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Types de polluant et conditions de formation
L’ensemble des polluants de la circulation automobile peut être retrouvé à l’intérieur des véhicules, des bus et des autobus. Les moteurs rejettent dans le trafic des oxydes de carbone (COx), du dioxyde de soufre (SO2), des particules fines, des hydrocarbures (Borie AL, 2006). En effet selon les conditions d’utilisation, le moteur peut rejeter dans le trafic quatre types de polluants majoritaires :
Le monoxyde de carbone (CO) : gaz incolore, inodore mais toxique. Il se forme par combustion incomplète par exemple lorsque le mélange est temporairement trop riche ou à cause d’un filtre à air encrassé, d’un défaut de tarage des injecteurs, d’une surconsommation d’huile, sous une forte accélération ou lorsque la voiture roule en altitude.
Les oxydes d’azote (NOx) : ils se forment lors du processus de combustion, au moment où le carburant brûle à des températures élevées. Parmi eux on retrouve l’oxyde d’azote (NO) et le dioxyde d’azote (NO2). Le NO2 est un gaz de couleur rouge, suffocant et toxique qui apparait lorsque le mélange est temporairement trop pauvre, par réaction de l’oxygène et de l’azote de l’air. Ses propriétés chimiques en font un précurseur de l’ozone, un autre gaz toxique.
Les hydrocarbures carbonés : ils résultent de la combustion incomplète du carburant et de l’évaporation. Ils peuvent se combiner avec les oxydes d’azote sous l’action de la chaleur et des rayons solaires pour former l’ozone. Ce sont généralement des ‘‘grumeaux’’ microscopiques qui se forment lorsque le carburant est mélangé à l’air. Ces particules sont stoppées par le filtre à particules, si le véhicule en est muni. De nouveaux additifs incorporés aux carburants permettent de réduire ou de supprimer ce phénomène avec, comme corollaire, une baisse de la consommation.
Les particules en suspension (PM) : ce sont des particules solides ou liquides présentes dans l’air. Certaines sont suffisamment grandes et sombres et peuvent être perçues comme de la suie ou de la fumée, tandis que d’autres sont fines, minuscules et ne sont généralement pas visibles à l’oeil nu. Les émissions véhiculaires sont principalement composées de particules grossières (PM10), fines (PM 2,5) et ultra-fines (PM de l’ordre de 0,1 μm ou moins). La plupart de ces particules proviennent du frottement et de l’usure de certaines pièces du moteur qui, au cours de sa vie, peut perdre ainsi plusieurs dizaines de grammes d’alliages divers (cylindres, segments, paliers, coussinets, soupapes, cames, portées d’arbre à cames, etc.). Elles sont normalement entraînées par l’huile de graissage et recueillies dans le filtre à huile, mais une partie est évacuée directement par les gaz d’échappement, en particulier si l’étanchéité du moteur est défectueuse. Incolores et inodores, extrêmement fines et difficiles à détecter, ces micro-particules passent au travers du filtre à particules et restent en suspension dans l’air. Elles finissent au plus profond de nos poumons et sont soupçonnées d’être cancérigènes.
Outres ces polluants nous pouvons aussi rencontrer les oxydes de soufre (SOx) produits par l’oxydation du souffre ; l’ozone qui se forme lorsque les oxydes d’azote et les hydrocarbures réagissent à la chaleur et à la lumière solaire. D’autres sources de pollution comme les embrayages, les freins et l’usure des pneus sont aussi génératrices de polluants durant la vie du véhicule. (ADILCA, 2017).
Sources de pollution dans les habitacles
Sources internes
Il s’agit principalement de polluants provenant des matériaux de construction du véhicule et aussi des sources exogènes liées aux habitudes de l’utilisateur. En effet, le véhicule lui-même est source de polluant à travers les matériaux le composant. Pang et Mu (2007) ont attribué les concentrations de formaldéhyde trouvées dans un autobus récent aux émissions de ses matériaux de fabrication.
D’autres sources comportementales peuvent être mises en évidence comme l’ont montré les travaux de Lamorena et Lee (2008) qui ont évoqué l’influence de l’utilisation de désodorisant pour voiture sur la concentration en formaldéhyde dans les véhicules. En effet les réactions entre les COV biogéniques comme les monoterpènes émis par les déodorants et l’ozone, entraînent la génération de fines particules et de composés organiques dont le formaldéhyde. Cette influence des déodorants et des produits d’entretien du véhicule a été également mise en évidence dans les études de Fedoruk et Kerger (2003) comme étant une source prédominante des COV recensés dans un véhicule.
