Toucher vaginal en systématique

Toucher vaginal en systématique

Limites et biais de l’étude

L’une des limites de notre étude concernait tout d’abord le périmètre choisi. Même si le projet s’est déroulé sur deux villes ainsi que leurs communes associées, ce qui représentait au total 17 villes, nous restions dans un territoire majoritairement urbain. Cela ne nous permettait pas de comparer les pratiques citadines et rurales qui peuvent différer comme ont pu le souligner certains participants « Médecin généraliste en zone rurale à plus de 30 km des mater : quelles propositions pouvez-vous me faire ??? » Ensuite, l’un des biais concernait le contact des praticiens. Initialement, nous devions seulement les contacter par mail mais aucun mailing des gynécologues libéraux n’existait. Leurs adresses postales ont donc été trouvées dans les pages jaunes mais les changements d’adresses ne sont pas forcément à jour.

Ceux faisant partie des catégories jointes par mail et n’ayant pas d’adresse électronique n’ont pu recevoir notre courriel. Nous étions donc face à un biais de recrutement. Une autre de nos faiblesses serait la faible puissance de notre étude (479 questionnaires envoyés, 198 réponses reçues, 148 questionnaires exploitables) ainsi que le nombre de questionnaires qui étaient 12 non exploitables. Ces derniers représentaient 24.2% (N=48) des réponses reçues. Nous aurions peut-être dû le faire tester par plus de personnes, et non pas seulement par un gynécologue obstétricien et un médecin généraliste, en faisant par exemple un questionnaire test.

Cela aurait sans doute permis une meilleure compréhension de certaines questions et notamment la numéro 13 (Depuis le début de votre exercice avez-vous changé vos habitudes vis-à-vis du toucher vaginal ?) qui a été source de beaucoup de confusions et donc d’exclusions des questionnaires. Il se peut que les praticiens aient eu un problème d’interprétation entre le changement d’habitude depuis la publication des recommandations ou bien la diffusion de ce questionnaire Il existe également un biais de sélection car les personnes qui ont répondu, sont probablement les personnes les plus intéressées par le sujet et donc les plus au courant des recommandations. Un autre des points faibles était le caractère déclaratif du questionnaire pour lequel nous ne pouvons pas contrôler les réponses. Ces éléments rendent donc l’extrapolation à la population cible difficile. Le sujet a tout de même suscité beaucoup de questions et de remarques auprès des praticiens qui ont pu les exprimer à la fin du questionnaire. Ils ont notamment évoqué plusieurs idées afin de les aider face à certaines situations.

Analyse des données

Dans la littérature, nous n’avons retrouvé aucune étude comparable sur l’évaluation des pratiques des professionnels face au toucher vaginal. Parmi les professionnels interrogés, 70.3% (N=104) ne réalisent pas de toucher vaginal en systématique lors des consultations prénatales. Parmi eux, 69.6% (N=71) citent le fait que ce n’est pas un examen obligatoire du suivi de grossesse d’après les recommandations de l’HAS. (8) Le taux d’application et de connaissances des recommandations est donc satisfaisant. La deuxième raison citée (41.2% ; N=42) est que c’est un examen qui peut être mal vécu par les patientes. Il est important que les professionnels aient conscience de cela puisque 85% des femmes affirment que le toucher vaginal est une expérience négative. Nous n’avons retrouvé qu’une seule étude qui date de 1979 réalisée auprès de 75 femmes non enceintes sur le vécu de l’examen gynécologique.

On peut penser que ce ressenti peut être extrapolé aux futures mamans. (9) On retrouve peu de données dans la littérature sur le ressenti des praticiens face à ce geste mais dans un mémoire d’étudiante sage-femme, 170 sages-femmes avaient été interrogées sur leurs pratiques et 50.5% d’entre elles ne voyaient dans le TV aucune autre connotation que le versant médical et 72% pensaient que le TV était un « geste médical utile et nécessaire à l’élaboration d’un diagnostic fiable ». Cependant, 91% de cette population était consciente que le TV pouvait être un examen difficilement vécu par les patientes. (10) Nous n’avons pas de renseignements sur ce que peuvent ressentir les professionnels quand ils examinent une parturiente. Même si les praticiens qui appliquent les recommandations sont nombreux, ils savent s’adapter aux différentes situations cliniques.

Un seul a déclaré ne jamais faire de toucher vaginal (1%). La situation la plus fréquente qui les pousse à examiner les patientes est lorsque celles-ci présentent des contractions utérines (95.1% ; N=97) ce qui est logique et conforme aux textes du CNGOF. Parmi les professionnels, 64.7% (N=66) acceptent d’examiner le col si la patiente le demande et 46.1% (N=47) si elle a déjà accouché prématurément. Ces réponses prouvent que les professionnels s’accommodent bien à chaque patiente, à leur vécu et leurs antécédents.

