie, mais surtout par son effet potentiellement délétère sur la fonction rénale.
Parallèlement aux variations épidémiologiques et cliniques, les techniques chirurgicales du traitement de la lithiase urinaire ont évolué au cours des 30 dernières années. La chirurgie ouverte classique a laissé la place aux techniquesmini invasives, notamment l’endo-urologie et la lithotripsie extra corporelle (LEC). Le profil génétique et les habitudes de vie des populations occidentales diffèrent de ceux des populations de notre pays, le Sénégal, et de la sous-région ouest africaine. Par ailleurs, les techniques chirurgicales qui ont révolutionné le traitement de la lithiase urinaire ne sont pas toujours disponibles dans nos structures sanitaires. Par ailleurs, peu d’études ont été faites sur la lithiase urinaire dans notre pays.
EPIDEMIOLOGIE
Evolution historique et géographique
La maladie lithiasique, dite «maladie de pierre», vient du mot grec «lithos» qui signifie pierre ; le mot calcul quant à lui vient du latin «calculus» quireprésentait de petits cailloux utilisés comme monnaie d’échange lors de transactions marchandes [6,61,63,76]. Il s’agit d’une affection ancienne puisque le premier calcul connu remonte auxenvirons de 4800 ans avant Jésus-Christ et a été découvert dans les restes d’une momie en haute Egypte [12].Autrefois, jusqu’au XIXe siècle, la lithiase urinaire était urique et phosphatique,de siège vésical touchant dans 95% des cas l’enfant de sexe masculin [4]. C’est une pathologie qui a évolué avec l’industrialisation de l’Europe et l’amélioration des conditions hygiéno-diététiques.Depuis 30 ans, il existe une augmentation constante de la maladielithiasique oxalo-calcique dans les paysindustrialisés ; elle est préférentiellement de siège rénal et urétéral, à l’origine d’épisodes de colique néphrétique [4].
Considérations épidémiologiques
L’épidémiologie des lithiases reflète le niveau socio-économique et le degré de médicalisation des populations. Les caractéristiques épidémiologiques de la lithiase urinaire sont en perpétuelle évolution et traduisent les modifications des habitudes nutritionnelles, des conditions sanitaires, des facteurs d’environnement ou de la prévalence despathologies qui prédisposent au risque de lithiase. Cependant, si l’on considère que les populations des différents pays du monde évoluent globalement vers une amélioration de leurs conditions de vie et du niveau de médicalisation, on peut considérer que les modifications de la maladie lithiasique sont comparables dans tous les pays du monde, avec un rythme propre à chaque pays ou chaque groupe de population considéré. De ce fait, la comparaison des données disponibles dans différents paysconfirme cette similitude d’évolution. Concrètement, les modifications les plus évidentes de la pathologie lithiasique à l’échelle mondiale portent sur trois points :
– Le premier est l’âge des sujets affectés par la lithiase : au sein des populations dont le niveau socio-économique est faible, la lithiase touche essentiellement les enfants, avec un rapport garçons/filles élevé, couramment supérieur à dix et pouvant même dépasser 20 dans certains cas. À l’inverse, dans les pays industrialisés, la lithiase urinaire affecte aujourd’hui essentiellement les adultes, de la 3ème à la 7ème décennie ; le rapport hommes/femmes (H/F) est généralement compris entre 1,5 et 2,5 et se situerait même au-dessous de 1,5 aujourd’hui, du moins aux États-Unis, comme le suggèrent certaines études récentes [71].
– Le second point important est la localisation anatomique initiale des calculs, qui est plutôt vésicale au sein des populations de faible niveau et principalement rénale dans les populations de niveau socio-économique moyen ou élevé.
– Enfin, la nature des calculs est différente, essentiellement phosphatique ou urique (et uratique) dans les populations à faible revenu, et en revanche largement dominée par l’oxalate de calcium dans les pays industrialisés et les populations de niveau de vie élevé [19].
L’analyse biochimique des primo-calculs au cours des deux dernières décennies est résumée dans le tableau I et montre que [17] :
– la répartition des constituants lithiasiques diffère chez l’homme et la femme ;
– les calculs de weddelite tendent à régresser chez l’homme ;
– parmi les calculs phosphocalciques, la brushite a considérablement progressé chez la femme ;
– les calculs majoritaires en struvite, marqueurs d’infection à germes uréasiques (Klebsiella, Serratia, Proteus etc.) ont significativement diminué chez la femme ;
– les calculs liés à la cristallisation des médicaments ont considérablementrégressé chez l’homme.
Fréquence
La fréquence des lithiases urinaires est très variable selon les pays, la catégorie sociale de la population étudiée et le site de l’étude [27]. L’incidence est estimée à 1% dans une population de plus de 20 ans. Cinq pour cent de la population est atteinte au moins une fois dans sa vie de lithiase urinaire. La prévalence de la lithiase est en hausse dans tous les pays industrialisés. Dans 80% des cas, il existait une élimination spontanée du calcul [19]. Le risque de récidive est important, estimé à 20% dans les 4 ans et à 90% dans les 20 ans.
Facteurs Favorisants
Facteurs intrinsèques
– Sexe : elle touche environ deux hommes pour une femme.
