Topologies membranaires et modifications post-traductionnelles des protéines IFITM

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Réponse du système immunitaire inné à l’infection virale

Bien que les virus soient des parasites intracellulaires obligatoires, signifiant qu’ils ne peuvent survivre sans détourner à leur profit la machinerie cellulaire d’un hôte vivant, la plupart d’entre eux ne compromettent habituellement pas notre survie. Ceci s’explique par le fait que notre organisme n’est pas sans défense et déploie de nombreuses mesures destinées à limiter et à éradiquer les infections virales. Le système des interférons de type 1 (α/β) joue notamment un rôle central dans cette défense antivirale et est actif contre tous les types de virus (Haller et al., 2006).
Afin de développer une réponse rapide et efficace contre une intrusion virale, celle-ci doit tout d’abord être décelée. Pour ce faire, la cellule hôte détecte la présence du virus grâce à des récepteurs, les PRRs (« Pattern Recognition Receptors »), situés dans le cytosol et dans les endosomes, qui reconnaissent spécifiquement certaines molécules virales appelées PAMPs (« Pathogen-Associated Molecular Patterns »). Par exemple, dans le cytosol, les ARN viraux double brin sont reconnus par les récepteurs RIG-I et MDA5 (famille de récepteurs RIG-I-like) (Yoneyama et al., 2004 ; Andrejeva et al., 2004). Tandis que dans les endosomes, les ARN viraux double brin sont reconnus par le récepteur TLR3 (« Toll-Like Receptor 3»), les ARN viraux simple brin sont reconnus par les récepteurs TLR7 et 8 et les ADN double brin sont eux reconnus par les récepteurs TLR9 (Beutler, 2004 ; Bowie et Haga, 2005 ; Iwasaki et Medzhitov, 2004). La liaison de ces PAMPs viraux aux PRRs initie alors des cascades de signalisation, dont fait partie la voie NF-κB, aboutissant à la synthèse et à la sécrétion dans le milieu extracellulaire environnant d’interférons de type I par la cellule hôte.
Les interférons de type I constituent une famille de cytokines appartenant au système immunitaire inné et agissant en première ligne de défense contre tous les types de virus. Les interférons de type I, α et β, ont un récepteur commun, IFNAR. IFNAR est un hétérodimère composé de deux sous unités, IFNAR 1 et 2, et est situé à la membrane des cellules productrices d’interférons et des autres cellules de l’organisme, susceptibles d’être de nouvelles cibles du virus. En circulant et en se liant à leur récepteur, les interférons α/β stimulent ainsi la réponse antivirale des cellules de façon autocrine et paracrine afin de limiter la propagation du virus. La liaison des interférons de type I à leur récepteur IFNAR induit le recrutement et l’activation des kinases JAK1 (« JAnus Kinase 1 ») et TYK2 (« TYrosine-specific Kinase 2 ») qui à leur tour phosphorylent les protéines STAT1 et 2 (« Signal Transducers and Activators of Transcription »). Les protéines STAT1 et 2 phosphorylées s’associent au facteur-9 de régulation d’interféron IRF-9 (« Interferon Regulatory Factor-9 ») pour former un complexe de facteurs de transcription hétérotrimérique appelé ISGF3 (« Interferon-Stimulated Gene Factor 3 »). ISGF3 est ensuite transloqué dans le noyau où il induit la transcription de plusieurs centaines de gènes stimulés par l’interféron, appelés ISGs (« Interferon-Stimulated Genes ») (de Veer et al., 2001 ; Der et al., 1998), en se liant aux éléments ISRE de leur région promotrice (Samuel, 2001 ; Stark et al., 1998). Ces ISGs codent pour des protéines exerçant différentes activités antivirales, telles que, pour n’en citer que quelques-unes, les protéines MX1, OAS1, PKR, TRIM5, Tetherin, Viperin ainsi que les protéines IFITM1, 2 et 3 (Schoggins et Rice, 2011).
Cependant, certains virus ne constitueraient pas de dangereux pathogènes s’ils n’avaient pas évolués en développant des stratégies leur permettant d’échapper au contrôle des interférons. Ces stratégies incluent la suppression de la synthèse d’interférons, la régulation négative de leur signalisation ou encore l’inhibition de l’action antivirale de leurs protéines effectrices. Pour accomplir ces activités provirales, les virus utilisent des protéines virales non structurales (c’est-à-dire non présentes dans les particules virales mais exprimées dans les cellules infectées) et non essentielles à leur réplication, interagissant avec différents constituants viraux et cellulaires, et exerçant souvent plusieurs fonctions au sein des cellules infectées. Par exemple, la protéine NS1 du virus de la grippe A exerce plusieurs actions ciblant des points stratégiques de la défense antivirale cellulaire et qui toutes concourent à favoriser la multiplication virale. NS1 se lie notamment aux molécules d’ARN double brin et les séquestre dans le but d’empêcher l’activation du système des interférons (Wang et al., 2000). Elle contribue également à favoriser la traduction des ARNm viraux au détriment des ARNm cellulaires (de la Luna et al., 1995 ; Park et Katze, 1995) et inhibe la maturation de ces derniers (Lu et al., 1994). Et enfin, NS1 participe à la régulation du cycle de réplication viral (Krug et al., 2003). Par conséquent, il semble établi à présent que la capacité des virus à antagoniser l’action antivirale des interférons détermine directement leur degré de virulence et pourrait être à l’origine de la transmission interespèces de virus dits émergents ou réémergents à la recherche de nouveaux hôtes. En effet, il a été démontré que l’efficacité de ces actions virales antagonistes, permettant d’outrepasser la défense mise en place par les interférons, varie d’une espèce à l’autre (Bossert et Conzelmann, 2002 ; Parisien et al., 2002). Une sélection de variations génétiques permettant à ces virus d’être transmis à l’Homme et de mieux échapper à sa réponse antivirale pourraient alors s’opérer au sein d’un hôte intermédiaire auquel ces virus sont bien adaptés (Munier et al., 2010), expliquant dès lors la survenue d’infections zoonotiques telles qu’illustrées par les épidémies de Coronavirus SRAS ou encore celles des virus Hendra, Nipah, Ebola et Marburg ; et justifiant la menace que représente la transmission du virus de la grippe aviaire H5N1 à l’Homme (Haller et al., 2006).