Sources externes
L’air à l’intérieur des automobiles est constamment influencé par les conditions météorologiques environnantes. Des études ont montré une relation linéaire entre le renouvellement de l’air intérieur, l’ouverture ou la fermeture des vitres, la vitesse de circulation et la ventilation (Ott et al. 2007 ; Fruin et al. 2011). En effet plus la vitesse du véhicule est élevée, plus l’air intérieur est continuellement renouvelé; plus les vitres sont ouvertes plus on aura un échange important entre l’intérieur et l’extérieur du véhicule et ces échangent d’air vont influencer les niveaux de concentration des polluants dans l’habitacle. Ainsi dans les études de Mexico City conduites par Shiolara et al. (2005) les microbus dont les fenêtres sont toujours ouvertes, montrent des concentrations de polluant bien plus élevées que les bus et voitures dont les fenêtres sont généralement fermées.
Par ailleurs, les échanges d’air entre l’habitacle et le milieu extérieur du véhicule peuvent également se produire lors de l’ouverture et la fermeture des portières, lors de la ventilation (air conditionné) ou encore de manière diffuse (Ott et al., 2008).
Ces échanges d’air peuvent avoir deux principales conséquences :
L’intrusion de polluants atmosphériques dans l’habitacle de l’autobus : La météorologie locale et la photochimie, qui modifiant les concentrations atmosphériques de certains polluants ont été souvent les raisons évoquées par certains auteurs pour justifier les concentrations de certains polluants mesurés dans l’habitacle des bus et autobus (Hanoune, 2008).
L’influence des dégagements des véhicules environnants : Elle dépend en partie de la distance séparant les deux véhicules, du type de carburant utilisé par le véhicule suivi.
En outre les travaux de Sabin et al. (2005) ont révélé la possibilité d’une auto-pollution des véhicules. En effet les gaz d’échappement des bus et microbus peuvent directement être réinjectés à l’intérieur en augmentant ainsi les concentrations de polluant. Même si les mécanismes de cette auto-pollution font encore objet de discussion dans la littérature, le sens et la force du vent pourraient avoir une part indéniable dans ce phénomène. A ceci il faut ajouter la remise en suspension de poussière par les autres véhicules du voisinage (surtout ceux situés devant) qui peuvent entrer dans le bus et influencer les niveaux de polluants existants (Amato et al., 2011a ; Pant et Harrison, 2013 ; Denier van der Gon et al., 2013 ).
Trafic routier et aspect du parc automobile à Dakar
Infrastructures routières
Depuis quelques années le Sénégal s’est engagé dans un processus de modernisation de son réseau routier. Depuis 2002, les enquêtes ont montré :
Une croissance du trafic soutenue, de l’ordre de 6% par an ou plus,
Une forte concentration géographique du trafic sur une surface réduite dans les régions de Dakar et Thiès,
La prépondérance des modes de transport en commun dans le trafic passager,
La domination écrasante de la route dans les transports intérieurs (plus de 95% pour le fret, plus de 99% pour le transport de passager) (Fabrice Bertholet et al., 2004).
Grâce aux différents plans de développement mis en place depuis quelques années, le réseau routier s’est considérablement amélioré assurant la fluidité des transports des personnes et des biens et favorisant les échanges. Dans la région de Dakar, plusieurs nouveaux axes routiers ont été construits ou améliorés.
Analyse du parc automobile
A l’amélioration du réseau routier suit une augmentation du parc automobile même si la tendance n’est pas trop au renouvellement du parc malgré les efforts effectués ; d’autres facteurs sont à considérer comme l’augmentation de l’âge des véhicules importés qui est passé de 5 ans à 8 ans. Cette augmentation à provoquer une flambée des véhicules importés et du nombre de véhicules circulant depuis les années 2012. Selon les enquêtes le parc automobile immatriculé du Sénégal est estimé à 401 000 véhicules, toutes séries confondues : séries normales, séries de l’administration, séries des transits temporaires, du corps diplomatique, de l’armée, etc. 72,76 % de ce parc national (soit 292 428 véhicules), circule dans la capitale Dakar (AllAfrica, 2015).