Parmi les quatre outils disponibles pour dépister les MAP, évoqués dans ce questionnaire, les professionnels ont affirmé que l’échographie de col était pour eux le moyen le plus fiable. Or, dans la littérature, les résultats sont discordants. En effet, Grotegut et al. (11) ont trouvé une relation significative entre l’effacement et la dilatation cervicale par le toucher vaginal et celle mesurée par échographie de col. De plus, en se basant sur le score du Bishop, Benichou et al. (3) (annexe3) ont prouvé qu’avec un score du Bishop simplifié, basé sur les deux éléments les plus prédictifs d’un accouchement (dilatation et effacement du col), le toucher vaginal devient un aussi bon outil pronostic que l’échographie pour prévoir un accouchement dans les 48h ou à 7 jours. Toutefois, il n’existe pas de description détaillée, ni une technique standardisée du toucher vaginal contrairement à celle de l’échographie de col. (12)

Le toucher vaginal possède donc une grande variabilité intra et inter professionnelle tandis que l’échographie de col est plus reproductible et possède une meilleure sensibilité et spécificité que le toucher vaginal. (3) D’après Benichou et al. (3) l’échographie a également une meilleure valeur diagnostic pour les accouchements avant 34SA comparé au toucher vaginal. Même si l’échographie est plus objective son coût est plus important. Le tarif d’une échographie de col est de 35,44€. (13) A ce prix, il faut ajouter une formation spécialisée. En comparaison, une boîte de 100 doigtiers stériles coûte 3,50€ et le toucher vaginal fait partie de la formation initiale des médecins et des sages-femmes.

Les praticiens de cette étude ont classé la tocographie externe comme le moyen le moins fiable pour dépister une MAP alors que celle-ci est définie par des contractions utérines régulières associées à des modifications cervicales (3). Mais comme le souligne le manuel L’obstétrique pour le praticien (4), la tocographie externe est surtout utilisée comme un moyen de seconde ligne, toujours associé à un autre outil diagnostic. La tocographie externe seule ne permet pas de poser un diagnostic de MAP. Alors que 139 (93.9%) personnes ont répondu à la question sur le classement des techniques, 22 personnes n’ont pas noté le dosage de la fibronectine. Ceci est peut-être dû au manque de connaissances autour de cet examen. En effet, il est peu utilisé en France. Son avantage est qu’il a une excellente valeur prédictive négative. Si le prélèvement des sécrétions cervico-vaginales révèle l’absence de fibronectine, dans 98 à 99% des cas, la patiente n’accouchera pas dans les 2 semaines qui suivent ce test. (14)

Après lecture de ces articles, on se rend compte que l’intérêt ou non du toucher vaginal est difficile à déterminer. Dans nos résultats, on retrouve bien cette hésitation des professionnels autour de cet examen car c’est celui qui les a le plus divisé avec un écart type important. (2,51 +/-1,11) Ceci prouve que les professionnels qui réalisent un toucher vaginal systématiquement et qui ont répondu majoritairement (81.8%) que la première raison de cette pratique était le fait de dépister des MAP, ont des arguments en leur faveur même si cela ne correspond pas aux recommandations actuelles. On voit bien que le toucher vaginal suscite encore bien des interrogations. Pour ces mêmes professionnels, c’est également le bien être de la patiente qui est primordial car 43.2% ont déclaré que c’est pour les rassurer qu’ils adoptent cette pratique en systématique.

Lorsque le toucher vaginal est effectué en routine, les habitudes ont de l’importance (34.1%). Ce qui prouve que sa manière d’exercer n’est pas si facile à modifier. Le médico-légal n’a finalement pas trop de poids (13.6%) ce qui est plutôt une bonne chose car aucun texte officiel, en France ne rend le toucher vaginal obligatoire pendant la grossesse.

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Table des matières

  1. 1.Introduction
    2.Matériel et Méthode
    2.1. Critères d’inclusion et d’exclusion
    2.2. Population cible et source
    2.3. Questionnaire
    2.5. Recueil et traitement des données
    2.6. Critères de jugements .
    3.Résultats
    3.1. Population
    3.2. Pratiques
    3.2.1. Toucher vaginal en systématique
    3.2.2. Toucher vaginal non systématique
    3.2.3. Consultations où le toucher vaginal reste indispensable selon les professionnels
    3.2.4. Raisons principales à la réalisation non systématique d’un toucher vaginal
    3.2.5. Situations face auxquelles les professionnels effectuaient un toucher vaginal
    3.3. Point de vue sur la fiabilité des techniques
    3.4. Evolution des pratiques
    3.5. Information
    4.Discussion
    4.1. Limites et biais de l’étude
    4.2. Analyse des données
    Conclusion
    Annexes
    BibliographieRapport PFE, mémoire et thèse PDFTélécharger le rapport complet

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