Contribution de la protéine IFITM3 à la réponse antivirale de l’immunité adaptative

Wakim et al. ont découvert que, suite à une primo-infection par le virus de la grippe A, des lymphocytes/cellules T mémoire CD8+ résidentes (TRM, « Tissue-Resident Memory T cells ») apparaissent dans les poumons (aux sites de la primo-infection) et expriment de façon constitutive et en grande quantité la protéine antivirale IFITM3. Ces cellules, persistant à long terme dans les tissus non lymphoïdes périphériques, maintiendraient l’expression d’IFITM3 déclenchée par l’infection virale, afin de les protéger et de garantir leur survie en cas de nouvelles expositions au virus de la grippe ainsi qu’à d’autres virus également restreints par IFITM3. Ces cellules seraient alors en mesure de contribuer à une élimination plus rapide des infections virales. Des cellules du même type exprimant IFITM3 en grande concentration ont également été observées dans le cerveau de souris infectées par le Virus de la Stomatite Vésiculaire (VSV). Bien qu’il ait été montré que l’expression d’IFITM3 dans ces cellules naïves puissent être stimulée aussi bien par la détection d’interférons (IFN) alpha que par une reconnaissance antigénique, le maintien de la surexpression de la protéine une fois l’infection résolue ne semble pas, par contre, être engendrée par des signaux locaux (tel que l’IFN-α) présents dans les poumons. Ces cellules posséderaient en réalité la propriété unique de déméthyler le promoteur du gène IFITM3 permettant dès lors l’expression constitutive de la protéine IFITM3 en grande quantité. En conclusion, la fonction antivirale de la protéine IFITM3 ne se limiterait pas seulement à l’immunité innée mais supporterait également l’immunité adaptative en lui conférant une résistance prophylactique aux infections virales, améliorant par conséquent la qualité de sa réponse (Wakim et al., 2012).