Cependant la vétusté du parc automobile pose un énorme problème à la fois sanitaire, environnemental et sécuritaire. Équipé de vieux moteurs rejetant des gaz toxiques et plein de polluants, ces véhicules déversent dans la nature des milliers de mètre cube de déchets par jour, ayant des effets délétères sur la santé humaine, l’environnement et aussi source de nombreux accidents qu’on leur impute. D’après la Direction des transports terrestres, les voitures de 16 ans et plus représentent 56,5% du parc automobile tandis que les véhicules de 11 à 15 ans constituent quant à eux 10,2% et ceux qui ont entre 6 et 10 ans sont de 18,9%. Les voitures « neuves », c’est-à-dire celles qui ont été mises en circulation durant les 5 dernières années, quant à elles, ne correspondent qu’à 14,4% du total du parc (Dakar7 l’info 7/7, 2016).
La répartition par type de véhicule se présente comme suit :
Véhicules Particuliers 38%
Taxi interurbain 17%
Camionnette/passagers 10%
Camionnette/marchandises 8%
Car et autocar 10%
Camion 2 essieux 6%
Camion 2 essieux 4%
Ensemble articulé 6% (Fabrice Bertholet et al., 2004).
En 2015, on compte à Dakar, une voiture particulière pour 40 habitants. Pour les véhicules motorisés on disposait de :
256 véhicules pour 1000 ménages
40 véhicules pour 1000 habitants (20 en 2000)
Et pour les voitures particulières on avait :
169 véhicules pour 1000 ménages
25 véhicules pour 1000 habitants (17 en 2000)
Les compagnies de transport en commun
D’après les rapports du Conseil Exécutif des Transports Urbains de Dakar (CETUD) et les enquêtes-ménages sur la mobilité, le transport et l’accès aux services urbains dans l’agglomération de Dakar (EMTASUD 2015) sous la tutelle du Ministère des Transports, les transports publics (collectifs) représentent 80% des déplacements motorisés avec 35% des déplacements assurés par les GIE AFTU, 20% par les cars rapides, 12% par les clandos, 10,5% par les taxis, 6% par les Dakar Dem Dik et enfin 4% par les ‘‘Ndiaga Ndiaye’’.
Dakar Dem Dik
Dakar Dem Dik est une société de capitaux dont les actions sont réparties entre l’État (76,6 %) et des investisseurs privés sénégalais. Elle a repris les actifs de la SOTRAC, et est entrée en exploitation en 2001. Elle détient le monopole d’exploitation des bus de plus de 50 places à Dakar et exploite 24 lignes publiques (12 urbaines, 12 périphériques) et 14 lignes scolaires. Sa fréquentation moyenne est de 3000 voyages urbains et de 3300 périurbains avec une vitesse moyenne de 15 km/h, un intervalle moyen de 15 minutes et une capacité moyenne de 90 places (Ndiaye et Tremblay, 2009 ; SSATP No.11).
Le réseau de bus AFTU (Association de Financement des Transports Urbains)
Détenteur des minibus blancs de marque TATA, ce réseau de bus AFTU est créé en 1999 et regroupe les GIE pour la mise en commun des véhicules.
En effet avec la disparition de la SOTRAC qui a entraîné une forte augmentation du nombre des cars rapides et Ndiaga Ndiaye (de quelques centaines à plus de 3000 véhicules), l’Éta s’est engagé dans un processus de renouvellement du parc automobile afin d’améliorer le confort, d’assurer la fluidité des transports et de faciliter le déplacement des personnes et des biens. Ainsi en 2006 on a assisté à la mise en service de 1444 véhicules neufs exploitant 60 lignes à ce jour.
Ce réseau a une fréquentation moyenne de 7750 voyages AFTU-Urbains et de 6150 voyages AFTU-Périurbains avec une vitesse moyenne de 15 km/h, un intervalle moyen de 15 minutes et une capacité moyenne de 43 places (Ndiaye et Tremblay, 2009 ; SSATP No.11).
Les Cars rapides et Ndiaga Ndiaye
Anciens camions commerciaux transformés en minibus, ils assurent une grande partie des déplacements dans les banlieues de Dakar. Ils sont redoutés pour les déplacements de courte distance à moindre coût avec une prééminence des questions de sécurité (vols, agressions), de pollution, de confort, de contribution à la congestion du réseau routier pour cette catégorie de véhicules. Cette offre artisanale de transport est entrain de basculer progressivement vers l’AFTU avec le renouvellement du parc (Ndiaye et Tremblay, 2009 ; SSATP No.11).
