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Traitements antirétroviraux et maladies cardio-vasculaires
Bien que l’usage des premiers antirétroviraux (analogues nucléosidiques) a commencé dès la fin des années 1980, ce n’est que dix ans plus tard que leur association à deux nouvelles classes thérapeutiques, les anti-protéases et les analogues non-nucléosidiques, a permis d’obtenir un résultat spectaculaire modifiant le pronostic de l’infection par le VIH (3, 23). Les bénéfices immuno-virologiques se sont traduits par une diminution de l’incidence des syndromes d’immunodéficience humaine acquis (SIDA), et donc de la mortalité liée à l’infection par le VIH. Dès lors, la question de la tolérance à moyen et long termes des traitement antirétroviraux a revêtue toute son importance. Dans les années qui suivirent, les premiers cas de maladie cardiovasculaire survenant chez des personnes jeunes et à faible risque cardiovasculaire ont été rapportés (24-28). Une association entre le traitement par antiprotéase et les troubles métaboliques a été décrite (29-31). De plus, certaines études observationnelles ont tenté de décrire un lien entre la trithérapie et la maladie cardiovasculaire (32-35), alors que d’autres n’ont pas montré cette association (36, 37).
Les conséquences pratiques de ces observations restaient à préciser. En effet, bien que ces études aient souligné l’existence d’un lien entre les traitements antirétroviraux et des anomalies métaboliques, il ne s’agissait pas d’événements cliniques. Nous ne détaillerons pas les mécanismes sous tendant la relations entre traitement ARV et maladies cardiovasculaires, et nous renvoyons le lecteur à d’autres travaux (38, 39) pour faire la synthèse de la littérature concernant cette relation elle-même.
Parmi les premières études concernant le lien entre maladies cardiovasculaires et traitements antirétroviraux, quatre suggèrent l’existence d’un lien significatif (32- 35) et deux n’ont pas permis de retrouver cette association (36, 37). Les méthodologies utilisées dans ces études doivent être prises en compte dans l’interprétation des résultats. Des quatre études rapportant une association, trois étaient des études de cohortes utilisant comme critère de jugement, la survenue d’infarctus du myocarde (32-34). La dernière étude a utilisé un critère de jugement composite regroupant plusieurs maladies cardiovasculaires (35). Les deux études qui n’ont pas révélé d’association (36, 37) ont utilisé également un critère de jugement composite associant infarctus du myocarde et accident vasculaire cérébral à partir de données administratives issues des diagnostics d’hospitalisation. Certaines de ces études étaient basées sur un faible nombre d’évènements et/ou ne permettaient pas d’ajuster sur les facteurs de risque classiques cardiovasculaires.
Dans deux études (35, 36), le groupe témoin était constitué d’individus séronégatifs pour le VIH et rapportaient un effet significatif des traitements sur les taux d’incidence de maladies cardiovasculaires. Il est possible que l’infection par le VIH en elle même modifie le risque cardiovasculaire. En effet, des études antérieures aux trithérapies ont décrit une association entre certains troubles métaboliques (baisse du HDL cholestérol (40), hypertriglycéridémie (40-42)) et un stade avancé de l’infection par le VIH. Récemment, les investigateurs de l’étude SMART ont rapporté un risque cardiovasculaire plus élevé chez les sujets qui interrompaient leur traitement antirétroviral, par comparaison avec des sujets poursuivant les traitement (21), suggérant le rôle propre de la réplication virale du VIH dans la genèse de la maladie athéromateuse, probablement par le biais de mécanismes inflammatoires encore peu étudiés et loin d‘être élucidés.
Dans une étude portant exclusivement sur des femmes, traditionnellement protégées à âge égal, du risque cardiovasculaire comparées aux hommes (43), l’incidence des maladies cardiovasculaires était plus élevée dans le groupe de femmes séropositives pour le VIH en comparaison avec le groupe de femmes séronégatives pour le VIH. Les femmes séropositives pour le VIH avaient également une graisse périviscérale abdominale plus importante et un rapport taille/hanche plus élevé. En ajustant pour ces différences, la relation entre le statut VIH et le risque cardiovasculaire était affaibli, ce qui suggère que les modifications physiques, plus que le virus lui-même, pourraient être responsables du sur-risque cardiovasculaire. Dans une autre étude, les dyslipidémies liées aux antiprotéases pourraient, d’après les auteurs, être plus liées à un régime inapproprié qu’aux molécules elles-même (44). Ces données viennent brouiller les pistes liant les traitements antirétroviraux aux complications cardiovasculaires.