Les familles IFITM et CD225/Dispanines

La famille de protéines IFITM fait elle-même partie d’une plus grande famille de protéines transmembranaires, les dispanines. Celles-ci ont en commun de présenter la même topologie membranaire, à savoir deux régions TransMembranaires ou TM, d’où leur nom, les dispanines, « span » signifiant travée en anglais. Les dispanines existent chez les eucaryotes et les bactéries et présentent une forte homologie de séquence ainsi que plusieurs motifs conservés, situés principalement au niveau de la boucle intracellulaire séparant les 2 TM ou hélices ainsi qu’au niveau de la première hélice transmembranaire (Sällman Almén et al., 2012). Les protéines IFITM sont également caractérisées par la présence d’une région centrale hautement conservée, nommée CD225, correspondant au premier domaine associé à la membrane suivi de la boucle intracellulaire (figure 1), dont l’homologie de séquence est partagée par plus de 300 membres constituant la famille CD225/pfam04505 (John et al., 2013). En plus des protéines IFITM 1 à 3, 5 et 10, la famille CD225 comprend sept autres membres chez l’humain, à savoir PRRT1, PRRT2, TMEM233, TMEM91, TUSC5, SYNDIG1, SYNDIG1L (Perreira et al., 2013). Cependant, seules les protéines IFITM1, 2 et 3 possèdent des propriétés anti-virales reconnues. Alors que leur domaine CDD225 est lui hautement conservé, leur région N-terminale présente quant à elle des variations de séquence et de taille d’une protéine IFITM à l’autre qui pourraient expliquer leurs spécificités anti-virales respectives (figure 1) (John et al., 2013). Quant aux sept autres protéines humaines de la famille CD225, peu de choses sinon rien n’est connu à propos de leur fonction (Perreira et al., 2013). SYNDIG1L est suspectée d’être impliquée dans la pathogenèse de la maladie de Huntington (de Chaldée et al., 2006) tandis qu’il a été établi que des mutations dans le gène PRRT2 sont responsables de la survenue de la dyskinésie kinésigénique paroxystique et du syndrome de convulsions infantiles-choréathétose (Lee et al., 2012). Cependant, le mécanisme engendrant ces maladies reste inconnu.