Les Taxis et les « Taxis clandos »
Généralement de couleur jaune-noir, les licences de Taxis existaient depuis 1967. Ce mode de transport n’a pas de points fixes de stationnement, circulation à vide pour 30% aux heures creuses impactant la fluidité du trafic automobile.
Quant aux « Taxis clandos » ce sont des collectifs légalisés en 1979 desservant principalement Pikine, Guédiawaye, Rufisque, Parcelles Assainies et autres artères du centre urbain dakarois. Ce sont des taxis clandestins circulant sans licence dont le fonctionnement est proche de celui des cars rapides avec points d’arrêt identifiés et tarif généralement fixes (CETUD, 2015).
Polluants du trafic et effets sanitaires
Différentes études menées depuis la seconde moitié du 21ème ont mis en exergue les effets délétères des polluants sur la santé humaine.
Les particules (PM10, PM2,5 et PM0,1) :
Plusieurs études épidémiologiques ont abouti à la conclusion que l’inhalation des PM (particulate matter) ambiantes qui peuvent pénétrer dans les bronchioles et jusqu’à l’interface alvéolaire des poumons, pourrait conduire à une mort prématurée et contribuer à l’aggravation des maladies respiratoires et cardiovasculaires (Brunekreef et Holgate 2002). Ces études ont montré le lien de causalité entre les augmentations des admissions dans les hôpitaux et des visites aux urgences, l’absentéisme dans les écoles, le nombre de jours de travail perdus et de jours d’inactivité, et les épisodes de fortes concentrations atmosphériques des PM. D’autres études plus récentes ont fait état de morbidité et de mortalité par atteinte respiratoire ou cardiovasculaire associées aux polluants du trafic incluant l’exacerbation de l’incidence des asthmes, les hospitalisations et décès dus aux infarctus du myocarde (Hoek et al., 2002 ; Jerett et al., 2008 ; Tonne et al., 2009). Les PM dégagées par les gaz d’échappement des moteurs diesel sont d’autant plus inquiétantes qu’elles sont associées à un risque plus élevé de cancer du poumon. A court terme, ces polluants peuvent entraîner des effets aigus comme le stress oxydatif dans les voies respiratoires (Laumbach et Kipen, 2010). Les valeurs guides de l’OMS pour les PM2,5 sont de 10 μg/m3 en moyenne annuelle et de 25 μg/m3 en moyenne par jour ; pour les PM10 elles sont de 20 μg/m3 en moyenne annuelle et de 50μg/m3 en moyenne par jour.
Le dioxyde d’azote :
Les effets pathologiques de NO2 ont été mis en évidence dans des circonstances accidentelles de travail. Exposés à des concentrations de 10 mg/m3 de NO2, des travailleurs ont présenté des troubles respiratoires très marqués mais transitoires ; ces troubles disparaissent après arrêt de l’exposition. Pour des expositions prolongées à des concentrations supérieures à 100 mg/m3 de NO2, on observe des irritations pulmonaires et une diminution persistante de la fonction respiratoire. Ce gaz toxique entraîne une inflammation importante des voies respiratoires à des concentrations dépassant 200 μg/m3, sur de courtes durées. D’après des études épidémiologiques le NO2 est aussi responsable des crises d’asthme et des bronchites. Les valeurs guides de l’OMS pour le dioxyde d’azote NO2 sont de 40 μg/m3 en moyenne par an et de 200 μg/m3 en moyenne par heure (PCFV, 2007).
Le monoxyde de carbone (CO) :
Le monoxyde de carbone se fixe à l’hémoglobine dans le sang en passant par les poumons et réduit l’apport d’oxygène aux organes et aux tissus du corps humain. La menace du CO sur la santé est encore plus sérieuse pour ceux qui souffrent de maladies cardiovasculaires, en particulier ceux atteints d’angine de poitrine ou de maladie vasculaire périphérique. Les individus en bonne santé sont également affectés, mais seulement lorsque les niveaux de CO sont plus élevés. L’exposition à des niveaux élevés de CO est associée à l’affaiblissement de la perception visuelle, de la capacité de travail, de la dextérité, de la capacité à étudier et de l’exécution de tâches complexes. A des concentrations suffisantes, l’empoisonnement au CO peut causer la mort. Les valeurs guides définies par l’OMS pour le CO est de 10 mg/m3 sur 8 heures et 30 mg/m3 sur 1 heure (PCFV, 2007).