– Age : la maladie lithiasique est une affection du sujet jeune et se déclare entre 20 à 50 ans. Le pic de fréquence des premières manifestations lithiasiques se situe dans la troisième décennie chez la femme et la quatrième chez l’homme. Au-delà de 60 ans, elle correspond généralement à desrécidives. Il existe des étiologies particulières chez l’enfant, notamment malformatives [27].
– Facteurs héréditaires et familiaux : certaines lithiases métaboliques ont une transmission génétique. Il existe des formes familiales d’hypercalciurie idiopathique. Il semble qu’un facteur familial intervienne dans la lithiase calcique, mais il est difficile de faire la distinction entre l’origine génétique et les habitudes alimentaires ou l’environnement.
– Facteurs ethniques : chez les sujets soumis à une alimentation européenne ; l’incidence lithiasique augmente, et ceci tend à prouver qu’il s’agit plus d’un facteur environnemental et alimentaire, que d’un facteur génétique.
Facteurs extrinsèques
– Les facteurs saisonniers : la déshydratation joue un rôle important dans la précipitation des cristaux. Pour les populations des pays tempérés, l’incidence va augmenter lors des saisons chaudes ou à l’occasion de voyages dans les pays chauds.
– Les facteurs socio – professionnels : les cuisiniers marins et fondeurs qui sont soumis à des phénomènes de déshydratations ainsi que les professions citadines stressantes avec un dérèglement alimentaire et une insuffisance d’apport en boisson, constituent les populations les plus sensibles.
Facteurs nutritionnels
Toutes les études prouvent que l’incidence de la lithiase est liée au régime alimentaire avec des différences liées au type de lithiase. La fréquence des lithiases se réduit en cas de régime pauvre en protéines et chez les personnes végétariennes. Au contraire, elle a augmenté fortement dans les pays industrialisés, ẚ forte consommation de protéines animales, de purines, de graisses, de sucre et de sel.
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Table des matières
INTRODUCTION
1. EPIDEMIOLOGIE
1.1. Evolution historique et géographique
1.2. Considérations épidémiologiques
1.3. Fréquence
1.4. Facteurs Favorisants
1.4.1. Facteurs intrinsèques
1.4.2. Facteurs extrinsèques
1.4.3. Facteurs nutritionnels
2. RAPPELS ANATOMIQUES
2.1. Présentation de la Voie Excrétrice Supérieure Intrarénale (VESI)
2.1.1. Morphologie externe de la VESI
2.1.2. Morphologie interne
2.1.3. Vascularisation et l’innervation de la VES
2.1.4. Rapports
2.2. Voie excrétrice supérieure extrarénale : uretères
2.2.1. Morphologie externe
2.2.2. Morphologie interne
2.2.3. Rapports
2.2.3.1. Uretères lombaires
2.2.3.2. Uretères iliaques
2.2.3.3. Uretères pelviens
2.2.3.4. Uretères intravésicaux
2.3. Vascularisation et innervation
2.3.1. La vascularisation artérielle
2.3.2. La vascularisation veineuse
2.3.3. La vascularisation lymphatique
2.3.4. L’innervation
3. LA LITHOGENESE
3.1. Étapes de la lithogénèse
3.1.1. La sursaturation urinaire
3.1.2. La germination cristalline
3.1.3. La croissance cristalline
3.1.4. L’agrégation des cristaux
3.1.5. L’agglomération cristalline
3.1.6. Rétention des particules cristallines
3.1.7. Croissance et évolution du calcul
3.2. Facteurs de régulations
3.2.1. Promoteurs de la lithogenèse
3.2.2. Inhibiteurs de la lithogenèse
3.3. Facteurs de risque de la lithogenèse
3.3.1. Le rôle du pH urinaire
3.3.1.1. Rôle de l’acidité
3.3.1.2. Rôle de l’alcalinité
3.3.2. Anomalies morpho-anatomiques des voies urinaires
3.3.3. Facteurs nutritionnels
3.3.4. Le syndrome métabolique et lithiase urinaire
3.3.5. Maladies génétiques et lithiase urinaire
3.4. Composition des calculs
3.4.1. Les calculs minéraux
3.4.2. Les calculs organiques
3.4.3. Les calculs d’origine médicamenteuse
4. DIAGNOSTIC DES LITHIASES URETERALES
4.1. Diagnostic positif
4.1.1. Circonstances de découverte
4.1.1.1. La Douleur
4.1.1.2. L’hématurie
4.1.1.3. Lithiases révélées par une complication
4.1.2. L’interrogatoire
4.1.3. Examen physique
4.1.4. Les examens complémentaires
4.1.4.1. La biologie
4.1.4.2. L’imagerie
4.2. Le Diagnostic différentiel
4.2.1. Devant la Colique Néphrétique (CN)
4.2.2. Devant les autres causes d’obstructions urétérales
4.2.3. Devant une lacune radio transparente de la voie excrétrice
4.3. Diagnostic Etiologique
4.3.1. Enquête clinique et radiologique
4.3.2. Enquête biologique et analyse morpho-constitutionnelle
5. TRAITEMENT
5.1. Buts
5.2. Moyens
5.2.1. Mesures hygiéno-diététiques
5.2.2. Traitement médical
5.2.3. Traitement physique et endoscopique
5.2.4. Traitement chirurgical
5.3. Indications
5.4. Résultats et Surveillance post-thérapeutique
CONCLUSION