Dans un contexte d’amélioration de la compréhension des phénomènes hydromorphologiques et bio/géomorphologique au sein des cours d’eau, l’étude de la lithologie et de la dynamique fluviale et sédimentaire occupe une place prépondérante.
Le nombre d’études sur des structures sédimentaires lithologiques s’est largement étendue et se base de plus en plus sur un suivi individuel des particules (VERVYNCK, 2019) par traçage sédimentaire. Ce suivi individuel est nécessaire dans la mesure où les structures étudiées sont dynamiques. L’identification particulaire est nécessaire dans le cas où l’objectif est de mettre en relation le déplacement d’une particule avec des caractéristiques qui lui sont propre (granoclassement, déplacement selon la classe granulométrique, point de dépôt…). Le traçage sédimentaire constitue une discipline de la géomorphologie qui permet d’affiner la compréhension de la mobilité d’une charge solide dans un cours d’eau. Le traçage sédimentaire possède des moyens d’applications extrêmement diversifiés selon le type de traceur ainsi que le type de structure à l’étude. La dynamique sédimentaire est étroitement liée aux conditions hydrauliques appliquées au cours d’eau faisant l’objet de l’étude. La structure lithologique étudiée est largement renseignée pour les cours d’eau à lithologie graveleuse et en cours d’apport de connaissance pour les substrats sablograveleuse, il s’agit des armures sédimentaires. Il s’agit de la résultante d’un tri granulométrique qui se voit, par la chasse (expulsion) de sédiments fins en surface, composé d’une couche de sédiments grossiers (sus-surface), peu mobile qui renferme une sous-couche de sédiments fins qui ne sont pas directement sujets au transport solide par augmentation des conditions hydrauliques. L’état de la recherche sur les armures sédimentaires (BORTOLOTTI, 2019 non publié) abordé en prémisse à ce travail a rendu compte de la suspicion de responsabilité de ces structures dans de nombreux phénomènes bio (WINTENBERGER, 2015) et géomorphologiques.
L’étude du transport solide et de la structuration sédimentaire en Loire Moyenne est une thématique largement renseignée et d’intérêt majeur dans la compréhension hydromorphologique la Loire. Les éléments de réponse de cette étude seront intégrés aux travaux de recherche en sédimentologie et aux différentes communautés faunistiques et floristiques présentes en Loire Moyenne. Le site des Îles de Mareau-aux-Prés, situé en aval d’Orléans, fait l’objet de nombreux travaux de recherche car il offre un réservoir de biodiversité unique, façonné par la dynamique morphosédimentaire de la Loire (cf « Site d’étude et éléments de contexte » partie 2). Ses caractéristiques en font un terrain d’étude préférentiel pour le suivi de travaux d’entretien du lit de la Loire (Projet BioMareau-I) ainsi que l’étude du fonctionnement sédimentaire, du paysage et des éléments de biodiversité (BioMareau-II) (Projet pluridisciplinaire BioMareau – INRA, 2020). L’interaction entre l’étude des caractéristiques géomorphologiques et le suivi de communautés ligneuses sur le site de Mareau a fait naître la suspicion d’une influence du phénomène de rupture d’armure sédimentaire (structures sédimentaire particulières) (BORTOLOTTI, 2019) sur la qualité d’implantation des semis de peupliers noirs (suivis des semis ligneux en Loire Moyenne (WINTENBERGER, 2015). Suite à l’investissement de l’Université de Tours dans des PIT tags permettant d’effectuer un traçage de particules par RFID passif. La commande se résume en l’établissement d’un protocole applicable au site de Mareau-des-Prés, qui consiste à étudier les armures sédimentaires par marquage (implantation de PIT tags) pour, in fine, caractériser leur influence dans la dynamique de végétalisation des barres forcées.
Site d’étude et éléments de contexte
Dynamique hydro-sédimentaire du site d’étude
La Loire voit son cours subdivisé en trois parties (Loire amont, Loire moyenne et Loire aval) et s’étend sur plus de 1000 km, drainant un bassin versant de 117 000 km2 . La Loire moyenne se situe entre le Bec d’Allier et le Bec de Maine, au niveau de la ville d’Angers (49). THESE Son régime hydrologique présente de fortes disparités selon les années. « Les débits moyens interannuels varient entre 182 m3.s -1 à Nevers (Bec d’Allier) et 853 m3 .s -1 à Montjean-surLoire. » (CLAUDE, 2012).