Échantillonnage des lignes
D’après les enquêtes EMTASUD de 2015, 80% des déplacements interurbains sont assurés par les transports publics (collectifs) dont 35 % assurés par les GIE AFTU (EMTASUD, 2015). De ce fait notre étude s’est focalisée sur le mode de transport en commun le plus utilisé à savoir les TATA gérés par les GIE AFTU.
Afin d’obtenir une représentativité de notre échantillon, nous avons effectué un échantillonnage à deux degrés :
Un échantillonnage en grappe qui nous a permis de sélectionner parmi les garages de bus de Dakar. Ainsi trois principaux garages ont été retenus :
o Le garage de Sahm : Ce garage dispose de 4 lignes de bus assurant la liaison entre Dakar et sa banlieue et d’une vingtaine de bus. Ce garage situé au carrefour des axes de Gueule Tapée – Médina –Fass et de la VDN – Sandaga, a la particularité d’accueillir une multitude de lignes secondaires assurant de courts trajets conduits par les Cars Rapides et les Ndiaga Ndiaye mais aussi des arrêts pour d’autres bus comme les Dakar Dem Dik.
o Le garage de Pétersen : situé en plein centre ville à proximité du grand marché de Sandaga, ce garage est constitué d’une vingtaine de ligne de bus et plus d’une centaine de bus. Plusieurs autres lignes de minibus Ndiaga Ndiaye, desservent les liaisons entre Dakar, sa banlieue et même l’intérieur du pays.
o Enfin le garage de Lat Dior, non loin du garage de Pétersen, est aussi situé à proximité du marché Sandaga. Il est constitué d’une quinzaine de ligne de bus et d’une cinquantaine de bus qui assurent les différentes liaisons. Notons qu’à ce niveau aussi plusieurs autres lignes subsidiaires de minibus Ndiaga Ndiaye desservent quelques trajets menant vers les quartiers périphériques du centre ville.
Un second sondage aléatoire a été effectué au niveau de chaque garage pour sélectionner trois (03) lignes de bus sur lesquelles ont porté notre campagne de mesure.
Ensuite au niveau de chaque ligne sélectionnée nous avons effectué trois (03) voyages aller-retour. Une mesure aller-retour les matins entre 9h00 et 11h00, deux mesures les soirs de 15h00 à 20h00.
A chaque voyage un tableau de bord permettait de recenser tout évènement marquant sur le trajet comme les embouteillages, les accidents, les surcharges de passager etc.
Matériel et méthode
Matériel
Le matériel utilisé dans le cadre de notre étude est constitué de deux appareils : l’EVM-7 et l’AQ Pro.
L’EVM-7 version 1.05 de Quest Technology permet la mesure du monoxyde de carbone (CO), du dioxyde de carbone (CO2), des particules fines (PM), des composés organiques volatils (COV), de la température, de l’humidité relative et du point de rosée. Dans notre étude, nous nous sommes intéressés à l’étude des CO et des PM10 du fait de la plus grande sensibilité de notre appareil à mesurer ces polluants (Figure 1).
La mesure des particules est faite grâce à un impacteur rotatif situé en haut de l’appareil. Il est possible de régler la taille des particules filtrées. Dans notre étude nous avons choisi une taille de 10 microns ainsi nous avons pu mesurer les PM10 mais en même temps les PM2,5 et toutes les particules de taille inférieure.
Une fois le diamètre des particules sélectionné, l’appareil collecte en temps réel les aérosols/poussières en utilisant un photomètre de diffusion optique de 90° pour déterminer la masse totale (en mg / m3) de matière particulaire. Un échantillonnage gravimétrique est aussi utilisé pour déterminer la taille des particules. Il s’agit d’un procédé de filtrage dans lequel les particules sont collectées et filtrées dans la cassette gravimétrique, ensuite la poussière passe à travers le moteur optique de l’appareil. A la fin de l’expérience, la cassette gravimétrique peut être récupérée et analysée au laboratoire.