Impact spécifique des antiprotéases
Bien que la plupart des AP ont été associées à différents degrés au risque de dyslipidémie (54, 55), c’est le ritonavir qui est le plus souvent impliqué (31, 45, 56, 57) . Dans l’étude DAD (48), le ritonavir était associé à une élévation des triglycérides, du cholestérol total et du rapport triglycérides / HDL cholestérol plus importante que l’indinavir, utilisé à l’époque sans ritonavir. Cette relation est également retrouvée avec de plus faibles doses de ritonavir, utilisé désormais en « boost » d’autres antiprotéases (58). La prise de ritonavir a également été associé à des niveaux plus élevés de LDL cholestérol.
Plus récemment, plusieurs auteurs se sont intéressés à l’impact de nouvelles antirotéases, qui sont toutes associées au ritonavir : le lopinavir, le fosamprénavir et l’atazanavir. Dans une étude (42), après quatre semaines de traitement par lopinavir, le taux de triglycérides augmente chez des personnes séronégatives pour le VIH, sans modification du LDL cholestérol (59),39). Chez des sujets séropositifs pour le VIH, le traitement par le lopinavir a été associé à une élévation du cholestérol total, des triglycérides (60-62) et du HDL cholestérol (63), avec pour conséquence, une élévation du taux de triglycérides sur HDL cholestérol (64). De plus, plusieurs études ont montré une corrélation entre le niveau de base des valeurs lipidiques et leurs augmentations secondaires à la mise en route du traitement par le lopinavir associé au ritonavir (61, 63, 65). Ce résultat suggére que ce traitement reste bien toléré sur le plan métabolique lipidique chez les personnes à faible risque avant traitement. Les modifications liées au fosamprenavir associé au ritonavir étaient les mêmes que celles liées au lopinavir associé au ritonavir dans l’étude KLEAN (66). L’atazanavir a souvent été considéré comme une molécule à part, induisant un meilleur profil lipidique (57, 67-71) et une étude de remplacement d’une antiprotéase par l’atazanavir a rapporté des résultats favorables (72), même si, dans cette dernière étude, il n’y avait aucun impact sur le LDL cholestérol.
Impact spécifique des analogues non-nucléosiques
En comparaison à la classe des antiprotéases, il existe peu d’études comparant les différentes molécules de cette classe. Dans la plus importante de ces études les effets de la névirapine sont comparés à ceux de l’efavirenz chez le sujet séropositif pour le VIH n’ayant jamais reçu de traitement antirétroviral. Les personnes recevant la névirapine ont présenté une élévation plus importante du HDL cholestérol et une diminution plus importante du cholestérol total, le tout résultant d’une baisse du rapport triglycérides sur HDL cholestérol alors que ce taux augmentait sous l’efavirenz (73). Les valeurs après le suivi initial du cholestérol total, du LDL cholestérol et des triglycérides continuaient d’augmenter parmi les sujets restés dans le bras randomisé avec un suivi plus long, mais le HDL cholestérol diminuait modérément. Néanmoins, les différences entre les groupes persistaient (74). Dans la cohorte Suisse, les taux de triglycérides augmentaient chez les sujets traités par efavirenz et diminuaient chez les patients traités par névirapine (45). L’étude DAD retrouvait les même tendances concernant les triglycérides et l’efavirenz (48).
Rôle possible des analogues nucléosidiques
Dès le début des années 1990, une étude a montré que l’AZT pouvait modifier les paramètres lipidiques (75) en diminuant les taux de triglycérides. Avec le développement des trithérapies hautement actives (HAART), en particulier les antiprotéases, les désordres métaboliques engendrés par les analogues nucléosidiques ont été moins étudiés, voire largement ignorés. Les taux de triglycérides étaient diminués chez les personnes recevant de l’abacavir dans la cohorte Suisse alors qu’une autre étude montrait l’opposé. L’utilisation de la stavudine était liée à une augmentation du cholestérol total, du LDL cholestérol et des triglycérides (42, 76). La lamivudine et le didanoside étaient associés à des taux plus élevés de HDL cholestérol. Le nouvel analogue nucléotidique, le ténofovir semble induire des modifications lipidiques de moindre amplitude (42, 76).