Découverte de la famille IFITM et de ses propriétés antivirales

Trois gènes de la famille IFITM humaine, nommés 9-27 (IFITM1), 1-8D (IFITM2) et 1-8U (IFITM3) ont été découverts en 1991. Leur analyse a révélé que leur région promotrice contenait un ou plusieurs éléments ISRE, permettant de conclure que leur expression était hautement inductibles par les interférons de type I et II (Lewin et al., 1991).
En 1995, Deblandre et al. ont démontré que le produit du gène 9-27 (IFITM1) est une protéine précédemment identifiée comme étant l’antigène Leu-13 (Deblandre et al., 1995). Leu-13 a été initialement définie comme étant une petite protéine membranaire dont l’expression est induite par les interférons et qui s’associe, dans les leucocytes et les cellules endothéliales, à d’autres protéines (tels que les composants CD19, CD21 et CD81/TAPA-1 du récepteur des lymphocytes B) (Matsumoto et al., 1993) pour former un complexe à la surface cellulaire relayant des signaux d’agrégation et d’inhibition de la prolifération cellulaire (Evans et al., 1990).
Un an plus tard, en 1996, Alber et Staeheli ont voulu déterminer si la protéine 9-27 (IFITM1 ou encore Leu-13) exercait elle aussi une activité antivirale, tout comme d’autres protéines induites par les interférons, telle que MxA. Ces auteurs ont constaté que chez la souris, les cellules exprimant la protéine humaine 9-27 étaient moins sensibles à l’infection par le virus de la stomatite vésiculaire que les cellules contrôle n’exprimant pas la protéine, mais que son efficacité antivirale était moindre que celle de la protéine MxA testée en parallèle. En outre, les auteurs n’ont constaté aucune inhibition significative du virus de la grippe par la protéine 9-27. (Alber et Staeheli, 1996). Bien que ces conclusions soient aujourd’hui contestées par des études plus récentes, indiquant qu’au contraire, IFITM1 restreindrait plus efficacement le virus de la grippe que celui de la stomatite vésiculaire, Alber et Staeheli ont été les premiers à attribuer une fonction antivirale à une protéine IFITM.
Hormis une rapide mention, en 2003, de l’activité antivirale exercée par le gène 1-8 U (IFITM3) contre le virus de l’hépatite C (Zhu et Liu, 2003), ce n’est que 13 ans plus tard, en 2009, que les propriétés antivirales des protéines IFITM ont été redécouvertes et véritablement mises en avant. Auparavant, la plupart des études concernant les protéines IFITM s’intéressaient à leur rôle dans le développement, bien que leur forte induction par les interférons soit déjà connue (Tanaka et al., 2005), et ce, jusqu’à ce qu’il ait été démontré que la délétion du locus Ifitm entier n’avait aucun impact sur le développement ou le phénotype apparent de souris IfitmDel-/- (Lange et al., 2008). En 2009, Brass et al. ont donc identifié les protéines IFITM comme pouvant être de potentiels facteurs de restriction du virus de la grippe A lors d’un criblage par ARN interférence destiné à identifier les facteurs cellulaires modifiant la réplication du virus de la grippe. Ces auteurs ont ensuite validé leur hypothèse en constatant un accroissement de la réplication du virus de la grippe dans les cellules humaines lorsque IFITM3 était ciblée par de petits ARN interférents. Ils ont également démontré que la surexpression des protéines IFITM1, 2 et 3 inhibait la réplication de toutes les souches du virus de la grippe A examinées ainsi que celle des flavivirus du Nil Occidental et de la Dengue testés en parallèle. Ils ont observés, en outre, que les souris IfitmDel-/- étaient d’une part, plus vulnérables à l’infection par le virus de la grippe A et d’autre part, que l’effet antiviral des interférons de type 1 et 2 était moindre chez ces souris. Brass et al. ont ensuite poussé leurs investigations encore plus loin en montrant que seuls les rétrovirus pseudotypés, c’est-à-dire combinés, à différentes hémagglutinines (HA) virales (H1, H3, H5 et H7) pouvaient être efficacement restreints par les protéines IFITM1, 2 et 3, suggérant que les protéines IFITM pourraient cibler l’entrée des souches du virus de la grippe dans la cellule via leur protéine d’enveloppe HA. Les protéines IFITM ont alors été définies comme constituant une famille de facteurs de restriction antiviraux actifs contre deux familles de virus enveloppés, les familles orthomyxoviridae et flaviviridae, et participant de façon non négligeable à l’action antivirale des interférons de type 1 et 2 (Brass et al., 2009).