Une pompe est utilisée dans le procédé d’échantillonnage de particules comme source d’air de sorte que les particules sont aspirées et collectées pour la mesure. Le débit est de 1,67 Litre par minute.
La mesure des gaz quant à elle se fait par des capteurs incorporés permettant de mesurer les niveaux réels de CO, CO2 et des composés organiques volatiles dans l’air aspiré par les pompes (3M Personal Safety Division User Manual 3M).
L’AQ Pro quant à lui sert à mesurer les niveaux d’oxyde d’azote (NO), du dioxyde d’azote (NO2), de la température, de l’humidité relative et du point de rosée (Figure 2).
La mesure des concentrations des différents gaz dans l’air ambiant est faite grâce à des capteurs électrochimiques pour le NO et le NO2. Il s’agit d’un capteur à trois électrodes qui répond au dioxyde d’azote gazeux. Le dioxyde d’azote est un gaz « collant » et la réponse de ce capteur est habituellement la plus lente de tous les capteurs. Par contre la mesure des paramètres non gazeux comme la température et l’humidité est effectuée par des capteurs électriques solides localisés en bas de l’appareil (AQ PRO Instruction & Operations Manual Version 1.05).
Méthode
Nous avions effectué une campagne de mesure embarquée, chacun de nos deux appareils est allumé quelques minutes avant le démarrage du bus. Nous vérifions les différents paramètres comme l’heure, les unités de mesure, la mémoire de stockage des données etc. Ensuite nous déclenchons la collecte des données au démarrage du bus et ce jusqu’à l’arrivée au terminus du bus considéré. Nos deux appareils sont posés devant sur le côté opposé au côté chauffeur.
La température et l’humidité relative sont mesurées au niveau de chaque appareil mais par contre l’heure est à la fois mesurée par les appareils et notée sur un tableau de bord afin de faire coïncider les évènements notés aux pics constatés des différents polluants. Les techniciens disposaient d’un tableau de bord qui permettait de décrire les différents évènements présents sur le trajet et l’heure où ces évènements ont été observés.
Discussion
L’enjeu de la pollution atmosphérique est autant plus inquiétant au regard des effets sanitaires qu’elle peut, à court ou à long terme, engendrer. Si au cours de ces dernières décennies des mesures particulières sont prises dans plusieurs pays (surtout les pays développés) pour assurer la qualité par la mise en place des mesures règlementaires et des mécanismes de contrôle continu de la pollution, des efforts restent encore à faire dans la majorité des pays (surtout ceux du sud).
CO
Les résultats de la présente étude montrent des concentrations moyennes de CO plus faibles par rapport aux différentes normes. La moyenne générale de pollution au CO de 1,54 mg/m3/heure (1,35 ppm/heure) est inférieure à la valeur guide de l’OMS (OMS, 2005) pour la protection de la santé (10 mg/m3 pour 8 heures) pour les passagers qui passent en moyenne une heure dans les transports publics. Cependant cette concentration pourrait être légèrement élevée (12,32 mg/m3 pour 8 heures soit 10,8 ppm/8 heures) pour les employés des sociétés de transport en commun (chauffeurs et receveurs de bus) qui passent en moyenne 08 heures de temps dans le transport.
En milieu professionnel, la norme française recommande une valeur limite d’exposition professionnelle VLEP de 08 heures égale à 55 mg/m3 (INRS, 2016). De leur coté l’American Conference of Governmental Industrial Hygienists (ACGIH) a fixé une TWA-8 heures (Time-Weighted Average) de 25 ppm et le National Institute for Occupational Safety and Health (NIOSH) a proposé une concentration moyenne maximale (TWA-8 heures) de 35 ppm avec une limite maximale acceptable de 200 ppm pour 8 heures de travail (ACGIH, 2013). A cet effet les concentrations de CO trouvées dans la présente étude n’excèdent donc pas ces différentes normes en terme d’exposition professionnelle.
Dans les différents États, les règlementations diffèrent légèrement selon le niveau de protection défini par chaque État. Au Québec, le règlement sur la santé et la sécurité du travail a établi une valeur d’exposition moyenne pondérée (VEMP) sur une période de 8 heures de 35 ppm à ne pas dépasser (Gouvernement du Québec, 2013). Le Sénégal pour sa part a fixé une valeur de 30 mg/m3 pour 24 heures. Il en ressort que la moyenne de CO présentée dans cette étude ne dépasse pas les limites règlementaires définies et est conforme aux normes internationales sur la qualité de l’air intérieur et les expositions professionnelles.