Autres marqueurs du risque cardio-vasculaire
Plusieurs études ont porté sur d’autres marqueurs de maladies cardio-vasculaire, comme, par exemple, des scores d’atteintes coronariennes, la protéine C-réactive, les apolipoprotéines CIII, l’adiponectine ainsi que des marqueurs du métabolisme lipidique de plus petites tailles (49, 50, 77-81). Les combinaisons de trithétrapie étaient associées à une augmentation de tous ces marqueurs dans la plupart des études. Trois études transversales (78, 82, 83) et une étude longitudinale mesurant l’épaisseur de la paroi carotidienne intima-média (84) n’ont pas montré d’association avec l’utilisation des antiprotéases. Dans ces études, en revanche, les facteurs de risque cardiovasculaires habituels étaient fortement corrélés à l’atteinte vasculaire, alors que les facteurs inhérents à l’infection par le VIH et à son traitement n’étaient que faiblement associés. Deux études antérieures avaient pourtant retrouvé avec une fréquence anormalement élevée un épaississent de la paroi carotidienne intima-média chez des patients traités par antiprotéase comparé à des sujets contrôles séronégatifs pour le VIH (85, 86). Une limite importante était l’absence de validation de ces mesures chez les sujets infectés par le VIH. Par conséquent, la signification de ces résultats discordants est difficile à préciser. De plus, la taille des effectifs ne permet pas d’analyse par molécule alors que le risque pourrait être différent entre les molécules d’une même classe.
Trithérapies et infarctus du myocarde
A partir des données de la plus grande cohorte spécifiquement mise en place pour évaluer le risque cardiovasculaire lié aux traitements antirétroviraux (l’étude DAD), les auteurs ont observé que les taux d’évènements cliniques étaient plus élevés parmi les sujets recevant des traitements antirétroviraux et que cette augmentation s’amplifiait avec la durée d’exposition (87). En 2007, les auteurs ont mis à jour leurs données et ont observé une forte association entre la durée d’exposition aux antiprotéases et l’incidence des infarctus du myocarde. En revanche, aucune association n’avait pu être mise en évidence pour la classe des analogues non-nucléosidiques. Ces résultats suggèrent que les améliorations des troubles lipidiques peuvent se traduire par une diminution des évènements cliniques, également parmi les sujets atteints par le VIH. Des résultats similaires ont été retrouvés dans la cohorte Athena (88).
Cohorte OBSVIH
La cohorte OBSVIH correspond au suivi prospectif des personnes incluses dans le travail transversal de DEA portant sur les facteurs de risque de mauvaise observance au traitement antirétroviral et réalisé en 1999-2000 dans deux hôpitaux universitaires Français (CHU Caen Côte de Nacre et CHU Bichat). Pour plus de détails, veuillez vous référer à l’annexe 1 (Exemplaire de DEA).
Protocole SIROCCO
Le synopsis du protocole de l’essai SIROCCO (Switch of NNRTI to Reduce the Occurrence of Cardiovascular Complications) est fourni en annexe 2.
Protocole POSOVIR
Le synopsis du protocole de l’essai POSOVIR (POSOlogie de la VIRamune) est fourni en annexe 3.
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Table des matières
INTRODUCTION
1. REVUE DE LA LITTERATURE
1.1.1 L’IMPORTANCE DE L’OBSERVANCE
1.1.2 TRAITEMENT ANTI-RETROVIRAUX ET RISQUE CARDIO-VASCULAIRE
2. METHODOLOGIE ET MISE EN PLACE
2.1 COHORTE OBSVIH (ANNEXE 1)
2.2 PROTOCOLE SIROCCO (ANNEXE 2)
2.3 PROTOCOLE POSOVIR (ANNEXE 3)
3. RESULTATS
3.1 OBSERVANCE ET RESISTANCE AUX ANALOGUES NONNUCLEOSIDIQUES
3.2 DYSLIPIDEMIE ET ANALOGUES NON-NUCLEOSIDIQUES
3.3 EFFET DE LA PRISE UNIQUE SUR L’OBSERVANCE A LA NEVIRAPINE
3.4 QUALITE METHODOLOGIQUE DES ESSAIS DE NON-INFERIORITE
CONCLUSION
REFERENCES
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