Localisation des protéines IFITM

La protéine IFITM1 réside principalement dans les radeaux lipidiques de la membrane plasmique (Bradbury et al., 1992) ainsi qu’à la membrane des endosomes précoces, tandis que les protéines IFITM2 et 3 sont majoritairement présentes à la membrane des endosomes tardifs, des lysosomes et des autolysosomes, soit au niveau des compartiments intracellulaires (Huang et al., 2011 ; Feeley et al., 2011). Cette distribution cellulaire des protéines IFITM pourrait être déterminée par leur domaine NTD respectif. La tyrosine 20 (Y20), appartenant au domaine NTD d’IFITM2 et 3 mais absente d’IFITM1, a notamment été identifiée comme étant un résidu clé ciblant IFITM3 aux membranes endolysosomales (figure 1). La mutation d’Y20 a eu pour effets de changer la localisation d’IFITM3, des compartiments endolysosomaux vers la membrane plasmique, et d’y induire son accumulation (Jia et al., 2012). Y20 appartiendrait en effet à un motif Yxxφ (φ représentant un acide aminé à chaîne hydrophobe « imposante »), ici la séquence protéique 20-YEML-23, servant de signal de tri aux protéines, leur permettant d’être rapidement internalisées à partir de la membrane plasmique pour être ensuite adressées aux lysosomes. En outre, la découverte que cette tyrosine Y20 peut être phosphorylée par la tyrosine kinase Fyn suggère que l’activité de ce motif peut être régulée. Etant donné qu’il a été constaté que seule une faible proportion des protéines IFITM3 sont phosphorylées au sein de la cellule, on peut en déduire que la phosphorylation d’Y20 inhiberait la localisation d’IFITM3 au sein des membranes du système endolysosomal réprimant, par conséquent, ses fonctions antivirales. Il est en effet très probable que la phosphorylation d’Y20 empêche l’interaction du motif YEML avec la sousunité µ2 du complexe AP2 (« Adapter Protein-2 ») impliqué dans le processus d’internalisation par endocytose clathrine-dépendante, ayant pour conséquence la rétention d’IFITM3 à la surface cellulaire (Jia et al., 2012).
Il convient toutefois de garder à l’esprit que la quasi-totalité des études visant à déterminer la localisation des protéines IFITM au sein de la cellule ont été conduites avec des protéines IFITM étiquetées et/ou surexprimées et que ces modifications ont pu affecter dans une certaine mesure leur distribution cellulaire (Perreira et al., 2013) et/ou leur activité. En effet, la surexpression de la protéine IFITM3 engendrerait d’une part, sa redistribution à la membrane plasmique et d’autre part, entraînerait un élargissement des vésicules cytoplasmiques telles que les endosomes tardifs et les lysosomes ainsi qu’une augmentation du nombre et de la taille des autolysosomes dans lesquels les particules virales sont piégées et transportées jusqu’à leur dégradation (Feeley et al., 2011). De même, le type cellulaire ou tissulaire influencerait également la localisation des protéines IFITM. Par exemple, l’observation par imagerie confocale du tissu pulmonaire de souris infectées par le virus de la grippe A a confirmé la localisation endolysosomale d’Ifitm3 in vivo dans la plupart des types cellulaires (tels que les pneumocytes alvéolaires de type II, les cellules endothéliales, les fibroblastes et différents leucocytes), à l’exception des cellules ciliées des voies respiratoires supérieures dans lesquelles elle est apparue résider principalement à la membrane plasmique apicale et ciliée (Bailey et al., 2012). Enfin, le professeur Farzan et son équipe ont observé que l’ajout d’une étiquette N-terminale destinée à rendre la protéine IFITM3 fluorescente avait eu des répercussions non seulement sur sa localisation cellulaire mais aussi sur l’efficacité de son action antivirale. La protéine ainsi modifiée est apparue de façon marquée et inhabituelle au niveau périnucléaire. Bien que sa capacité à restreindre le virus de Marburg n’ait pas été affectée, son action antivirale dirigée contre le virus de la grippe A s’est-elle, par contre, montrée amoindrie (C.C. Bailey, G. Zhong, I. Huang &M. Farzan, données non publiées).

Topologies membranaires et modifications post-traductionnelles des protéines IFITM