Des taux de concentration similaires en CO ont été trouvés dans d’autres études comme celle de Limasset (1993). Les niveaux de pollution rencontrés dans cette étude sont de 11,3 ppm et 12,5 ppm respectivement dans les bus de Paris et de Bordeaux. Dans une étude comparative entre divers modes de déplacement (marche, motocycle, véhicule léger et bus), Saksena et al. (2008) ont trouvé des concentrations 11,5 ppm de CO dans les bus. Ce qui se compare bien aux valeurs de 10,8 ppm en 08 heures trouvées dans notre étude.
De leur coté, Chan et al. (2001) ont trouvé dans les bus de Hong Kong une moyenne de 1,9 ppm pour des trajets d’environ une heure contre 1,35 ppm/heure trouvé dans notre étude. Par ailleurs, leur étude a aussi montré que les bus de transport intra-urbain (urbain-urbain) ont présenté des moyennes de 1,5 à 2,4 ppm pour des durées allant de 40 à 57 minutes alors que les bus effectuant les trajets urbain-banlieue avec des durées de 60 à 88 minutes ont présenté des moyennes de 1,6 à 2,8 ppm. Ces résultats étayent nos hypothèses selon lesquelles les bus effectuant les trajets entre Dakar et sa banlieue présentaient des niveaux de pollution plus élevée (lignes 31 : Sahm-Pikine Texaco et 38 : Sahm-Guediawaye avec des moyennes par heure respectives de 2,08 mg/m3/heure et 2,07 mg/m3/heure) ; comparée aux bus des trajets urbain-urbain (Lignes 1 : Lat Dior-HLM Grand Yoff et 34 : Lat Dior-Nord Foire avec des moyennes de 1,5 mg/m3/heure et 1,25 mg/m3/heure respectivement) qui ont des niveaux plus bas de CO. Ces différences s’expliqueraient par le confinement de l’axe routier, la densité du trafic, les embouteillages et les fumées noires. Ces lignes urbain-banlieue présentent un confinement de la voie, constaté sur les lignes 31 et 38 à partir de Liberté 6 jusqu’à leur terminus De même, on a aussi enregistré un nombre considérable de fumées noires dues aux cars rapides sur ces trajets mais nous ne saurons ici faire le lien direct avec les niveaux de CO rencontrés. Cependant la congestion de l’axe routier par des constructions, des bâtiments et des arbres empêche l’aération et la dispersion des polluants et favorise leur accumulation (Saksena et al. 2008). Ainsi le CO rejetés dans le trafic se retrouve en forte concentration sur les axes routiers étroits.
Ces observations rejoignent les travaux de Morin et al. (2009) qui ont montré de plus forte concentration de polluants dans les tunnels et pendant les heures de pointe. Ces mêmes observations avaient été faites dans l’étude de Zagury et al. (2000) qui a mis en évidence l’impact du sillage sur les niveaux de concentration des pollutions à l’intérieur du véhicule. Ces constations confirment les résultats de la présente étude et témoignent d’une plus grande crédibilité.
PM10 :
Les PM10 (Particulate Matter) sont des matières particulaires dont la taille est inférieure à 10 μm. La moyenne générale des PM10 retrouvés durant la campagne de mesure est de 236 μg/m3/heure soient 1888 μg/m3 pour 08 heures.
Les normes de règlementation de la pollution proposées par l’OMS et l’Union Européenne pour la protection de la santé, suggèrent une moyenne de 50 μg/m3 pour 24 heures (OMS, 2005) ; et en France ces valeurs ont été traduites en texte par décret (République française, décret n°2010-1250, 2010). Par contre au niveau local, la norme sénégalaise a fixé une valeur limite plus élevée (260 μg/m3 pour 24 heures).
Les résultats de la présente étude montrent des niveaux de concentration de PM10 assez élevées mais difficilement comparables. Par rapport aux valeurs guides de l’OMS, aux normes de l’UE et de la France, on observe un dépassement important de plus de 4,5 fois les valeurs limites recommandées si la pollution était constante toutes les heures au cours d’une journée de 24 heures mais ce qui n’est probablement pas réelle. Les mesures effectuées les matins étaient en moyenne plus faibles que celles des soirs. Sur toutes les lignes de bus étudiées dans cette campagne de mesure, on observe un dépassement d’au moins 3 fois la limite recommandée par l’UE et l’OMS. Cependant notons que ces limites règlementaires sont indiquées pour une exposition de 24 heures.