Localisé en Loire moyenne en aval d’Orléans (45), environ à 500m en aval de la confluence avec le Loiret, le site des îles de Mareau-aux-Prés est constitué d’une mosaïque de quatre îlots sur une superficie de treize hectares (Projet pluridisciplinaire BioMareau – INRA, 2020). Ce site d’étude est intégré à la Réserve Naturelle Nationale de SaintMesmin et constitue le support de travaux de recherche en sédimentologie et sur les différentes communautés faunistiques et floristiques (WINTENBERGER, 2015).
La présence en ce lieu d’une barre sédimentaire forcée (non migrante) s’explique par l’hétérogénéité des apports sédimentaires. Pendant les épisodes de crue, modulés par la présence de végétation (ligneux) et l’effet de déflexion induit par la topographie du site, une accrétion de la charge sédimentaire du fond des chenaux environnants a lieu. La ségrégation des tailles de grains due à ce phénomène induit une structure verticale de dépôt de sédiments qui s’apparente, à certaines positions du site, à une armure sédimentaire. En effet, l’hétérogénéité du mélange sédimentaire évolue vers deux couches distinctes : une sub-surface exemptée de sédiments fins et une sous-surface composée, à l’inverse, de ces sédiments fins (matériau stocké). L’interdépendance de ces deux couches en termes de mobilité, par l’effet de masquage exercé par la sub-surface, a souvent été remise en question dans les travaux de recherche (KOMAR et SHIH, PARKER et KLINGEMANN, LISLE) mais semble se rapporter à un transport sélectif lié à la taille du sédiment. Sur le site d’étude, les armures sédimentaires sont notamment présentes au niveau de la tête des barres sédimentaires. En effet elles sont localisées généralement sur les parties amont et centrale de la barre, du fait de la taille plus importante des sédiments déposés, tandis que la partie avale d’une barre est classiquement constituée de sédiments plus fins et trié (WINTENBERGER, 2015). Les phénomènes de dépôt sont dépendants des variables hydrauliques, notamment des pics de crue (Stéphane Rodrigues, 2004). La barre non migratrice (forcée) du site n’en est pas moins dynamique, du fait de phénomènes d’érosion et de dépôt auxquels elle est exposée. Selon l’intensité des crues, le seuil de rupture des armures sédimentaires est atteint, ou pas. Ces structures constituent de points durs associés à des zones « stables » qui peuvent conditionner l’implantation de végétation sur une barre sédimentaire ou sur une île (Coraline Lise Wintenberger, 2017). Un des rôles de ces structures sédimentaires est « la dissipation de l’énergie susceptible de réduire la force de trainée exercée sur les semis » (Coraline Lise Wintenberger, 2017).
Etudes granulométriques et structurelles (géomorphologie) complémentaires
Les armures sédimentaires sont ainsi soumises à un seuil de rupture qui conditionne la libération du stock sédimentaire sous-jacent plus fin, phénomène qui se solde par une érosion marquée. Ces armures, sur le site de Mareau-aux-Prés, sont composées de sédiments « grossiers » (> 2mm) (cf paragraphe RFID et études granulométriques) dont la mise en mouvement peut être étudiée par des « méthodes de mesures directes qui permettent d’évaluer les distances réellement parcourues, les seuils de mise en mouvement de la charge solide et les flux charriés (Wilcock et al., 1996 ; Haschenburger et Church, 1998 ; Petit et al., 2005 ; Wong et al., 2007) » (Kevin Graff, 2018).
Ce seuil de rupture, dans le contexte d’un système sablo-graveleux, reste inexploré par la recherche à ce jour, et donc inexploité. C’est la raison pour laquelle l’analyse granulométrique du site est capitale pour l’atteinte d’objectifs de suivi de particules, et surtout, de traçage de ces dernières par transpondeurs passifs. Les études effectuées jusqu’alors, via des analyses granulométriques effectuées sur le site, permettent de constater une distribution spatiale particulaire gouvernée par des évènements hydrologiques et des écoulements. Ainsi, sur la barre forcée, les vitesses d’écoulement quotidiennes moyennes varient entre 0,9m.s-1 et 1,6m.s1 (WINTENBERGER, 2015). Les vitesses décroissent du chenal principal vers le côté gauche et de l’amont vers l’aval. Il a été constaté que la contrainte de cisaillement du lit associé varie de 0 à 20 N.m-² ; les valeurs moyennes et médianes étant égales respectivement à 4,6 N.m² et 3,3 N.m² (WINTENBERGER ,2015). La contrainte de cisaillement est plus élevée dans la partie amont de la barre qu’en aval. « La relation entre la contrainte de cisaillement du lit calculée et la D50 des sédiments échantillonnés lors des crues a été intégrée dans le diagramme de Southard et Boguchwal (1990). Pour les faibles débits, la contrainte de cisaillement du lit était parfois insuffisante pour induire le mouvement des sédiments. » (WINTENBERGER, 2015).