Après avoir fait l’objet de nombreux débats, la topologie membranaire des protéines IFITM n’est toujours pas clairement établie.
En raison d’éléments démontrant l’accessibilité d’épitopes situés aux extrémités N et C-terminales des protéines IFITM, leur topologie a tout d’abord été décrite comme étant celle adoptée par les protéines membranaires de type 3, à savoir deux domaines transmembranaires orientant dès lors les extrémités N et C-terminales de la protéine vers la lumière du réticulum endoplasmique ou vers l’espace extracellulaire, ayant été établi que le domaine CIL est obligatoirement intracellulaire, puisque lié par un anticorps reconnaissant sa séquence uniquement après perméabilisation de la cellule et non lorsque la cellule est intacte (Smith et al., 2006) (figure 3). Parmi ces éléments figurent la reconnaissance à la membrane plasmique, par cytométrie en flux, d’étiquettes portées par les extrémités N ou C-terminales de protéines IFITM (Brass et al., 2009 ; Weidner et al., 2010 ; Li et al., 2013), ainsi que la reconnaissance par un anticorps de la partie N-terminale de la protéine IFITM1 (antigène Leu-13) exprimée à la surface de leucocytes humains, cette reconnaissance induisant, par ailleurs, l’agrégation des cellules T (Chen et al., 1984).
Cette première théorie a ensuite été remise en question par la découverte de modifications post-traductionnelles touchant notamment les extrémités N et C-terminales des protéines IFITM et ne pouvant avoir lieues que dans le cytosol, telles que l’ubiquitination de la lysine 24 (Lys24) d’IFITM3 (Yount et al., 2012), la phosphorylation de sa tyrosine 20, discutée plus haut (Jia et al., 2012), ou encore la palmitoylation d’une cystéine C-terminale de la protéine Ifitm1 murine (Hach et al., 2013) (figures 1 et 4). De plus, il a été démontré qu’une protéine IFITM3 modifiée pour contenir un site de myristoylation à son extrémité N-terminale et un site de prénylation à son extrémité C-terminale, et restreignant la réplication du virus de la grippe A, est bien myristoylée et prénylée par des enzymes cytosoliques (Yount et al., 2012). Un second modèle de topologie membranaire pour les protéines IFITM a alors été proposé par Yount et al., dans lequel les domaines NTD, CIL et CTD font tous face au cytosol ayant pour conséquence que les régions hydrophobes les séparant ne traversent plus la membrane d’un bout à l’autre mais soient seulement insérées en son sein, définissant les protéines membranaires de type 1 (Yount et al., 2012) (figure 5). La palmitoylation de trois cystéines (C71, 72 et 105) de la protéine IFITM3 humaine situées dans le domaine IM1 (C71 et C72) et à la jonction entre le CIL et le domaine IM2 (C105) plaide également en faveur d’un premier domaine hydrophobe intramembranaire ou associé à la membrane, d’autant plus que la palmitoylation de ces trois cystéines est requise pour que la protéine puisse pleinement exercer son activité antivirale. Ces palmitoylations permettraient l’adressage voire l’ancrage de la protéine à la membrane (Yount et al., 2010). Tandis que l’ubiquitination des lysines d’IFITM3 situées dans le NTD (Lys 24) et dans le CIL (Lys83, Lys 88 et Lys104) n’aurait d’autre fonction que de réguler le niveau d’expression de la protéine, sa surexpression pouvant en effet être délétère au fonctionnement normal de la cellule en dehors de toute infection virale (Shan et al., 2013) (figure 1 et 4). D’autres arguments en faveur de cette topologie ont également été avancés. La localisation d’IFITM3 au sein du feuillet cytosolique de la membrane la protègerait de la digestion par les enzymes lysosomales ainsi que de la neutralisation par les virus entrant. Cette topologie intramembranaire pourrait également modifier les propriétés biophysiques des membranes, mécanisme par lequel IFITM3 pourrait exercer son action antivirale (Perreira et al., 2013).