Par ailleurs la moyenne général de 236 μg/m3/heure retrouvé dans cette mesure n’excède pas la règlementation au niveau local qui prévoit une limite de 260 μg/m3 pour 24 heures par contre on observe des dépassements de cette valeur au niveau de plusieurs lignes (ligne 1 : Lat Dior- HLM Grand Yoff, 281 μg/m3/heure ; ligne 25 : Petersen-Parcelles, 283 μg/m3/heure et ligne 38 : Sahm-Guediawaye avec une moyenne de 310 μg/m3/heure ). Ce qui suppose qu’une heure de trajet passée dans ces bus expose à un dépassement de la valeur seuil sénégalaise. Ces dépassements pourraient s’expliquer par les conditions météorologiques. En effet la période des prélèvements coïncidait avec la saison de fraicheur et des grands vents de poussière à Dakar. De très nombreux vents de poussières ont été mentionnés lors des prélèvements. Ainsi les lignes 1 et 5 ne présentent pas de caractéristiques particulières par rapport à leur trajet ou à l’aspect des voies empruntées mais une atmosphère sombre et de la visibilité réduite avec des poussières ont été notées sur ces trajets. En outre Dakar étant une presqu’île les niveaux de PM10 souvent rencontrés sont des fois influencés par des embruns marins et les vents du Sahel. En dehors de ces conditions météorologiques, la valeur extrême observée sur la ligne 38 serait alliée à la prépondérance des fumées noires sur son trajet associées aux multiples embouteillages.
Les valeurs limites d’exposition professionnelle définie d’après la règlementation française est de 10 mg/m3 (10000 μg/m3) pour la fraction inhalable et 5 mg/m3 (5 000 μg/m3) pour la fraction alvéolaire pour 08 heures (INRS, 2016) or la présente campagne montre une moyenne de 236 μg/m3/heure soient 1888 μg/m3 pour 08 heures. Ces valeurs sont alors inférieures à la VLEP française.
Les travaux de Morin et al. (2009) ont montré des concentrations moyennes de polluants allant de 150 à 200 μg/m3. Cependant les polluants considérés dans cette étude étaient les PM1. La valeur moyenne de PM10 de 236 μg/m3 trouvée dans notre étude se justifie du fait que les PM1 sont incluses dans les PM10 qui ont fait objet de mesure. Des résultats similaires ont été obtenus par Saksena et al. (2008) qui ont montré des concentrations de PM10 de l’ordre de 262 μg/m3 dans les bus au Vietnam. Pour leur part Praml et Schierl (2000) avaient trouvé des moyennes globales de 155 μg/m3 de PM10 pour l’ensemble des trajets effectués dans les bus de Munich avec des valeurs allant de 71 à 279 μg/m3. Notre étude est de ce fait en harmonie avec les résultats des autres auteurs sur ce sujet.
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Table des matières
INTRODUCTION
PREMIÈRE PARTIE : POLLUTION ATMOSPHÉRIQUE ET TRAFIC ROUTIER
I°/ Pollution dans l’habitacle des automobiles
I.1°/ Modélisation et mise en oeuvre
I.2°/ Types de polluant et conditions de formation
I.3°/ Sources de pollution dans les habitacles
I.3.1°/ Sources internes
I.3.2°/ Sources externes
II°/ Trafic routier et aspect du parc automobile à Dakar
II.1°/ Infrastructures routières
II.2°/ Analyse du parc automobile
II.3°/ Les compagnies de transport en commun
III°/ Polluants du trafic et effets sanitaires
DEUXIÈME PARTIE : ETUDE EXPÉRIMENTALE
I°/ Objectifs
II / Cadre d’étude
III°/ Échantillonnage des lignes
IV°/ Matériel et méthode
IV.1°/ Matériel
IV.2°/ Méthode
TROISIÈME PARTIE : RÉSULTATS ET DISCUSSIONS
I°/ Résultats
I.1°/ Les lignes
I.2°/ Durée moyenne des trajets
I.3°/ Température et humidité relative
I.4°/ Concentrations des différents polluants
II°/ Discussion
CONCLUSION
BIBLIOGRAPHIE
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