Les zones d’armure situées en amont de la barre sédimentaire constituent des points stabilisant les sédiments et sont explicables par des valeurs élevées du critère adimensionnel de Shields (rapport entre les forces de cisaillement qui tendent à la mise en mouvement et les forces de gravité qui tendent à l’empêchement de ce mouvement). La mise en mouvement d’une particule d’une taille donnée est dès lors régie par la contrainte de cisaillement que l’on peut obtenir par estimation à partir du diagramme de Shields. Dans le cas d’armures, on note que les paramètres précédents ne sont pas adaptés à ce type de structure car ils ne prennent pas en compte l’arrangement et la forme des grains sur le lit. Les armures ont pour caractéristiques de ne pas pouvoir se développer sur des sédiments uniformes (D84/D50 < 1,5), et d’être gouvernées par l’augmentation de la rugosité du lit et la diminution d’apports sédimentaires.
L’étude réalisée par Coraline WINTENBERGER (2015) a permis d’affiner les valeurs de mouvements de particules grossières par le calcul du point auquel on remarque l’abandon de la charge de fond. Selon la granulométrie, la contrainte critique de cisaillement du lit nécessaire pour initier le mouvement des sédiments varie entre 0,02 et 50,3 N.m-². Cette dernière valeur correspond aux grosses particules constituant des couches d’armure présentes sur la barre.
Par interpolation des recherches effectuées sur des rivières à lit graveleux (Church, Malavoi…), le D50 de l’armure est environ 1,5 à 3 fois supérieur à celui de la sous-couche qu’elle renferme. L’identification et l’étude de ces structures est rendue possible par le croisement des données d’analyses granulométriques effectuées sur le site de Mareau-aux-Prés et des connaissances apportées sur les armures sédimentaires et leurs caractéristiques (BORTOLOTTI, 2019). Le substrat offre un spectre granulométrique de sédiments non cohésifs qui est globalement sablo (max= 2 mm) – graveleux (max = 64 mm). Les analyses granulométriques ont été enrichies par l’étude de sédiments prélevés dans trois chenaux secondaires répartis sur le cours moyen de la Loire (Bréhémont [37], Souzay-Champigny [49], Ingrandes/Le Fresne-sur-Loire [44]) et sur une barre sédimentaire (Mareau-aux-Prés [45]). Ces dernières ont permis « de tracer les courbes de fréquence cumulées des sédiments échantillonnés (Figure 2 : Courbes des fréquences cumulées des tailles de grain (n=68) et D50 (n=98) (losanges) des sédiments de Loire en fonction des unités sédimentaires échantillonnées associées avec les courbes de fréquence cumulées de la taille des grains des sédiments utilisés pour remplir la fosse expérimentale (WINTENBERGER, Dynamique fluviale et végétation pionnière à Salicaceae en rivière sablo-graveleuse, 2015)) De plus, le travail de thèse de Latapie (2011) a permis de compléter le spectre granulométrique rencontré en Loire moyenne avec le D50 d’échantillons de sédiments provenant de chenaux secondaires, de barres sédimentaires ainsi que du fond de chenal. » (WINTENBERGER, 2015) .
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Table des matières
INTRODUCTION
PARTIE 1 : PRESENTATION DES ACTEURS IMPLIQUES ET DES DOCUMENTS ETUDIES DANS LE CADRE DE LA CONSTITUTION DE CE PROTOCOLE CE TRAVAIL
PARTIE 2 : MATERIELS ET METHODES
1. SITE D’ETUDE ET ELEMENTS DE CONTEXTE
1.1. Dynamique hydro-sédimentaire du site d’étude
2. ETUDES GRANULOMETRIQUES ET STRUCTURELLES (GEOMORPHOLOGIE) COMPLEMENTAIRES
3. METHODES GEOMORPHOLOGIQUES ET SEDIMENTOLOGIQUES
3.1. Chaînes d’érosion couplées à la topographie et suivies par image (ballon…)
3.2. Relevé topographique et suivi par image
3.3. RFID (Radio Frequency IDentification)
3.3.1. Généralités
3.3.2. Échantillonnage de particules, taille de sédiments et techniques de prélèvement
3.3.3. Matériel de détection
3.3.4. Prospection et taux de retour
PARTIE 3 : RESULTATS, INTERPRETATION ET OUVERTURE
1. METHODES GEOMORPHOLOGIQUES ET SEDIMENTOLOGIQUES
1.1. Rupture des armures
1.2. Suivi de particules grossières sur la barre RFID
CONCLUSION
BIBLIOGRAPHIE
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