Enfin, l’hypothèse d’une topologie membranaire intermédiaire aux deux autres a également été avancée sur la base de nouvelles investigations menées sur la protéine IFITM3 murine (Bailey et al., 2013). Dans ce modèle, le domaine NTD serait cytosolique et le domaine CTD serait extracellulaire impliquant que le premier domaine hydrophobe soit intramembranaire et que le second soit transmembranaire, décrivant la topologie partagée par les protéines membranaires de type 2 (figure 6). Cette fois, les auteurs ont utilisé des cellules imperméabilisées afin de s’assurer que les anticorps fluorescents, utilisés pour reconnaître les étiquettes FLAG ajoutées aux extrémités N et C-terminales d’Ifitm3, ne puissent pas atteindre et reconnaître leurs épitopes si ceux-ci sont situés du côté intracellulaire de la membrane. L’analyse, par cytométrie en flux, de la fluorescence indirecte émise par les épitopes FLAG N et C-terminaux a alors révélé que bien que ces épitopes aient été tous deux détectés du côté extracellulaire de la membrane, le signal émis par l’épitope C-terminal était bien plus intense que celui émis pour l’autre épitope, suggérant que le domaine CTD d’Ifitm3 serait extracellulaire. Ensuite, afin de déterminer la proportion d’épitopes N et C-terminaux intra et extracellulaires, la protéine Ifitm3 a été marquée par deux autres étiquettes Myc (N-terminale) et C9 (C-terminale) et l’intensité de leur fluorescence respective a été observée par microscopie de fluorescence dans des cellules imperméabilisées ou non. La fluorescence indirecte émise par l’épitope N-terminal Myc n’est apparue de façon prononcée que dans des cellules intactes et perméables tandis que celle de l’épitope C-terminal C9 s’est révélée être d’égale intensité que les cellules aient été imperméabilisées ou non. En outre, l’adjonction d’un motif KDEL, lié par des chaperones séquestrant les protéines dans le Réticulum Endoplasmique (RE), à l’extrémité C-terminale d’Ifitm3 a eu pour conséquence de bloquer la protéine dans le RE, indiquant qu’Ifitm3 adopte une topologie membranaire exposant son extrémité C-terminale à la lumière du RE. Et enfin, une dégradation C-terminale d’Ifitm3, probablement engendrée par des enzymes lysosomales, a également été observée. Quant aux domaines IM ou TM de la protéine, les auteurs ont déterminé que seul le domaine TM2 peut être exprimé seul et traverser la membrane, contrairement au domaine IM1 qui lui ne peut être exprimé seul et qui servirait plutôt de signal d’ancrage à la membrane. Tous ces éléments tendent à prouver que l’extrémité C-terminale d’Ifitm3 serait extracellulaire, ou encore orientée vers la lumière du RE, tandis que son extrémité N-terminale serait majoritairement intracellulaire. En effet, la détection par cytométrie en flux de l’extrémité N-terminale d’IFITM3 à la surface extracellulaire pourrait signifier qu’une autre conformation de la protéine existe soit, identique à celle adoptée par les protéines membranaires de type 3 soit, correspondant à une complète inversion de la protéine. Ces deux topologies pourraient permettre à la protéine Ifitm3 d’exercer des fonctions différentes, telles que la restriction virale ou bien l’adhésion cellule-cellule (Evans et al., 1990 ; Chen et al., 1984), en fonction du type cellulaire. Puisque par exemple, dans l’étude décrite ci-dessus, l’adoption par la protéine Ifitm3 d’une topologie membranaire de type 3 ou inversée n’a été observée que dans les cellules 293T (isolées de reins embryonnaires humains) et non dans les MEFs (« Mouse Embryonic Fibroblasts ») (Bailey et al., 2013).

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Table des matières

Liste des abréviations
Introduction
1. Présentation générale des protéines IFITM
2. Réponse du système immunitaire inné à l’infection virale
3. Contribution de la protéine IFITM3 à la réponse antivirale de l’immunité adaptative
4. Les familles IFITM et CD225/Dispanines
5. Domaines des protéines IFITM
6. Les gènes IFITM et leurs orthologues chez la souris
7. Découverte de la famille IFITM et de ses propriétés antivirales
8. Localisation des protéines IFITM
9. Topologies membranaires et modifications post-traductionnelles des protéines IFITM
10. Restriction du virus de la grippe A par IFITM3
11. Autres virus inhibés par les protéines IFITM
12. Mécanisme(s) d’action
Enjeux et objectifs
Matériel et méthodes
1. Clonage, expression et purification d’IFITM3
1.1. Clonage d’IFITM3 dans le plasmide d’expression pETM-11
1.2. Expression d’IFITM3 en bactérie E.coli souche C41 et purification des membranes cellulaires
1.3. Criblage de détergents pour la solubilisation et la purification d’IFITM3
1.4. Test de solubilisation et de purification d’IFITM3 en Cymal-5, Fos-Choline-12 et LAPAO
1.5. Solubilisation et purification d’IFITM3 en Fos-Choline-12
2. Caractérisation biochimique et biophysique d’IFITM3
2.1. Détermination de l’état oligomérique d’IFITM3 par SEC-MALLS
2.2. Détermination de l’état oligomérique d’IFITM3 par pontage chimique
2.3. Analyse de la structure secondaire d’IFITM3 par dichroïsme circulaire
2.4. Etude de la dénaturation thermique d’IFITM3 en micelles de Fos-Choline-12
2.5. Protéolyse limitée d’IFITM3 à la trypsine
2.6. Analyse des échantillons de protéines, de liposomes et de nanodisques par microscopie électronique à coloration négative
3. Reconstitution d’IFITM3 en liposomes
3.1. Formation des liposomes
3.2. Titration des liposomes avec du Triton X-100
3.3. Reconstitution d’IFITM3 en protéoliposomes par déstabilisation des liposomes préformés
4. Observation des protéoliposomes par microscopie de fluorescence
4.1. Préparation et marquage fluorescent des liposomes
4.2. Marquage fluorescent de la protéine IFITM3
4.3. Formation de protéoliposomes fluorescents
5. Reconstitution de la protéine IFITM3 en nanodisques pour analyse par RMN.
5.1. Préparation des lipides POPC
5.2. Expression et purification de la protéine d’assemblage MSP
5.3. Expression et marquage isotopique 15N et/ou 13C d’IFITM3
5.4. Deutération de la protéine IFITM3
5.5. Purification de la protéine IFITM3 marquée et/ou deutérée à pH 10
5.6. Dénaturation et repliement de la protéine 15N IFITM3
5.7. Assemblage des nanodisques avec la protéine IFITM3 marquée et/ou deutérée
6. Expériences de résonance magnétique nucléaire
7. Mise en évidence, par la méthode d’électrophysiologie TEVC, de la formation de pores membranaires par la protéine IFITM3 en micelles de Fos-Choline-12
7.1. Procédure expérimentale
Résultats
1. Résumé des premières tentatives d’expression et de purification d’IFITM3
2. Résultats du criblage de détergents pour la solubilisation et la purification d’IFITM3
3. Test de solubilisation et de purification d’IFITM3 en Cymal-5, Fos-Choline-12 et LAPAO
4. Solubilisation et purification d’IFITM3 en Fos-Choline-12 (à plus grande échelle)
5. Caractérisation biochimique et biophysique d’IFITM3
5.1. Détermination de l’état oligomérique d’IFITM3 par SEC-MALLS
5.2. Détermination de l’état oligomérique d’IFITM3 par pontage chimique
5.3. Observation par microscopie électronique à coloration négative de la protéine IFITM3 fortement concentrée en micelles de Fos-choline-12
5.4. Analyse par dichroïsme circulaire de la structure secondaire adoptée par IFITM3 en micelles de Fos-Choline-12
5.5. Etude de la dénaturation thermique d’IFITM3 en micelles de Fos-Choline-12
6. Essais de cristallisation d’IFITM3 par diffusion de vapeur et en phase cubique de lipides
7. Reconstitution de la protéine IFITM3 en liposomes
7.1. Protéolyse limitée des protéoliposomes
7.2. Détermination de l’état oligomérique d’IFITM3 en protéoliposomes par pontage chimique
7.3. Observation des protéoliposomes par microscopie électronique à coloration négative
7.4. Observation des protéoliposomes par microscopie de fluorescence
8. Reconstitution de la protéine IFITM3 en nanodisques MSP1E3D1-POPC
9. Analyse par RMN de la protéine IFITM3 reconstituée en nanodisques MSP1E3D1- POPC
10. Analyse par RMN de la protéine IFITM3 reconstituée en nanodisques MSP1-POPC et MSP1D1ΔH5-POPC
10.1. Optimisation du spectre 2D 1H-15N HSQC de la protéine IFITM3 en nanodisques de taille moyenne MSP1-POPC
10.2. Attribution des résonances obtenues pour la protéine IFITM3 en nanodiques MSP1-POPC à pH 4 et à 30 °C
10.3. Prédiction de la structure secondaire adoptée par les régions attribuées d’IFITM3
10.4. Stratégies mises en œuvre pour parvenir à attribuer les résidus d’IFITM3 interagissant avec la membrane du nanodisque
11. Expérience de protéolyse limitée d’IFITM3 en nanodisques MSP1-POPC
12. Détermination de l’état oligomérique d’IFITM3 en nanodisques MSP1E3D1-POPC et MSP1-POPC par pontage chimique
13. Mise en évidence, par la méthode d’électrophysiologie TEVC, de la formation de pores membranaires par la protéine IFITM3 en micelles de Fos-Choline-12…
Discussion
1. Influence de la Fos-Choline-12 sur le repliement adopté par IFITM3
2. Etats oligomériques adoptés par IFITM3 dans différents environnements
3. Hypothèses concernant la topologie membranaire adoptée par IFITM3 en liposomes et en nanodisques
4. Nouvelle information structurale apportée par l’analyse RMN d’IFITM3 reconstituée en nanodisques
5. Hypothèses concernant la ou les fonctions présumées d’IFITM3
Références
Résumé

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